500 beroemde Belgische wetenschappers / 500 scientifiques belges célèbres

PLAN

1 L’histoire des sciences en Belgique / De geschiedenis van de wetenschappen in België

2 Scientifiques belges de premier plan / Belgische eersterangswetenschappers

 

1 L’histoire des sciences en Belgique / Geschiedenis van de wetenschappen in België

 

Histoire des sciences de Belgique, 1815-2000, Partie 1, La Renaissance du Livre, 2001

 

(p.17) Le siècle des Lumières, la Révolution et l’Empire avaient produit un patriciat francophone et francophile largement perméable aux influences de Paris. En Flandre, il se superposait à un peuple resté fidèle à ses traditions. On élevait ses enfants en français, et on parlait flamand aux domestiques et aux animaux. C’était un obstacle sérieux à la politique scientifique de Guillaume Ier (1772-1843).

 

(p.18) En 1843, dans le premier rapport sur l’enseignement supérieur présenté aux Chambres belges, le ministre de l’Intérieur, Jean-Baptiste Nothomb (1805-1881), expliqua que si le choix de ces professeurs avait, à bon droit, éveillé les susceptibilités nationales, l’appel fait à la science allemande se justifiait par le fait « que les traditions de l’Université de France ne pouvaient à elles seules répondre au caractère et aux besoins intellectuels des populations d’origine germanique. » –

 

Les sociétés savantes, comme la Société des Sciences de Liège, pratiquent la même politique dans le recrutement de leurs membres correspondants. De même c’est à Paris et dans les grandes (p.19) universités allemandes que l’on envoya se former les jeunes Belges qui devaient peu à peu prendre le relais. Ainsi, le jeune chimiste Laurent-Guillaume De Koninck (1809- 1887) visite à Paris les laboratoires de Louis-Joseph Gay Lussac (1778-1850), de Louis-Jacques Thénard (1777-1857), mais aussi ceux d’Eilhard Mitscherlich (1794- 1863) et de Justus von Liebig (1803-1873) en Allemagne. On recruta d’autres étrangers, comme le mathématicien piémontais Gaspard-Michel Pagani ( 1796-1855), sans compter les  Luxembourgeois Michel Gloesener ( 1794- 1876), Jean-Baptiste Brasseur ( 1802-1868), Antoine Schorn (1830-1898), Mathias Schaar (1817-1867), Joseph Neuberg (1840-1926).

 

Cependant, cette science se veut belge et inscrite dans la lignée de nos gloires nationales. Comme tout pays nouvellement indépendant, la Belgique n’ eut rien de plus pressé que de se créer une galerie d’ ancêtres. Le jeune état dut chercher dans son passé des titres de fierté, revendiquer sa place dans les nations avancées et baliser le chemin de futurs progrès. C’est l’objet de l’ « Histoire des sciences mathématiques et physiques chez les Belges », d’Adolphe Quetelet (1796-1874).

 

(p.25) L’Eglise du reste veillait et son influence était puissante. En 1856- 1857,1’illustre André Dumont (1809-1857) prononça un discours de rentrée académique sur le thème « L’origine du monde physique et la théorie de sa formation ». Ce discours, où des esprits chagrins avaient trouvé des traces de panthéisme, ne fut point publié.

A Gand, le professeur de droit naturel Hubert Brasseur avait, en 1856, paru mettre en cause la divinité du Christ et le caractère surnaturel de l’Eglise. Il y eut chahut, plainte des élèves, campagne de presse, interpellations à la Chambre et au Sénat, condamnation de l’Université de Gand par les évêques. Brasseur fut sauvé par Hubert-Walthère Frère-Orban (1812-1896) qui défendit en ces termes la liberté académique : « que deviendrait l’enseignement de la philosophie et de l’histoire, que serait même l’enseignement de la géologie, s’ il fallait les mettre en concordance avec des cultes déterminés? » Il ne croyait pas si bien dire.

 

Le 8 décembre 1864, le pape Pie IX (tout récemment béatifié) promulguait l’encyclique Quanta cura contre le modernisme, et le syllabus, catalogue de quatre-vingts erreurs du temps, en gros toutes les libertés modernes. La position papale allait encore se durcir avec la perte des Etats Pontificaux et la proclamation du dogme de l’infaillibilité le 18 juillet 1870. Comme l’affirmait Eugène Goblet d’Alviella (1846-1925), il était désormais impossible d’être libéral en politique et catholique en religion. Le libéralisme belge devient anticatholique, voire antireligieux. En 1854, s’était créée la première association rationaliste et de libre pensée, l’ Affranchissement, qui donna naissance en 1863 à la Libre Pensée, laquelle fut à l’ origine de la Ligue de l’Enseignement, fondée le 26 décembre 1864, quinze jours après l’encyclique. La revendication d’un enseignement obligatoire et laïque allait de pair avec l’exaltation de la science, seul antidote possible à la religion puisqu’ elle passait pour fournir des vérités sûres.

 

(p.27) Le monde catholique, quant à lui, vivait douloureusement le conflit entre foi et science. En 1855, Monseigneur Félix-Antoine-Filibert Dupanloup (1802-1878) allait jusqu’à mettre en garde contre les mathématiques: « L’étude des mathématiques, en comprimant la sensibilité et l’imagination, rend quelquefois l’ explosion des passions terrible. » Au concile du Vatican ( 1870), la constitution Deifilius affirmait qu’il ne peut pas y avoir de dissension entre raison et foi,  » Nulla unquam inter fidem et rationem vera dissensio esse potest » , en sorte que l’Eglise se réservait le droit de condamner les erreurs de la science. La constitution dogmatique de la foi catholique précisait: « L’Eglise qui a reçu la charge apostolique d’ instruire les hommes, le dépôt sacré de La foi, tient également de Dieu le droit et le devoir de condamner la science (ainsi faussement nommée) de peur que les hommes ne soient séduits par la philosophie et par des illusions trompeuses. »

 

C’est donc sur la voie d’un difficile « concordisme » que s’engageaient les chrétiens, et les Belges y jouèrent un rôle important.

 

En 1875, le père Ignace Carbonnelle, S.J. (1829-1889), fondait la Société scientifique de Bruxelles qui publiait les Annales, puis, à partir de 1877, la célèbre Revue des questions scientifiques. Le président de la Société, Louis-Philippe Gilbert (1832-1892), professeur à Louvain, déclarait en 1876: « Si vous êtes catholiques, il faut savoir prouver que vous êtes savants; si vous êtes savants, il faut oser montrer que vous êtes catholiques. » Mais Domi-

nique Lambert a finement montré que la Revue était fort peu copernicienne, et même souvent dans la camp contraire.

 

De même, les Belges participèrent massivement aux Congrès scientifiques internationaux des Catholiques, mis sur pied à partir de 1888 par le recteur de l’Institut catholique de Paris, Monseigneur d’Hulst (1841 – 1896), le géologue Albert de Lapparent (1839- 1908) et le chanoine Duilhé de Saint Projet. Paul Mansion (1844- 1919), professeur à Gand, y défendit l’interprétation nominaliste du copernicanisme, le père Joseph Van den Gheyn (1854-1913), l’origine asiatique de la race noire, Alfred Grafé (1855- 1907), professeur à Liège, y défendit le libre arbitre contre les expériences d’hypnotisme, et Georges Monchamp (1856- 1907), professeur au séminaire de Saint-Trond, y traita en ces termes des preuves de l’existence de Dieu :

« Oui, que la science poursuive sa route, fatalement, qu’ elle le veuille ou pas, les questions d’origine se poseront (ne le sont-elles pas déjà?). Mieux que cela, elles se résoudront, et elles se résoudront par la solution théiste, car nous savons que Dieu est la cause totale de ce qui est en dehors de lui, que tout être fini a, de part en part, la marque de la fabrication divine. »

 

Les conditionnements et les limites du concordisme se reflètent dans de volumineux recueils, largement répandus, comme Les questions controversées de l’histoire et de la science (Bruxelles, Vromant; Paris, Sunard et Derangeon; Bruxelles, Société belge de Librairie, 18941. Selon les auteurs « le plus sûr critérium pour reconnaître la fausse histoire et la fausse science, c’est de constater chez l’auteur du livre une haine bien formulée contre le catholicisme. » Bible, géologie, préhistoire, anthropologie, physique, Evangiles, histoire de l’Eglise, histoire de l’ancien régime, physiologie sont minutieusement revisités et mis en accord avec la foi.

