GÉNÉRALITÉS

PLAN

1 Généralités

2 Chronologie

3 Autres analyses (le révisionnisme, …) 

4 Documents

1 Généralités

4 questions à 5 historiens, in: LB, 3/1980

 

Jacques Stiennon (prés. de la Commission d’ Histoire pour le ministère de l’ éducation nationale)

‘Le cours d’histoire devrait comprendre l’éducation sociale et civique, avoir pour objet l’histoire globale – ce qui implique la pratique de l’histoire locale autant que régionale, nationale ou internationale.’

 

Jacques Willequet (ULB)

“L’histoire doit former le sens critique afin de résister au totalitarisme: … il faut connaître les enrichissements du passé pour comprendre ceux du présent, relativiser les choses, apprendre à penser, apprendre à penser par soi-même en toute liberté.”

 

G.-H. Dumont (ICHEC)

“L’histoire apprend le mieux à se garder des passions idéologiques.”

“ Et ces racines (= celles des jeunes), c’est essentiellement l’histoire qui peut les révéler. Non seulement l’ histoire de notre pays et de notre identité culturelle, mais également celle de l’ Europe à laquelle nous participons.”

 

Léo Moulin (anc. prof. au Collège de l’ Europe à Bruges)

Dans le ‘Syllabus d’histoire des temps modernes’ que j’ai publié en 1941, j’écrivais: “M’adressant à des petits Belges, je n’ ai pas manqué d’attirer leur attention, chaque fois qu’il convenait, sur les événements qui bouleversèrent les provinces belges, ou sur les progrès des arts, des lettres et des sciences qui pouvaient illustrer leur histoire. J’espère qu’ils puiseront, dans ces leçons du passé, un juste orgueil de ce qu’ont fait leurs ancêtres, une profonde pitié pour ce qu’ils ont souffert, un grand amour pour ce qu’ils ont espéré et voulu faire.”

Telles sont encore, à mes yeux, les raisons belges d’enseigner l’histoire.

2 Chronologie

1100s

Die Wurzeln des Zwists, S.20-21, in : Geschichte 11/2003

 

Der Begriff „Hundertjäriger Krieg“ ist eine Schöpfung des 19. Jahrhunderts. Etwas überspitzt könnte man auch von einem 250-jährigen Krieg sprechen, denn seit dem Ende des 12. Jhs. entbrannte immer wieder der Konflikt zwischen den Plantagenets und ihren Rivalen auf dem französischen Thron: Es ging wie so oft um Land und Macht …

 

1494

Colomb

Marc Ferro, éd., Le livre noir du colonialisme, éd. Robert Laffont, 2003

 

(p.43) Un peu plus tard, en avril 1494, survient ce que Las Casas tiendra pour la « première injustice » commise aux Indes. Hojeda a été envoyé par Colomb dans l’intérieur, vers le Cibao où doit se cacher l’or. En cours de route, il s’emporte à propos d’une obscure histoire de vol, et fait couper oreilles et nez à deux coupables présumés. Après quoi, il ordonne l’arres­tation d’un cacique local et de son fils, puis il les envoie à Colomb pour qu’il les mette à mort. Certes, Colomb s’en abstiendra ; mais c’est bien lui qui avait donné l’ordre de couper oreilles et nez à tous ceux qui seraient soupçonnés de vol, sous prétexte que ce serait visible pour tout le monde, et dissuasif. C’est lui qui exige que Caonabo soit pris par flatterie et ruse, ce qui sera accompli quelques semaines après l’incident des voleurs5. Le commentaire ultérieur de Las Casas sur toute cette affaire a une portée qui dépasse les circonstances de la conquête. C’est, écrit-il, cette injustice « première [qui] donnait juste titre et bon droit [aux Indiens] d’engager et mener contre les chrétiens une juste guerre ». Il estime que l’amiral n’avait pas le droit de se déplacer dans les parties de l’île sans en prévenir d’abord les souverains ou caciques, ni sans leur accord6. De fait, à l’été 1494, tout Haïti est entré en guerre. Colomb revient alors d’un voyage d’exploration à la Jamaïque et sur la côte sud de Cuba. Il ramène aussi les premiers exemplaires de ces fameux chiens de combat qui seront utilisés contre les Indiens et contre les esclaves ou insurgés noirs, et, comme on sait, jusqu’en 1803, dans la guerre d’indépendance d’Haïti. Voici ce qu’en dit Colomb lui-même, et qui se passe de commentaire : « Un chien fait ici grande guerre au point que nous les estimons l’égal de dix hommes et que nous en avons fort besoin7. » Car, avec la résistance indienne, le jugement sur ce peuple a changé du tout au tout. Aux premières rencontres, on les avait tenus pour des hommes et femmes pacifiques, doux en général, et même faciles à convertir au christianisme. Dès qu’ils engagent le combat, ils ne sont plus regardés que comme des gens perfides, voleurs, meurtriers ou pillards.

 

5.  Pour l’ordre de couper les nez et les oreilles, voir Lequenne, II, p. 106.

6.  La Historia de las Indias, éd. Ranke-Millarès, Mexico, 1951,1, ch. xcn.

7.  Christophe Colomb, Œuvres complètes, Paris 1992, p. 293 (ci-après, Colomb, O.C).

 

(p.44) (…) Colomb mène la guerre vigoureusement ; en mars 1495, les Indiens sont écrasés à la bataille de la Vega Real. Le nombre des morts est inconnu, probablement très élevé. Quelques centaines de pri­sonniers sont envoyés en Espagne pour y être esclaves ; toutefois la reine Isabelle s’y refusera. Sur place, les Indiens tentent de pratiquer la stratégie de la terre brûlée, mais, refoulés dans les montagnes, ils meurent de faim en grand nombre. Dès lors, les survivants doivent se résigner à travailler aux mines et aux champs. Colomb avait prévu de faire venir d’Espagne des artisans et ouvriers qualifiés pour les encadrer et les former. Il en est effec­tivement venu quelques-uns, mais l’amiral a vite constaté que les Espagnols dans la colonie ne travaillaient pas, ne cherchaient qu’à obliger les autres à travailler pour eux. Et de leur imposer un effort physique sans répit : l’horaire de travail n’est limité par aucune règle, la sécurité du travailleur taïno à l’égard des agressions des maîtres n’existe pas. On a déjà cité des exemples de mauvais traitements de la part des contremaîtres ; il en est beaucoup d’autres. Que des maladies épidémiques, notamment la variole, surgissent, elles frappent des organismes gravement affaiblis ; au surplus, les malades indiens ne sont guère soignés. On ne saurait donc tenir les Espa­gnols pour innocents de ces vagues épidémiques.

Le résultat s’inscrit dans des chiffres accablants. L’estimation la plus courante de la population de l’île à l’arrivée de Colomb, et que rappelle le rapport des dominicains de 1519, la porte à 1,1 million de personnes. En 1507, le trésorier Juan de Pasamonte n’en compte plus que 60 000. En 1520, il ne subsisterait plus qu’un millier d’Indiens à Hispaniola, plus aucun à Porto Rico. Le déficit d’une main-d’œuvre, qui, officiellement, n’est pas esclave, mais qui est traitée comme si elle l’était, devient tel qu’il entraîne des déportations à partir de terres plus ou moins voisines : quarante à cin­quante mille des îles Lucayes vers Hispaniola, sans compter un nombre indéterminé d’Indiens pris sur la terre ferme et vendus comme esclaves aux Espagnols de la première colonie d’Amérique. La même catastrophe va s’abattre sur Cuba, où s’étaient réfugiés quelques groupes de Taïnos, et qui fut occupée à partir de 1509-1511, sur la Jamaïque et enfin sur San Juan de Porto Rico.

 

1506

Marie-France Cros, Il y a 500 ans, mourait Colomb, LB 18/05/2006

 

C’est dans l’indifférence générale qu’inter­vint, le 20 mai 1506, la mort du navigateur gé­nois. Un an plus tard, le moine cartographe allemand Martin Waldseemuller attribuait (par anti-judaïsme?) au Florentin Amerigo Vespucci – jeune homme qui participa aux 2e et 3e expéditions de Colomb mais qui, lui, se rendit compte que le Génois avait touché un nouveau continent – la découverte de « l’Amé­rique », qui fut nommée en son honneur.

 

1880s-

Marc Ferro, éd., Le livre noir du colonialisme, éd. Robert Laffont, 2003

 

(p.81) Le plus grand historien de l’Australie de l’époque écrivit, en 1930 : « Le progrès de la civilisation britannique a rendu inévitable la progres­sion naturelle de la race aborigène vers son extinction — tels sont les mots lénifiants du gouverneur de l’Australie. En vérité, une culture de la chasse et une économie pastorale ne peuvent pas coexister à l’intérieur des mêmes limi­tes. Néanmoins, les envahisseurs britanniques firent parfois leur travail de destructeur avec la brutalité inutile d’enfants profondément stupides21. »

 

Aux environs de 1880, les quelques Aborigènes demeurant encore dans les parties colonisées de l’Australie vivaient dans la plus grande détresse. Ils trouvaient refuge dans le lit de petits cours d’eau ou à la péri­phérie des villes. Beaucoup échouaient dans les ghettos urbains. Pour ces hommes, la résistance armée avait généralement cessé, mais, en l’absence de droits juridiques, ils n’avaient aucun moyen de se protéger de l’exploi­tation des Blancs. On pouvait les battre, les violer et même les assassiner en toute impunité, comme le rappelle leur littérature22.

 

1914-18

H. De Maere (Lasne), La leçon de juillet 14, LB 14/12/1981

 

Pour le professeur Barrea, la leçon de juillet l4 est que la Première Guerre mondiale fut provoquée par une fermeté diplomatique et une rigidité militaire sans le correctif de la négociation. « En juillet 14 comme aujourd’hui, dit 1’éminent professeur, tout etait prêt depuis des années pour éviter la guerre… qui éclata cependant ».

Ce point de vue a dejà été contesté, à raison, par M. L. Duquesne de la Vinelle, qui estima au contraire que, comme pour la Deuxième Guerre mondiale, le déclenchement de la première a été au moins encouragé par la faiblesse des alliés, leurs atermoiements et leur refus de faire usage de leur pouvoir de dissuasion.

Je voudrais ajouter au dossier quelques extraits d’un article paru dans « Le Patriote » (prédécesseur de « La Libre Belgique ») du 14 juillet 19l4, qui semble indiquer que le professeur Barrea a tort de reprocher aux autres une mémoire « sélective » de l’histoire :

« Une campagne nouvelle a commencé dans certaines feuilles militaires ou militaristes pour amener le gouvernement a de nouvel1es charges personnelles et financières en vue de la défense nationale. Celle-ci, d’après les professionne1s, dont la tactique n’a plus varié depuis 1830. est plus compromise que jamais. La thèse n’est pas nouvelle… Nous avons alors comparé les prétentions de nos guerriers au rôle de la grenouille vis-à-vis du boeuf…

« Nous posons donc de nouveau la question : est-il vraiment acquis que nos voisins nous menacent ? Ou, pour préciser, est.il vrai que, comme le prétendent seuls les militaires anglais, français et belges, l’Allemagne, pour utiliser la supériorité numérique évidente de ses troupes, envahira la Belgique…

« Il semble rationnel de chercher la réponse à cette question dans les déclarations officielles des chefs responsab1es de 1’empire allemand. Or ces déclarations sont formelles et récentes… : « – Guillaume II : « La Belgique a bien raison d’avoir confiance en moi ».

« – Le ministre de la Guerre : « La neutralité de la Be1gique, garantie par acte international. ne sera pas perdue de vue par 1’Allemagne ».

– « Quel motif avons-nous de suspecter la sincérité de ces déclarations officielles ?

