Le français, langue truffée de stupidités: la phonologie
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0 Généralités: l’illusion de l’unité de la prononciation française
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0 Généralités: l’illusion de l’unité de la prononciation française
in : André Martinet, Henriette Walter, Dictionnaire de la prononciation française dans son usage réel, …
« Des recherches poursuivies au cours des 30 dernières années ont montré que l’unité de la prononciation française était une vue de l’esprit et ne correspondait à rien de réel. »
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A. Martinet, H. Walter, Dictionnaire de la prononciation française dans son usage réel, 1973
(p.16) L’illusion de l’unité de la prononciation française
Sans vouloir diminuer les mérites de ces différents ouvrages, on doit signaler qu’ils se fondent tous implicitement sur la conviction qu’à de rares exceptions près, chaque mot a une prononciation correcte, et une seule, commune à l’ensemble des Français cultivés, « Méridionaux » mis à part. On en conclut que tout auteur de dictionnaire ou de manuel de prononciation qui s’estime « cultivé » et qui ne se connaît pas d’attaches méridionales peut tranquillement proposer son propre usage comme la norme. Une série d’enquêtes, à commencer par celle d’André Martinet effectuée dans un camp d’officiers prisonniers, en 1941, apporte définitivement la preuve que les Français cultivés non-méridionaux ne s’accordent ni sur le nombre des phonèmes qu’ils distinguent, ni sur la façon dont ils les réalisent, ni sur ceux qu’ils choisissent pour tel ou tel mot (se reporter à André Martinet, La prononciation du français contemporain, Paris-Genève, 1945, nouveau tirage en 1972). Se limiter aux données obtenues pour la Capitale ne permettrait pas de serrer une norme de plus près, puisqu’il n’y a pas deux sujets, parmi les 66 Parisiens soumis à l’enquête de 1941, qui aient répondu de façon identique à toutes les questions.
Quelles prononciations recommander ?
Est-ce à dire que toutes les prononciations qu’on peut entendre soient également recommandables ? Et d’abord qu’est-ce qu’une prononciation recommandable ? On est tenté de la définir comme celle que pratiquent les personnes et les classes qui jouissent, dans la société, du plus haut prestige. Il resterait alors à déterminer quelles sont ces personnes et ces classes. Il n’est pas sûr d’ailleurs que l’emploi, parmi des sujets appartenant à des milieux modestes, de prononciations de prestige n’entraînerait pas la moquerie ou, du moins, quelques sourires. En d’autres termes, n’importe quelle forme linguistique peut, dans certaines circonstances, être « déplacée ». Il y aurait donc autant de normes qu’fl y a de milieux distincts, et ceux qui ont à vivre dans différents milieux devraient, dans ce cas, apprendre à changer de norme d’un instant à l’autre. C’est effectivement ce que nous constatons chez la plupart de nos contemporains : on ne parle pas en famille et entre amis comme on le fait en public. Toutefois, cela n’affecte pas également tous les plans de la langue : il n’est pas difficile de changer de lexique, de favoriser ou d’éliminer les formes argotiques; il y a, dans le parler familier, des tours grammaticaux (nous, on Part) qu’on évite dans le parler soutenu ; certains sujets peuvent modifier, selon leurs interlocuteurs, le rythme du débit et les traits généraux de leur élocution. Mais ce qui ne change guère au gré des contacts sociaux, c’est le système (…)
PRÉFACE
Le dictionnaire de la prononciation française que nous présentons ici diffère de ses prédécesseurs sur un point fondamental. Les auteurs qui nous ont précédés ont tous, tacitement ou expressément, posé en principe qu’il existait, à quelques rares exceptions près, une et une seule prononciation acceptable de chaque mot de la langue. Cette prononciation était attribuée soit à la « bonne bourgeoisie » parisienne, soit aux Parisiens cultivés, » en tout cas à un groupe censé se comporter de façon uniforme en matière de langage. Il devait donc suffire, pour quiconque appartenait à ce groupe, de présenter sa propre prononciation, ou, pour celui qui n’en était pas, de reproduire la prononciation d’un sujet qui en faisait partie. Des recherches poursuivies au cours des trente dernières années a montré que l’unité de la prononciation française était une vue de l’esprit et ne correspondait à rien de réel. Quelle que soit la classe sociale ou le groupe culturel retenu comme digne d’imitation, on trouve en son sein, d’un individu à un autre, des divergences si considérables et si fréquentes, qu’il n’est plus possible de présenter comme un modèle à suivre la prononciation d’une seule personne. La même absence d’unité vaut pour le corps des professionnels de la radio et de la télévision qui, en France, ne semblent pas être invités à se conformer à un seul et même modèle, contrairement à ce qui se produit, par exemple, en Grande-Bretagne. A ne donner jamais, pour chaque mot, qu’une seule prononciation, on s’expose soit à perdre la confiance des usagers conscients que leur propre prononciation, différente de celle qui est proposée,’ est d’un prestige au moins égal, soit à faire croire à des gens moins sûrs d’eux-mêmes qu’il leur faut réformer la prononciation parfaitement acceptable qui est la leur. La seule solution tout à la fois scientifique et honnête consiste à déterminer les latitudes existantes dans les couches de la population dont on a jugé bon de présenter en exemple les habitudes de prononciation. C’est ce que nous avons tenté de faire en retenant comme informateurs dix-sept adultes des deux sexes, d’âge compris entre vingt et soixante-et-onze ans, choisis parmi – des personnes cultivées – de résidence normale parisienne, mais d’une assez grande mobilité géographique. La prononciation française idéale nous paraît être celle qu’on ne pense pas à localiser, serait-ce dans la Capitale, celle, en un mot, qui passe inaperçue et qui, de ce fait, n’empêche pas l’auditeur de concentrer son attention sur ce qui fait l’objet du discours.