 

(p.105) Charles-Jean de La Vallée Poussin se voit confier l’ enseignenment de Louis-Philippe Gilbert, lors du décès prématuré de ce dernier, en 1892. Le jeune chargé de cours n’a que 26 ans, mais il a eu le temps de suivre, à Paris, les leçons de Camille Jordan (1838-1922), Charles Hermite (1822-1901), Gaston Darboux (l842-1917) et Henri Poincaré (1854- 1912), et ses premiers travaux ont déjà attiré l’attention du monde mathématique belge, et en particulier de Paul Mansion. Son succès de 1896 lui assure une renommée internationale, qu’il confirme par des travaux de premier ordre sur la théorie de l’intégration de Riemann et de Lebesgue (« test d’intégrabilité de La Vallée Poussin »), l’approximation des fonctions (« noyau de La Vallée Poussin »), l’analyse harmonique (« test de convergence et méthode de sommation de La Vallée Poussin »), la représentation conforme et la théorie du potentiel. Sans parler d’une multitude de notes allant de la géométrie non euclidienne au calcul des probabilités, en passant par la relativité restreinte, le mouvement d’ un solide et ce qui deviendra bien plus tard la programmation linéaire. Fidèle à la tradition de Louis-Philippe Gilbert, Charles-Jean de La Vallée Poussin rédige et publie son cours d’analyse, qui voit douze éditions entre 1903 et 1959, est traduit en russe et réédité chez Dover aux USA. Nombreux sont les mathématiciens d’Europe et d’Amérique qui reconnaissent avoir appris l’analyse dans le livre de Charles-Jean de La Vallée Poussin. La deuxième édition de 1909 est d’ailleurs le tout premier ouvrage d’analyse élémentaire expliquant 1′ »intégrale de Lebesgue », tandis que la troisième édition expose déjà, en 1914, l’importante notion de « différentielle totale » d’ une fonction de plusieurs variables.

 

(p.106) Pendant la première guerre mondiale, Charles-Jean de La Vallée Poussin est invité à professer à l’Université de Harvard, au Collège de France, à la Sorbonne et à l’Université de Genève. Il s’ensuit des monographies sur l’intégration et sur l’approximation des fonctions qui sont devenues classiques. Lorsque l’Union mathématique internationale est fondée, à l’issue de la Grande Guerre, Charles-Jean de La Vallée Poussin en est le premier président. Il est fait docteur honoris causa de plusieurs universités étrangères et membre de plusieurs académies. Lorsque, en 1928, l’Université catholique de Louvain célèbre le jubilé professoral de son éminent analyste, le comité d’honneur constitue un véritable « who is who » des mathématiciens de l’époque. Aussitôt après, le Roi Albert 1er confère le titre de baron à l’incontestable leader des mathématiciens belges.

 

(p.109) On pouvait croire, à l’époque, la théorie des sections coniques achevée. Elle est pourtant renouvelée entre 1820 et 1822 par deux mémoires d’Adolphe Quetelet et de Germinal Dandelin, établissant en particulier que les foyers d’une section d’un cône droit par un plan sont les points de contact de ce plan et des deux sphères inscrites dans le cône et tangentes au plan. Ce théorème fait partie d’un ensemble de résultats que le mathématicien français Théodore Olivier (1793- 1853) baptisera, dès 1847, les « théorèmes belges », une appellation « nationaliste » bien rare en mathématiques, et encore utilisée de nos jours. Selon l’avis autorisé de Michel Chasles (1793-1880), ce théorème offre la première construction qu’on ait donné des foyers des coniques dans le cône. Henri Lebesgue (1875-1941) confirme cette opinion cent ans plus tard :

« ces théorèmes – les seuls à ma connaissance qui aient reçu le nom d’une Nation – ont apporté un fait mathématique nouveau : la détermination des foyers et directrices de la section plane d’un cône de révolution; mais ils ont apporté en même temps les moyens de rajeunir, de simplifier, d’abréger et de rendre plus puissant tout à la fois l’enseignement élémentaire de la théorie des coniques. »

 

(p.118) Dans « Sur un nouveau genre d’illusions d’optique », Plateau décrivit la construction et l’effet d’un disque avec 16 fentes et 16 secteurs intermédiaires. Si on dessinait dans les secteurs 16 figures identiques, on voyait alors en regardant par les fentes du disque tournant dans un miroir une figure immobile. La contribution capitale de Plateau est qu’au lieu de mettre 16 fois la même figure, il dessina 16 figures qui changeaient toujours un peu. Par cet effet, les figures qui se suivaient rapidement fusionnaient l’une dans l’ autre et un mouvement était suggéré. C’est pour cette raison que Plateau est cité comme un « précurseur du cinéma », mais il serait plus juste de dire »précurseur du dessin animé ».

 

 

(p.159) Le régime néerlandais (1814-1830)

 

L’unification des Pays-Bas du Nord et du Sud en 1815 a totalement bouleversé le système pédagogique du Sud. Sous l’impulsion de Guillaume Ier, on ouvrit un grand nombre d’écoles, d’ athénées et d’ écoles normales. Grâce à son arrêté du 25 septembre 1816, trois universités furent ouvertes aux Pays-Bas du Sud, respectivement à Gand, à Louvain et à Liège. Ces universités furent administrées d’une manière quasi identique aux universités des provinces septentrionales, à savoir Leyde, Groningue et Utrecht, qui avaient déjà été réorganisées à partir de 1815. Outre les Facultés de Droit, de Médecine et de Philosophie et Lettres, on créa dans chaque université une Faculté des Sciences mathématiques et physiques. Celle-ci offrait deux grades académiques de candidat (deux ans d’études pour chacun). Le premier était considéré comme grade de préparation pour accéder à la Faculté de Médecine, l’autre préparait les étudiants à obtenir le grade de docteur en sciences mathématiques et physiques (un an d’études).

 

L’une des tâches les plus délicates lors de la réalisation des trois universités dans les provinces du Sud, fut la nomination de professeurs non seulement compétents, mais également acceptables. A Louvain, on nomma pour l’enseignement de la chimie Jean-Baptiste Van Mons (1765- 1842), à Liège on choisit Jean-Charles Delvaux de Fenffe (1782-1863). A Gand, il fallut recourir à l’étranger parce que François-Egide Verbeeck (1779- 1848), qui avait déjà été nommé, préféra enseigner à la Faculté de Médecine. A la dernière minute, on nomma l’Allemand Jean-Charles-Frédéric Hauff (1766-1846), à qui l’on confia les cours de physique et de chimie. Van Mons et Delvaux avaient déjà une expérience dans l’enseignement de la chimie, alors que Hauff avait enseigné les mathématiques au gymnase de Cologne.

 

Sous le régime français, les instruments scientifiques provenant de l’ancienne Université de Louvain et de l’Ecole centrale du département de la Dyle avaient été rassemblés dans un « musée » à Bruxelles.

 

(p.197) La soude Solvay

 

Dans les années 1850, Charleroi est l’un des plus grands centres mondiaux de fabrication du verre; la soude y est quotidiennement indispensable. Or, l’industrie chimique belge est encore largement tributaire des matières premières importées de l’étranger. De surcroît, le procédé Leblanc, dévorateur d’énergie, ne fournit pas toujours une soude de grande qualité, et est particulièrement polluant. Ces différents inconvénients contribuent à l’augmentation du prix de revient de la soude, et donc du verre. Dès le début du siècle, plusieurs scientifiques recherchent un procédé plus rentable.

Ernest Solvay (1838-1922) est originaire de Rebecq-Rognon, dans le Brabant wallon. Son père exploite une petite raffinerie de sel. Passionné par les sciences, Solvay se destine à des études d’ingénieur; sa santé précaire l’ empêche de suivre cette voie. A vingt-et-un ans, il entre à la Compagnie du gaz, à Saint-Josse-ten-Noode, administrée par son oncle; il y examine à loisir le lavage et l’ épuration des gaz, et le traitement des solutions ammoniacales.

En 1861, Solvay prend un brevet pour la « fabrication industrielle du carbonate de soude au moyen du sel marin, de l’ammoniaque et de l’acide carbonique.

 

(p.198) L’avantage primordial du procédé perfectionné et porté à l’ échelle industrielle par Solvay réside dans la possibilité de fabriquer de la soude, au moyen de deux produits courants et peu coûteux: le sel marin, et la pierre calcaire. Ce procédé est si génial, et si rarement expliqué en-dehors des traités de chimie, (…).

 

(p.200) Le rôle de la Belgique dans la construction des fours à coke est du reste très important. En 1852, Evence Dieudonné Coppée (1827-1875) fonde à Haine-Saint-Pierre une petite usine de carbonisation de la houille. Ingénieux et entreprenant, il dépose plusieurs brevets dans les années 1850- 1860 pour différents modèles de fours à coke chauffés par la combustion directe des gaz distillés. Ces fours sont les prototypes de tous les fours à coke modernes, Ils se présentent sous la forme de grandes batteries de fours accolés les uns aux autres, étroits, et séparés par de minces cloisons en briques dans lesquelles des vides sont ménagés pour servir de conduits de chauffage (carneaux verticaux).