Aucun autre que des avis dip1omatiques étrangers à l’Allemagne et contredits catégoriquement par 1es déclarations officielles que nous avons citées ci-dessus. Ces avis sont absolument insuffisants pour nous faire admettre que l’empereur Guillaume II soit autre chose qu’un parfait homme et un chef tout-puissant et respecté…

– « C’est à force de nous hypnotiser sur cette conception saugrenue de nos prétendus devoirs internationaux que nous avons fini par admettre comme chose toute naturelle et même légitime, une invasion de notre territoire par ceux qui ont juré de nous défendre. Cette invasion que le grand homme d’Etat anglais Gladstone qualifiait de « crime atroce dont aucune nation ne pourrait se rendre coupable »…

– « C’est avant tout dans le droit et la justice que les petits pays doivent chercher 1eur protection ».

Vingt jours après la parution de cet article, l’Allemagne envahissait la Belgique et la suite est connue.

 

1914-18

P.V., Un vide historiographique, LB, 04/12/1993

 

“On n’ a guère pris en compte les travaux d’Arno Mayer qui considère que c’est 14-18 qui marque réellement la fin de l’ Ancien Régime.”

 

1914-18

Christian Dupont, L’attentat de Sarajevo, /BXL/ LB 04/12/1993

 

Vous écrivez, après bien d’autres : “ L’attentat de Sarajevo a été préparé à Belgrade, avec l’aide d’une société secrète, la “Main noire », dirigée par le chef de renseignement de l’armée serbe ”.

Cette version des faits est contestée depuis de nombreuses années par les meilleurs auteurs mais, curieuse ment, elle est reprise encore dans la plupart des ouvrages de vulgarisation disponibles.

Tant J -J Becker et S. Bernstein dans leur » Victoire et frustration 1914-1929  » (Seuil, 1990, coll. Nouvelle histoire de la France contemporaine, t. 12, p. 19) que J. Carpentier et F. Lebrun dans leur “ Histoire de l’Europe  » (Seuil, 1992, coll. Points Histoire H 157, p. 401) écrivent que la Serbie n’avait

rien à voir avec l’attentat de Sarajevo; le premier précise même que le gouvernement serbe avait prévenu le gouvernement austro-hongrois des risques que courait le prince héritier en se rendant à Sarajevo.

Vladirnir Dedijer ( The road to Sarajevo, New York Londres, 1966) écrit même que le gouvernernent serbe avait perdu tout contrôle sur la “ Main noire » au moment de l’attentat et que Gavrilio Prinzip, le meurtrier, avait, lui-même, échappé au contrôle de la “ Main noire  » en juin 1914.

De plus, le groupe auquel appartenait Prinzip ne voulait pas, contrairernent à la  » Main noire « , d’un Etat des Slaves du sud sous contrôle serbe mais bien d’une solution fédérale pour l’empire austro-hongrois.

Au vu des conclusions de ces différents historiens, Belgrade n’aurait donc rien à voir avec l’attentat. L’implication de la Serbie aurait été « inventée » par Vienne de manière à prétexter sa déclaration de guerre.

La “grande guerre » aurait donc commencé par une manipulation de l’opinion internationale.

 

1915

Le Westhoek et la première attaque chimique, LB 23/04/2005

 

Il y a eu 90 ans qu’a été lancée la première attaque chimique de l’histoire, non loin d’Ypres.

 

1940-45

Qui étaient-ils ? L’histoire des Waffen-SS, in: Ligne de front, 3, janv.-fév. 2007

 

(p.39) « Ceux ayant des penchants pour l’alcool – la tabac étant à peine toléré – sont éliminés d’office. »

 

(p.49) On pense ici évidemment aux volontaires SS musulmans recrutés en Bosnie-Herzégovine et en Croatie en mars 1943 pour y former une légion devant combattre contre les « Rouges » de Tito. Kroatische-SS-Freiwilligen-Division dans un premier temps, elle sera transformée en 13. SS-Freiwilligen bosnisch-herzegowinische Gebirgs-Division (Kroatien) en octobre 1943 puis en 13. Waffen-Gebirgs-Division der SS « Handschar » en juin 1944. Ces hommes porteront un fez frappé d’une tête de mort et, selon Mabire, « on les verra même se livrer aux cérémonies islamiques, tournés vers La Mecque, à genoux sur leur toile de tente camouflée, après avoir retiré leurs bottes… Ils vont combattre uniquement en Yougoslavie et vont se signaler par d’innombrables atrocités. » ; il en sera d’ailleurs de même pour les recrues albanaises de la 2 /. Waffen-Gebirgs-Division der SS « Skanderbeg » (Albanische Nr. 1) et les Croates de la 23. Waffen-Gebirgs-Division der SS « Kama » (kroatische Nr. 2) dont les crimes de guerre à rencontre des populations civiles et les rapines en tout genre seront innombrables. Ainsi, si certaines divisions de la Waffen-SS, à l’instar de la « Wiking », semblent ne pas avoir été coupables de crimes de guerre, d’autres, comme les « Handschar », « Skanderbeg » ou « Kama » ne seront que des ramassis de criminels et de bandits venus chercher une certaine impunité à l’abri des runes SS. Au fur et à mesure que se poursuit le conflit, se constituent aussi de petites unités de volontaires SS baptisées « légions » ou SS-Sturmbrigaden. Ces unités sont de la taille d’un régiment renforcé. Ces SS sont serbes, grecs, bulgares, roumains, Slovènes, ruthènes mais aussi italiens, français avec la SS-Sturmbrigade « Frankreich », ancêtre de la « Charlemagne », et belges flamands et wallons. Ils s’engagent pour l’aventure, pour éviter d’aller travailler pour l’industrie de guerre allemande et, bien sûr, pour certains, pour des raisons politiques et idéologiques, pour lutter contre le bolchevisme. Ainsi les Hongrois formeront-ils vers la fin de la guerre les 25. Waffen-Grenadier-Division der SS « Hunyadi » (ungarische Nr. 1) et 26. Waffen-Grenadier-Division der SS (ungarische Nr. 2) sans oublier l’unité de cavalerie 22. SS-Freiwilligen-Kavallerie-Division « Maria Theresia » tandis que les Belges de Léon Degrelle formeront la SS- Freiwilligen-Sturmbrigade « Wallonien » avant de devenir en octobre 1944 la 28.           SS-Freiwilligen-Grenadier-Division

« Wallonien ». Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ceux qui se surnommaient eux-mêmes les « Bourguignons » deviendront vite parmi les meilleurs combattants de la Waffen-SS !

 

(p.62) Entre dénazification et oubli

 

Autre cas emblématique, celui du SS-Standartenführer « Jochen » Peiper, condamné en 1946 pour sa responsabilité dans le massacre de Gl’s prisonniers à Baugnez en décembre 1944 – crime improprement connu  comme étant  le  « massacre  de Malmedy ». Là encore, du fait de l’insuffi­sance de certaines accusations, la peine de mort de Peiper est commuée en une simple peine de prison. C’est du moins la version officielle. En réalité, le procès de Peiper et de ses camarades, dont « Sepp » Dietrich, permet d’évoquer un autre  personnage célèbre en la personne du politicien améri­cain Joseph McCarthy qui, dans les années 60,   conduira   la   célèbre   « chasse   aux sorcières » afin de « nettoyer » le pays de ses communistes. Sénateur républicain du Wisconsin, un état à très fortes minorités allemandes ayant soutenu la candidature de McCarthy, celui-ci prit la défense des condamnés en faisant valoir que le tribunal n’avait pas été équitable à leur égard et que des irrégularités avaient entaché leurs inter­rogatoires. Dans le courant des années 50, les accusés seront ainsi relaxés, le dernier à être remis en liberté étant Peiper lui-même, en 1956. À bien des égards, l’intervention de McCarthy souligne le revirement améri­cain sur le sujet, Washington préférant épargner ses anciens ennemis, les Alle­mands, pour se préparer à les utiliser en cas de guerre avec ses anciens amis et alliés, les Soviétiques.  En tout état de cause, vivant dans le petit village de Traves, en France, près de Vesoul, l’ex-officier SS est de nouveau poursuivi par le gouvernement italien, en 1968, pour le massacre de Boves avant que l’instruction ne soit abandonnée faute de preuves solides. À l’été 1976, Peiper meurt carbonisé dans l’incendie criminel de sa demeure. A contrario, les exactions commises sur \’Ostfront par les Waffen-SS restent pour la plupart impunies tout comme, pour d’évidentes raisons, leurs équivalents soviétiques en Prusse orientale et en Allemagne en 1944-45. On peut ainsi citer le cas du SS-Obergruppenführer Erich von dem Bach-Zelewski, chef de la police en Biélorussie et passé à la Waffen SS en 1944. Si ce dernier fait bien l’objet de plusieurs condamnations successives pour son rôle dans l’élimination de SA et d’oppo­sants communistes avant-guerre, il ne sera jamais inquiété pour sa participation aux exécutions de masse perpétrées en Russie. Dans la France d’après-guerre, outre (p.63) des ressortissants Allemands, sont égale­ment jugés, pour trahison et « intelligence avec l’ennemi », certains des survivants de la 33. Waffen-Grenadier-Division der SS « Charlemagne ». C’est ainsi que le Waffen-Hauptsturmfùhrer der SS Henri Fenet, ayant reçu la Ritterkreuz à Berlin en avril 45, est condamné à 20 ans de / travaux forcés. Libéré en 1949, il finira sa vie à la tête d’une petite entreprise. Le cas de Pierre Cance, bras droit de Damant, l’un des principaux artisans de la Milice puis de la SS française est comparable. Condamné à mort en 1947, sa peine est commuée en prison à perpétuité avant qu’il ne soit libéré < dès 1950. À l’inverse, Joseph Darnant, lui-même, chef de la Milice de Vichy, est exécuté en octobre 1945 tout comme le SS-Hauptsturmfûhrer Jean Bassompierre en 1948 mais pour des faits antérieurs à son engagement dans la « Charlemagne. » D’aucuns échappent à toute condamna­tion, tel le SS-Sturmbannführer Jean de Vaugelas qui parvient à quitter l’Europe pour finir sa vie en Argentine. Enfin, d’autres reprennent après-guerre leur carrière de romancier ou de journaliste à l’exemple de Jean Lousteau-Chartez ou de Marc Augier, plus connu sous son nom de plume de « Saint Loup ». De ces anciens SS européens, peu renieront leur engage­ment de jeunesse. Quant à certains, ils le prolongeront par un militantisme plus ou moins discret à l’extrême droite.

 

LES « RECYCLÉS »

 

(…) Ainsi de nombreux anciens Waffen-SS, principalement allemands, trouvent-ils en Indochine et dans les bataillons de la Légion étrangère un nouveau champ d’application pour leurs compétences, ce avec la béné­diction tacite des autorités françaises qui manquent de combattants pour mener cette guerre. Selon certains témoignages, des ex-Grenadiere de la « Charlemagne » auraient même été employés par l’Armée française comme instructeurs pour leur connaissance des matériels allemands récupérés. Idem pour certains « Malgré-nous » Alsaciens et Mosellans, assimilés Allemands durant la guerre et de ce fait parfois versés par conscription dans les Waffen-SS après 1943. Combien des ces ex-Waffen-SS ont-ils été engagés à Dien Bien Phu ? Impossible à dire et délicat à assumer.

