Le judaïsme est aussi une religion extrémiste...

Albert Guigui, A la découverte du judaïsme en 101 mots, éd. Racine, 2010

 

(p.49) Le port de la kippa

 

Le port de la kippa ( calotte) n’a pas de signification hiérarchique. C’est une obligation religieuse qui incombe à tout Juif, quel que soit son niveau de religiosité. « II est interdit de marcher quatre coudées tête découverte» est-il écrit dans le choulhan ‘arouch (code de lois juives).

La kippa est un signe d’identification et d’appartenance. Elle marque l’adhésion à un cadre, à un mode de vie et de pensée. Ce morceau de tissu porté sur la tête a une grande force symbolique, à l’instar d’un drapeau qui incarne la force et la puissance d’un État libre et indépendant.

Mais, en dehors de ce signe d’appartenance, la kippa est une marque d’humilité. Elle témoigne, pour celui qui la porte, de l’existence d’une force supérieure omniprésente à laquelle il se soumet constamment et volontairement.

La kippa est aussi un rappel constant et une incitation perpé­tuelle à accomplir les commandements divins. Elle est, comme d’autres signes religieux tels que la circoncision ou le châle de prière, une invitation permanente à harmoniser le comportement humain avec la volonté divine.

La kippa fixe enfin des limites à l’individu. Nous vivons une période où les progrès scientifiques évoluent à pas de géant. La science fait des découvertes chaque jour, les unes plus auda­cieuses que les autres. Les médecins réussissent des prouesses remarquables.

La position du judaïsme face à ces progrès incessants est claire. Le judaïsme dit oui à la science. Il dit oui au progrès. Il rap­pelle cependant que « science sans conscience n’est que ruine de l’âme». Il affirme constamment que les découvertes scientifiques doivent être canalisées par une éthique et une morale pour éviter que cette science ne devienne l’ennemie de l’homme.

 

(p.85) Les animaux permis et interdits

 

31 Les mammifères1

1.  L’Éternel parla à Moïse et à Aaron, en leur disant2 :

2.  Parlez ainsi aux enfants d’Israël: voici les animaux que vous pouvez manger, parmi toutes les bêtes qui vivent sur la terre

3.  tout ce qui a le pied corné et divisé en deux ongles, parmi les animaux ruminants, vous pouvez le manger.

4.  Quant aux suivants, bien qu’ils ruminent ou qu’ils aient le pied corné, vous n’en mange­rez point le chameau, parce qu’il rumine mais n’a point le pied corné, il sera impur pour vous;

5.  la gerboise, parce qu’elle rumine, mais n’a point le pied corné, elle sera impure pour vous;

6.  le lièvre, parce qu’il rumine, mais n’a point le pied corné, il sera impur pour vous ;

7.  le porc, qui a bien le pied corné, qui a même le sabot fourchu, mais qui ne rumine point, il sera impur pour vous.

8.  Vous ne mangerez pas de leur chair, et vous ne toucherez pointa leur cadavre, ils sont impurs pour vous.

La Bible fournit des critères clairs afin de déterminer quels qua­drupèdes sont autorisés. « Toute bête qui a le pied ongle, l’ongle fendu en deux et qui fait partie des ruminants, vous en mange­rez. » La Bible énumère dix animaux autorisés : le bœuf, le mou­ton, la chèvre, le cerf, la gazelle, le daim, le bouc, l’antilope, le buffle et le chevreuil3. Mais les plus courants sont: l’agneau, le bœuf, la génisse, le mouton, la vache, le veau. Tous les animaux de ce genre sont herbivores.

1    Lv.,XI,3-9.

2   Lv.,XI, 1-8.

3   Dt. XIV, 4-5.

(p.86) Les animaux qui répondent seulement à l’une de ces exigences, tels que le porc qui a le sabot fendu mais ne rumine pas, ou le chameau, qui rumine mais n’a pas le pied fendu, sont interdits. Sont défendus également, à titre d’exemple : le lièvre, la gerboise, le cheval, etc.

(p.88) Les poissons1

Pour les animaux vivant dans l’eau, le Lévitique dispose :

9.  Voici ce que vous pouvez manger des divers animaux aqua­tiques: tout ce qui, dans les eaux, mers ou rivières, est pourvu de nageoires et d’écaillés, vous pouvez en manger.

10.  Mais tout ce qui n’est pas pourvu de nageoires et d’écaillés, dans les mers ou les rivières, soit ce qui pullule dans l’eau, soit les animaux qui l’habitent, ils sont immondes pour vous;

11.  immondes ils resteront pour vous; ne mangez point de leur chair, et ayez leurs cadavres en abomination.

12.  Tout ce qui, dans les eaux, n’a pas de nageoires et écailles, vous sera une abomination.

La Tara précise que les seuls poissons permis sont ceux qui ont à la fois des écailles et des nageoires. Exemples : aiglefin, anchois, bar, brochet, cabillaud, carpe, colin, dorade, goujon, hareng, limande, merlan, morue, perche, plie, rouget, saumon, sole, tanche, thon, truite, etc. Ainsi le crabe, le homard, les huîtres sont interdites. Le caviar des poissons interdits est lui aussi défendu2.

 

(p.89) Les oiseaux

On lit dans le Lévitique :

13.  Et voici ceux que vous repousserez parmi les oiseaux; on ne les mangera point, ils sont immondes : l’aigle, l’orfraie, la Valérie;

14.  le faucon et le vautour selon ses espèces;

15.  tous les corbeaux selon leurs espèces;

16.  l’autruche,   l’hirondelle,   la  mouette,   l’épervier selon ses espèces;

17.  le hibou, le cormoran, la hulotte;

18.  le porphyrion, le pélican, le percnoptère ;

19.  la cigogne, le héron selon ses espèces, le tétras et la chauve-souris.

Les oiseaux de basse-cour sont autorisés.

Contrairement aux quadrupèdes et aux poissons, le texte ne donne pas de caractéristiques générales pour les oiseaux purs,

 

(p.90) Les insectes, les vers et les œufs

Les insectes, les vers

Quant aux insectes et aux vers, le Lévitique ordonne au cha­pitre XI :

20.  Tout insecte ailé qui marche sur quatre pieds sera immonde pour vous.

21.  Toutefois, vous pourrez manger, parmi les insectes ailés marchant sur quatre pieds, celui

 

(p.91) Les œufs

Consommation

Nous ne pouvons consommer que les œufs de volailles cacher. Une goutte de sang dans un œuf rend tout l’œuf inutilisable. Cependant, dans le cas où il s’agit d’un œuf frais, si la gouttelette de sang est située dans le blanc, à un endroit autre que le germe, on l’enlève et on peut consommer l’œuf.

Si un œuf interdit est mélangé à d’autres œufs, le tout est inutilisable.

Aussi faut-il ouvrir chaque œuf à part et ne le mélanger à d’autres qu’après l’avoir examiné. Il est permis de consommer les œufs durs et les œufs à la coque tels quels, étant donné qu’il n’est pas possible de les examiner au préalable.

 

(p.139) La circoncision dans la tradition juive1

Et Dieu dit encore à Abraham : « Et toi tu seras fidèle à mon alliance, toi et ta postérité, tout le cours des générations. Voici l’alliance que vous garderez entre moi et vous et ta descendance à venir : fais circoncire tout mâle2.» Ainsi, la Tara ordonne à tout Juif de circoncire son fils. Cette circoncision, ou « Brith-Mila», doit se faire le huitième jour3.