 

(p.203) Parmi les autres applications de l’azote, la fabrication d’ammoniaque synthétique a particulièrement été développée en Belgique. Dès avant la Première Guerre mondiale, en Allemagne, le groupe chimique BASF (Badische Anilin & Soda-Fabrik) porte à grande échelle la synthèse de l’ammoniaque par le procédé Haber. Dans celui-ci, l’azote est combiné directement à l’hydrogène, récupéré des fours à coke, pour former de l’ammoniaque (…) . Or, en 1917, Georges Claude démontre que la fabrication d’ammoniaque synthétique est considérablement plus rentable si elle s’ opère à très haute pression (un millier d’atmosphères), et en utilisant de l’hydrogène à très basse température ( -2000 C).

 

La Société belge de l’Azote, créée en 1923 et installée à Renory-Ougrée près de Liège, exploite cette nouvelle découverte de Georges Claude. L’établissement fabrique aussi de l’ammoniaque au départ de carbure de calcium chaud (…).

 

(p.204) Baekeland travaille d’abord pour la Ansia Cy. En 1893, il invente, au sein de cette nouvelle société de fabrication de films et de supports photographiques un papier révolutionnaire, le « Velox » Deux ans plus tard, la Kodak Cy lui achète le brevet. Cette opportunité fait la fortune de Baekeland, qui s’installe alors dans la banlieue de New York. Peu après, il fonde une société de recherche en électrochimie, et met au point des améliorations dans la fabrication du chlore et de la soude caustique.

 

 

Histoire des sciences de Belgique, 1815-2000, Partie 2, La Renaissance du Livre, 2001

 

(p.205) Le discours prononcé à Seraing par le Roi Albert Ier le 1er octobre 1927 et la création du Fonds national de la Recherche scientifique qui s’ensuivit ouvrent une nouvelle période dans l’histoire moderne de la science en Belgique. Le FNRS va de pair avec la Fondation universitaire, la Fondation Francqui, la Fondation Biermans-Lapôtre à Paris et plus tard l’Academia Belgica de Rome. C’est une véritable relance de la recherche qui s’opère.

Ces initiatives s’inscrivent dans un contexte mondial: aux Etats-Unis, le National Research Council est fondé en 1915; au Royaume-Uni, le Research Advisory Council en 1916; en Allemagne, la Deutsche Forschungsförderung en 1920; en France, l’Office national de la Recherche scientifique (ONRS) en 1922, et le CNRS en 1939; en Italie, le Consiglio Nazionale delle Ricerche en 1923; l’Institute for Advanced Study de Princeton s’ouvre en 1930. Désormais les universités, les académies et les sociétés savantes sont épaulées, parfois supplantées par des corps de chercheurs professionnels.

 

C’ est que le début du siècle a vu l’amorce d’une deuxième Révolution scientifique: vers 1900, la redécouverte de Mendel lance la génétique; les rayons X, la relativité, les quanta sont des années 1895-1905; dans l’élucidation de la structure de l’atome, les pas décisifs sont accomplis entre 1913 et 1928. La période qui s’ouvre comptera 9000 des scientifiques de toute l’histoire de l’humanité. La science et la technique d’aujourd’hui se mettent en place: en physique nucléaire, les premières réactions en chaîne sont de 1942, la bombe d’Hiroshima explose le 6 août 1945, les premières centrales sont construites en 1944; l’ADN est découvert en 1944 et la « double hélice » en 1947; en informatique, l’ ordinateur ENIAC est de 1943,le premier transistor de 1947,le circuit intégré de 1949.

 

Dans cette prodigieuse aventure, la Belgique joue un rôle significatif, mais peu d’historiens se sont risqués à retracer une évolution foisonnante. Seuls les auteurs du Florilège des Sciences en Belgique ont dressé en 1968 et en 1980 une utile récapitulation des hommes et des travaux. C’est que l’historien se trouve ici confronté à une quadruple difficulté: l’absence de recul; les lacunes de la documentation; la technicité du sujet; la prise directe sur le présent.

Comment distinguer, dans la masse des faits, l’essentiel de l’accessoire, les fausses pistes des courants novateurs? Comment embrasser l’ensemble de l’activité scientifique sans sombrer dans de stériles inventaires? Force nous a été de faire des choix. On ne trouvera pas ici l’encyclopédie de la science des dernières décennies, mais les orientations qui ont paru les plus déterminantes. A cela s’ajoute que les recherches de détail, base de toute synthèse, font presque totalement défaut pour certains domaines, comme par exemple les sciences humaines.

 

(p.15) Si le 1er octobre 1927 peut être tenu pour une date charnière, c’est que le discours de Seraing a pris, au fil du temps, figure de mythe mobilisateur. Des citations d’Albert 1er (1875-1934) sont en effet, jusqu’à ce jour, une composante obligée de tout propos politique sur la science. En fait, son projet d’une science utile, patriotique, sociale et pacifique, appuyée sur le mécénat privé, ne survit pas à la Deuxième Guerre mondiale. La « big science », dans son contexte européen, puis planétaire, exige la définition par l’Etat d’une politique scientifique qui très tôt sera confrontée aux exigences régionales. D’autre part, la troisième industrialisation unifie science et technologie en projet unique dans le contexte industriel. En même temps, la conscience des échecs et des dangers de la science suscite dans la communauté scientifique et dans la société civile l’émergence d’ une réflexion éthique.

 

(p.16) C’est donc le monde industriel qui a relancé la recherche. Le premier conseil d’administration du Fonds national de la Recherche scientifique le montre. Il comprend les quatre recteurs et les cinq directeurs d’institutions équivalentes, les secrétaires perpétuels de l’Académie royale de Belgique et de l’Académie de Médecine, et quatorze membres désignés par la Fondation universitaire. Parmi ceux-ci, on trouve neuf savants et cinq figures de proue de l’industrie lourde: Emile Francqui (1862- 1935) et Félicien Cattier (1869- 1946) de la Société Générale, Armand Solvay du célèbre groupe chimique, Léon Guinotte, président des Associations charbonnières, Gustave Trasenster, administrateur délégué du puissant groupe sidérurgique d’Ougrée-Marihaye. Le premier directeur, Jean Willems (1895- 1970), était un proche de Francqui. Aussi eurent-ils quelque mal à admettre que leur argent finance des projets aussi économiquement inutiles que les fouilles d’Apamée.

 

Dans son sixième rapport annuel (1932- 1933), Jean Willems crut devoir s’en expliquer. « L’écho du discours royal de Seraing ne s’était pas éteint et déjà naissait la crainte de voir le Fonds national favoriser exclusivement les recherches de science pure ou ne pas réserver tout au moins en partie suffisante de ses ressources au bénéfice immédiat de l’industrie. »

 

Dès 1929, le Fonds national de la Recherche scientifique avait mis sur pied avec le Comité central industriel (représentant le patronat ) un Bureau spécial des relations science-industrie que présida Alexandre Galopin (1879- 1944) de la Générale. Une partie du budget annuel fut consacrée à des programmes d’intérêt industriel financés à coûts partagés. Sous l’occupation, ce Bureau spécial jettera discrètement les bases de ce qui deviendrait après la guerre l’IRSIA.

 

Au-delà des intérêts immédiats de l’industrie, l’entourage d’Albert Ier estimait que la recherche est patriotique et sert la grandeur du pays. En 1919, Francqui négocie les modalités de création de la Fondation universitaire, issue de caisses de secours pour la population belge pendant la guerre (Comité national (p17) de Secours et d’Alimentation, Commission for Relief in Belgium), alimentée par des fonds privés. Dans une lettre au Premier Ministre Léon Delacroix (2 septembre 1919), il déclare la nouvelle institution propre à « réjouir le coeur de tous les Belges patriotes et philanthropes. » Selon Francqui, elle est oeuvre « patriotique ». Douze ans plus tard, l’industriel réaffirme son jugement lors de la création du Prix qui porte son nom et qui doit couronner des Belges « ayant apporté à la science une contribution importante, dont la valeur a augmenté le prestige de la Belgique. » La grandeur de l’Etat constitue également l’ axe fondamental du Discours de Seraing. Albert Ier lie la richesse du pays et son importance sur le plan international à la puissance de son industrie. Pour le souverain le maintien de l’Etat à son rang passe par le maintien de l’industrie à un haut niveau de performance. Ce niveau dépend étroitement de la qualité d’une recherche technologique « de pointe », dans la mesure où pour se maintenir, l’industrie doit progresser et que ce progrès n’est possible que par la science et la recherche.

 

De cette perspective patriotique, les Flamands se sentaient exclus. Dès 1901, Julius MacLeod (1857-1919) avait publié son manifeste Het Nederlandsch en de Wetenschap où il réclamait le droit à la science pour le peuple flamand. Le FNRS était senti comme l’émanation de la bourgeoisie francophone malgré la présence au Conseil de sympathisants de la cause flamande, comme les anciens ministres Pierre Nolf (1873-1953) et Prosper Poullet (1868-1937), et de distingués scientifiques gantois comme l’historien d’art August Vermeylen ( 1872-1945) et le physicien Jules Verschaffelt (1870-1955). Aussi l’institution nouvelle fut-elle violemment attaquée par Paul Van Oye (1886-1969) lors de l’assemblée générale annuelle du Willemsfonds (association culturelle libérale flamande) le 29 octobre 1933.