 

(…) Le « groupe Gehlen », qui cons­tituera le noyau dur des futurs services secrets d’Allemagne Fédérale, commence à récupérer et à employer pour le compte du CIC (Coûter Intelligence Corps) et de la CIA (créée en 1947) plusieurs milliers d’agents. Parmi ceux-ci se trouvent des centaines d’anciens Waffen-SS, à l’exemple du SS-Brigadeführer Christoph Diehm, ancien chef d’état-major de la brigade « Kaminski ». Certains d’entre eux, environ une centaine, sont recher­chés par la justice pour crimes de guerre ou pour leur participation directe à l’entre­prise génocidaire nazie. C’est le cas du SS-Sturmbannführer Karl Haas mis en cause par la justice italienne dans le massacre des Fosses Ardéatines, près de Rome, et qui dirige, à la fin des années 40, le réseau « Los Angeles » chargé par Washington d’espionner le Parti communiste italien. De la même façon sont constitués ou recons­titués plusieurs réseaux de renseignement au-delà du rideau de fer. C’est ainsi que, notamment dans les pays baltes, des maquis antisoviétiques tiennent quelques temps avec l’aide du « groupe Gehlen ». Le SS-Standartenführer Alfons Rebane, ancien cadre de la 20. Waffen-Grenadier-Division der SS (estnische Nr. /), y mène même une « petite guerre personnelle » contre les Soviétiques jusqu’à sa mort en 1947. Quant au KGB soviétique, il n’est évidemment pas en reste et cherche à retourner un maximum de ces agents au passé trouble, parfois avec un succès étonnant.

 

1945

in : Delta, 9, 2004, p.22

 

Vadertje Stalin duwde Polen west­waarts. Na de capitulatie van nazi­-Duitsland werden heel wat gebieden door de overwinnaars uit het Oosten gean­nexeerd. Zo kwamen bij de Sovjet-Unie:

1) Pools Galicië met als belangrijkste stad Lvov of Lemberg en ook nog Leopot, nu Lviv in de nu onafhankelijke staat Oekraï­ne (tot 1919 maakte dit gebied deel uit van het Oostenrijks-Hongaarse rijk).

2) Pools Wolhynië met als belangrijkste plaats Brest-Litovsk, nu een stad in Wit­Rusland of Belarus.

3) het noorden (onge­veer 1/3) van Oost-Pruisen met als hoofd­stad Koningsbergen, nu Kaliningrad, dat binnen de Russische Federatie ligt.

Polen daartegen « kreeg »:

1) het zuiden van Oost-Pruisen (2/3), d.i. Masurië, met als belangrijkste steden Marienburg, nu Mal­bork.

2) het territorium rondom Danzig (Gdansk).

3) Preussisch-Holland, ook nog Stedeken Holland genoemd, nu Paslek en Elbing (nu Elblag).

4) heel Pommeren met als belangrijkste steden Stettin, nu Szcze­cin, Kolberg (Kolobrzeg), Swinemünde (nu Swinoujscie). Alleen Voor-Pommeren bleef bij Duitsland en vormt daar nu één van de 16 « Länder ».

5) 9/10 van, Silezië met ais belangrijkste steden Breslau, nu Wroclaw, Oppeln, nu Opte. Slechts 1/10 bleef bij Duitsland, namelijk de streek rond Görlitz.

 

Vermelden wij nog dat tussen 1919 en 1939 Litouwen gewapenderhand Memel aanhechtte (nu Klaipeda).

 

De vraag is nu of deze gebiedsroof bij de vastlegging en versteviging van de Euro­pese Unie ook nog ooit, ter sprake komt ? Dat het hier ging om een “straf” voor het verslagen onmenselijke nazi-regime is geen argument, aangezien zijn tegenhan­ger in het Oosten zelfs nog slechter was. Gebiedsroof is gebiedsroof, door wie ook en om welke reden ook. Het bovenstaan­de toont overigens aan dat wij er verkeerd aan doen de oostelijke « Länder » van de Bondsrepubliek (de voormalige D.D.R.) te bestempelen ais « Oost-Duitsland ». De be­naming « Midden-Duitsland » is historisch juister. Wat overigens nog altijd bewezen wordt door een te Berlijn verschijnend dagblad dat nog steeds « Mitteldeutsch­ Land » heet.

 

1945-

Das Nachleben der Gestapo, in: FAZ, 27/11/2009

 

Weder Bonn noch Ost-Berlin verzichtete nach 1949 auf die Mitarbeit ehemaliger nationalsozialistischer Kriminalbeamter, die oft Karriere machten.

Von Michael Wildt

 

Etwa 25 000 Angehörige der Gesta­po, so schätzen die beiden Herausgeber des Bandes, haben 1945 das Ende des ,,Dritten Reiches » erlebt. Die alliierten Sieger liessen keinen Zweifel daran, dass sie die Straftaten verfolgen würden, und erklärten im Urteil des Nürnberger Gerichtshofes 1946 die Gestapo zu einer verbrecherischen Organisation, deren Angehörige in jedem Fall zu internieren und zu bestrafen seien. Aber der beginnende Kalte Krieg verwandelte die Entnazifizierung in eine lästige Pflicht, derer sich bald alle zu entledigen suchten. Die Urteile der Spruchgerichte über die einstigen Gestapo-Beamten fielen milde aus und stimmten im Strafmass zumeist mit der Internierungszeit überein, so dass diese Täter nach der Verhandlung als freie Männer den Gerichtssaal verlassen konnten.

 

Und auch die beiden Nachfolgestaaten des Deutschen Reiches sahen bald keinen Grund mehr, auf die Mitarbeit ehemaliger Nationalsozialisten zu verzichten. In der Bundesrepublik sorgte das sogenannte ,,131er »-Gesetz aus dem Jahr 1951 dafür, dass im öffentlichen Dienst auch belastete Nationalsozialis­ten eingestellt werden konnten. Zwar waren die Gestapo-Beamten formal von dieser Regelung ausgeschlossen. Aber es gab eine Hintertür, die sich ihnen öffnete, wenn sie nachweisen konnten, dass sie ,,von Amts wegen » zur Gestapo versetzt worden waren. Und da gerade in den Aufbaujahren 1933 bis 1936 etliche Angehörige der Gestapo von der Kriminalpolizei gekommen waren, fiel diesen der Nachweis nicht schwer. So konnte es passieren, dass der ehemalige Gestapo-Chef von Bialystok Lothar Heimbach, als er Anfang der sechziger Jahre vor Gericht gestellt werden sollte, von Kriminalkommissar Theodor Lipps verhaftet wurde, der einst ebenso wie Heimbach zur Einsatzgruppe D in der Sowjetunîon gehört hatte, die fur Zehntausende von Morden verantwortlich war.

 

Das Einschlüpfen in die Normalität der frühen Bundesrepublik

Solche Karrieren zeigt das Buch in Hül­le und Fülle. Da ist Horst Kopkow, der den kommunistischen Widerstand verfolgte und nach dem Krieg den briti-schen Geheimdienst mit vielen Informa-tionen versorgte, der dafür wiederum Kopkows Einschlüpfen in die Normali­tät der Bundesrepublik wohlwollend beförderte. Da ist Walther Rauff, ein zentraler Funktionär des Reichssicherheitshauptamtes, in dessen Abteilung die Gaswagen gebaut wurden und der später ein Einsatzkommando in Nordafrika fûhrte. Rauff gelang es, nach Chile zu flüchten, wo selbst die Allende-Regierung einem Auslieferungsbegehren der Bundesrepublik widersprach, weil Rauff der Armée gute Dienste tat. Dass er sich traute, dennoch nach Deutschland zu reisen, und unbehelligt Verwandte besuchen konnte, spricht zudem Bande über die Ernsthaftigkeit der Behörden, seiner habhaft zu werden. Der einstige Kommandeur der Sicherheitspolizei in Tou­louse wurde Leiter der Wasserschutzpolizei in Duisburg, sein Kollege in Paris, Kurt Illers, brachte es zum Senatspräsidenten am Landessozialgericht Niedersachsen – die Mitwirkung am Besatzungsterror in Frankreich beeinträchtigte keine dieser Karrieren in der Bundes­republik.

 

Nicht anders waren die Verhältnisse in der DDR, wo die SED schon früh beschlossen natte, dass ehemalige Natio­nalsozialisten durchaus Genossen wer­den durften. Nach den Schauprozessen von Waldheim 1950 nahm die Zahl der Verurteilung von NSVerbrechern wie in der Bundesrepublik rapide ab. Gab es 1951 noch 332 Urteile gegen NS-Täter in der DDR, wurden 1955 nur noch 23, 1959 gar nur sechs Urteile gefällt. Und selbstverständlich besafî das Ministerium fur Staatssicherheit keine Skrupel, einen verurteilten Massenmörder wie Heinrich Groth, einstmals Kommandeur der Sicherheitspolizei in Litauen, als  ,,IM » anzuwerben.

 

Die Leistungen der Staatsanwälte der Zentralen Stelle in Ludwigsburg

Nur von einer Ausnahme berichtet der Band: Dr. Hans Schumacher. Der ehema­lige Gestapo-Chef von Kiew, der persönlich an Massenexekutionen teilgenommen hatte, gab 1959, als  er in Wuppertal verhaftet und vernommen wurde, zu Protokoll, dass er groBes Unrecht getan und seit den Mordtaten 1942 keine innere Ruhe mehr gefunden habe. Die Möglichkeit, über das ,,131er »-Gesetz in den öf­fentlichen Dienst zu gelangen, hatte er bewusst ausgeschlagen, auf eine Zulassung als  Rechtsanwalt verzichtet und bis zu seiner Verhaftung als  kleiner Angestellter gearbeitet. Wegen gemeinschaftlich begangenen Mordes in mindestens 82 Fällen wurde Schumacher zu vier Jahren Zuchthaus verurteilt und starb 1992 in Kassel. Den Prozessen gegen Gestapo-Angehörige widmen sich mehrere Aufsätze und unterstreichen noch einmal die grofte Leistung der Staatsanwäl­te in der Zentralen Stelle der Landesjustizverwaltungen in Ludwigsburg, die seit ihrer Gründung 1958 ganz entscheidend an der Strafverfolgung von NS-Verbrechen Anteil hatte. Nur dieser Stelle ist es zu verdanken, dass Dutzende von NS-Tätern in den sechziger und siebziger Jahren verurteilt werden konnten.

 

Bei der Vielzahl dieser Fälle, die die Autoren dieses Bandes ausbreiten, kommt indessen die Frage, warum die Bundesrepublik trotz dieser personellen Belastung demokratisch werden konnte, zu kurz. Konnte es nicht sein, dass die Kraft der Institutionen, auch der Polizei, in einem Rechtsstaat so grofî ist, dass sogar der NS-belastete Chef eines Landeskriminalamtes, selbst wenn er sich persönlich nicht zu einem Demokraten gemausert haben mag, dennoch keinen Schaden mehr anrichten kann, weil er nun eine rechtlich kontrollierte Position ausübt? Es fehlt in diesem akribisch recherchierten und kenntnisreichen Band, der sogar einen Beitrag zum Nachleben der Gestapo im Spielfilm beinhaltet, ein Aufsatz über das Verhältnis von Polizei und Demokratie. Denn – anders als  der Titel des Bûches nahelegt – hat es nach 1945 zwar ehemalige Gestapo-Beamte noch zu Tausenden gegeben, aber eben nicht mehr die Gestapo.

 

Klaus-Michael Mallmann/Andrej Angrick (Herausgeber): Die Gestapo nach 1945. Karrieren, Konflikte, Konstruktionen. Wissenschaftliche Buch-gesellschaft, Darmstadt 2009.368 S., 49,90 €.

 

3 Autres analyses

Corse

« Une vision orientée de l’histoire », selon Mossa naziunale, Corse-Matin 09/07/2001

 

A propos du spectacle « a notte di memoria » à Bastia

 

Le spectacle historique en costumes de la relève des Gouverneurs baptisée « A notte du a memoria », à Bastia, inspire une analyse critique de Mossa naziunale.