La circoncision est un acte religieux. Elle est – pourrait-on dire -l’acte le plus caractéristique du judaïsme parce qu’elle marque l’individu dans sa chair et lui rappelle sans cesse son apparte­nance au peuple juif. Elle est le signe de l’Alliance au point de faire dire au roi David : « Même au bain, quoique n’ayant sur moi aucun objet de culte, quoique empêché de penser à ta Sainte Loi, je garde sur moi la marque de l’Alliance4. » La cérémonie peut avoir lieu le Chabbat, les jours de fêtes ou même à Yom kippour. Cependant, quand la circoncision présente un certain danger, il est interdit de faire courir à l’enfant un risque quelconque et l’on attend aussi longtemps qu’il le faut.

La circoncision est un acte religieux. Rabbi dit : « Si grand est le commandement de la circoncision, qu’il équivaut à tous les com­mandements de la Tara5. »

La circoncision est un acte chirurgical qui consiste à couper l’excroissance (prépuce) qui recouvre l’extrémité de la verge et à

1    Cet article est paru dans La Libre Belgique du 8 janvier 1991.

2   Gn 17, 9-10.

3   Gn 17,13.

4   Traité Menahoth 43b ; Abravanel, Commentaire sur Gn. 17, 9. À l’époque des Mac-cabées, certains juifs, apparemment honteux, essayaient de cacherle fait qu’ils étaient cir­concis.

5   Traité Nedarim 3 Ib.

 

(p.141) retrousser ensuite la peau, en dessous de la coupure, afin de lais­ser à découvert l’extrémité de ce membre. Le pansement auquel on procède à la fin de l’opération n’est soumis à aucun règlement spécial mais les circonciseurs mettent à profit une expérience séculaire ainsi que les derniers progrès de la médecine pour réa­liser la circoncision avec les meilleures garanties d’hygiène. La médecine admet presque unanimement que le prépuce ne joue aucun rôle physiologique utile. Par contre, il peut causer des infections qui exigent d’en faire l’ablation à ceux qui les ont contractées. Bien que l’on attribue à la circoncision des proprié­tés sanitaires réelles, celles-ci n’occupent, dans la conscience juive, qu’une place très secondaire et le précepte divin dépasse la portée hygiénique de l’acte.

 

(p.151) Le mariage dans la tradition juive1

II est incontestable que, dans l’ordre de la création, l’espèce humaine occupe une place privilégiée. Toutes les autres créatures lui sont subordonnées quelle que soit leur importance. C’est en vue du perfectionnement de l’homme qu’a été organisé l’univers dans tous ses détails. Cependant, Dieu lui-même reconnut que son chef-d’œuvre ne serait parfait que grâce à la création de la femme, grâce à son union à l’épouse, chair de sa chair et âme de son âme. L’homme n’est considéré comme pleinement complet que lorsqu’il est uni à la femme comme il est dit : « II les créa mâle et femelle, les bénit et les appela du nom d’homme2. » C’est alors que l’homme abandonne son père et sa mère et s’unit à sa femme pour devenir ensemble une seule chair. Se marier et élever une famille est une prescription divine, la première que Dieu ait adres­sée à l’homme. C’est par le mariage que l’homme devient à l’image de Dieu, s’associant avec lui dans la création et la perpétuation de la race humaine sur terre. C’est pour cette raison que l’équivalent en hébreu du mot mariage est kiddouchin, qui signifie : « sancti­fication par excellence». Le mariage n’est donc pas considéré comme une concession, mais comme un idéal.

 

Croissez et multipliez!

L’Éternel dit en effet : « Croissez et multipliez-vous ! Remplissez la terre et soumettez-la3. » Isaïe, reprend la même idée : « La terre a été créée non pour demeurer déserte mais pour être habitée4.» Un des buts fondamentaux du mariage est donc de peupler le monde et continuer l’œuvre commencée par Dieu. Voilà pour­quoi le choulhan ‘arouch5 commence par ces mots le chapitre traitant du mariage : « Chaque Juif est obligé de se marier. L’homme qui refuse de se marier minimise l’image de Dieu et agit comme s’il voulait voir la présence divine s’éloigner d’Israël. » II importe à tel point de prendre femme que chacun est autorisé à vendre un

1    Ce texte a été publié dans les Actes du XlIIe Colloque international de Sexologie tenu au Centre international Cardinal Suenens (Louvain), les 21,22 et 23 mai 1971.

2   Gn. 5, 2.

3   Gn. 1, 28.

4   Is. 45,18.

5   Code fondamental de la loi juive, ayant pour auteur Rabbi Yossef Caro et dont la première édition parut en 1567. Il comprend quatre parties.

 

(p.157) La houppa (le dais nuptial)

Le dais représente symboliquement la chambre nuptiale. Il sert également de modèle au foyer qui sera construit. Il montre que, si le bonheur doit y régner, il ne sera pas déterminé par des facteurs matériels, mais par l’esprit de joie et d’harmonie. Nombre de communautés orthodoxes érigent la houppa en plein air. Ce fai­sant, elles se fondent sur des prescriptions du code des lois juives qui stipule : « Le dais doit être fait sous le ciel ouvert comme sym­bole de bonne chance. »

Le mariage, dans la tradition juive, a un double objectif: la sanc­tification de deux êtres pour les buts les plus sacrés de la vie, la procréation et l’éducation des enfants et, d’autre part, la commu­nauté, où la femme devient le complément physique, moral et social que la nature de l’homme réclame. Voilà pourquoi les pro­phètes, pour peindre l’amour divin vis-à-vis d’Israël, ne trouvèrent pas de plus pure et de plus radieuse image que l’amour conjugal.

 

(p.161) Le get1

La religion juive blâme le divorce, mais ne l’interdit pas. Toutefois à l’heure actuelle, le mari est seul à pouvoir le réclamer. La femme ne peut le demander directement à un tribunal rabbinique. Celui-ci ne peut qu’engager le mari à l’accorder.

La cérémonie se fait devant un tribunal rabbinique, c’est-à-dire devant un rabbin assisté de deux collègues, d’un secrétaire et de deux témoins. Elle consiste dans la rédaction rituelle d’un acte en langue araméenne (comme pour le mariage), conformément à un formulaire et à une orthographe méticuleusement proto­colaires, par lequel le mari reconnaît à sa femme en bonne et due forme sa pleine liberté et notamment, celle de se remarier à son gré.

 

(p.163) 65 La ‘agouna

L’un des drames les plus douloureux qui frappe aujourd’hui la communauté juive à travers le monde est celui vécu par les ‘agou-noth2.

Une ‘agouna est une femme qui a été mariée et qui se trouve dans l’impossibilité de prouver son état actuel de veuve ou, en cas de séparation de fait ou de divorce civil d’avec son mari, celui de divorcée. Aussi, tant que sa situation n’a pas été éclaircie, elle ne peut contracter un nouveau mariage valable religieusement. Les enfants qui naîtraient d’une telle union étant considérés comme des mamzérim3, c’est-à-dire des bâtards au sens de la loi juive. Pour ces enfants les conséquences sont dramatiques. Ils ne pour­ront se remarier qu’avec un autre mamzer. La ‘agouna demeure

1    ( Prêtre en hébreu. ) Tout juif descendant en droite ligne paternelle A’Aaron, le pre­mier grand prêtre. Le patronyme de Cohen indique que celui qui le porte descend d’une famille sacerdotale.

2   Cf. Shlomo Riskin, Woman and Jewish Divorce in Hoboken, NJ Ktav Publishing House, 1989 ; M. Chigier, Husband and Life in Israëli Law, Jérusalem, Harry Fishel Institute Publications, 1985.

3   Le sens usuel du mot bâtard signifie un enfant d’une femme et d’un homme non mariés, un enfant illégitime. Pour le judaïsme, le mamzer est l’enfant d’une femme mariée, issu non pas de son époux mais d’un autre homme.

 

(p.169) L’avortement

Que dit la tradition juive de l’avortement dans des cas extrêmes, tel celui du viol?