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André Goosse, Prononciations flottantes, LB 04/03/1974
Dans leur Dictionnaire de la prononciation française dans son usage réel, André Martinet et Henriette Walter donnent les résultats d’une vaste enquête, dont les modalités ont été décrites Il y a quinze jours. Je rappelle seulement que dix mille mots ont été soumis à dix-sept témoins. L’ouvrage ne répond pas à la question « Comment doit-on prononcer ? », mais à « Comment prononce-t-on? ». Et l’on constate que, pour plus d’un mot sur dix. l’usage est flottant. Il faut louer et remercier le Conseil international de la langue française d’avoir pris cette publication sous son patronage. A quoi bon légiférer dans l’atstrait ? Il convient, au contraire, de savoir ce qui se dit réellement. A partir de là, on écartera les prescriptions que plus personne ne respecte, et on déterminera la marge de liberté qu’on peut laisser aux locuteurs parce qu’elle n’a aucun effet sur l’efficacité de la communication.
Principales divergences
Quatre fois sur cinq à peu près, les flottements concernent les voyelles, notamment, une fois sur quatre, le timbre de a et, une fois sur quatre aussi, l’alternance é-è. (…)
Mais quoi bon nous escrimer à reproduire des prononciations qui ne font même pas l’unanimité à Paris ? Il serait absurde de renoncer à notre un : trois témoins du Dictionnaire le conservent dans tous les cas; trois autres le remplacent toujours par in; le reste pratique une sorte d’éclectisme.
L’idéal n’est pas de singer les Parisiens, mais d’adopter une prononciation que l’on peut dire neutre, celle qui se fait le moins remarquer. Pour cela, Il suffit d’atténuer les particularités régionales ou locales.(…)
Cas particuliers
Beaucoup de mots étrangers sont des cas particuliers. Comme je l’ai dit, c’est parmi, eux que l’on trouve surtout des variantes nombreuses et profondes; par exemple, pour destroyer : dèstrwayé, dèstrwoyé, dèstroyeur, dèstrwayer, dèstrwayèr (sans compter quelques nuances des voyelles). Voilà qui ne facilite pas ila compréhension entre le-3 hommes parlant la même langue. Les emprunts mal assimilés sont une entrave plus qu’une richesse. Cet ‘argument linguistique a plus de poids que les lamentations inspirées par le chauvinisme. On regrette que notre temps ait renoncé à l’usage de jadis qui donnait aux mots d’emprunt une prononciation conforme à la phonologie française (et aussi à l’orthographe française). Vous devinez ce que devient notre groenendael dans la bouche de dix-sept Parisiens : à l’initiale, un seul grou- (prescrit par Warnant) contre cinq gro- ou grô-, trois greu-, huit groé ou ‘ aroè, la syllabe du milieu hésite entre èn’ , eun’, in, un, an, à moins quelle ne soit escamotée (groèit’dal); à la finale, -dal ou -dèl.