« La Corse a été génoise, loin de nous l’idée de nier ce fait historique, mais c’est aussi contre Gênes que les Corses ont acquis leur indépendance. » (…)

« Les Génois n’ont jamais eu à cœur de développer l’île pour le bien de ses habitants, lesquels étaient soumis à une forte imposition. » (…)

« Avec une telle manifestation, c’est l’occupation génoise qui est glorifiée. » (…)

« Les organisateurs d’une telle manifestation ont le devoir, par souci d’équité historique d’y intégrer un épisode qui met en valeur la résistance des Corses. » (…)

« A notte di a memoria », est un titre qui « de manière insidieuse invite la mémoire à se réveiller pour se souvenir d’un événement qui transcende l’allégeance à un occupant. »

 

Egypte

Nefertiti : (en fait) Nofretete

 

France

François Reynaert, Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises, éd. Fayard, 2010-12-26

 

(p.481) Le point intéressant, donc, n’est pas de savoir depuis combien de temps on est l’ennemi éternel de telle nation, mais de comprendre comment on s’arrangeait pour que tout le monde le croie, une fois qu’on l’était devenu. Dans la littérature nationaliste française du XIXe siècle, l’Angleterre était parée de tous les vices, on en faisait un pays de boutiquiers perfides qui ne pensaient qu’à placer leur came­lote et empocher des livres sterling. En 1914, elle brille soudain par ses vertus, tandis que l’Allemagne souffre de pesants préjugés.

 

Grèce

Philippe Cattiez (psychiatre), Histoire de voile, LB 14/05/2004

 

Si la Grèce antique reste pour l’Occident le modèle de démocratie, nous sommes au-delà de l’idéal athénien. Cette démocratie n’appartenait qu’à l’élite, l’aristo ; les esclaves existaient et étaient exclus de la chose publique ; idem pour les femmes. Dans cette société masculine, la pédérastie était une pédagogie à la base de l’éducation : l’adulte devait initier le jeune garçon à la rhétorique, la géométrie, la philosophie, les Beaux-Arts, les arts martiaux, et aussi la sexualité (et pas uniquement à celle-ci). (…)

A l’époque des Romains, peu moraux, la seule faute était l’obsequium : l’esclavagisme (…).

 

Grèce intolérante

Philippe Toussaint, Histoires de la justice (1), in : PP ?, 30/08/1979

 

/chez les Grecs/

 

(p.56) (…) il y avait des « sycophantes », c’est-à-dire des hommes de paille qu’on payait pour déposer plainte contre un citoyen à qui on voulait du mal. La rétribution qu’on leur versait leur valait la perte éventuelle de leurs droits…

(p.57) Chaque petit paysan de l’Attique avait au moins un esclave, comme aujourd’hui n’importe quel ‘poor white’ d’Afrique du Sud a au moins une servante indigène. (…)

… le sort des malheureux travaillant dans les mines du Laurion ou dans les grandes propriétés, non plus sous les ordres directs d’un maître, mais d’un intendant, d’un kapo dont ils avaient évidemment bien plus à redouter la ‘justice’.

 

Hitler

« Hitler baute die erste Autobahn », P.M. 2/2003, p.64

 

Dieser Spruch ist ein Überbleibsel der Nazi-Propaganda.

Die erste Autobahn für jedermann entstand zwischen Köln und Bonn ; Konrad Adenauer, damals Oberbürgermeister, eröffnete sie 1929.

 

Indiens

Marc Ferro, éd., Le livre noir du colonialisme, éd. Robert Laffont, 2003

 

(p.54) Certes, plus récemment, les anthropologues ont revu à la baisse les estimations de Dobyns en combinant différentes techniques statistiques et ethnohistoriques, pour proposer des évaluations comprises entre 2,2 mil­lions (Douglas Ubelaker) et 7 millions d’Indiens en Amérique du Nord (dont au moins 5 millions sur le territoire correspondant aux États-Unis actuels, d’après les calculs de Russell Thornton) vers 15005. Les débats ne sont pas clos, mais une fourchette de 6 à 8 millions de personnes recueille aujourd’hui l’assentiment de la plupart des spécialistes

 

(p.55) Ce que l’on sait de manière plus certaine est que, vers 1800, la popu­lation indienne n’était plus que de 600 000 personnes (États-Unis actuels), et qu’elle diminua jusqu’à un nadir de 375 000 personnes vers 1900 (250 000 aux États-Unis), soit 5 à 10 % de la population d’origine, avant la lente convalescence démographique du xxe siècle. Même s’il est proba­blement impossible d’en mesurer précisément les effets, l’installation des Européens en Amérique du Nord a entraîné une catastrophe démographique d’une ampleur probablement unique dans l’histoire de l’humanité. Des groupes entiers, des sociétés et des cultures raffinées ont disparu à jamais de la surface de la terre.

(p.57) (…) Peut-on alors parler de génocide, voire d’« holocauste américain », à propos du massacre des Indiens, pour reprendre l’expression de plusieurs auteurs contemporains, en particulier Russell Thornton et David Stannard11 ? Il est clair que la colonisation de l’Amérique du Nord ne se fit pas avec l’objectif primordial d’exterminer des êtres humains : elle répondait plutôt à un ensemble de motivations économiques et politiques étrangères à la population indienne proprement dite. Mais il est également clair qu’une fois installés sur place les Européens durcirent progressivement leur attitude à l’égard des Indiens, jusqu’à les considérer, le plus souvent, comme une variété inférieure et nuisible d’êtres humains dont l’élimination était légi­time, voire souhaitable. Le terme de génocide, qui se réfère à la destruction systématique d’un groupe humain, est donc approprié. Il y eut bien un géno­cide en Amérique du Nord, qui, avec l’esclavage, constitua la facette la plus tragique du processus de colonisation.

 

11 Thornton, American Indian Holocaust and Survival, op.cit., et Stannard, American Holocaust, op.cit.

 

Irlande

Xavier Goossens, Irlande du Nord / De peu reluisantes complicités …, LB 18/04/2003

 

Les services de sécurité britanniques ont été officiellement accusés de complicité dans l’assassinat de dizaines de catholiques irlandais.

 

Japon

Marc Ferro, éd., Le livre noir du colonialisme, éd. Robert Laffont, 2003

 

/Colonisation japonaise/

 

(p.415) A Okinawa, le régime mis en place dans un territoire non japonophone (la langue des Ryûkyû s’apparente linguistiquement au japonais, mais elle en est différente) expérimente certaines futures pratiques coloniales japo­naises. Le système scolaire n’enseigne que la langue de Tokyo et les habi­tants d’Okinawa doivent attendre 1920 (une trentaine d’années après « Hondo ») pour pouvoir envoyer des députés à la Chambre basse. La crise du sucre en 1921 provoque un effondrement du niveau de vie des habitants dont beaucoup (plus de 50 000), poussés par la misère, s’expatrient à l’étranger (Hawaï surtout, mais aussi la Nouvelle-Calédonie française) ou dans les colonies, comme Taïwan.

 

(p.416) La colonisation dont sont victimes les populations des Ryûkyû est tra­giquement confirmée lors de la bataille d’Okinawa au printemps 1945. Dans un terrible lapsus, l’état-major japonais la qualifie de « dernière bataille avant celle qui se déroulera sur le sol de la mère patrie » : la « bataille du Japon » ne commencera qu’après la chute d’Okinawa, considérée comme une possession coloniale dont la perte était parfaitement envisageable. Après tout, la Chine avait bien renoncé à Taïwan en 1895 sans pour autant disparaître. De même, il est révélateur de constater que l’armée japonaise en pleine bataille d’Okinawa fut contrainte d’annoncer officiellement que ceux qui parleraient dans la langue locale de l’île seraient traités comme des espions et fusillés.

Occupé par les Américains à partir de juin 1945, l’archipel est restitué au Japon en 1972 en échange du maintien d’installations militaires géostra­tégiques dans l’île principale. Il n’est pas inutile de rappeler que le dépar­tement des Ryûkyû est le seul qui n’ait jamais été visité par l’empereur régnant. Sa présence n’est pas « souhaitée » par les insulaires….

 

pédophilie

ERASTES ET EROMENES

 

(…) L’amour des garçons a joué un trop grand rôle dans l’édu­cation grecque. On constate même que le mot « amour » est assez rarement employé dans les textes de l’époque classique quand il s’agit de l’attrait normal des sexes et qu’il est pres­que réservé à l’amour homosexuel. (…)

 

La tradition était si forte en Grèce à cet égard, et si persis­tante, qu’à l’époque romaine encore, Plutarque, bien qu’il fat lui-même un excellent époux et père de famille nombreuse, se croira obligé de consacrer plusieurs pages de son Dialogue sur l’amour à démontrer que les jeunes filles, après tout, aussi bien que les jeunes gens, sont capables d’inspirer un sentiment passionné 1

Dira-t-on que cet état de choses provient, à Athènes, du fait que les jeunes filles vivaient recluses et restaient illettrées ? Mais à Sparte, où elles se montraient en public demi-nues et où les garçons ne cultivaient guère leur intelligence, la pédéras­tie fleurissait (…) plus largement et plus ouvertement qu’à Athènes. (…)

 

(…) H.-I. Marrou a eu raison, je crois, d’insister sur l’ori­gine militaire de l’homosexualité en Grèce. Elle fut d’abord, selon lui, une forme de « camaraderie guerrière » qui survivra au moyen âge hellénique (…).

La cité grecque, même évoluée, telle l’Athènes du siècle de Périclès, reste un « club d’hommes », « un milieu masculin » interdit à l’autre sexe, où l’attachement passionné d’un homme et d’un adolescent de douze à dix-huit ans peut être générateur de nobles sentiments de courage et d’honneur. A Thèbes au IVe siècle eixte un exemple typique de bravoure collective soutenue et cimen­tée par des « amitiés particulières « . Et dès le VIe siècle, à Athènes, les célèbres « tyrannoatones » semblent avoir agi moins par amour de la liberté que parce qu’un fils du tyran Pisistrate avait osé jeter les yeux sur le bel Harmodios, aimé d’Aristogi­ton. Plutarque cite plusieurs cas analogues en d’autres cités, où le meurtre du tyran fut en réalité un acte inspiré par la jalousie ou la vengeance amoureuse, dont un crime passionnel, mais les « tyrannoatones » furent célébrés partout comme des libé­rateurs. (…)

 

A Athènes, il semble que les lois de Solon défendaient l’accès, non seulement à l’école mais aussi de la palestre, aux hommes qui n’y avaient pas de fonctions à remplir, mais les dialogues (…) nous montrent que cette interdiction n’était guère respectée : le bjsis, par exemple, nous fait pénétrer en compagnie de Socrate et de plusieurs ‘jeunes gens (…) dans la palestre de ‘…) où l’on vient admirer « le beau (…) « . C’est ainsi qu’un homme remarquait un adoles­cent et le poursuivait de ses .assiduités ; si l’adolescent répondait à ses avances et s’attachait à lui, il se créait entre eux une intimité qui, certes, pouvait rester pure, mais qui, bien souvent, sans doute, prenait un autre caractère. Sou­vent cette amitié était excitante à la fois pour l’aîné, qu’animait un ardent désir de protéger et de former ( . . . )

 

Admettons que l’amour de Socrate pour Alcibiade soit resté pur, (…).

 

in : La vie quotidienne en Grèce au siècle de Périclès, Ed. Hachette / 1959.

 

préjugés

L.T. Maes, Les préjugés et leur influence sur l ‘ enseignement de l’ histoire, in : Textes et Documents, n° 300 , 1974 , pp.14-15

 

Les préjugés nationalistes se marquent d’autant plus fortement qu’ils sont en conjonction avec des ambitions impérialistes. Pourquoi la France et la Grande-Bretagne font-elles encore partie des « Quatre Grands »? (…) C’est là un stéréotype anachronique qui est, cependant, un ferment actif de la politique réelle.