 

Utile et patriotique, la science est aussi sociale, source de progrès et de bien être pour la population. Ce thème se retrouve à la fois dans le discours d’ Albert Ier et dans les écrits de Francqui. En effet, alors que le souverain exprime la nécessité « d’utiliser au profit de tous les meilleures aptitudes de ceux qui les possèdent », Francqui explique qu’en créant la Fondation universitaire, il s’agira de « procurer à chacun de nos compatriotes l’occasion et le moyen de donner la pleine mesure de sa valeur personnelle, c’ est collaborer de la manière la plus fructueuse au développement de la prospérité du pays et à l’ accroissement du bien-être de ses enfants. » Ce n’est d’ailleurs pas l’effet du hasard que l’on choisisse de réaffecter à la science des fonds initialement prévus pour fournir une aide alimentaire. Il y a perpétuation et réorientation de l’aide. Ce qui répond à une vision selon laquelle il existe une continuité entre les deux types de nourriture : les besoins matériels étant rencontrés, il devient possible de se préoccuper des choses de l’esprit. Le discours est en outre profondément humaniste. Pour Francqui, il y a perpétuation dans l’entraide sociale « sous sa forme la plus noble (unie) au développement de la grandeur intellectuelle et morale du pays, » La méritocratie est ainsi le levier de l’ascenseur social.

 

Enfin, au sortir de la première guerre mondiale, tous sont convaincus que la science, par la coopération internationale qu’elle engendre, contribue à rapprocher les peuples et à sauvegarder la paix. L’optimisme scientiste rejoint ainsi les courants pacifistes et mondialistes apparus au tournant des deux siècles et les illusions nourries par la Société des Nations. Typique de cette mouvance est l’historien des sciences George Sarton (1884-1956), Gantois réfugié en Amérique pendant la guerre. Dans les éditoriaux de sa revue Isis, dont le premier numéro parut à Wondelgem en 1913, il affirme que « History of science is the history of mankind ». Seule histoire universelle (« catholique ») et cumulative, l’histoire de la science est la base d’un nouvel humanisme international fondé sur les valeurs que la science génère. C’est le même idéal qui inspire la création du Mundaneum ou Palais Mondial par Paul Otlet (1868-1944) et Henri La Fontaine (1854-1943), deux éminents juristes imprégnés d’idées pacifistes et internationalistes proches du courant anarchiste. Le projet était grandiose: mettre à la disposition des hommes de bonne volonté, de toute origine géographique ou sociale, une documentation à caractère universel, mais particulièrement scientifique et technique, pour prévenir les conflits par une meilleure connaissance mutuelle.

 

(p.84) Si tous ces mathématiciens d’origine belge portent haut à l’étranger le renom de notre pays, on doit amèrement regretter qu’ils n’aient pu trouver, dans leur terre natale, un Institut des Hautes Etudes scientifiques ou un Institute for Advanced Study. Pour les individus comme pour les nations, l’enfer est pavé d’occasions manquées. La science belge attend avec impatience un nouveau discours de Seraing.

 

(p.111) Après Einstein, Nernst est le premier à penser que l’hypothèse des quanta peut s’appliquer à d’ autres phénomènes que le rayonnement, et qu’elle peut résoudre également des problèmes touchant la structure de la matière. Pour cela Nernst a dû modifier des équations thermodynamiques considérées jusqu’alors comme ne posant pas de difficulté. Il est donc résolu à promouvoir la discussion de l’hypothèse des quanta, et cherche à voir confirmée par d’autres physiciens l’importance de la nouvelle théorie.

 

La proposition de Nernst est acceptée, et le premier »Conseil scientifique » (on avait d’abord pensé à l’expression « Concile scientifique ») se réunit à l’invitation d’Ernest Solvay du 30 octobre au 3 novembre 191 1. Il est présenté comme une « sorte de Congrès privé » où l’élite des savants est invitée à « discuter une série de points controversés des théories physiques modernes ». Nernst s’est effacé, peut-être pour éviter des difficultés de caractère national avec les savants français et britanniques, et la réunion est présidée avec brio par le physicien hollandais Hendrik Antoon Lorentz (1853-1928).

Le choix de Bruxelles, lieu régulier de réunion de congrès scientifiques, a pu également jouer un rôle en convainquant les physiciens de différentes nationalités de se rendre dans un endroit « neutre ».

 

La théorie du rayonnement et les quanta : le premier Conseil et son impact

 

La grande innovation des Conseils Solvay consiste à rassembler un nombre limité de savants et à laisser beaucoup de place aux discussions. Une vingtaine de scientifiques de tout premier plan participent au Conseil de 1911, dont Hendrik Antoon Lorentz, Marie Curie, Henri Poincaré, Max Planck, Albert Einstein, Heike Kamerlingh Onnes, Ernest Rutherford, Walther Nernst, Jean-Baptiste Perrin, Marcel Brillouin, James Hopwood Jeans, Wilhelm Carl Wien, Emil Warburg, Arnold Sommerfeld; parmi eux, neuf sont ou seront détenteurs du prix Nobel, Se préparant à rencontrer à Bruxelles toutes ces personnalités, Einstein parlera de « sabbat de sorcières».

 

Le thème du premier Conseil Solvay est « La théorie du rayonnement et les quanta ». Alors que la théorie du rayonnement intéresse jusqu’ alors surtout les Allemands (à part Lorentz, Jeans et Larmor), il est remarquable que se rassemblent des théoriciens et des expérimentateurs provenant aussi bien de France et d’Angleterre que d’ Allemagne, d’ Autriche, des Pays-Bas, du Danemark et de Belgique.

 

 

(p.146) Physique solaire

 

Le Soleil est la seule étoile dont nous puissions avoir une image nette, et les détails que nous y observons impliquent l’utilisation d’instruments spéciaux et des analyses particulièrement fines.

 

D’autre part, l’importance des flux énergétiques qu’il nous envoie a permis d’étudier le Soleil, bien avant les autres astres dans des domaines variés de longueurs d’onde. A l’Observatoire royal de Belgique, l’activité solaire est suivie automatiquement dans le domaine optique à partir d’une table équatoriale équipée de filtres monochromatiques isolant la raie H de l’hydrogène et la raie du calcium (p.147) ionisé à 393,3 nm. D’autre part, des observations continues du Soleil dans le domaine des radio-fréquences sont effectuées à partir de la station radioastronomique de l’Observatoire, installée à Humain (Rochefort). Un radiotélescope à miroir parabolique de 7,5 m de diamètre fonctionne sur 600 Mhz, tandis qu’un interféromètre comportant 48 miroirs de 4 m de diamètre permet d’obtenir des images uni- et bidimensionnelles à la fréquence de 408 Mhz. De plus, c’est à Uccle qu’est basé le « Sunspot Index Data Center », qui, utilisant les données obtenues par des engins spatiaux, et notamment les archives de l' »Extreme UV Imaging Telescope » du satellite européen SOHO, diffuse en permanence dans le monde les données relatives à l’activité solaire.

 

L’étude de la photosphère solaire a mobilisé les énergies des astronomes belges pendant de nombreuses décennies. Ces travaux ont été initiés dès avant la guerre par Marcel Migeotte. Docteur en sciences physiques et mathématiques de Liège et ingénieur opticien de Paris, Migeotte s’initie à l’Université de Michigan aux techniques de détection de l’infrarouge et construit à Liège un spectromètre infrarouge à haute résolution, qu’il applique à l’étude du spectre solaire. Invité à la Ohio State University en 1947, ses observations le conduisent à identifier spectroscopiquement la présence de méthane et d’ oxyde de carbone dans l’atmosphère terrestre, découvertes qui eurent un grand retentissement aux Etats-Unis, En 1950, il installe à la Station scientifique du Jungfraujoch (3.580 m) son spectrographe et entreprend, avec l’ aide de Lucien Neven de l’ Observatoire royal, dans une atmosphère à pression réduite et à très faible teneur en vapeur d’ eau, l’enregistrement du spectre solaire dans l’infrarouge.

 

(p.148) C’est en 1956-1957 que paraîtra leur atlas du spectre solaire de 2,8 à 23,7 microns, qui atteignait pour 1a première fois une résolution de 0,1 cm.1. Ces travaux ont révélé la présence de 4.000 nouvelles raies dans le spectre solaire. Les travaux furent poursuivis et un nouveau spectrographe de 730 cm de distance focale permit l’élaboration par Luc Delbouille Ginette Roland et Lucien Neven d’un Atlas du spectre solaire de À 3000 à À 10000 Angströms,

ouvrage monumental paru en 1973 qui sert de référence aux travaux de spectroscopie sur le Soleil dans ce domaine spectral. La présence de raies atomiques interdites fut mise en évidence de façon indiscutable et cette moisson de résultats fut exploitée tant à Uccle qu’à Liège par de nombreux chercheurs. Elle fut le point de départ de nombreuses études d’abondances d’éléments chimiques par Nicolas Grevesse (°1938), Jean-Pierre Swings (°1943) et Emile Biémont (°1947) et de composés moléculaires par Rodolphe Zander et ses collaborateurs.