Pratiquer l’avortement, c’est priver un être humain de sa vie. C’est aussi un grand échec. Mais il y a des circonstances exception­nelles qui exigent une solution exceptionnelle. C’est ainsi que le grand théologien, philosophe et médecin Maïmonide considère que le fœtus est un agresseur quand il met en danger la vie de la mère, tant sur le plan physique que psychique. Il s’agit certes d’un agresseur innocent mais qui n’en est pas moins agresseur. On peut donc invoquer le cas de légitime défense. Des principes qui peuvent intervenir dans les problèmes concernant l’avortement thérapeutique.

 

(p.265-266) Ne tue pas.

C’est Dieu qui donne la vie et c’est lui seul qui peut la reprendre. C’est un commandement qui ne souffre d’aucune exception. Aussi, toutes les mesures doivent être prises pour sauver la vie humaine. Le suicide est interdit. L’euthanasie active est interdite. En revanche, il n’est pas recommandé non plus de maintenir en vie par des moyens sophistiqués une personne mourante.

La légitime défense est cependant admise par le judaïsme.

Tu ne tueras pas, explique Ibn Ezra, ni par la main armée, ni par la langue en accusant le prochain faussement en justice, ni par les calomnies ou des mauvais conseils dont on sait qu’ils conduiront à la mort, ni enfin en lui cachant un secret qui serait susceptible de le sauver d’une mort certaine.

 

Jacques Heers, Les négriers en terres d’islam, La première traite des Noirs, 7e-16e siècle, éd. Perrin, 2003

 

Les négriers en terres d’islam

La première traite des Noirs vif-xvie siècle

L’histoire de l’esclavage, généralement limitée à la Rome antique, à la période coloniale et à la traite des Anglais et des Français aux xvie et xviie siècles, laisse de nombreux pans aveugles, en raison de la rareté des sources et de la culpabilité rétrospective des nations colonisatrices. Ainsi, du viie siècle à la fin du xixe, s’est mis en place un système de traite musulmane des Noirs d’Afrique, par caravanes à travers le Sahara et par mer à partir des comptoirs d’Afrique orientale.

En tenant compte des travaux les plus récents, notam­ment ceux des historiens ivoiriens et nigérians, Jacques Heers retrace le mécanisme de cette traite, ses itinéraires, ses enjeux commerciaux et le rôle des esclaves dans les sociétés arabes – à la Cour, dans l’armée, dans les mines ou aux champs. Il évoque les tensions épisodiques, mais aussi la grande révolte du ixe siècle. Se dessinent de la sorte une cartographie de l’esclavage africain ainsi qu’une étude sociale menée sur une période de plus de mille ans, encore trop méconnue.

Agrégé d’histoire, Jacques Heers a été professeur à la Sorbonne et directeur du département d’études médiévales de Paris-Sorbonne. Parmi ses principaux ouvrages, chez Perrin : Le Moyen Age, une imposture, Gilles de Rais, La Première Croisade, Jacques Cœur, Louis XI, Les Barbaresques.

 

(p.7) L’esclavage se pratiquait, au sud du Sahara, entre les Noirs, d’un royaume ou d’une tribu à l’autre, depuis des temps certainement très reculés et a perduré pendant tout au long de la traite atlantique sans que celle-ci y soit pour quoi que ce soit. De plus, la traite musulmane, vers le Magh­reb et les Etats du Proche-Orient, active dès les origines de l’Islam, au lendemain même des grandes conquêtes de l’Egypte puis du Maghreb, s’est exercée, sur une bien plus vaste échelle, par mer sur la face orientale du continent et, par terre, à travers le désert, par de multiples routes qui convergeaient vers les marchés et les ports de la Méditerranée. (p.8) Non, comme celle des chrétiens, durant deux cents ans, mais pendant plus de mille deux cents ans. Elle n’a reculé que devant les entreprises diplomatiques et mili­taires des puissances coloniales, l’Angleterre en tout pre­mier lieu, et ne s’est pas pour autant éteinte, seulement peu à peu ralentie pour ne disparaître qu’au xxe siècle. Ce livre ne prétend pas évoquer tous les aspects des traites vers les pays d’islam, des origines à aujourd’hui, mais seulement la longue période où, du vif au xve siècle, ils furent les seuls à pratiquer ce commerce des Noirs.

(…)

De l’esclavage chez les musulmans, livres et manuels parlent très peu.

Pourtant la présence de nombreux, de très nombreux esclaves dans les pays d’islam, de l’Orient au Maroc, jusqu’à ce dernier siècle ne fait aucun doute. Tous les his­toriens musulmans, tout au long des siècles, s’accordent sur ce point et en soulignent l’importance.

 

(p.9) Que dit le Coran ? Que disent les docteurs et les sages ? Que faut-il croire? Rien de plus malaisé : pour l’islam, comme pour tant d’autres religions et doctrines, l’exégète peut trouver tout et le contraire de tout, selon qu’il s’en tient à la première lettre ou qu’il cherche à interpréter, à préciser les circonstances de telle ou telle rédaction.

Plusieurs auteurs n’hésitaient pas à affirmer que, pour l’islam, « l’on trouverait des justifications de l’esclavage aussi solides dans la religion que dans les coutumes4 ». D’autres, bien plus nombreux, sont allés jusqu’à prétendre qu’« aucune confession ne s’est penchée avec tant de solli­citude que l’islam sur le sort de l’esclavage en général et du nègre en particulier ». Et de conclure : « Si tous les maîtres d’esclaves de la péninsule Arabique et d’ailleurs avaient tenu à imiter l’exemple donné, en 632, par Maho­met, l’esclavage eût pratiquement disparu de notre monde, près de douze siècles avant son abolition européenne5. »

Aucun doute pourtant : Mahomet et quelques-uns de ses • compagnons, certains fils de captifs eux-mêmes, possé­daient un certain nombre d’esclaves, faits prisonniers lors des toutes premières expéditions armées, et il semble bien que le Coran tolérait l’esclavage, imposant quelques res­trictions, certes non du tout négligeables, aux droits du maître.

 

(p.11) La guerre pourvoyeuse de captifs (viie-xe siècle)

 

Les conquêtes musulmanes, du viie au xe siècle, si bru­tales et d’une telle ampleur que le monde méditerranéen n’avait jamais rien connu de tel, provoquèrent un nombre considérable de captures et, aussitôt, un très important tra­fic d’hommes et de femmes, conduits en troupes sur les marchés des grandes cités. L’esclavage devint alors un phénomène de masse affectant tous les rouages sociaux, hors de proportion avec ce qu’il avait été dans l’Empire byzantin.

 

(p.13) Aucune frontière, entre chrétiens et musulmans, ne fut, au cours des siècles de ce que nous appelons le Moyen Age et plus tard encore, ni bien définie, ni bien gardée. Sur la Frontera qui, en Castille, dans le Levant et en Andalousie, marquait le contact entre les pays reconquis par les chré­tiens et ceux demeurés aux mains des musulmans, les habi­tants souffraient, des deux côtés, angoisses et peines, leurs terres dévastées et leurs maisons brûlées, les femmes, les hommes et les enfants enlevés de force. Parler, comme l’ont fait et le font encore quelques historiens d’occasion, d’une civilisation et d’une société « des trois cultures », musulmane, juive et chrétienne, est signe d’ignorance ou de supercherie, les deux ensemble généralement. Les mar­chandages pour les rachats ou les échanges d’esclaves puis les accords conclus par les souverains ou les gouverneurs des cités et des provinces montrent que plus de trois cents captifs chrétiens furent libérés en 1410, cent en 1417 et cinq cent cinquante en 1439. Henri IV, roi de Castille, (p.14) obtint, en 1456, que mille prisonniers lui soient aussitôt remis, et ensuite trois cent trente-trois chacune des trois années à venir. Le voyageur allemand Jérôme Munzer éva­lue à deux mille le nombre de captifs chrétiens enfermés dans les geôles de Grenade au moment de la reconquête de la ville par les Rois Catholiques, en 1492. Deux à trois mille captifs avaient été expédiés par mer vers le bagne de Tétouan, en Afrique9.