 

Les préjugés sont parfois les conséquences de points de vue  politiques ou idéologiques.  Les régimes politiques ont tendance à construire des mythes quant à leur « passé inaliénable » et de se livrer, de ce fait, à une falsification de l’histoire: ainsi, la version oficielle de la plupart des universités des Etats-Unis selon laquelle leur pays fut fondé par les anglo-saxons protestants de race blanche (White / Anglo-Saxon /Protestant -W.A.S.P), « Pilgrim fathers » (pères-pélerins) du Mayflower e 1621, bien qu’un rôle important ait été joué cent ans plus tôt par les Espagnols de Soto (San Augustine) et Colorado (Santa Fe) ainsi que par Walter Raleigh; l’histoire officielle soviétique prétend que la foondation de Novgorod n’a rien à voir avec les marchands hanséatiques et elle ne parle pas de Rurik ni des Scandinaves: la Russie fut fondée par les Russes! (…) De la même manière, l’enseignement de l’histoire en Allemagne nazie était au service des mythes de la race aryenne et de l’Empire allemand pour mille ans.  La lutte des historiens marxistes contre les historiens non marxistes est aussi à la naissance de nombreux préjugés.  C’est ainsi qu’en 1960, l’Allemand de l’Ouest Lutger put écrire une « Histoire socio-économique de l’Allemagne » sans citer Marx ni Engels, sans (…) spécifier le chômage de 1930. (…) de ce fait, il existe tant en Allemagne occidentale qu’en Allemagne de l’Est un certain nombre de thèmes et de schémas qui restent tabopus, afin de conserver homogène et sans tache le territoire propre à chacune d’elles.

 

racisme

Paul Vaute, Onze siècle de jeux pour Zeus, LB 21/08/2000

 

Apollon a aussi ses jeux (les Jeux pythiques), tout comme Neptune (les isthmiques) et Hercule (les Néméens).

Vaute: Le refus des étrangers, au moins dans les premiers siècles des Jeux, montre aussi qu’une différence est faite entre ce qui est grec et ce qui ne l’est pas.

Hannick Jean-Marie (Unité Histoire de l’Antiquité – UCL): Oui.

 

révisionnisme

Arendt Hannah, Sur l’antisémitisme, Calmann-Lévy, 1973

 

“(…) l’histoire elle-même est détruite, et sa compréhension – fondée sur le fait qu’elle est l’oeuvre des hommes et peut être comprise par eux – est menacée, si les faits ne sont plus regardés comme des composants du monde passé et présent, mais sont utilisés à tort comme modes de preuve de telle ou telle opinion.”

 

révisionnisme

Domenico Losurdo, Le révisionnisme en histoire, Problèmes et mythes, éd. Albin Michel,  2006

 

(p.182) La racisation de l’ennemi continue d’avoir des conséquences néfastes bien au-delà de la fin de la guerre. Récemment, l’historien canadien James Bacque a accusé Eisenhower d’avoir sciemment provoqué la mort, du fait des privations et de l’inanition, de centaines de milliers de prisonniers de guerre allemands, et a appelé pour cette raison à la destruction des statues érigées en l’honneur du général et homme d’État américain. Bien qu’il ait été engagé dans la défense de la mémoire de son héros et qu’il ait nié les accusations les plus graves, le directeur du Centre Eisenhower de l’Université de la Nouvelle-Orléans admet :

II y a eu de mauvais traitements diffus des prisonniers allemands au cours du printemps et de l’été 1945. Ils étaient frappés, privés d’eau, contraints de vivre à ciel ouvert, sans abri, avec des rations alimentaires inadéquates et des soins médicaux inadéquats. Leur courrier était retenu; dans certains cas, pour apaiser leur faim, les prisonniers préparaient un « bouillon » d’eau et d’herbe115.

Et pourtant, des gardiens des camps de concentration, qui se disent « témoins des atrocités », tracent un tableau encore plus tragique :

On ne manquait certainement pas d’eau: nous étions juste sur le Rhin, et nous ne donnions pas suffisamment d’eau aux prisonniers. Rendus fous par la soif, certains rampaient sous les barbelés et couraient vers le fleuve, à travers les champs dans la pleine lumière du jour, tandis que les gardes américains les mitraillaient.

 

(p.198) Les dénonciations occidentales des atrocités allemandes commen­cèrent avec la violation de la neutralité de la Belgique par les Allemands en août 1914. Les Allemands – disait-on – avaient violenté des femmes et même des enfants, empalé et crucifié des hommes, coupé des langues et des seins, crevé des yeux et brûlé des villages entiers. Ces nouvelles n’étaient pas seulement publiées dans les journaux à scandales, mais portaient aussi la signature d’écrivains fameux, de John Buchan à Arthur Conan Doyle et Arnold Toynbee, pour en citer seulement quelques-uns. Cette propagande continua tout au cours de 1914 et 1915, mais atteignit un nouveau sommet en avril 1916, quand la presse britannique commença à publier des (p.199) nouvelles et des commentaires sur l’utilisation par les Allemands des cadavres des soldats, pour la production de lubrifiants comme la glycérine et le savon. En outre, probablement au bénéfice de la Chine et des pays musulmans, on ajouta que l’on tirait des cadavres de la nourriture pour les porcs.

Il existait en effet en Allemagne de telles entreprises (Kadaververwertungsanstalten), mais il s’agissait de cadavres d’ani­maux et non d’êtres humains. Quoi qu’il en soit, ces nouvelles ne constituaient pas une exception; même des journaux bien connus comme le Financial Times publiaient des comptes rendus selon lesquels le Kaiser lui-même avait donné l’ordre de torturer des enfants de trois ans, et avait personnellement spécifié quelles tortures devaient être pratiquées. Le Daily Telegraph rapporta en mars 1916 que les Autrichiens et les Bulgares avaient tué 700 000 Serbes au moyen de gaz asphyxiants.

 

Au milieu des années vingt, intervenant à la Chambre des communes, le ministre des Affaires étrangères anglais Austen Chamberlain admit que « l’histoire de la fabrique de cadavres était privée de fondement3». Nous savons aujourd’hui que les témoi­gnages, les déclarations, les images, les photogrammes qui docu­mentaient les atrocités de l’Allemagne wilhelmienne, que tout cela était le résultat d’une savante manipulation, à laquelle fournit sa bonne contribution l’industrie cinématographique américaine naissante, qui tournait dans le New Jersey les scènes sur le comportement atroce et barbare des troupes de Guillaume en Belgique4! Deux particularités des « atrocités » attribuées aux Allemands donnent surtout à penser. Celle des femmes violées et des seins coupés nous reconduit aux représentations par lesquelles en Amérique l’idéologie officielle cherchait à stimuler à la fois «les anxiétés sexuelles et les anxiétés raciales » à l’égard des Indiens5. Il y a ensuite les hommes « crucifiés » : c’est comme si on attribuait maintenant aux Allemands la pratique de l’homicide rituel. Commence en outre à peser sur eux, dans le premier conflit (p.200) mondial déjà, un soupçon encore plus grave. Selon Bergson, en tant que « race élue », la « race germanique » ne se réserve qu’à elle-même «le droit absolu de vivre». Tout au plus « tolérées » en période de paix, « les autres races » sont destinées à subir l’« anéan­tissement » en temps de guerre. L’Allemagne « ne s’en prendra pas seulement aux combattants: elle massacrera les femmes, les enfants, les vieillards ; elle pillera, elle incendiera. L’idéal serait de détruire les villes, les villages, toute la population6». Comme on le voit, l’accusation de génocide est ici déduite a priori de l’idéologie attribuée à l’Allemagne wilhelmienne et même éternelle.

On comprend alors les arguments du révisionnisme historique, ou de ce que l’on appelle « négationnisme ». Pourquoi l’extermina­tion systématique des Juifs attribuée au IIP Reich ne serait-elle pas aussi un mythe? Ne nous trouvons-nous pas en présence d’une formulation nouvelle et plus précise de l’accusation d’homicide rituel adressée aux Allemands, celui-ci commettant l’Holocauste d’un peuple consacré par la Bible ? Voyons qui sont les principaux accusateurs de l’Allemagne. En tant que représentant de l’adminis­tration Wilson, Franklin Delano Roosevelt a activement participé à la campagne contre les « atrocités allemandes » au cours de la Première Guerre mondiale7. Quant à Staline, il tente même, au procès de Nuremberg, d’attribuer aux nazis l’exécution des officiers polonais perpétrée à Katyn par l’armée soviétique.

 

(p.201) Plus intéressante encore est la polémique qui s’est développée de nos jours à propos de la tragédie arménienne. Dans ce cas, ce sont les descendants des victimes des massacres turcs qui accusent au premier chef, en tant que négationnistes ou révisionnistes, des représentants éminents de la culture juive internationale, engagés à démontrer l’unicité et l’incommensurabilité de l’Holocauste. Mais alors, pourquoi devrait-il être licite de nier ou de redimensionner le génocide serbe et non celui des Juifs? D’autant plus que, si l’Allemagne peut être intéressée à se dégager de l’infamie d’Auschwitz, les puissances rivales ou potentiellement rivales pourraient être intéressées à lui attacher pour toujours l’étiquette de responsable d’un crime « unique » dans l’histoire. Vouloir fixer par la loi une vérité officielle, comme on tend à le faire dans certains pays, est contraire à toute éthique de la recherche scienti­fique, et de plus ne peut qu’engendrer le soupçon que les vain­queurs veulent cacher la vérité avec plus d’obstination qu’ils ne l’ont fait au lendemain de la Première Guerre mondiale.

 

Nous verrons que la recherche historique n’a pas besoin de suppositions étrangères pour établir la particularité tragique du sort réservé aux Juifs par le nazisme. C’est pour cette raison peut-être que le révisionnisme cherche à redimensionner l’horreur du IIIe Reich en ayant recours, du coup, à une autre stratégie. Au moins dans sa phase initiale, l’internement des Juifs dans les camps de concentration allemands serait comparable à celui des citoyens allemands dans les camps de concentration français et anglais, ou à celui des citoyens américains d’origine japonaise dans les camps de concentration américains. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agirait d’une mesure typique de la guerre totale, qui (p.202) n’hésite pas à frapper en bloc des groupes ethniques suspects d’un faible loyalisme patriotique, ou susceptibles de l’être. Et le fait que le soupçon nourri par Hitler n’était pas moins légitime que celui que nourrissait Roosevelt serait démontré par la « déclaration de guerre » contre l’Allemagne prononcée par Chaïm Weizmann au nom des organisations sionistes9.

 

(…) Sur les Américains d’origine japo­naise pèse aussi un préjugé racial de longue date, qui met en garde depuis des décennies la « race blanche » contre le «péril jaune», ou tonne contre cette «engeance d’esclaves asiatiques». (…)

(p.203) Le Los Angeles Times tonne de façon menaçante: «Une vipère est toujours une vipère, où que soient couvés ses œufs; ainsi un Japonais, né de parents japonais, grandit comme un Japonais, non comme un Américain. » II s’agit – confirme un général – d’une « race » bien plus dangereuse que les Italo-Américains ou les Germano-Américains, et on ne pourra donc être tranquille tant que celle-ci n’aura pas été « balayée de la surface de la terre13 ». Que serait-il advenu si le territoire des États-Unis avait été envahi ou réellement menacé de l’être ? Après la bataille de Midway, on ne peut plus parler de problèmes de sécu­rité militaire. Et, cependant, les Américains d’origine japonaise continuent à être privés de liberté: les derniers occupants ne peuvent quitter les camps de concentration qu’au milieu de 1946, presque un an après la fin du second conflit mondial. Le retour chez eux des citoyens latino-américains d’origine japonaise, déportés par les États-Unis depuis treize pays d’Amérique latine, est encore plus lent : (…) en 1948 (…)

 

(p.209) Suspectés d’être une cinquième colonne, les aliens allemands, contraints par Wilson de se faire enregistrer officiellement, deviennent la cible d’une campagne de terreur: leurs propriétés et leurs entreprises sont mises sous séquestre à l’initiative du ministre de la Justice ; cependant, avec d’autres traîtres possibles, ils sont marqués et rendus reconnaissables par un signe distinctif jaune ; et, comme nous le savons, ne manquent pas ceux qui invoquent la stérilisation d’une race génétiquement tarée31. Que ce soit pour les mesures d’expropriation aux dépens d’une minorité nationale (suspecte de faible loyauté patriotique et qu’il est donc bien de neutraliser, en attendant de la punir sur le plan économique), que ce soit pour le signe distinctif jaune, que ce soit enfin pour l’apparition de l’idée de la stérilisation forcée (et d’une liquidation pourtant « indolore ») de groupes ethniques entiers, la pensée évoque le IIIe Reich.