 

D’autre part, la nécessité d’identifier et d’Interpréter la présence de très nombreuses raies nouvelles a donné naissance à des travaux théoriques et expérimentaux de physique atomique et moléculaire (Emile Biémont, Iwan Dubois, Harald Bredohl).

 

A l’Université de Mons-Hainaut, nombre de paramètres nouveaux ont été calculés pour différents éléments d’intérêt astrophysique tels que les lanthanides, qui jouent un rôle important en nucléo-synthèse (Emile Biémont, Pascal Quinet, Patrick Palmeri). En même temps, ces chercheurs montraient enfin qu’il existait un excellent accord entre les abondances d’ éléments légers non volatils, voire d’ éléments réfractaires lourds, déterminées par des

analyses spectroscopiques dans la photosphère solaire et les abondances météoritiques effectuées par voie chimique sur certains chondrites carbonés.

Ils résolvaient aussi définitivement l’ancien et irritant problème de l’abondance du fer dans le Soleil.

 

L’équipe d’ observateurs solaires de Liège a souhaité s’ affranchir le plus possible des effets gênants de l’ atmosphère terrestre. Dans 1’Infrarouge, c’est possible à partir d’une altitude d’environ 30 km.

 

Les chercheurs liégeois ont donc imaginé un télescope couplé à un spectrographe à haute résolution, installé dans la nacelle orientable d’un ballon stratosphérique. Cet instrument, lancé de la base américaine de Palestine (Texas) a ramené une série de résultats intéressants. Il a notamment permis de mettre en évidence, dans la haute atmosphère terrestre, des traces d’acide fluorhydrique, produite par la décomposition de fréons. A suite de cette découverte, l’acide fluorhydrique a été observé en permanence à partir du spectrographe du Jungfraujoch, afin d’en surveiller l’évolution. Depuis, les études se sont poursuivies à l’aide de données obtenues par divers satellites, notamment américains et une activité intense d’analyse s’est développée à Liège et à Uccle.

 

Enfin, notons que le spectre solaire global a été étudié lors de plusieurs vols de laboratoires spatiaux habités à l’aide d’instruments construits par les chercheurs de l’Institut d’Aéronomie spatiale de Belgique en vue de la détection d’une variation du flux solaire total reçu par l’atmosphère terrestre.

 

Mécanique céleste et système solaire

 

L’astronomie du système solaire a été fort en honneur à l’Observatoire royal. Paul Stroobant s’est intéressé à la structure des anneaux de Saturne, à la structure et à l’origine des anneaux d’astéroïdes. Ces astéroïdes feront l’objet de l’attention constante de plusieurs astronomes, dont Eugène Delporte (65 découvertes), Sylvain Arend ( 1902-1992) (51 découvertes), Henri Debehogne (°1928) ( 174 découvertes) et Eric Elst (01936) (84 découvertes). 134 de ces objets seront découverts à Uccle, ce qui place cet observatoire au l6e rang mondial dans ce domaine, Ces découvertes se sont principalement faites à l’aide de l’astrographe double de 40 cm. Ces travaux se sont poursuivis à l’aide de divers instruments sous des cieux plus cléments, notamment à l’aide de l’astrographe de l’ESO à La Silla et du télescope de Schmidt Liège-CNRS à l’Observatoire de Haute-Provence, par Henri Debehogne et Eric Elst, où de nombreuses découvertes compléteront celles faites à Uccle. Depuis 1997, le télescope de 120 cm d’Uccle, équipé de détecteurs CCD est couramment utilisé pour la localisation précise d’astéroïdes, observations dont les résultats sont communiqués au « Minor Planet Center » de (…).

 

(p.151) Les comètes ont été observées régulièrement à Uccle, où plusieurs découvertes ont eu lieu. La plus célèbre est bien sûr la comète apériodique 1957 III, découverte le 8 novembre 1956 à l’astrographe double de 40 cm de diamètre au cours d’un programme de recherches de petites planètes par Sylvain Arend et son calculateur Georges Roland. Peu après étaient repérées à Uccle les comètes périodiques 1957VII par Arend et Rigaux et 1959c par Arend. D’autre part, l’étude physique des comètes avait intéressé Polydore Swings, à la suite de ses travaux sur les composés moléculaires du carbone. En 1941, au cours d’un séjour au Lick Observatory où il a été invité comme Research Fellow, Swings va donner l’explication de la très curieuse distribution d’ intensité des bandes moléculaires dans les spectres cométaires; il montre que cette distribution et ses variations dans une même comète sont dues aux changements de vitesses radiales de la comète par rapport au Soleil, dont le rayonnement excitateur, strié d’ absorptions atomiques et moléculaires, va être reçu par la chevelure cométaire à des longueurs d’onde variables par suite de l’ effet Doppler-Fizeau.

 

Cette idée fondamentale de Swings sera reprise et développée par plusieurs de ses collaborateurs (Claude Arpigny, Daniel Malaise). Swings découvrit également, en collaboration avec Andrew McKellar (1919-1960) de Victoria (Canada), une nouvelle bande moléculaire dont les travaux de Gehrard Herzberg (1904-1997) et de B. Rosen (1900-1980) à Liège montrèrent qu’elle appartenait à un composé moléculaire inconnu, le C3′ composé de trois atomes de carbone. On comprend dès lors que, les comètes soient restées pour Swing s un sujet de prédilection et que peu d’aspects de la photochimie de ces astres n’ aient retenu son attention. Sous son impulsion, Louis Haser (°1928), chercheur venant de l’Université de Sarrebrück, va développer un modèle de distribution de matière dans les têtes cométaires qui rencontrera un grand succès et de nombreuses applications. C’est av’ec Haser qu’il publiera en 1955 son Atlas of Representative Cornetary Spectra qui sera souvent cité dans la littérature.

Dès 1952, il entame avec Armand H, Delsemme (°1918) une collaboration qui les conduira à émettre l’idée que les molécules très volatiles (NH3, CH4), parentes des radicaux observés dans les comètes, pourraient être captées dans des hydrates solides.

 

(p.151) Delsemme, après avoir tenté d’implanter entre 1957 et 1960 sous l’égide de l’IRSAC (Institut de Recherche scientifique en Afrique centrale) un observatoire près de Jadotville (alors Congo belge) développera par la suite, à l’Université de Toledo (Ohio), ses recherches sur les noyaux cométaires et 1″influence du bombardement cométaire sur les planètes, et notamment sur la Terre. Il démontrera que l’existence d’ eau à la surface de notre planète (et

par suite l’ apparition de la vie) est due au bombardement de notre planète par des millions de comètes principalement pendant le premier milliard d’années de son existence; il a collaboré à d’ importants projets spatiaux avec Jet Propulsion Laboratory de la NASA (Pasadena, Californie). Les comètes ont été abondamment observées par Jean Surdej et François Dossin (1928-1998) avecletélescope de Schmidt Liège- CNRS, où a été découverte la comète Heck-Sause. Sorti de l’Université de Gand, Georges Van Biesbroeck (1880-1974) fait, au Yerkes Observatory de l’Université de Chicago, une belle carrière comme observateur des planètes et astéroïdes, On lui doit la détermination de l’orbite de Néréide, satellite de Saturne, ainsi que la découverte de la comète 1954 IV, d’une période de 12 ans 5 mois.

 

Les problèmes de turbulence résonnante dans les queues cométaires ont fait l’objet de recherches de Frank Verheest (RUG), qui a aussi étudié les modes d’Alfvén dans les plasmas planétaires comportant des poussières. Les champs magnétiques solaire et cosmique ont fait l’objet d’investigations à l’Universitaire Instelling Antwerpen par Dirk Callebaut.

 

Le lecteur s’ en sera rendu compte : le bilan de l’activité astronomique menée en Belgique pendant la période sous revue est important, riche et varié.

Dans le cadre imparti à ce chapitre, il n’ a guère été possible de relater ici la vie scientifique des différents centres où cette activité s’ exerce. Les travaux importants réalisés dans le domaine de la cosmologie tant théorique qu’ observationnelle ont été traités dans un autre chapitre. Sans même faire allusion à toutes les sciences connexes qui sont mentionnées dans le premier fascicule (1815-1927) météorologie, géophysique interne, sismologie, magnétisme terrestre, géodésie et topographie, aéronomie…) et en se limitant aux activités purement astronomiques, il n’est pas possible ne fût-ce que de citer tous les sujets de recherche, à moins de réduire ce texte à une sèche énumération de matières et de noms. L’auteur en est bien conscient et présente par avance ses excuses pour les nombreuses omissions; le lecteur pourra trouver, dans d’ autres sources, dont certaines sont citées en référence, des compléments intéressants.