 

(p.16) Les premiers grands marchés d’esclaves (ixe-xe siècle)

 

esclaves saxons, marchands juifs et chrétiens

Pendant longtemps, les géographes, les voyageurs et les marchands musulmans tenaient pour « Slaves » tous les hommes qui vivaient hors de leurs Etats, de l’Espagne aux steppes de la Russie et de l’Asie centrale et, plus loin encore, sur les terres inconnues, contrées réputées rebelles de Gog et Magog.

Les conquérants musulmans n’ont tenté que très rare­ment des raids aussi loin de leurs bases et les esclaves slaves ne pouvaient être qu’objets de traite. Ceux de Bohême étaient régulièrement conduits à Prague, centre de castration pour les hommes, puis à Ratisbonne. Ceux des pays plus au nord, avec les Saxons faits prisonniers lors des campagnes de Charlemagne des années 780, turent expé­diés vers les gros bourgs fortifiés de la route germanique pour finir sur le marché de Verdun. De là, on les menait à Lyon, autre grand carrefour pour ce négoce des cap­tifs, puis à Arles et Narbonne et, enfin, vers les ports d’Espagne, du Maghreb ou, directement, de l’Orient. Ce n’était ni affaires de peu ni d’un court moment : au xe siècle encore, Liutprand, évêque de Crémone (920-972), ne ces­sait de dénoncer et de condamner les profits énormes, pro­prement scandaleux, que réalisaient les marchands de Verdun. A la même époque, les recensements des Slaves amenés sur le marché musulman de Cordoue donnent un chiffre de plus de dix mille en l’espace de cinquante années, de 912 à 961. Ils ont très vite formé, comme les (p.17) Turcs en Orient, peuple non encore islamisé, une part importante des troupes et du corps des officiers au service du calife. Au temps de la décadence de ce califat de Cordoue et de l’éparpillement des pouvoirs, dans les années 1000, plusieurs d’entre eux, notamment dans le Levant ibérique, prirent la tête d’un petit royaume, alors complètement indépendant 11.

 

Les marchands des pays d’islam, eux non plus, ne se ris­quaient pas volontiers hors du monde méditerranéen et répugnaient à se rendre en Gaule où ils ne rencontraient que des populations hostiles. On ne les y voyait pas fré­quenter les marchés d’esclaves alors que les Juifs étaient, eux, communément montrés comme les maîtres de ce mal­heureux commerce. Certains n’étaient que de petites gens, colporteurs errants, vendeurs de bibelots et de pacotille qui ne prenaient à leur suite qu’un ou deux captifs. D’autres, au contraire, bien en place auprès des palais des rois francs, maîtres d’entreprises implantées dans tout le pays, convoyaient vers les ports de la Méditerranée de nom­breuses troupes de prisonniers, embarquées vers l’Orient. « Ils rapportent d’Occident des eunuques, des esclaves des deux sexes, du brocart, des peaux de castor, des pelisses de martre et des autres fourrures et des armes12. » Nos auteurs, musulmans et chrétiens, insistent particulièrement sur le rôle des Juifs qui, dans l’Espagne musulmane, for­maient souvent la majorité de la population dans les grandes villes, notamment à Grenade, appelée communé­ment, au vme siècle, la « ville des Juifs ». Négociants en produits de luxe, métaux, bijoux et soieries, plus rarement prêteurs sur gages, ils se groupaient en petites sociétés de parents et d’amis, les uns établis dans une des cités proches de la frontière castillane, les autres dans les ports d’Ibérie et d’Afrique du Nord, et prenaient à leur compte certaine­ment une bonne part des transactions entre les deux mondes. On assurait aussi que, les musulmans s’y refusant, ces trafiquants Israélites veillaient à la bonne tenue des centres de castration13.

 

(p.18) Pour l’Italie, les mêmes auteurs parlent beaucoup moins des Juifs mais plus souvent des marchands chrétiens, hommes de vilaines mains, pillards et complices, meneurs de raids au-delà des Alpes ou sur l’autre rive de l’Adria­tique, tous trafiquants d’esclaves, capables de faire prison­niers et de ramener hommes et femmes sans regarder à leurs origines ou à leur religion. Les hommes d’affaires vénitiens, ceux-ci mieux organisés et plus honorablement connus, armant des navires à leurs noms, y prenaient part. Soumise alors à Byzance, Venise bravait les empereurs de Constantinople qui avaient formellement condamné cette traite et menacé les coupables de dures sanctions. Pour mettre un terme à ces sinistres négoces ou, du moins, en limiter les profits, Léon V l’Arménien, empereur (813-820), interdit à tous ses sujets, plus particulièrement aux Vénitiens, de commercer dans les ports d’Egypte et de Syrie. L’on vit pourtant d’audacieux trafiquants traquer des esclaves dans les Abruzzes et le Latium pour les revendre dans le Maghreb 15.

 

(p.20) Ce fut, au long des temps, un négoce tout ordinaire, quasi routinier, soumis aux coutumes, aux règles et aux taxes. « Quand les Russes ou les gens d’autres races arrivent dans le pays des Bulgares avec des esclaves, le roi a le droit de choisir pour lui un esclave sur dix. » Les Russes s’aventuraient très loin et, des régions les plus éloi­gnées du « pays des Slaves », ramenaient des captifs, hommes et femmes des deux sexes, et des fourrures pré­cieuses, peaux de castor et de renard noir. Deux cents ans après Ibn Fodlan, Abu Hamid de Grenade I8, lors d’un long et pénible voyage en Europe de l’Est, trouve les Russes partout sur son chemin. Ils lui parlent des Wisu, peuple de la région du lac Ladoga où les hommes chassent le castor, et des Arw du pays des grands fleuves qui, eux, chassent l’hermine et le petit-gris. Au-delà des Wisu, près de la mer Arctique, « la mer des ténèbres », vit un peuple de nomades, les Yura, qui, contre des épées, livrent aux Russes des peaux de zibeline et des esclaves. Ces deux négoces, peaux de bêtes et bétail humain, allaient partout de pair19.

Là aussi, les Juifs assuraient certainement une part importante des échanges, en particulier à l’est, pour les produits de la lointaine Asie ou des steppes et déserts des hauts plateaux. L’historien et géographe Ibn Khurdadhbeth consacre un long passage de sa description du monde à ces (p.21) Juifs Radhanites20 et décrit, noms de nombreux fleuves, de villes et de peuples à l’appui, quatre de leurs grands itiné­raires : l’un arrivant de l’ouest, par mer, vers Antioche, un autre le long de la côte méridionale de la Perse, un autre encore par la mer Rouge et la mer d’Oman jusqu’en Inde, et le dernier, le plus important, vers l’Europe centrale et les pays du Nord.

 

(p.24) Dans un des gros bourgs de la Riviera génoise, en 1531, un homme sur cinq se trouvait alors esclave chez les Turcs. Dans Alger, où l’on ne comptait pas moins de six ou sept bagnes pour les chrétiens prisonniers, plusieurs centaines de captifs, peut-être un millier, étaient entassés dans des conditions épouvantables, dans le plus grand bagne, situé en plein cœur du tissu urbain, sur le souk principal qui cou­rait d’une porte à l’autre. C’était un vaste édifice de soixante-dix pieds de long et quarante de large, ordonné autour d’une cour et d’une citerne. Au temps d’Hassan Pacha, dans les années 1540, deux mille hommes logeaient dans un bagne plus petit et, un peu plus tard, encore quatre cents dans celui dit « de la Bâtarde ». A Tunis, demeurée longtemps indépendante sous un roi maure, la conquête de la ville par les Turcs, en 1574, fit que l’on bâtit en toute hâte huit ou neuf bagnes qui suffirent à peine à y entasser les prises de guerre; les hommes s’y pressaient jusqu’à dix ou quinze dans des chambres minuscules, voûtées et sombres25.