 

(p.210) (…) après avoir stimulé l’instauration de la Terreur, l’interminable conflit avec la coalition antifrançaise débouche, en 1799, sur le coup d’Etat d’un condottiere qui met à profit la gloire conquise sur les champs de bataille pour instaurer un despotisme de type nouveau.

 

(p.214) En 1921, après avoir subi la violence des brigades blanches (tolérées ou protégées par la police), les quartiers noirs de Tulsa (en Oklahoma) sont attaqués par voie terrestre et bombardés à la dynamite par un ou plusieurs avions. Un habitant, frappé par cette offensive guerrière en règle (destinée à prévenir la réaction redoutée des Noirs aux précédentes actions des brigades), a l’impression d’assister à l’invasion allemande de la France ou de la Belgique : « Le feu des armes reprend en succession rapide. On voit les gens s’enfuir de leurs maisons en flammes; certains avec des nouveau-nés dans les bras et suivis d’enfants terrorisés et (p.215) hurlants, d’autres, vieux et faibles, tous en fuite pour leur salut. » Les survivants sont ensuite déportés en masse par les forces de police et enfermés dans des «camps d’internement47».

 

Passons à l’Irlande: les patriotes ou les nationalistes croient pouvoir profiter de la guerre pour réaliser leur rêve d’indépen­dance. À Pâques 1916, le 22 avril, ils s’insurgent à Dublin. Bien que leur haine pour l’Angleterre soit séculaire et de même séculaire leur expérience de la dureté de la répression, ils n’ont pas encore bien compris la réalité de la guerre totale: « L’entraînement des insurgés s’était basé sur la conviction qu’ils auraient exclusivement à affronter le feu des armes légères; ils considéraient comme impossible de la part des Britanniques l’emploi de l’artillerie dans une cité historique.» La désillusion est tragique. Quelques jours après, le centre de la ville est en ruines. Contraints de se rendre, les insurgés, même gravement blessés, sont passés par les armes après des «procès» sommaires et secrets, sur la base de la loi martiale. Ceux qui sont suspects de sympathie pour le mouvement sont enfermés par milliers, sans procès, dans des camps de concentra­tion. Mais le pire est encore à venir. Avec la fin de la guerre, la lutte pour l’indépendance reprend de l’élan, et se développe toujours plus comme une lutte armée. La spirale de la terreur et de la contre-terreur devient infernale. Le pouvoir a recours aux repré­sailles : des bandes paramilitaires ouvrent le feu sans discrimination sur une foule d’amateurs de football; des quartiers entiers sont détruits. Une affiche prévient: « Si un policier est tué dans le voisi­nage, cinq partisans du Sinn Féin seront tués […]. Mettez fin aux attentats contre la police, sinon nous détruirons chaque maison qui pue le Sinn Féin. » C’est une pratique qui ne scandalise pas Lloyd George: « Dans la situation actuelle de l’Irlande, on ne peut pas punir un policier qui tue un homme dont il a quelque raison de penser qu’il est impliqué dans le meurtre de policiers. On ne peut affronter ce genre de choses que par des représailles. » Ou, pour le dire comme un autre représentant du gouvernement, «la terreur doit être affrontée par une terreur plus grande48 ». C’est exactement le point de vue de Lénine.

 

(p.216) Dans les mêmes années qui suivent immédiatement la fin du premier conflit mondial, entrent en action en Allemagne ce qu’on appelle les corps francs (Freikorps), qui ne se limitent pas à rétablir l’ordre dans la patrie, mais interviennent aussi dans les pays baltes pour défendre à la fois les ambitions impériales allemandes persis­tantes et la civilisation contre la « barbarie asiatique » et bolche­vique. Dans Riga qu’ils ont « libérée » (avec le consentement au moins initial du gouvernement social-démocrate et même de l’Entente), les corps francs procèdent, le 22 mai 1919, à des exécu­tions sommaires massives sans procès ; ils recourent toutefois à la fiction de la loi martiale qui prévoit la peine de mort pour des crimes comme le « manque de respect à la cour martiale, [les] sympathies pour le bolchevisme, être surpris dans les rues de Riga après 18 heures, avoir utilisé un téléphone privé49». Pour ce qui concerne l’Allemagne proprement dite, plus encore que l’action des corps francs (qui se reconnaîtront plus tard largement, et ce n’est pas un hasard, dans le nazisme, et constitueront l’ossature initiale des SS)50, privée de scrupules juridiques et humanitaires, il est bon d’avoir à l’esprit que, comme le reconnaît Nolte lui-même, bien qu’à ce moment il n’en soit pas encore arrivé au révi­sionnisme historique, « les mesures impitoyables de répression de Noske » et du gouvernement social-démocrate vont bien au-delà des « entreprises des spartakistes », de même qu’en Hongrie, la «terreur blanche» de Horthy se révèle bien plus radicale que la «terreur rouge» qui la précède51. C’est peut-être la prise de posi­tion du ministre de la Guerre Schiffer qui définit le mieux l’at­mosphère de ces années. Selon lui, devant un état d’exception aigu, le président fédéral « pourrait même faire répandre des gaz toxiques sur des villes entières si c’était, dans un cas concret, une mesure nécessaire au rétablissement de la sécurité et de l’ordre52 ».

Aux bandes paramilitaires anglaises, aux corps francs alle­mands, correspondent les brigades fascistes italiennes et le Ku (p.217) Klux Klan américain. Ce qui est particulièrement caractéristique dans le tableau que présente l’Occident des premières années de l’après-guerre, c’est moins la terreur exercée par l’appareil d’État, au sens étroit, que le recours à des corps armés de caractère «privé» ou «semi-privé». Le droit de représailles, et de représailles même sans discrimination, ne peut être proclamé officiellement par le gouvernement anglais, qui en tolère et en encourage pour­tant l’exercice, au moyen d’une sorte d’appareil d’Etat de réserve, non lié par les lois ordinaires.

 

(p.218) Mais les victimes privilégiées sont évidemment les Juifs. L’état-major russe met en garde contre leur travail d’espionnage. Certains sont pris en otage et menacés de mort au cas où la « communauté juive » ferait preuve de peu de loyauté à l’égard de l’armée tsariste; de prétendus «espions» sont passés par les armes56. Surtout, on décide la déportation des Juifs dans les zones menacées par l’avance allemande. Un député à la Douma décrit ainsi les modalités de l’opération lancée à Radom, à 23 heures :

La population est informée qu’elle doit abandonner la ville, avec la menace que quiconque sera surpris à l’aube sera pendu […]. À cause du manque de moyens de transport, les vieillards, les invalides et les paralytiques doivent être transportés à bras. La police et les gendarmes traitent les Juifs comme des criminels. Dans un cas, un train est entièrement scellé, et quand il est finalement réouvert, la majeure partie de ceux qui sont dedans sont moribonds.

 

Sur le demi-million de Juifs soumis à cette mesure de déporta­tion, il y a cent mille survivants57. À la suite des deux révolutions, l’agitation antisémite connaît ensuite une nette aggravation : main­tenant, la chasse aux Juifs, flétris comme bolcheviques, se combine avec la guerre civile et internationale contre le nouveau pouvoir soviétique. Tandis que ce dernier s’emploie à combattre l’agitation sanglante par des lois draconiennes, dans le camp opposé les forces britanniques procèdent, au cours de l’été 1918, à une diffusion massive de tracts antisémites lancés par avions58. Quelques mois (p.219) après se déroulent des pogroms aux proportions bouleversantes, où perdent la vie environ soixante mille Juifs, et qui, à ce qu’il semble, jouissent de l’appui secret des « Alliés, alors engagés dans leur inva­sion de la Russie59 ». C’est un chapitre de l’histoire qui semble être directement le prélude au génocide nazi60.

 

(p.220) En France, avant même le début de la Première Guerre mondiale, se répandent des mouvements au centre desquels se trouve « lidolâtrie des héros et la fascination (p.221) du sang » : (p.221) ils proclament la « guerre sainte » contre la République, invoquent la mort de Jaurès et expriment le projet de noyer le Parlement dans la Seine, flairent partout la présence de l’espionnage et de la trahison juifs, déchaînent des bandes contre les socialistes et les antimilitaristes. En même temps que l’Action française se distinguent surtout les Camelots du roi, dont le nom est « synonyme de terreur », une terreur qui est clairement tributaire de la préparation de la gigantesque bataille qui se dessine à l’ho­rizon. Après avoir balayé des rues toute résistance à l’instauration du service militaire de trois ans, ces brigadistes français se vantent d’avoir agi comme « gendarmes supplétifs ». Et le premier Nolte commente opportunément : « Ils dénigrent la loi en uniformes de la police auxiliaire : une singulière alliance en effet, lourde de consé­quences futures65!» Il est clair que les éléments constitutifs du fascisme sont déjà bien présents, et, d’après l’historien allemand non encore révisionniste, Mussolini déduit la première expérience de la terreur non de Lénine mais bien précisément des Camelots, même si dans un premier temps la nouvelle de leurs méfaits remplit «de dédain et de mépris un cœur marxiste66».

 

(p.224) À la tête de la croisade contre le complot judéo-bolchevique se (p.225) place initialement Henry Ford, le magnat de l’industrie automo­bile américaine; pour le combattre, il fonde une revue à grand tirage, le Dearborn Independent: les articles qui y sont publiés sont recueillis en novembre 1920 dans un volume, Le Juif interna­tional, qui devient aussitôt un point de référence de l’antisémi­tisme international, au point de pouvoir être considéré comme «sans doute le livre qui a le plus contribué à la célébrité des Protocoles dans le monde75 ». Des hiérarques nazis de premier plan, comme von Schirach et même Himmler, diront plus tard s’être inspirés de Ford ou être partis de lui. Le second, en particulier, raconte qu’il n’a compris « le danger du judaïsme » qu’à partir de la lecture du livre de Ford : « pour les nationaux-socialistes ce fut une révélation». Vient ensuite la lecture des Protocoles des Sages de Sion : « Ces deux livres nous indiquèrent la voie à parcourir pour libérer l’humanité affligée du plus grand ennemi de tous les temps, le Juif international76. » Et par ailleurs, selon Himmler, en même temps que les Protocoles, le livre de Ford aurait joué un rôle « décisif » (ausschlaggebend) non seulement sur sa propre forma­tion, mais sur celle de Hitler77. Il est certain que Le Juif interna­tional continue à être publié avec grand honneur sous le IIIe Reich, avec des préfaces qui soulignent le mérite historique décisif de l’auteur et industriel américain (pour avoir fait la lumière sur la «question juive») et mettent en évidence une sorte de ligne de continuité de Henry Ford à Adolf Hitler78 !

 

(p.227) Et pourtant à la fin du XIXe siècle, un député antisémite, qui reven­dique au Reichstag l’expulsion en masse des Juifs, sans se laisser lier par la compassion pour tel ou tel individu, fait justement explicitement référence à cette histoire : « Les Anglais ont bien fait d’exterminer la secte » des Thugs tout entière, « sans vouloir déter­miner si l’un ou l’autre de ses membres avait bien personnellement commis un assassinat »86.

 

(p.228) Mais revenons à la révolte des Philippines, en nous basant sur la reconstruction d’un autre historien américain: la guérilla est combattue non seulement par la destruction systématique des récoltes et du bétail, mais aussi par l’enfermement en masse de la population dans des camps de concentration où la faim et la maladie la réduisent. Un général (Jacob H. Smith) donne l’ordre explicite de transformer un village en une « lande désolée », en ayant recours entre autres à l’exécution de tous les hommes au-dessus de dix ans. Il ne s’agit pas d’un geste isolé : il faut faire son profit – confirme le secrétaire à la Guerre lui-même – « des méthodes que nous avons expérimentées avec succès dans l’Ouest au cours de nos campagnes contre les Indiens87».