 

Enseignement et diffusion de l’astronomie

 

L’astronomie est enseignée à des degrés divers dans les différentes universités belges. Lors de l’élaboration de la loi de 1929 sur les programmes et les grades universitaires, les recherches astronomiques concernaient en grande partie l’astrométrie, la mécanique céleste et la statistique stellaire. Aussi son enseignement fût-il rattaché principalement à la nouvelle licence en sciences mathématiques, dont elle constituait une des branches de spécialisation. La licence en sciences physiques, créée par la même loi, ne prévoyait qu’un cours à option intitulé « spectroscopie et astrophysique ». Or, à cette époque, l’astrophysique était devenue une partie essentielle de l’astronomie. Des cours équilibrés dans cette discipline ne pouvaient être enseignés aux étudiants mathématiciens qu’après que des éléments de physique statistique et de mécanique quantique, voire d’hydrodynamique, ne leur soient dispensés. La situation a évolué diversement selon les universités. D’un autre côté, l’enseignement et la recherche en astronomie sont loin d’avoir suivi des chemins parallèles. Telle université, qui disposait de force cours d’astronomie n’ effectuait que très peu de recherches.

 

Le schéma classique de l’enseignement de l’astronomie dans les universités belges comportait d’abord un enseignement obligatoire dispensé aux candidatures en sciences mathématiques et en sciences physiques, ainsi qu’aux candidatures ingénieurs. Assez uniforme jusque vers 1960, l’importance de cet enseignement devint au cours des années très variable, allant de 5 à 45 heures par an.

 

(p.156) C’est un fait remarquable, rarement rencontré dans l’histoire des sciences, que les travaux des chercheurs belges furent à l’origine de chacune des étapes successives sans exception marquant ce renouveau de la thermodynamique, et restèrent depuis lors à la pointe des progrès réalisés. Ainsi, tout en élargissant en 1924 le champ de la thermodynamique par l’introduction de l’affinité – fonction d’état associée au non-équilibre – Théophile De Donder (1872-1957) ouvrait en même temps une brèche vers la cinétique; et, tout en poussant en 1971 la thermodynamique de non-équilibre dans ses derniers retranchements par l’ obtention d’un critère de stabilité, Paul Glansdorff (1904-1999) et Ilya Prigogine (°1917) ouvraient en même temps une brèche vers la science du non-linéaire.

 

(p.213) Le groupe de René Thomas n’est pas le seul, loin s’ en faut, à avoir contribué de manière significative à la compréhension des mécanismes de l’expression génétique. A partir des années 60, à l’Université de Gand, Walter Fiers (°1931) s’attela à la détermination de la structure et de la séquence du matériel génétique de plusieurs virus. A l’occasion d’un séjour postdoctoral au California Institute of Technology, en collaboration avec Sinsheimer, Walter Fiers démontra tout d’abord la circularité de la chaîne d’ADN du bactériophage ФX174. De retour à Gand, il se lancera dans une longue série d’expériences qui devait le mener à publier, dès 1976, la première séquence d’un génome complet, le virus MS2, dont le matériel génétique est constitué d’une longue chaîne d’ARN (3.569 nucléotides). L’analyse de cette séquence devait rapidement déboucher sur une meilleure compréhension de diverses propriétés biologiques du virus, ainsi que sur la structure des gènes (début, fin, etc.).

 

(p.216) La stratégie utilisée par Walter Fiers, Jeff Schell et Marc Van Montagu, basée sur la localisation, le clonage, le séquençage et l’analyse de l’expression de gènes ou virus d’intérêt médical ou agronomique, trouve sa source dans les premiers travaux fondamentaux du groupe sur les bactériophages. Utilisée dans de nombreux laboratoires à travers le monde, cette stratégie conduira à de nombreux succès, renforçant la confiance d’un nombre de plus en plus grand de biologistes dans une approche, certes réductionniste mais surtout d’une efficacité redoutable, de l’ensemble des fonctions vivantes en termes de gènes, protéines, et d’interactions moléculaires entre ceux-ci. Cette approche débouchera dans les années 90 sur divers projets de séquençages de génomes complets d’organismes vivants, depuis les bactéries jusqu’à l’être humain. A ce jour, plus d’une dizaine de génomes bactériens ont déjà été entièrement séquencés, ainsi que le génome complet d’un organisme eucaryote unicellulaire, la levure Saccharomyces cerevisiae. Ce dernier résultat a été obtenu dans le cadre d’un projet de collaboration internationale remarquable impliquant plusieurs dizaines de laboratoires européens, dû à l’initiative d’André Goffeau (UCL), avec notamment la

participation du groupe de Marcelle Granson et de son successeur, Bruno André, à Bruxelles. Le séquençage du génome du premier organisme pluricellulaire, un ver nématode, vient d’être achevé en Angleterre, alors que les génomes de la mouche drosophile et de la plante A. thaliana, avec la participation du groupe de Marc Van Montagu à Gand, devraient être terminés au cours de l’année 2000.

 

Enfin, la séquence complète d’un génome modèle pour l’être humain, produit de l’assemblage de séquences provenant de diverses souches cellulaires et de divers individus, devrait être finalisée d’ici quelques années.

 

 

2 Scientifiques belges de premier plan / Belgische eersterangswetenschappers

1512-1594 Gerardus Mercator

Gérard de Kremer, dit Mercator, natif de Rupelmonde, fut le père de la science géographique.  Son planisphère rendit de grands services à la navigation. (in: J. Schoonjans, Nos Gloires, Vulgarisation de l’histoire de Belgique par l’image, Ed. Historia, BXL, s.d ,in: Nos Gloires, III)

Lou Van Beirendonck, Lieven Verbrugge , Les Belges sont formidables, Vous en doutiez ?, éd. Brillant, 2005

LA Belgique, PAYS D’INVENTEURS

La Belgique sur la carte du monde

Pour le premier portrait de la galerie des inventeurs belges, nous devons remonter le temps de quelques siècles. Gerhard Kremer, mieux connu sous le nom de Mercator (1512-1594), est considéré comme le fondateur de la cartographie moderne. Il est né à Rupelmonde, mais est parti en 1530 à Louvain pour y étudier la philosophie, la géographie, la géométrie et les mathématiques à l’université. C’est au cours de ses études qu’il s’est fait appeler Mercator. Son intérêt pour les cartes, les globes célestes et terrestres, les instruments scientifiques et la cartographie date de cette (p.308) époque. En 1569, il publie la première édition de sa célèbre carte du monde, pour laquelle il a utilisé une méthode géométrique permettant de reproduire aussi fidè­lement que possible une surface ronde sur une surface plane. Dans la projection de Mercator, la surface terrestre est d’abord projetée comme un cylindre, que l’on déroule ensuite pour en faire une carte plane. Le principe de projection de Mercator n’était pas unique, mais il est toujours à la base des cartes marines que les capitai­nes utilisent aujourd’hui pour envoyer leurs superpétroliers sur les océans, ou que les pilotes emploient pour diriger leurs jumbos dans l’espace aérien. L’itinéraire d’un navire, qui suivait une direction cardinale fixe, n’a pu être représenté qu’à partir de ce moment-là sur une carte par une ligne droite, ce qui a considérablement simplifié la navigation. Une autre idée de Mercator a laissé ses traces à notre époque: c’est en effet lui qui a utilisé pour la première fois le terme ^atlas’ pour définir un ensemble de cartes.

Mercator, plus géographe que mathématicien

(in: LB, s.d.)

Mercator - hemelbol / globe céleste (+- 1551)

Mercator wilde aarde en hemelen beschrijven

(Dirk Draulans, in: Knack, 29/02/2012)

1514-1564 Vesalius (Andries Van Wesel / André Vésale)

(in: Geschiedenis, november 2014, p.10-14)

Au 16e siècle, un Bruxellois, André Vésale, fut le père de l’anatomie et de la chirurgie.  Il osa disséquer les cadavres et opérer les malades.  Il est considéré comme le créateur de la médecine moderne… (in : J. Schoonjans, Nos Gloires, Vulgarisation de l’histoire de Belgique par l’image, Ed. Historia, BXL,  s.d ,in: Nos Gloires, III)

(LB, 1990s)

(LB, 05/11/1993)

1517-1585 Rembert Dodoens, plantkundige / botaniste

(in: De Lage Landen, s.d.)

Au 16e siècle, un Malinois, Dodoens, fut le père de la botanique.  Il fut le premier à établir un classement scientifique des plantes et des fleurs dans son livre « Kruidboek » …

Il composa 2 siècles avant Carl von Linné, le Suédois, un ‘kruidboek’.