Toute conquête s’accompagnait inévitablement, sur des territoires de plus en plus étendus, d’une chasse aux esclaves, bien souvent but principal de l’expédition. « Les Turcs, voisins des chrétiens, envahissent souvent les terres de ces derniers, non tellement par haine de la croix et de la foi, non pour s’emparer de l’or et de l’argent, mais pour faire la chasse aux hommes et les emmener en servitude. Lorsqu’ils envahissent à l’improviste des fermes, ils emportent non seulement les adultes mais encore les bébés non encore sevrés qu’ils trouvent abandonnés par leurs parents en fuite; ils les emportent dans des sacs, et les nourrissent avec grand soin26. »

 

(p.43) Hérétiques et rebelles

 

Combattre à mort ceux qu’on qualifie d’ennemis de Dieu, accusés de se dresser contre la Loi et contre l’autorité ou, simplement, de mal se conformer aux règles de la reli­gion, a souvent conduit, chez les Hébreux puis chez les Grecs et les Romains, enfin chez les chrétiens comme chez les musulmans, à des guerres d’extermination menées au nom du Bien ; pour détruire ou humilier les vaincus acca­blés par le sort des armes, pour leur faire perdre leur dignité, leur honneur ; en définitive, pour les réduire en ser­vitude. Les pratiques de la Rome antique, ses triomphes et ses cortèges d’esclaves enchaînés, se retrouvent souvent et pendant très longtemps dans l’ensemble du monde méditer­ranéen, en Orient comme en Occident et pas seulement en pays d’islam. C’est ainsi que le pape Clément V (1305-1314) proclamait que les Vénitiens, capturés les armes à la main lors de la guerre contre Ferrare, ville alliée ou sujette de Rome, seraient aussitôt traités comme des esclaves. Grégoire XI (1370-137), quelque temps plus tard, excom­muniait les Florentins, complices des villes rebelles, et déclara solennellement que chacun pouvait, sans craindre le jugement et la colère de Dieu, s’emparer de leurs biens et vendre à l’encan les prisonniers sur les marchés28. L’an 1390, le roi Jean d’Aragon s’arrogeait le droit d’appeler tous les chrétiens à la guerre contre les bandes de « rou­tiers», ces brigands de grands chemins, et contre les rebelles, sardes et corses ; là aussi, les vaincus, prisonniers, étaient traités en esclaves29. On ne parlait certes pas tou­jours de croisade et de guerre sainte, mais de «bonne guerre » ou de « guerre juste » et cela suffisait à faire des hommes et des femmes insoumis des hors-la-loi contre qui toutes violences, toutes formes de dégradations, devenaient licites, parfois même encouragées.

 

(p.45) Dans les pays d’islam, les persécutions et chasses aux rebelles furent de tous les temps. Les musulmans ont large­ment usé de ces expéditions punitives qui autorisaient de combattre et de réduire en servitude ceux que l’on disait mauvais croyants, tout particulièrement en Afrique du Nord et en Espagne où certains peuples, islamisés pourtant, ne furent pas toujours à l’abri des attaques. Les souverains d’Egypte et des royaumes du Maghreb lancèrent de nom­breux raids contre des populations notoirement converties, parfois depuis de longs temps, au lendemain même de la conquête. Les Berbères accusés d’hérésie, les Kharidjites notamment, furent soumis à de dures vexations, accablés autant d’impôts que les non-musulmans, et leurs femmes capturées pour le harem. Révoltées, sous la conduite de Maisar (dit le Pauvre ou le Vil), dans son enfance simple porteur d’eau à Kairouan, plusieurs tribus prirent Tanger avant de subir, en 740, lors du « combat des nobles », une sanglante défaite qui leur coûta un nombre considérable de tués et davantage encore de prisonniers mis à la chaîne. Quelques années plus tard, dans la région de Mérida en Espagne, les troupes de Cordoue massacrèrent un grand nombre de rebelles, berbères eux aussi, firent un millier de captifs, des enfants surtout, vendus aussitôt sur les mar­chés. En 1077, des centaines, peut-être des milliers de femmes berbères d’une tribu d’Afrique déclarée hérétique furent elles aussi exposées et mises aux enchères sur le marché du Caire.

 

(p.81) Les marchands d’esclaves

 

L’or et les esclaves : ces deux négoces d’Afrique ont fait la fortune des caravaniers et des trafiquants. Pourtant, sur le plan humain, les deux traites n’étaient en rien compa­rables : pour l’une, commerce muet, approches sans heurts, marchandises inertes et faibles escortes; pour l’autre, guerres et violences, misères et souffrances. De plus, pour l’or, les lieux de production et d’échanges se limitaient à quelques régions parfaitement circonscrites ; les routes, peu nombreuses, ne conduisaient qu’à quelques villes mar­chandes, tandis que la chasse et le trafic des Noirs sévis­saient dans tous les pays d’au-delà du Sahara, de la côte atlantique à celles d’Orient sans exception. Aucun pays, aucun peuple ne fut épargné. C’était une mise en coupe réglée d’une effrayante ampleur. Dès les années 800, les esclaves razziés ou achetés en Afrique noire furent de plus en plus nombreux sur les marchés de l’Islam. Ce misérable négoce l’emportait déjà de très loin sur celui des Blancs d’Europe ou d’Asie et prit très vite l’allure d’un trafic rou­tinier aux mains soit des Arabes et des Berbères, maîtres des comptoirs et des oasis, soit des Noirs eux-mêmes, rois et chefs de tribus islamisés ou demeurés « païens ».

 

arabes dans la mer rouge

 

Les hommes d’Arabie, du Hedjaz et du Yémen puis ceux d’Oman d’une part, de Bassorah et de Bagdad de l’autre, furent très tôt en contact direct avec les Noirs d’Ethiopie et de Nubie. Familiers des côtes et des ancrages, bien infor­més des ressources en hommes de l’arrière-pays, ils n’ont éprouvé aucune difficulté à maintenir de bonnes relations avec les chasseurs d’hommes ou les courtiers qui, aventu­rés dans les pays des Noirs, se sont peu à peu solidement (p.82) implantés, jusqu’à fonder de véritables Etats esclavagistes, à l’abri de toute rébellion. Les musulmans de la côte contrôlaient ainsi de nombreux postes de traite tout près des territoires de chasse. Ils ont constamment assuré, sans trop de frais ou d’aléas, les transports de captifs sur de nombreuses pistes caravanières vers leurs comptoirs et leurs entrepôts. La mer ne fut jamais un obstacle et la tra­versée n’exigeait ni de longs préparatifs ni de grands chan­tiers de construction ou d’armement.

Dans les premiers temps, les trafiquants d’esclaves, gens de la côte ou d’une tribu alliée, ne furent que de sordides touche-à-tout, hommes de sac et de corde, en quête de la moindre occasion de gagner un peu plus : boutiquiers, charlatans, fabricants et vendeurs d’amulettes, bonimenteurs à demi sorciers ou entremetteurs de mariages et maîtres d’école. Leurs entreprises se limitaient à peu de chose : ils achetaient des bêtes de somme et du beurre dans les campagnes proches de la rive gauche du Nil. De là, montés sur des ânes, portant avec eux quelques pièces de cotonnades, leur seule monnaie, ils allaient traiter et échan­ger leurs étoffes contre des hommes et des femmes captifs sur des marchés situés sur le plateau, à seulement plusieurs jours de marche. Leur monture valait alors un ou deux esclaves noirs et leur chargement trois autres. Les grands marchands, les ghellabas, ne se sont imposés que dans un second temps, une fois les pistes reconnues. Ceux-là comptaient vraiment, disposant de toutes sortes de relations et pesant même sur les décisions politiques dans les comptoirs de la côte ou du fleuve, de plus en plus actifs au cours des temps, gens de bien, notables, parfaitement insé­rés et respectés dans leurs communautés et leurs cités. Un bon nombre se disaient religieux, fakis, « qui regardaient la traite des nègres comme un accessoire ordinaire de leurs attributions ». Ils entretenaient des agents ou des commis dans plusieurs lieux de chasse ou de traite et ces négoces, pour le compte donc des Arabes des comptoirs et de leurs associés, couvraient, en Abyssinie et jusqu’en Nubie, de vastes territoires, très divers et très éloignés les uns des autres 19.