Hitler se réclame constamment, en plus de la conquête anglaise de l’Inde, de l’expansion blanche et européenne dans le Far West. Au fondement du génocide, il y a un acte de déspécification natu­raliste, et celle-ci nous renvoie en premier lieu à l’histoire du colo­nialisme. La déspécification naturaliste peut pourtant se présenter sous des formes sensiblement différentes. Il convient de partir de l’observation d’un historien de l’esclavage, qui synthétise ainsi quelques siècles d’histoire occidentale : « Les Noirs ont été arrachés à l’Afrique pour qu’ils travaillent les terres volées aux Indiens en Amérique88. » Ou bien, comme le dit Hobson (le libéral anglais de gauche lu avec attention par Lénine), l’expansion coloniale procède du même pas que « l’extermination des races inférieures » qui « ne peuvent pas être exploitées avec profit par les colonisateurs blancs supérieurs89 ».

 

(p.232) A cause de leur cuylture, en vertu de la couleur même de leur peau, les Juifs ne sont pas l’altérité immédiatement reconnaissable comme telle. Mais moins elle est visible, plus cette altérité est insurmontable, et elle doit donc être mise en évidence (par le ghetto ou par des signes de reconnaissance) pour que soit contenu et contrôlé cet élément étranger et sournois qui se niche dans le cœur même de la civilisation et menace d’en atta­quer la solidarité et la santé. C’est pour cela que Luther parle de «plaie pestilentielle102». Et c’est de là que sort la métaphore du foetor judaicus. Comme l’observe un pasteur du XVIIIe siècle, Th. Woolston, « même si leurs corps ne puent pas et n’ont jamais pué », reste le fait que, « selon le proverbe et l’opinion commune du genre humain, le monde est infecté par les Juifs103 ». La catégorie de foetor judaicus est seulement une première formulation, à ce stade peu « scientifique », de l’accusation ultérieure tournée contre les Juifs de constituer le véhicule d’infection, le bacille qui, par sa présence même, menace le salut de l’organisme social.

 

On ne doit pas penser que ces développements n’ont lieu qu’en Allemagne. Après la révolution de 1905, se déchaînent dans tout l’Empire russe « les pogroms contre les Juifs, accompagnés d’agres­sions contre les étudiants et les intellectuels »; c’est une chasse à l’homme qui s’accentue en 1917137: avant l’Octobre bolchevique, en Russie également le Juif tend à être identifié à l’intellectuel subversif, qui trame dans l’ombre des révolutions ou des complots. La dénonciation de l’intellectuel abstrait s’exprime chez Tocqueville comme la diagnose du « virus d’une espèce nouvelle et inconnue » qui explique les bouleversements révolutionnaires incessants et insensés. Ce type d’explication se diffuse largement dans toute la culture occidentale après l’éclatement de la révolution * d’Octobre. À la Chambre des communes, Churchill déclare (5 novembre 1919) qu’en favorisant l’arrivée de Lénine en Russie les Allemands ont envoyé «une fiole contenant une culture de typhus ou de choléra dans les réserves d’eau d’une grande ville». La source de contagion s’incarne dans une personnalité que l’homme d’Etat anglais flétrit comme «le grand maître et le chef» d’une «secte formidable, la plus formidable du monde», engagée «dans la destruction de toute foi religieuse» pour y substituer l’idolâtrie des «soviets internationaux des Juifs russes et polonais». Ce n’est pas un hasard si le nouveau régime épargne « les intérêts et les lieux

 

(p.245) L’intellectuel abstrait, chargé de ressentiment et visionnaire, tend toujours davantage à prendre une physionomie ethnique et raciale. D’autant plus qu’à la veille du renversement des Romanov, c’est Lénine lui-même qui fait remarquer que, justement en tant que victimes privilégiées de la « haine du tsarisme », les Juifs fournissent « un fort pourcentage des dirigeants (par rapport au chiffre total de la population juive) du mouvement révolutionnaire», et surtout «ont le mérite de donner, par comparaison aux autres nationalités, un pourcentage plus élevé d’internationalistes140». Le processus d’identification du virus subversif au judaïsme culmine avec le nazisme. Les deux métaphores au moyen desquelles la tradition réac­tionnaire a constamment traité des révolutionnaires, les rejetant comme fous et barbares étrangers, ces deux métaphores ou catégories fusionnent à présent totalement: il devient finalement possible d’identifier la base ethnique et raciale de la maladie ou du délire révo­lutionnaire. L’homo ideologicus est un seul et même barbare étranger à l’Europe et à la civilisation authentique : le Juif. Pour Hitler, il n’y a pas de doute : l’agent pathogène externe qui agresse et dissout la société est l’« ergoteur talmudique », prêt à toutes les «jongleries verbales» et doué de la seule aptitude à «jeter la confusion dans les choses les plus simples, à tout embrouiller141 ». Pour soutenir cette thèse, on peut aussi maintenant invoquer la « science » :

Le dépistage du virus juif est une des plus grandes révolutions qui aient été accomplies dans le monde. Le combat que nous livrons est de même nature que le combat livré au siècle dernier par Pasteur et par Koch. Combien de maladies trouvent leur origine dans le virus juif! […] Nous ne retrouverons la santé qu’en éliminant le Juif. Tout a une cause, rien n’arrive par hasard142.

 

(p.250)

Lorsqu’on parle de génocides politiques, on fait rarement mention du massacre de centaines de milliers de communistes en Indonésie (1965). Au-delà de la logique de la guerre totale, qui tend à ébranler le principe de la responsabilité individuelle (on pense à la pratique des décimations au cours du premier conflit mondial), «la coutume locale de la faute collective», selon laquelle des groupes familiaux entiers sont considérés comme responsables et donc exter­minés, contribue ici à accroître terriblement le nombre des victimes151. Ce détail est justement du plus grand intérêt: le massacre tend à se rapprocher du génocide en raison du poids exercé par les rapports sociaux et par une idéologie tribale qui ne renvoie sûre­ment pas à la tradition révolutionnaire (dans le cas de l’Indonésie, les rapports sociaux sont tout à fait pré-modernes). Naturellement, un mouvement révolutionnaire peut bien se combiner, dans des circonstances déterminées, à des rapports sociaux et des résidus idéologiques pré-modernes (il est probable qu’un phénomène de ce genre a eu lieu dans le Cambodge de Pol Pot) ; reste pourtant la contradiction de fond entre les deux éléments.

 

(p.252) /Staline – Ukraine/

 

L’insurrection paysanne prend la forme d’un « mouvement nationaliste » et « séparatiste » et se mêle à un «banditisme à substrat politique161 ». Cela explique les modalités atroces que prend parfois la guérilla : « On enleva l’enfant d’un gros calibre du parti […], qui fut ensuite retrouvé mort un matin devant sa maison, avec les yeux arrachés et un écriteau sur la poitrine : ceci en échange de ce que vous nous faites souffrir »; le fils d’un autre représentant du pouvoir « a été enlevé, découpé en morceaux et les morceaux ont été jetés devant la porte de la maison du père162 ».

 

(p.253) Tout de suite après la révolution d’Octobre, Gorki, qui par ailleurs adopte à ce moment des positions critiques par rapport au bolchevisme, parle avec un certain mépris des paysans de son immense pays, comme de « nomades non russes ». On a même écrit que le grand écrivain « haïssait les paysans russes, qui incarnaient à ses yeux l’héritage biologique mongolo-asiatique, auquel il attribuait la responsabi­lité première dans la ruine [et le retard] de la Russie165 ». Plus d’une décennie plus tard, au moment où la répression contre les campagnes rebelles et « contre-révolutionnaires » atteint le sommet de la tragédie, la correspondance diplomatique déjà citée fait dire à « un Juif, gros calibre du GPU local » qu’en Ukraine « le « maté­riau ethnographique » a changé166 ».

 

(p.260) (…) Inde entre 1943 et 1944. À la suite de l’invasion japonaise de la Birmanie, le Bengale, déjà privé de l’autosuffisance alimentaire, se trouve désormais en première ligne. Développant leur denial policy, les autorités militaires britanniques cherchent à mettre les ressources alimentaires de la région à l’abri d’une éventuelle avancée ulté­rieure de l’ennemi – mais avec des conséquences catastrophiques pour la population civile. Les correspondances qu’envoient les journalistes américains sont contrôlées par la censure qui s’em­ploie à supprimer toute référence à la « mort par inanition », à la «famine», aux «cadavres» qui s’écroulent sur les routes. En février 1944, cependant, le Congrès américain autorise l’UNRRA (United Nations Relief and Rehabilitation Administration) à envoyer des aliments en Inde. Mais Churchill nie que la colonie anglaise souffre de la faim : ( …).

 

(p.261) Entre 1943 et 1944, le coût humain de la famine au Bengale se monte à 3 millions de morts.

 

(p.276) Sur les Noirs a aussi longtemps pesé une malédiction religieuse. Dans la Genèse (IX, 21-27), on lit que, après le déluge universel, à la suite d’une abondante libation, Noé s’endormit nu : et c’est ainsi que le surprend, amusé et irrévé­rencieux, son fils cadet Cham. Quand le patriarche se réveille et qu’il apprend la chose, il condamne les descendants de Cham à être les esclaves des descendants de Sern et de Japhet (les autres fils de Noé). Les Noirs ont été ensuite identifiés et marqués comme descendants de Cham, et leur esclavage a été ainsi théologique-ment consacré. Les esclavagistes ont fait référence à ce thème pendant des siècles, suivis, après la guerre de Sécession, des théori­ciens de la suprématie blanche. Si la persécution antijuive a été pendant longtemps justifiée par le recours à la théologie chrétienne et au thème du déicide, les persécutions aux dépens des Indiens et des Noirs ont été justifiées par le recours à des thèmes dérivés du texte sacré, tant juif que chrétien : les Indiens, et les peuples qui leur sont assimilés, ont été identifiés aux habitants de Canaan, et les Noirs aux descendants de Cham.

Au cours des siècles, l’antichamitisme a sévi à côté de l’antisé­mitisme, et chrétiens et juifs ont participé à cet antichamitisme. * Sur les Noirs, plus que sur tout autre peuple, se concentre l’hor­reur de l’histoire universelle: à la différence de tous les autres persécutés – fait remarquer Malcolm X -, ceux-ci ne peuvent cacher la couleur de leur peau et leur identité propre223. C’est en partant de là que l’on peut comprendre la fortune de l’islam chez (p.277) les militants noirs américains qui, toujours pour démontrer l’uni­cité de l’Holocauste noir, soulignent parfois la participation des Juifs eux-mêmes à la traite des Noirs venant d’Afrique. Si la thèse du caractère exemplaire du génocide arménien déclenche l’accusa­tion de révisionnisme, cette dernière argumentation entraîne directement l’accusation d’antisémitisme. Et pourtant, cela n’a pas de sens de flétrir de cette manière une affirmation qui corres­pond à la réalité historique : la tendance à exagérer le rôle des Juifs dans la traite des Noirs est certes dangereuse et inadmissible, mais il serait absurde et injuste de prétendre que seuls les Juifs sont étrangers à des circonstances et à une infamie qui a eu comme protagoniste le colonialisme dans son ensemble, et auxquelles n’a pas non plus été étranger l’islam, auquel les militants noirs, dans leur polémique avec l’Occident (et la tradition religieuse juive et chrétienne), font souvent référence224. Et, dans l’ensemble, nous sommes plus en présence d’une revendication du primat négatif de l’antichamitisme dans l’histoire mondiale que face à une expression d’antisémitisme.