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André Goosse, Prononciations flottantes, LB 18/02/1974
Les dix-sept témoignages enregistrés sont reproduits, dans le nouveau dictionnaire, pour chacun des dix mille mots. Environ six pour cent de ces mots ont une seule prononciation : Par exemple, abject, abricot, acéphales aconit, atome; cette proportion aurait été plus réduite encore si les témoins avaient été pris dans d’autres milieux géographiques ou sociaux. Plus de la moitié des mots ont deux prononciations, un sur cinq en a trois. Quelques-uns ont dix formes : tête-de-maure, jiu-jitsu, hic et nunc, genévrier ou onze : irrémissiblement, gnôthi seauton; ou même treize : groenendael. Ce sont, naturellement, les mots étrangers qui donnent surtout lieu à de grandes hésitations. Si les auteurs avaient essayé de reproduire les moindres nuances, Ils auraient été amenés parfois «à donner autant de prononciations différentes ciue de sujets SOUMIS à l’enquêtes ». Les réponses ont donc été un peu simplifiées.
(…) Une autre réserve est liée au procédé suivi par l’enquête. En effet, les témoignages ne sont pas spontanés. Les dialectologues savent qu’en faisant traduire en wallon une phrase française, on court le risque d’obtenir de simples adaptations des mots ou des tours français au lieu des mots ou des tours vraiment dialectaux. De même, en faisant lire des phrases à des témoins qui savent que l’on veut étudier leur prononciation, on obtient assez facilement une diction plus recherchée, plus académique, moins naturelle, peut-être même moins « réelle ». Soit le syntagme « les chevaux» cinq témoins seulement ont supprimé l’e muet (lé chvô), alors que, dans l’usage parlé normal, surtout à Paris, la suppression est pour ainsi dire la règle.
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Jean-Marie Pierret, Phonétique du français, Cabay, LLN 1981, p.93
CHAPITRE I
CARACTÉRISTIQUES DU PHONÉTISME DU FRANÇAIS CONTEMPORAIN
1 richesse du système vocalique
§ 18l. Le système vocalique du français moderne, avec ses 15 voyelles, est un des plus riches parmi les langues d’Europe. L’allemand a 15 voyelles, le néerlandais 13, l’anglais 12 ; l’italien en a 7 et l’espagnol, 5 seulement. Une des caractéristiques les plus marquantes du vocalisme français, c’est l’opposition entre voyelles orales et voyelles nasales. Cette opposition n’est connue, en Europe, que par le portugais et le polonais, mais dans ces langues, les voyelles nasales n’ont pas vraiment le même statut qu’en français. Parmi les langues romanes, le français occupe une place particulière à cause de sa série de voyelles antérieures arrondies (y, ø, œ). Ces voyelles sont assez rares dans les langues européennes. On les rencontre cependant dans certaines langues germaniques (allemand, néerlandais, …).
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1 Illustrations
Exemples : (Martinet,Walter, 1973, p.71)
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Nombre de prononciations |
A |
2 |
abaissant |
4 |
abaisser |
3 |
abaisseur |
2 |
abandonnataire |
2 |
abandonné, -ée |
2 |
abandonner |
2 |
abasourdi |
2 |
abasourdir |
2 |
abasourdissant |
4 |
abasourdissement |
2 |
abâtardir |
4 |
abâtardissement |
3 |
abattoir |
2 |
abat-voix |
2 |
(p.72-73) |
|
agnat |
5 |
agneau |
2 |
agnelage |
7 |
agneler |
9 |
agnelet |
12 |
agnelin |
9 |
agneline |
8 |
agnelle |
2 |
agnosticisme |
2 |
agnostique |
2 |
agnus-castus |
3 |
agnus-dei |
6 |
-agogie |
2 |
-agogue |
2 |
agonie |
2 |
agonir |
2 |
agonisant |
2 |
agoniser |
2 |
agora |
2 |
agoraphobie |
4 |
agrammatisme |
3 |
agréable |
2 |
agréablement |
4 |
agrégation |
2 |
agrégé |
2 |
agréger > agrège |
> 2 |
agresser |
3 |
agresseur |
2 |
agressif |
4 |
agression |
2 |
agressivité |
3 |
agro- |
2 |
agronome / -mie / -mique |
2 |
agrostide |
2 |
agrostis |
2 |
agrotis |
2 |
aguerrir |
3 |
ah |
2 |
(p.74-75) |
|
ahan |
2 |
ahaner |
4 |
aide-mémoire |
4 |
aider |
2 |
aiglefin / é- |
2 |
aiglon |
2 |
aigrette |
2 |
aigretté |
7 |
aigrir |
2 |
aigu |
2 |
aiguade |
7 |
aiguail |
8 |
aiguière |
5 |
aiguillage |
3 |
aiguille |
2 |
aiguillée |
2 |
aiguiller |
3 |
aiguillette |
4 |
aiguilleur |
3 |