 

(p.167) Racisme et ségrégation

 

Le Noir, esclave ou libre, même estimé pour ses talents ou son courage, n’était certainement pas l’égal des autres hommes. La pratique ordinaire était, dans les écrits, les dis­cours et le parler de chaque jour, de ne pas désigner les hommes non arabes, les hommes de couleur en particulier, par leur filiation mais seulement par leur nom personnel et par leur surnom. On ne marchait pas dans la rue côte à côte avec eux. Lors des repas pris dans une salle commune, ils ne se tenaient pas assis avec les Blancs mais debout ; un Noir âgé, reconnu pour ses mérites, pouvait s’asseoir, mais tout au bout de la table. Ibn’Abd Rabbihi, né à Cordoue en 860, auteur d’une anthologie où il recense plus de vingt-cinq livres, écrivait que trois créatures seulement pouvaient, par leur présence, troubler la prière : un âne, un chien et un rnwla. Le mawla est le Noir, esclave converti et affranchi. On racontait – et l’anecdote fut souvent reprise par de bons auteurs – qu’à Damas un célèbre chanteur noir, nommé Saïd ibn Misjab, s’était joint incognito à un groupe de jeunes gens; il leur propose de prendre son repas à part; ils acceptent et lui font porter sa nourriture. Arrivent des chan­teuses esclaves, blanches celles-ci ; il les applaudit, les féli­cite et cela lui vaut d’ameres remontrances ; on lui demande de veiller à ses manières et de mieux tenir sa place43.

 

(p.177) Bien plus tard, chez les Ottomans, un de leurs poètes, renommé pour ses pièces de vers erotiques, méprisait lui aussi les Noirs et déconseillait d’en avoir. Les femmes sont bonnes à la cuisine mais pas au lit; c’est folie de vouloir faire l’amour avec des Noires quand on peut avoir des Blanches. Quant aux jeunes Noirs, « il n’est pas bon de les embrasser, à moins d’avoir les yeux bandés57 ». L’esclave est moins que l’être humain, une marchandise qui doit don­ner satisfaction et toutes satisfactions.

Ces récits, tous conformes et tous hostiles, tous chargés d’opinions racistes délibérément illustrées par quantité d’anecdotes et de slogans, ont, tout au long des siècles, pro­fondément marqué les opinions et les attitudes populaires. Les meilleurs auteurs laissaient entendre, ou affirmaient gravement, toutes manières d’arguments et de témoignages à l’appui, que les Noirs – tous les Noirs – étaient faits pour être esclaves. Les Slaves et les Turcs acceptaient d’être asservis en espérant atteindre un rang élevé et conquérir une part du pouvoir. C’est ce qu’avaient fait les mamelouks. Mais « les seuls peuples à accepter véritablement l’escla­vage sans espoir de retour sont les nègres, en raison d’un degré inférieur d’humanité, leur place étant plus proche du stade animal5S ».

La chasse aux captifs dans tous les pays d’Afrique d’au-delà des déserts, ouverte dès les premiers temps de l’Islam, ne fut jamais remise en question.

 

 

(p.255) portugais, américains et juifs

 

Parler de la traite des chrétiens et taire les musulmanes, ou les réduire à trop peu, était déjà travestir la vérité. Fallait-il, de plus, pour cette traite atlantique, ne citer que les armateurs de France ou accessoirement d’Angleterre et ne rien dire des autres, notamment des Portugais qui furent, et de très loin, les plus actifs sur place, solidement implan­tés, agents d’un commerce pionnier et maintenu en pleine activité bien plus longtemps21 ? Arrivés les premiers sur les côtes d’Afrique et sur les rives des fleuves, ils furent bien les seuls, avec les Américains, à s’établir à demeure dans les postes de traite à l’intérieur du continent, là où les Noirs étaient livrés sur le marché bien plus nombreux qu’ailleurs. Ces hommes n’étaient pas seulement capitaines de navires jetant l’ancre pour de courtes escales, le temps d’embar­quer les esclaves que d’autres Noirs leur vendaient, mais des résidents, chefs d’entreprises florissantes, négriers au sol, propriétaires de factoreries, d’entrepôts et même de troupes de rabatteurs.

(p.257) Peut-on imaginer que les Américains se soient contentés de recevoir des navires d’Europe chargés de Noirs captifs ? Ils furent, au contraire, parmi les plus actifs des armateurs et capitaines négriers. Leurs bâtiments de Maryland, de Géorgie et de Caroline allaient régulièrement en Afrique, plus particulièrement sur la côte de Guinée qu’ils appe­laient tout ordinairement la «Côte des esclaves». Ils avaient conclu des accords avec les rois de ce littoral et (p.258) avec ceux du Togo qui envoyaient leurs guerriers razzier à l’intérieur du continent et livraient leurs prisonniers à Anecho (actuellement à la frontière du Togo et du Daho­mey), à Porto Novo et à Ouidah, sites portuaires fortifiés. Au temps le plus fort de la traite, au début du xvme siècle, l’on comptait plus de cent vingt vaisseaux négriers, pour le plus grand nombre propriété de négociants et armateurs juifs de Charleston en Caroline du Sud et de Newport dans la baie de Chesapeake en Virginie (Moses Levy, Isaac Levy, Abraham AU, Aaron Lopez, San Levey), ou de Portugais, juifs aussi, établis en Amérique (David Gomez, Félix de Souza), qui, eux, avaient des parents au Brésil. A Charleston, une vingtaine d’établissements, nul­lement clandestins, distillaient un mauvais alcool, princi­pal produit proposé en Afrique pour la traite des Noirs esclaves24.

 

(p.260) Les chefs africains ont, pour assurer et développer leurs trafics, lancé des troupes de guerriers de plus en plus loin, aménagé marchés, entrepôts et ports d’embarquement. « Dès la haute période négrière du xvme siècle, les forts contingents de captifs des­tinés à l’exportation provenaient du lointain hinterland, voire de régions nettement continentales, éloignées parfois de mille kilomètres et davantage des zones littorales. » Ce qui impliquait la mise en place et la gestion d’un vaste sys­tème de captures et d’ « une logistique des transferts des captifs vers la côte, dépendants de la compétence de cour­tiers et de trafiquants africains spécialisés». Certains esclaves embarqués sur la côte du Congo pouvaient venir d’aussi loin que les royaumes de Luyda et de Luba27, à quelque deux cents kilomètres de là, où des marchands africains de Loango s’étaient installés à demeure en plu­sieurs postes de traite. En Angola, pour répondre aux ache­teurs portugais, les caravanes de pombeiros (esclaves domestiques de confiance), conduites la plupart du temps par des Noirs experts en ce travail, esclaves eux-mêmes, revenaient de lointains territoires de chasse, après une absence parfois de plus de deux ans28.