1527-1598 Abraham Ortelius, cartographe et géographe brabançon

 Géographe, l’Anversois Ortelius, publiait le meilleur atlas de son temps … (in : J. Schoonjans, Nos Gloires, Vulgarisation de l’histoire de Belgique par l’image, Ed. Historia, BXL,  s.d ,in: Nos Gloires, III

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.28

Le 20 mai 1570, c’était chose faite. Abraham Ortelius sortait de presse le «Theatrum orbis terrarum», le premier atlas du monde jamais édité. Imprimé chez Gielis Van Diest à Anvers, cet ouvrage, dédié au roi Philippe II d’Espagne comportait pas moins de 53 cartes ainsi qu’un index des auteurs consultés repre­nant 87 noms. Son succès fut immédiat. La première édition fut épuisée en quelques semaines. Elle fut immédiatement suivie par deux éditions en langue latine, d’une édition allemande et d’une version française. Au total, malgré un prix de vente très élevé, ce ne sont pas moins de 24 éditions et 1712 exemplaires qui sortirent de presse du vivant de l’auteur. Des éditions sans cesse mises à jour, grâce à la collaboration de bien des cartographes ambition­nant de voir apparaître leur nom dans cet atlas historique et, qui pour ce faire, ne cessèrent de l’alimenter de leurs trouvailles les plus récentes. A tel point que la dernière et quarante-et-unième édition, datée de 1612, soit bien après son décès, contenait 167 cartes différentes.

1548-1620 Simon Stevin

(Huens)

Flip G. Droste, « Simon Stevin », in : Delta, 1, 2008, p.22-23

 

Wij mogen de uitgeverij Aspekt danken dat zij door dit boek de aandacht vestigde op een van onze meest merkwaardige wetenschappers. Een wetenschapsman die gerust de vergelijking kan en mag doorstaan met zijn beroemde Italiaanse evenbeelden: Leonardo da Vinci en Michelangelo, zij het dan wel dat hij geen schilder was. Maar dit is dan ook het enige facet waarin hij zich niet thuis voelde. Ons volk mag er trots op gaan een dergelijk iemand de zijne te mogen noemen. Jammer dat hij niet meer gewaardeerd wordt.

Toen de in Brugge geboren Simon Stevin in 1581 om geloofsredenen uitweek naar Hol-land had hij zich al een zekere faam verworven. In 1583 ontmoet hij Prins Maurits aan de jonge universiteit van Leiden. De prins had dadelijk doorzien welke man van formaat hij leerde kennen. Hun wederzijdse betrekkingen groeiden dan ook snel uit tot een blijvende samenwerking en vriendschap, in zo ver dit natuurlijk in die tijd mogelijk was wegens het standsverschil.

Ten voordele van de vaderlandse zaak en van de jonge Republiek heeft Simon Stevin zijn talenten ontwikkeld en werd hij een echte « homo universalis ». Geen terrein dat hem vreemd bleef: natuurkunde, sluizenbouw, as­tronomie, perspectiefleer, vestingbouw, droog-legging van polders, zeevaartkunde en wat nog al meer…. Aïs men Dantzig wil uitbouwen tôt een havenstad doet men beroep op hem. Hij is een van de eersten in onze landen die het heliocentrisch wereldbeeld van Copernicus verdedigt.

Zelfs op het gebied van de filosofie, meer bepaald van de filosofische fundering van de politieia stpnd hij zijn mannetje. .

Talrijk zijn zijn uitvindingen op allerlei technische gebieden. Wat daarbij vooral steeds op-valt is zijn nuchtere kijk op de dingen. Een uitvinding heeft enkel zin aïs ze ook daadwer- kelijk in de praktijk kan toegepast worden, dus: geen théorie omwille van de théorie. Stevin houdt steeds beide voeten op de grond.

De auteur heeft van dit allés in een twintigtal hoofdstukken een overzicht gegeven. Op het einde van dit boek kan men dan ook niet anders dan vol bewondering opkijken naar deze universele geest, een waar pronkstuk voor ons volk. Hopelijk draagt het boek bij tôt een grotere waardering van deze grote figuur.

 

V.E.

 

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.31-33

 

 

Simon Stévin est, sans nul doute, l’un des plus grands savants qu’ait donné la Belgique. Il a marqué, entre autres, l’histoire des mathématiques, en généralisant par exemple le système décimal. Pour bon nombre d’historiens, il est à l’égal de Galilée ou de Kepler, ses contempo­rains qui se seraient inspirés de quelques-unes de ses théories. Et s’il est moins connu qu’eux, c’est tout simplement parce qu’il écrivait exclusivement et volontairement en langue néerlandaise, ce qui retarda la propagation de ses travaux à travers toute l’Europe.

On connaît peu de choses sur la vie de Simon Stévin. On sait qu’il est né à Bruges en 1548 ; qu’il exerça le métier de caissier à Anvers vers 1565 et qu’il revint dans sa cité natale en 1 570 pour y travailler au service des finances du port de Bruges. Mais, n’ayant pu y obtenir la franchise de la bière qu’il convoitait, il quittera définitivement la Venise du Nord un an plus tard. On retrouve alors sa trace, entre 1577 et 1581, en Prusse, en Pologne et dans les pays Scandinaves. En 1583, il est inscrit dans la faculté des lettres à l’Université de Leyde. C’est là qu’il fait imprimer son premier ouvrage, un livre consacré au calcul des intérêts. C’est un succès. À l’époque, en effet, les marchands ont toutes les peines

du monde à calculer les taux. Stévin va mettre à leur disposition une méthode sans égale, leur permettant de calculer, rapidement et facilement, les bénéfices et les pertes de leurs opérations commer­ciales. Il suffisait d’y penser.

Trois ans plus tard, il publie un autre petit traité qui va, à nouveau, faire sensation. Dans «De Thiende» (La dîme, dans sa traduction française), Stévin introduit la pratique du système décimal dans la comptabilité. Un système, certes amélioré dans sa forme mais toujours d’application cinq siècles après.

À l’université, Simon Stévin va encore découvrir l’œuvre d’Archimède. L’analysant, il va faire part de ses conclusions * dans deux nouveaux volumes, «La statique ou l’art de peser» et «L’hydrostatique». Il y démontre, notamment, la méthode du parallélogramme des forces et y énonce le paradoxe de l’hydros­tatique : la pression d’un liquide sur le fond d’un récipient est indépendante de sa forme, et aussi de la surface du fond; elle dépend seulement de la hauteur du liquide dans le récipient. Six ans avant Galilée, il va aussi découvrir que deux corps de poids différents tombent à la même vitesse.

Une telle intelligence est bien sûr remarquée par Maurice de Nassau, le Prince d’Orange qui, dès 1590, en fait son précepteur, puis son conseiller. À la Cour des Provinces-Unies, il va succes­sivement exercer les fonctions de superintendant des finances, castramétateur des armées, inspecteur des digues et des travaux hydrauliques. Dans chacune de celles-ci, il excelle et innove. Il va ainsi dresser des plans de fortification et inventer une techni­que pour retenir une armée d’envahisseurs en inondant terres et chemins par l’ouverture de digues et d’écluses. Il va aussi fonder une école d’ingénieurs militaires ; se lancer dans un traité de musique où il expose sa conception de la gamme tempérée. Il va encore se pencher sur le repérage en mer, la production des moulins à vent, … Et pour accélérer le transport des troupes, il

va imaginer un char ayant seulement recours à la force du vent pour se mouvoir. Nous y reviendrons.

Simon Stévin meurt en 1620 dans la discrétion qui aura carac­térisé toute sa vie. C’est un grand oublié de l’histoire de Belgi­que. Tout au plus lui a-t-on, tardivement, consacré une rue à Bruxelles et une place à Bruges où, à l’occasion du tricentenaire de sa naissance, on a même dressé une statue, œuvre du sculpteur Louis-Eugène Simonis. Le personnage est, depuis peu, réapparu dans la mémoire collective d’une Flandre à la recherche d’iden­tité. Toute sa vie durant, il est vrai, il se sera battu pour faire du dialecte parlé dans les Pays-Bas une langue à part entière et qui soit respectée. Jusqu’à créer des termes scientifiques et techniques se basant sur des racines germaniques et non grecques. Simon Stévin voyait l’avantage de la langue néerlandaise dans le nombre de mots monosyllabiques et la faculté de composer des radicaux. C’est pour cela que ses travaux sont, quasi exclusivement, écrits en néerlandais et… qu’ils mirent tant de temps à être traduits et diffusés.

 

J. Schoonjans, Nos Gloires,  Vulgarisation de l’ histoire de Belgique par l’ image, éd. Historia, BXL,  s.d.

 

Le mathématicien brugeois Simon Stevin eut une renommée mondiale.  Il a inventé les fractions décimales …

 

 

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.265-273

 

C’est grâce à ses connaissances mathématiques que Michel Coignet (1549-1623) put doter le monde de la navigation d’une multitude d’instruments de mesure. Il est considéré comme le père du secteur et le véritable précurseur du compas de propor­tion, faussement associé au seul nom de Galilée. Les inventions de Coignet ont littéralement modifié l’art de naviguer.

 

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.265-273

 

Toujours en Flandre, Anselme Boèce De Boodt (1550-1632) est considéré comme le père de la minéralogie. Il a été le premier à définir le caractère des minéraux, donnant de belles indications aux tailleurs de pierres précieuses.