aiguillier |
5 |
aiguillon |
4 |
aiguillonner |
4 |
aiguisage |
5 |
aiguisement |
4 |
aiguiser |
4 |
aiguiseur |
4 |
aiguisoir |
4 |
ailé |
2 |
ailier |
2 |
aillade |
3 |
ailloli |
2 |
Prononciation du ‘w’, in : Petit Larousse en couleurs, 1989
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/ / |
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|
w |
wading |
< ENG |
w |
wagage |
< NL |
v |
wagnérien |
< D |
v |
wagnérisme |
< D |
v |
wagon, … |
< ENG |
w |
wahhabisme, … |
< AR |
? |
wali |
< AR |
w |
walkman |
< ENG |
w |
walk-over |
< ENG |
? |
walkyrie ou valkyrie |
|
w |
wallaby |
< austral. |
w |
wallon, … |
< WAL |
w |
wapiti |
< amér. |
w |
wargame |
< ENG |
w |
warning |
< ENG |
w |
warrant, … |
< ENG |
w |
wassingue |
< NL |
w |
water-ballast, water-closet, …, |
< ENG |
w |
watergang, … |
< NL |
w |
watt, … |
< ENG |
? |
wax |
< ENG |
v |
W.-C. /’doublevese/ ou |
< ENG |
v |
weber |
< D |
w |
week-end |
< ENG |
v |
wehnelt |
< D |
? |
welche ou velche |
< D |
w |
wellingtonia |
< ENG |
w |
welter |
< ENG |
v |
wergeld |
< D (saxon) |
w |
western |
< ENG |
w |
wharf |
< ENG |
w |
whig |
< ENG |
w |
whi-: …, whisky, … |
< ENG |
v |
wienerli |
< D |
v |
wil(l)aya |
< AR |
w |
williams |
< ENG |
w |
winch |
< ENG |
w |
win- |
< ENG |
w |
wishbone |
< ENG |
v |
wisigothique ou wisigoth |
< D |
w |
witloof |
< NL |
v |
witz |
< D |
w |
wolfram |
< D |
w |
wolof |
|
v |
wombat, … |
< austr. |
w |
won |
< coré. |
w |
woofer |
< ENG |
v |
wormien |
< D |
v |
wu |
< CHIN |
v |
würm, … |
< D |
v |
wurtembergeois |
< D |
v |
wyandotte |
< ENG |
Re: French:idiotic 8/100 : Mr Dehayes’s survey (Mr Dehayes is Swiss)
Philippe Marchal – marchalp@free.fr 3/10/2000 – 01.39
Quelques remarques sur la réponse de M. Dehayes :
– Les Parisiens font bel et bien la différence entre le ô fermé et le o ouvert : pomme et paume sont bien prononcés différemment, et de manière très marquée à Paris, les deux mots sont prononcés de manière identique (ainsi que par ex. valet – vallée : é fermé, è ouvert) dans tout le sud de la France (« accent du midi » provenant de la langue d’oc), le nord, la Bretagne de l’Ouest (« Bretagne bretonnante ») en revanche, mot et maux, sot et seau sont prononcés, comme il se doit, o fermé, et ce en français standard (pardonnez l’anglicisme) depuis 2
siècles, la différence n’est plus faite en France qu’en Franche-Comté et une partie de la Bourgogne, à ma connaissance; ce que les Parisiens confondent en majorité, ainsi que la plupart des Français, c’est le â et le a : pâte – patte, et le ‘un’ et le ‘in’ (brun – brin, emprunt – empreint); ce que certains font à tort, et là en effet intervient le « snobisme », c’est qu’ils prononcent è des é normaux : ex. cahier prononcé ‘caillet’, je crée prononcé ‘je craie’, faisant du verbe créer un nouveau verbe quasi irrégulier.
– Il est normal que le français distingue les paires suivantes, même si la distinction n’est pas faite par 100% des francophones :
allaite, halète : j’allaite et je halète
baie, bée : prononciation bè et bé
bel, bêle : è court et ê long (différence il est vrai de moins en moins marquée)
bette, bête : idem
tette, tête : idem
dent, dans et dam : dam se prononce communément comme ‘dame’
est, ai, hais, haie, hé!, et, été, étai, été, était, gré, gray, grès, grès, gué, guet, les, lez, laid, laie, lai, lait, laie (sentier), (frères lai), thé, té, taie : des é et des è
hâle, halle, tâche, tache : â long et a court (cf. remarque ci-dessus)
molle, môle : o ouvert et ô fermé
sol (sou), sol (dispersion colloïdale), seul : je ne comprends pas ce que vient faire le mot ‘seul’ ici, il est vrai qu’il existe une prononciation parisiano-snobinarde dieu merci sur le déclin qui tend à prononcer ‘sol’ un peu comme ‘seul’, mais de là à les confondre !
hotte, ôte, hôte : h « aspiré » et o ouvert pour hotte, h « muet » et ô fermé pour hôte (prononcé exactement comme ôte)
J’aurais pu mentionner également la distinction entre les voyelles courtes et longues (ex. nous et noue, il et île, etc.) qui n’est plus faite par la majorité des Français, mais qui était bien marquée du temps de Molière (les règles de versification en portent trace).