 

(p.261) Dans l’Afrique de l’Ouest, à la différence des comptoirs musulmans de l’Afrique orientale, les ports où abordaient les navires n’étaient nullement sous le contrôle des négo­ciants et des négriers d’outre-mer, mais tous aux mains des Noirs esclavagistes ou, plutôt, de leurs souverains. C’est le roi du Loango (Ma-Loango) qui fit aménager les ports de (p.262)

Mayumba35 et de Loango. Le mafouk, grand et riche per­sonnage, responsable de la traite, y régnait en maître. Ses hommes attendaient les navires, aidaient, ici à franchir la barre ou à ramer sur les chaloupes, et là à guider les bâti­ments le long de la côte, entre les îles, vers un estuaire, par un réseau quasi inextricable de chenaux où les pilotes euro­péens auraient été incapables de se retrouver36.

 

De kinderfabrieken van Israël, in: Knack 16/04/2008, p.106-111

 

(p.107) Ze draaien het nummer 001-718-384-6060. ‘Welkom bij Dor Yeshorim, de rechtvaardige generatie’, zegt een Amerikaanse stem op het antwoordapparaat. ‘Wij zijn de commissie ter preventie van genetische aandoeningen. (pauze) Om uw compatibiliteit te checken, druk op twee. (pauze) Geef uw code in van negen cijfers, uw geboortedag en maand, en uw telefoonnummer. U wordt zo snel mogelijk teruggebeld.’

Ultraorthodoxe Joodse meisjes en jongens in Mea Shearim, een orthodoxe wijk vlak bij de Oude Stad in Jeruzalem, wachten in spanning af. Krijgen ze het fiat om te trouwen? Is het antwoord van de Commissie: ‘Genetisch compatibel met elkaar. Jullie kunnen trouwen’? Of wordt het: ‘Helaas, jullie zijn genetisch onverenigbaar’?

Welkom in de complexe wereld van het Jodendom. Maanden geleden werden deze orthodoxe jongens en meisjes getest. In colleges en aan hogescholen werd bloed afgetapt. Het werd onderzocht op het Tay-Sachsgen en een paar andere zware erfelijke aandoeningen. De resultaten verdwenen in een grote databank in New York, waar de gegevens van bijna allé orthodoxe Joden ter wereld zijn opgeslagen. Naar dat instituut hebben ze net gebeld. Want ze hebben een mogelijke huwelijkspartner. Het pasje met de code die ze kregen toen ze geprikt werden, hebben ze al die tijd zorgzaam bewaard. Van dat kaartje zou hun toekomst afhangen. Stel dat New York belt met de boodschap dat ze genetisch bij elkaar passen, dan kunnen ze een huwelijksdatum vastleggen. Zo niet, dan moeten ze een andere partner zien te vinden. Die gene­tische selectie voor het huwelijk is de Joods-orthodoxe méthode om zwaar gehandicapte kinderen uit te sluiten.

 

GEEN GEHANDICAPTEN

 

‘Genetisch determinisme!’ roepen sommigen uit. ‘Een afgeleide van de eugenetica van het Derde Rijk’, vinden anderen. Rabbijnen zien er geen graten in. Een opperrabijn van New York gaf zijn toestemming bij de oprichting van het instituut. En ook in Jeru­zalem vinden rabbijnen dat het systeem perfect kan: ‘Het is een preventie voor het huwelijk, en dat is aanvaardbaar.’

(p.108) Ook de Israëlische gehandicapten vinden niet dat mensen moeten lijden. Integendeel, ze zijn grote voorstanders van abortus bij embryonale afwijkingen en van prénatale tests. En ze steunen de wet die zegt dat het leven van een gehandicapte ‘illegitiem’ kan zijn. Aïs een gynaecoloog een anomalie niet heeft opgespoord of de ouders van een gehandicapt kind onvoldoende heeft ingelicht, kan het kind hem daarvoor op basis van die wet vervolgen. ‘Anders dan in het christendom heeft een foetus in het jodendom nauwelijks rechten. Hij wordt aïs een organisch onderdeel van de moeder beschouwd, niet aïs een op zichzelf staande levende identiteit. Een foetus heeft in Israël maar één recht: het recht om niet aïs gehandicapte geboren te worden’, zegt Hashiloni-Dolev.                                  

Voor gehandicapten is de situatie in Israël bijzonder ambigu. Ze aanvaarden enerzijds dat ze aïs gehandicapten misschien niet geboren hadden moeten worden. Tegelijk willen ze het recht op erkenning en verzorging. En dat krijgen ze ook.

 

Verboden voor Belgen

 

Zoals alle orthodoxe Joden ter wereld zoeken ook die van Antwerpen een genetisch compatibele partner voordat ze trouwen. Maar Antwerpen heeft een eigen verhaal.

‘Toen onze kinderen aan de universiteit in Israël wilden aanschuiven voor een bloedtest, stond er een groot bord: Verboden voor Belgen’, vertelt Pinkas Kornfeld, de voorzitter van de orthodoxe Antwerpse gemeente Mashike Hadass. Het gebeurde een jaar of zeven geleden. ‘We waren uitgesloten van de databank van Dor Yeshorim in New York omdat we onze eigen méthode hadden doorgezet.’

Die databank is het werk van Joseph Ekstein, die in de jaren tachtig nochtans met een zeer bijzonder idée was komen aanzetten. Nadat hij vier dochters had verloren aan het Tay-Sachs-syndroom, bedacht hij om in de toekomst de kinderen van allé orthodoxe Joden over de hele wereld te laten testen op de ziekte. Het is een ziekte waarbij kinderen veelal overlijden voor hun derde levensjaar. Bij Asjkenazische Joden komt ze zeer frequent voor: 1 keer op de 27 à 31 gevallen, tegenover 1 op de 250 in het alge-

meen. Lange tijd leefden Joden uit Oost- en Centraal-Europa in getto’s, waar aan inteelt werd gedaan. Dat maakt de prevalentie van de ziekte bij Asjkenazische Joden zo groot. De methode kreeg veel kritiek, omdat ze herinnert aan aspecten van de eugenetica. In de praktijk zouden twee Joden alleen nog met elkaar trouwen aïs ze niet allebei dragers zijn van de erfelijke ziekte. Zodra de tijd rijp is, informeren ouders of hun kinderen genetisch bij elkaar passen.

Ekstein wist zijn plannen door te zetten. Hij kreeg de steun van filantropen en richtte zijn databank Dor Yeshorim op. Hij wist massa’s mensen te bewegen, en huurde grote zalen aan Joodse hogescholen om de tests uit te voeren. ‘Met 97 procent van de Joden ter wereld kun je trouwen,’ zegde hij, ‘maar met 3 pro­cent niet.’

‘Het principe op zich vonden we goed’, zegt Pinkas Kornfeld. ‘Hij hield de resultaten geheim om niemand te stigmatiseren. Maar de tests waren duur. Ouders met kroostrijke gezinnen moesten om de twee jaar meermaals tientallen dollars ophoesten. Het ingezamelde bloed gebruikte Ekstein bovendien voor zijn laboratorium. Daarom beslisten we om het zelf te doen. We vonden een dokter in Ant­werpen die ons wou testen. Voor amper 5 euro remgeld kwamen we ermee weg.’ Ekstein had het snel begrepen, zegt Kornfeld. ‘In plaats van 500 tests kwa­men er uit Antwerpen nog maar 20 binnen. Hij gooide ons uit zijn databank en weigerde onze telefoontjes met vragen over compatibiliteit met anderen nog verder te beantwoorden. Aïs onze kinderen met een buitenlandse Jood wilden trou­wen, moesten we het zelf maar uitzoeken. Aan de entree van zijn testlokalen plaatste hij een bord: Ver­boden voor Belgen.’ De strijd van Antwerpen met Dor Yeshorim is ondertussen bijgelegd.

 

Deborah Sontag, Israel ‘uses’ holocaust, mufti of Jerusalem says, in: International Herald Tribune, 27/03/2000

 

… to win sympathy.

 

Le B’naï Brith (Fils de l’Alliance)

 

Organisation en grande partie secrète réservée aux Israélites, dont la tête est aux Etats-Unis et dont les ramifications recouvrent l’implantation planétaire de la diaspora.