 

1579-1944 Jean-Baptiste Van Helmont (l'homme qui a inventé le mot "gaz)

(LS, 10/01/1991)

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.37

 

Enfermé dans son laboratoire de Vilvoorde, Jean-Baptiste Van Helmont consacra toute sa vie à ce type d’expériences, prenant de plus en plus ses distances avec l’alchimie au profit d’une chymie’ naissante. Il découvrit ainsi la présence de suc gastrique dans la digestion ou comment produire de l’acide chlorhydrique, de l’acé­tate d’ammoniaque ou de l’huile de soufre. Il remarqua aussi que le charbon, par la combustion, exhalait une vapeur, appelée un «esprit» jusqu’alors inconnu. Il va lui donner le nom de «gaz», qui n’est autre qu’une déformation du mot allemand «gasht» ou du néerlandais «geest» signifiant «esprit». Cet «esprit», il va le retrouver un peu partout : dans les eaux de Spa, dans les celliers, dans les mines, dans la fermentation de l’alcool et même dans les produits de la digestion.

Pour faire comprendre l’importance du fruit de sa recherche au commun des mortels, il pratiqua à maintes reprises une expérience qui est entrée dans l’histoire, celle de la bougie : « Eteignez brusque­ment une bougie à longue mèche ; arrangez-vous de façon à ce que l’air ne soit pas trop agité afin de ne pas éparpiller la fumée qui s’échappera de la chandelle éteinte. Approchez une autre flamme de la fumée qui s’élève ; celle-ci s’enflammera et vous verrez la flamme descendre jusqu’à la mèche et enflammer à nouveau la chandelle préalablement éteinte. »

 

J. Schoonjans, Nos Gloires, Vulgarisation de l’histoire de Belgique par l’image, éd. Historia, BXL,  s.d. , in: Nos Gloires, III

 

Le médecin Van Helmont inventa le mot ‘gaz’ …

 

1598 - Pontus Hererus publie Rerum Belgicarum

17e siècle - Michel-Florent Van Langeren, astronome belge: carte de la Lune

(in: Grande Encyclopédie de la Belgique et du Congo, Editorial Office, Bruxelles, 1952, p.675)

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.47-49

 

Si la date du 21 juillet 1969 restera à jamais celle du premier pas sur la lune, plusieurs savants belges avaient déjà au XVIIe siècle une belle connaissance du grand satellite de la terre.

 

Michel-Florent Van Langren, aussi appelé Langrenus est ainsi le premier à avoir réalisé une carte scientifique de la lune.

La famille Van Langren est cosmographe de père en fils. Arnoul-Florent était le sphérographe officiel des Archiducs Albert et Isabelle, puis du Roi Philippe IV On lui doit les premières sphères terrestres et célestes et une collaboration au Theatrum d’Ortélius, évoqué plus avant. À sa mort, son fils Michel-Florent prit le relais à la Cour du Roi. Philippe IV lui demande de déter­miner la longitude géographique sur terre, un élément important pour la navigation maritime. Pour ces calculs, il va utiliser les écarts de temps entre l’apparition et la disparition des montagnes lunaires dans ce qu’il appelle le « terminateur », c’est-à-dire la frontière entre la partie sombre et la partie éclairée de la lune, durant les différentes phases lunaires. Il est ainsi amené, à l’aide d’un télescope, à dresser scientifiquement une carte de la lune.

Cette première « sélénographie » est, en fait, réalisée en 1627. Mais il faudra attendre 1645 pour que son travail soit publié. C’est le Roi Philippe IV qui finance l’édition de ce qui est appelé « Luminaria Austro-Philippica», les Luminaires austro-philippiques. Van Langren est le roi des flatteurs.

Il n’empêche. La carte de Langrenus est impressionnante de précisions. On peut y observer les différents cratères, mers, chaînes de montagnes ou sommets. À chacun de ces éléments, pour les reconnaître plus facilement, il a donné des noms. Ceux de rois ou reines catholiques pour les cratères les plus importants, ceux de saints ou de saintes pour les montagnes, ceux d’astronomes, de mathématiciens ou de savants de son époque ou du passé pour les plus petits cratères. Les mers et océans reçoivent des noms latins. Van Langren ne s’est pas oublié dans la distribution. Il a donné son nom à une mare Langreneanum.

Légitimement fier de son travail, Michel-Florent Van Langren le communiqua à deux jésuites italiens, les pères Jean-Baptiste Riccioli et François-Marie Grimadi, avec qui il coopérait. Mal lui en prit. Ils modifièrent ses nomenclatures. Le cratère Philippi IV fut rebaptisé du nom de Copernic. Et la mare Langreneanum devint la Mare Fecunditatis.

Ainsi disparaissait-il, plusieurs siècles durant, de l’histoire de la lune…

Mais la lune n’était pas la seule préoccupation de Langrenus. En 1652, il observa une comète et publia le fruit de ses observations. On lui doit encore des cartes des Pays-Bas espagnols, un projet de canal entre Bruxelles et Malines et un plan visant à protéger Bruxelles des inondations de la Senne. Il était infatigable. Début mai 1675, pourtant, il se sent mal. Il décède à l’âge vénérable de 78 ans. On l’enterre en grandes pompes, le 9 mai, en l’église Notre-Dame de la Chapelle. Son monument n’existe plus.

 

Les astronomes du XXe siècle ont, en revanche, comblé une injustice. Un cratère de la lune, et non des moindres puisqu’il a un diamètre de 132 kilomètres, porte aujourd’hui le nom de Langrenus. D’autres astronomes ou scientifiques belges l’accom­pagnent dans cette postérité interplanétaire : Adrien de Gerlache (1866-1934), Félix De Roy (1883-1942), Eugène Delporte (1882-1955), Corneille Heymans (1892-1968), Jean-Char­les Houzeau de Lehaie (1820-1888), Philippe van Lansberg (1561-1632), Georges Lemaître (1894-1966), Charles Malapert (1581-1630), Gérard Mercator (1512-1594), Théodore Moret (1602-1667), Wilhem Prinz (1857-1910), Lambert Quetelet (1796-1874), George Sarton (1884-1956), Jan Stade (1527-1579), Simon Stevin (1548-1620), André Tacquet (1612-1660), Georges Van Biesbroeck (1880-1974), André Vésale (1514-1564) et Godefroid Wendelin (1580-1667).

 

Lou Van Beirendonck, Lieven Verbrugge , Les Belges sont formidables, Vous en doutiez ?, éd. Brillant, 2005

 

(p.323) LE SAVIEZ-VOUS ?          

  • La première carte de la lune, où les montagnes, les cratères et les mers étaient baptisés du nom de souverains et de savants, a été réalisée par le cartographe Michael Florent van Langren ou Langrenus (1598-1675). Cette carte était particulièrement utile pour la marine, puisqu’elle permettait de calculer les longueurs géographiques sur base de la détermination du temps entre le moment où les montagnes de la lune s’éclairent et s’obscurcissent, ou lumières lunaires, comme les appelait van Langren. Un cratère de la lune porte d’ailleurs son nom.

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17e siècle - Gemma Phrysius, astronome belge

(in: Grande Encyclopédie de la Belgique et du Congo, Editorial Office, Bruxelles, 1952, p.675)

17e siècle

in: Yves Vander Cruysen, Curieuses histoires des inventeurs belges, éd. Jourdan, 2012, p.265-273

Dans le domaine des mathématiques, notre pays vit naître quelques grands cerveaux. Le jésuite Grégoire de Saint-Vincent (1584-1667), grand spécialiste de la quadrature du cercle est aussi l’auteur de la première quadrature de l’hyperbole dans laquelle il met en évidence son comportement logarithmique. Gottfried Wilhelm Leibniz l’estimait aussi important pour le développement de la science que le furent Descartes ou Galilée. Son disciple, le père Jean-Charles della Faille (1597-1652) va, lui, déterminer pour la toute première fois le barycentre d’une portion de cercle. D’une grande culture, il achèvera sa carrière à la Cour d’Espagne.

Schoonjans, Nos Gloires, Vulgarisation de l’histoire de Belgique par l’image, Ed. Historia, BXL, s.d ,in: Nos Gloires, III

La science historique débuta au 17e siècle avec Jean Bolland ou Bollandus, un Jésuite belge qui entreprit de publier les anciennes vies des saints en appliquant les méthodes de la critique historique. Cette oeuvre colossale s’intitule ‘Acta Sanctorum’.  Elle se poursuit aujourd’hui.  Les ‘Hagiographes’ belges de la Compagnie de Jésus s’appellent Bollandistes …

17e siècle - Libert Froimont, théologien et scientifique de l'UCL

(in: Grande Encyclopédie de la Belgique et du Congo, Editorial Office, Bruxelles, 1952)

17e siècle - Le jésuite Ferdinand Verbiest, mathématicien et astronome à la cour de l'empereur de Chine

(in: Grande Encyclopédie de la Belgique et du Congo, Editorial Office, Bruxelles, 1952)

17e-18e s. - Jan Palfijn, chirurgien belge

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