 

Même les tragédies historiques sont un moment de construc­tion de l’identité. On comprend alors que le thème du génocide constitue un motif de confrontation, non seulement entre les grandes puissances, mais entre les victimes elles-mêmes. Et on assiste de nos jours à la tentative des Arméniens, des Tziganes, des Indiens, des Noirs et d’autres groupes ethniques et sociaux (on pense aux homosexuels) de sauver leur tragédie de l’oubli histo­rique, ou de l’imposer au centre de l’attention culturelle et poli­tique. En faisant cela, ils sont objectivement portés à remettre en discussion l’unicité de l’Holocauste juif. Mais, en dépit des appa­rences et des points de contact superficiels, tout cela n’a rien à voir avec le révisionnisme historique proprement dit.

 

révisionnisme

Alain Schnapp, Archéologue, archéologues et nazisme, p.289-315, in: Olender, maurice, éd., Pour Léon Poliakov, Le racisme, mythes et sciences, éd. Complexe, Bruxelles, 1981

 

(p.312) Chercher à comprendre une conjoncture politique et idéologique, c’est analyser le comportement de personnes et de groupes, ce n’est pas distribuer éloge ou blâme.  Les erreurs d’interprétation témoignent de la difficulté du genre. Elle ne doivent pas empêcher de s’interroger sur les promiscuités de la science et de la politique.

 

La responsabilité collective des universitaires allemands dans le processus de corruption que nous venons de décrire est immense.  On voit cependant qu’elle est en quelque sorte atténuée par l’absence de toute critique internationale.  Suivant des préjugés encore affirmés de nos jours, chaque groupe de scientifiques est isolé face au pouvoir d’état et la solidarité active de la communauté internationale est tenue pour une ingérence scandaleuse dans les affaires intérieures d’un état.  Les associations internationales en particulier se refusent à toute intervention qu’on peut qualifier de politique.  On voit les conséquences de ce refus de responsabilité morale: il postule de l’archéologie une neutralité factice que les appareils d’Etats tentent de récupérer.  Dans le lent déferlement de la violence contre les peuples, les archéologues nazis sont les héritiers, marqués du sceau de l’infamie, d’une archéologie au service de la raison d’état que les régimes coloniaux ont tristement utilisée.  Doit-on rappeler la longue cohorte des préhistoriens et des antiquisants français au service de l’Algérie française ou la participation de l’illustre paléontologue Leakey à la répression contre les Mau-Mau?  Face à la bonne conscience des disciplines, l’archéologie nazie est là pour porter témoignage des conséquences de la démission de l’esprit scientifique face à la morale et aux droits des peuples.

 

révisionnisme

Léo Moulin, Initiation politique ou propagande ?, LS 08/05/1991

 

Le projet du ministre de l’Enseignement, M. Yvan Ylieff concernant l’objet et la finalité des cours d’histoire, me fait trembler.

Non que je ne me réjouisse de voir l’histoire reprendre la place qui lui est due. La Commission créée a cet effet a raison d’écrire qu’en développant une attitude d’interrogation et de recherche, et donc d’esprit critique, l’enseignement de l’histoire constitue le contrepoison des propagandes et l’antidote des dérives politiques, tout en faisant de l’élève un être ouvert et réceptif aux changements de société. L’histoire incite à comprendre plutôt qu’à juger, à expliquer plutôt qu’à condamner.  C’est la suite qui ne laisse pas d’être inquiétante : mettre l’accent sur la compréhension du monde moderne (ce que l’on ne peut qu’approuver) sans sacrifier les précédents (comment faire autrement ?), mais, et c’est ici que le bât blesse : en limitant cette démarche à l’essentiel (qui décidera de ce qui est essentiel ?) et en insistant sur le canevas chronologique (que nos esprits nébuleux avaient sacrifié allégrement).

 

Ce qui suit est plus grave. Il est proposé d’accentuer la formation des citoyens (celle-ci étant nulle, il serait difficile de l’accentuer mais passons). Fort bien.

Le texte du communiqué écrit : On ne saurait trop souligner l’importance de l’acquisition d’outils conceptuels indispensables : classe sociale, droite et gauche politiques, démocratie, suffrage universel, pouvoirs législatif et exécutif. Dans la même perspective, il est indispensable que l’élève puisse connaître les institutions politiques, économiques et sociales, issues des dernières révisions constitutionnelles.

En fait, c’est là tout autre chose que de l’histoire : c’est, au mieux, un cours d’initiation aux problèmes politiques contemporains et au civisme (et je sais, pour longtemps avoir participé aux travaux de commissions qui étudiaient ces questions, combien leur enseignement pose de problèmes), au pis, pure propagande électorale.

 

D’autant que la note ajoute . Si l’exercice de la critique était généralement basé sur l’analyse, j’écrivais, en 1941, dans le syllabus d’histoire : m’adressant à Belges, j’espère qu’ils puiseront, leçons du passé, un juste orgueil de fait leurs ancêtres, une profonde pitié pour qu’ils ont souffert, un, grand amour pour ce qu’ils ont espéré et voulu faire. C’est a cela que doit se limiter un cours d’histoire. Comme une préparation a une compréhension du monde dans lequel les jeunes sont appelés à vivre. Ni plus ni moins.

.Mais, je le répète, l’idée de les initier aux « outils conceptuels indispensables » me fait trembler. Que dire de la « classe sociale », concept que les sociologues s’échinent à définir depuis des décennies ? Parlera-t-on de la « classe ouvrière » ou « des classes ouvrières », comme le voulait Proudhon ?

Que penseront les parents si de la masse d’informations fournies par les médias, le maître retire quelques pépites qui n’ont pas l’heur de leur plaire, ou qui les choquent dans leurs convictions politiques, religieuses ou, tout simplement culturelles ? C’est là un problème qui se pose tous les jours en ltalie: Veut-on s’engager dans la voie où patauge ce pays ?

 

Qu’on ne me fasse pas dire que je suis hostile à l’idée d’une initiation ques de la société moderne. Il temps que je le demande (et de même pour le civisme qui n’en fait pas partie intégrante).

Mais, précisément parce que j’ai étudié ce problème, j’en connais et les difficultés et les dangers.

Le projet de monsieur Ylieff me semble les ignorer et, en tout cas, les sous-estimer grandement.

 

Rome intolérante

Philippe Toussaint, Histoires de la justice (2), in : PP ?, 30/08/1979

 

(p.81-) Le droit des Romains

/La Loi des XII tables/

 (p.82) La manière dont était organisé le recouvrement des dettes est significative. Le créancier pouvait aller jusqu’à la mise à mort de son débiteur défaillant, et, s’il y avait plusieurs créanciers, rien n’était plus simple : ils se partageaient le corps du débiteur en parts égales ! Telle fut, d’abord, l’admirable cohérence du Droit romain, d’un Droit, qui, intelligemment, ne se confondait pas avec la morale.

(p.87) Essentiellement, elle affirmait le droit de propriété, la puissance paternelle et les droits qu’on avait sur ses débiteurs. C’était bien, en effet, l’essence d’une civilisation qu’on présenta si longtemps comme une merveille et qui fut en réalité un acharnement mis à détruire ce qui n’était pas romain, à réaliser l’ordre contenu dans le vers de Virgile : « Toi, Romain, occupe-toi de dominer souverainement les peuples ! »

(…)

 

(p.92) uelle valeur la justice pouvait-elle tirer du Droit romain ? En réalité, dans nos pays, malgré les efforts déployés, les préteurs en poste loin de Rome continuèrent à se soucier fort peu de légalité. Potentats locaux, sûrs comme de vivre que les justiciables barbares n’étaient que des animaux bizarres, ils faisaient respecter la pax romana par la brutalité la plus ordinaire. Cette brutalité ne se démentit jamais et on pourrait dire, en somme, que les Romains étaient des gens avvec loi mais sans foi. (…)

 

Les Romains, lorsqu’ils devinrent commerçants, et dès lors conquérants (ou est-ce l’inverse ?), avaient logiquement le sens de l’Etat, c’est-à-dire d’un Etat fort. L’un des moyens qu’ils utilisaient volontiers était de se persuader que l’adversaire, le barbare (à l’origine, le même mot ‘hostis’ désignait à la fois l’étranger et l’ennemi) était toujours soit une brute idiote, soit une perfide canaille. Il avait bien de la chance en somme d’être soumis à Rome ! La « perfidie carthaginoise », dont on rebattit les oreilles, fut surtout proverbiale au moment où les Carthaginois, dont la civilisation était probablement très supérieure, faillirent bien l’emporter !  (…)

 

Au moment même où le Droit romain parvenait à sa perfection, la justice devint d’une inhumanité absolue. Ceux qu’on condamnait à travailler dans les mines avaient souvent au préalable le pied gauche coupé : ils travaillaient sans doute moins bien, mais ils ne s’échappaient pas ! On recourait à une astuce moins cruelle pour parer aux évasions : les condamnés avaient la moitié de leur chevelure rasée, en sorte qu’on les repérait facilement.

 

socialisme

Hannah Arendt, Vies politiques, Gallimard, 1974

 

(p.44-45) Un jour de janvier 1919, “Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, les deux leaders du Spartakusbund, mouvement précurseur du parti communiste allemand, furent assassinés à Berlin – sous les yeux des socialistes au pouvoir, et sans doute avec leur complicité.”

 

Turquie

François Reynaert, Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises, éd. Fayard, 2010-12-26

 

(p.266) L’Empire ottoman de l’époque avait d’ailleurs résolu la question de façon radicale : pour éviter les pro­blèmes de famille, il était entendu qu’après chaque succession, un sultan avait le droit de faire solennellement étrangler ses cadets.

 

Turquie

Smyrna, 1922 / End of an era, in: The Economist 03/05/2008

 

Paradise Lost: Smyrna, l922: The Destruction of Islam’s City of Tolerance. By Giles Milton. Sceptre; 42 6pages; £20. To be published in America by Basic Books in July

 

WHEN Smyrna -modern Izmir- fell to the Turkish army in 1922, and much of it was destroyed by fire, the city’s role as a bastion of Greek and Christian culture, going back nearly 2,000 years, came to an abrupt end. Before that, the port had been home to a di­verse and cosmopolitan population; by the standards of the region, it was a beacon of tolerance and prosperity.

In addition to the Greeks, Armenians, Jews and Turks, there were also Americans and Britons and what Giles Milton calls the « Levantines », rich families of European descent, who spoke half a dozen languages and occupied vast vil­las. Their dynasties dominated the trade and industry of the région. Some (like the Whittalls) retained British nationality over generations of Ottoman life, and it is their English-language diaries, letters and documents that provide Mr Milton with his best material. Although this slant is unrepresentatively British and privileged —lots of parties and picnics — it allows the author to be fair towards the Greeks and the Turks, who still blame one another entirely for the disaster.

 

The city’s destruction-still known in Greece as « the catastrophe »-had its roots in the first world war and the effort by the great powers to grab pieces of the disintegrating Ottoman empire.

Britain, America and France backed Greece’s charismatic leader, Eleftherios Venizelos, in his pursuit of the megali idea (« great idea »), the dream of creating a greater Greece by occupying Smyrna and swathes of Anatolia. Having li-censed a war by proxy, the allies in varying degrees turned cool on it. They looked on passively as Mustafa Kemal dater Ataturk, republican Turkey’s founder) and his troops routed the Greeks from Anatolia and reoccupied Smyrna, bent on revenge for Greek atrocities in the city and further east.

 

The port was ransacked and looted for days. Women were raped and muti-lated, children were beheaded and more than 100,000 people killed. Meanwhile, 21 allied warships sat in the harbour. Hundreds of thousands of refugees were trapped on the city’s quayside, yet officers on the ships still dressed for dinner and ordered louder music to drown out the screams. « Paradise Lost » is a timely reminder of the appalling cost of expansionist political ambitions; it tells a fascinating story with clarity and insight.

 

4 Documents

De vrije vrouwen van de Etrusken

(DT, 14/10/2011)

1914-18 - Chinezen met ons in de Grote Oorlog

(De Morgen, 26/04/2010) 

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