(in : E. Ratier, Mystères et secrets du B’naï Brith, éd. Facta, 1983)

 

Fondation en 1843. A New York, près de Wall Street.

 

L’ Europe continentale est le district XIX.

 

Reconnu par l’UNESCO, l’OMS, l’ONU et le Conseil de l’Europe, il a ouvert en 1998 un bureau permanent à Bruxelles … Il est plus vraisemblable qu’ ils tirent sciemment des écrans de fumée à la périphérie d’une nébuleuse complexe dont l’efficacité exige souvent le secret et, au moins, l’absence de publicité.’

 

Schweinefleisch

 

Araber und Juden essen ungern Schweinefleisch

Vor 5000 Jahren gab es im Nahen Osten grosse Schweineherden, es wurde allenthalben fleissig Schweinefleisch gegessen. Dann verschwanden rund um das Mittelmeer die grossen Wälder (zum Schiffebauen abgeholzt) und damit auch die Lebensräume fur die Schweine. Ausserdem konkurrierten die Schweine jetzt mit Menschen um das knapp gewordene Wasser, deshalb wurde in Mesopotamien und Ägypten das Aufziehen von Schweinen kurzerhand verboten. Aber nicht, wie viele glauben, aus gesundheitlichen oder religiösen, son­dern aus handfest wirtschaftlichen Gründen.

Lit.: Brockhaus – Wie es nicht im Lexikon steht, Mannheim 1996.

 

Hans Greimel, Gummi bears solve a sticky problem / New recipe caters to Kosher Market, The International Herald Tribune, April 17, 2001

 

“To make kosher gummi bears, a rabbi must oversee production and inspect every ingredient to make sure it passes muster. Every cooking vessel, collection bin and conveyer belt must be scrubbed down with boiling water to wash away impurities before kosher production begins.

For halal shipments, a Muslim cleric stands in.”

 

K.F., L’électorat juif empêché à Souccoth ?, DH 16/09/2006

 

La Fête des cabanes débute au même moment que les communales.

Sur les 40000 Belges de confession israélite, tous n’observent pas les obligations et les traditions religieuses à la lettre. Mais une partie d’entre eux devraient faire l’impasse sur les élections communales du dimanche 8 octobre. La raison ? La fête de Souccoth qui débute le samedi 7 octobre et dure sept jours.

 

Rabbin David Meyer, Suis-je devenu un extrémiste ?, LB 25/07/06

 

(…) sixième des Dix commandements : « Tu ne tueras point ». Erreur fondamentale de lecture ! Le texte de la Torah ne dit pas « Tu ne tueras point (Lo Ta’arog) », mais plutôt « Tu ne com­mettras pas de meurtre (Lo Tirtzakh) ». En­tre « tuer » et « commettre le meurtre » il y a tout un monde. Le meurtrier n’est autre que celui qui place la mort comme objectif ultime de son action, comme sa raison d’être. « Tuer » c’est, par contre accepter que, parfois, et avant toutes les mises en garde nécessaires, la source d’un espoir nouveau peut se trouver dans la destruction. C’est pour cela que les Dix commandements n’in­terdisent que le meurtre et non pas l’action de « tuer ».

Israël, en tant qu’Etat juif, se doit dans son action de maintenir à tout prix cette distinction philosophique et religieuse. Dans ses opérations militaires, par l’utilisa­tion de la force brute et par sa politique de destruction de l’infrastructure du Hezbol­lah et du Hamas, Israël n’érige jamais la violence et la haine comme valeur natio­nale ou religieuse.

 

Christian Laporte, Communauté juive / Les progressistes juifs aussi ostracisés, LB 04/05/2008

 

L’UPJB s’étonne : invitée à l’hommage au ghetto de Varsovie, son patronage a totalement été boycotté. » Une excommunication aujourd’hui dénoncée.

Y aurait-il désormais un « politiquement    correct juif en Belgique ? La question n’est point pro­vocante après un nouvel incident qui frappe cette fois l’Union des progressistes juifs de Belgique.

On se rappellera que lors du dîner du Consistoire central is-raélite à l’occasion de son bicen­tenaire, les responsables de la synagogue libérale de Bruxelles avaient été privés d’agapes sous peine de voir l’importante com­munauté conservatrice d’Anvers boycotter le dîner du 200e anni­versaire.

Cette fois, c’est l’Union des progressistes juifs de Belgique qui constate que son courant n’a pu s’associer dignement à la célé­bration de la mémoire des siens victimes de l’horreur nazie. En attestent des gestes d’ostracisa-tion qu’on croyait révolus face au silence dont on doit faire preuve à l’égard des victimes de la Shoah.

En cause : le choix délibéré d’écarter l’UPJB de la célébra­tion des 65 ans de l’insurrection du ghetto de Varsovie en l’oubliant dans le comité de patronage pour lequel elle avait été sollicitée mais aussi dans le pro­gramme officiel, attestant par là que ce n’était pas un oubli.

 

Le vilain petit canard

Trop respectueux du souvenir des Juifs broyés par l’horreur na­zie, l’Union et son président Henri Wajnblum n’ont pas voulu faire scandale au moment de l’hommage mais il leur est parti­culièrement pénible d’accepter cet état de fait. C’est pourquoi ils s’en expliquent dans leur men­suel qui sortira lundi. « La Libre » a pu prendre connaissance de ce qui est plus une douleur qu’une frustration.

Résumons : invitée à parrai­ner la cérémonie du 13 avril à Bruxelles, l’UPJB a constaté avec surprise que son nom n’ap­paraissait pas sur les affiches publiées dans diverses revues communautaires. « On nous ex­pliqua, commente le président de l’Union, que les affiches avaient été réalisées avant que la demande nous soit faite de join­dre le comité national, mais que l’UPJB apparaîtrait dans le pro­gramme comme membre dudit comité national. Quelle ne fut pas notre stupeur, peu avant la céré­monie, de nous entendre dire que, malheureusement, le nom de l’UPJB ne pourrait apparaître en raison de certaines oppositions. Nous avons tenté d’en savoir plus et on a appris que certaines asso­ciations, dont on nous a tu les noms, membres de la Fondation du Judaïsme de Belgique s’étaient farouchement opposé à la mention de notre nom, allant jusqu’à menacer de boycotter la cérémonie et d’appeler à son boy­cott ».

L’UPJB ne désirant pas pren­dre le risque de voir cette céré­monie se terminer en foire d’em­poigne intracommunautaire a alors dit s’associer à l’événement et a acheté un encart dans le pro­gramme officiel.

Reste évidemment le fond. Pour l’UPJB, « l’excommunica­tion semble être un jeu fort prisé au sein de la Communauté juive. Nous en avons déjà connu une en février 2002, ayant demandé no­tre adhésion à la commission na­tionale de la Communauté juive pour la Restitution dont il était évident que les organisations membres fourniraient le contin­gent de la Fondation du ju­daïsme de Belgique chargé de gé­rer les intérêts des capitaux issus des biens juifs en déshérence. Face au refus de réponse, l’UPJB avait interpellé Guy Verhofstadt, mettant les points sur les « i » : les progressistes juifs ne sont pas de moins bons Juifs que les autres mais leur position sur Israël et la question palestinienne dérange visiblement beaucoup de monde ! Le Premier ministre avait promis d’agir pour que toutes les sensibi­lités communautaires soient re­présentées. Mais rien ne vint ou se fit. Pas l’ombre d’un écrit mais des commentaires oraux à peine gênés! »

Orthodox Jews in Germany (IHT, 22/11/2010)

De Messiaanse Joden (Knack, 01/12/2010)

Harassed 8-year-old in Israel

(IHT, 29/12/2012)

The Abdul Wahab case

(Eva Weisel, in: IHT, 29/12/2011)

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