Il n’y a donc pas tant de vrais homonymes que ça !
Tout cela ne m’empêche pas de souhaiter une modernisation de l’orthographe française en en supprimant toutes les aberrations (il y en a des pelletées), mais en préservant l’histoire du français et ce qui en fait la beauté (ne pas prononcer comme le chat botté!).
Philippe Marchal
marchalp@free.fr
2 Cas particuliers
L’e muet
in : André Martinet, Henriette Walter, Dictionnaire de la prononciation française dans son usage réel, …
Ailleurs qu’à la finale, il tombe régulièrement là où sa chute aboutit à ne mettre en contact que deux consonnes prononcées : p.ex. dans ‘paletot’, ‘grandement’, ‘la petite’. Là où sa chute déterminerait l’apparition de groupes de plus de 2 consonnes, il se maintient généralement : p.ex. dans ‘âpreté’, ‘(… ?)’, ‘une petite’.
Pour éviter les groupes de 3 consonnes ou plus, on peut l’entendre là même où la graphie ne le connaît pas : par exemple, dans ‘ours blanc’, ‘match nul’.
(…) Il y a des mots comme ‘peloton’ où c’est presque toujours muet, quel que soit le contexte et d’autres, comme ‘penaud’ et ‘guenon’ où e est toujours prononcé.
L’h dit aspiré
A. Hella, Les liaisons dangereuses, VA, 29/04/1995
L’ H ASPIRE (sic)
“Le h dit aspiré dont la particularité première est précisément de ne pas devoir être aspiré, …”
Hérisson a un h aspiré (sic) alors qu’il dérive du latin. “Le linguiste Fernand Feugère a proposé là-dessus un exercice fort plaisant qui commence ainsi: “A travers les (h)ublots hermétiques de leurs (h)angars hivernaux, ces (h)ardis (H)ollandais faisaient entendre à leurs hôtes horrifiés les (h)ideux hallalis des (h)iboux contre des cordes (h)érissées de (h)amsters harcelés …” (id) (mettre les parenthèses: les ‘h’ aspirés (sic))
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Walter H., La mémoire des mots / latins ou germaniques, in : L’Histoire, 248, nov. 2000, p.38-39
(p.39) Les chausse-trapes du h « aspiré »
(…) On appelle à tort ce ‘h’ germanique transmis à la langue française un h « aspiré » : l’impossibilité de faire la liaison et l’élision.
Cette caractéristique touche non seulement les mots d’origine germanique (hanap, houppe, hardes, …) mais aussi des mots avec une autre origine :
hasard, henné (d’origine arabe) haut et hennir (d’origine latine) hamac (vient de l’arawak, par l’espagnol) harpie et hiérogyphe (d’origine grecque)
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Goosse / BON USAGE – 15/12/07 – Bellefontaine (conférence)
l’hiatus > actuellement la plupart des érudits disent « le + hiatus »
17es : la reine d’Hongrie > _ de Hongrie les contes d’ Hoffman le village de Habay, d’Hamipré le / handicap , les / handicapés > l’ h-, les « -z-« h-
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NB Lors de l’Eurovision 1980, la présentatrice pour les chanteurs français a prononcé deux fois le /h/ dans le titre : « Hé ! Hé ! M’sieurs, dames ! »
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La liaison
in : Joseph Hanse, Nouveau dictionnaire des difficultés du français moderne, 3e éd., De Boeck-Duculot 1994, p.549
Liaison. La liaison de la consonne finale d’un mot avec la voyelle initiale du suivant est beaucoup moins fréquente qu’autrefois. Elle ne s’impose que si les deux mots se soudent sans qu’il soit possible d’imaginer entre eux la moindre pause : les hommes. cinq enfants, mon ami, mes anciens amis, leurs amis, un fervent admirateur, très avare, prenez-en. dit-il, ils sont allés, nous irons, ils en ont, je suis heureux, il peut entendre, pas aujourd’hui, en avion, plus encore, quand il dit, sans arrêt, deux hommes, le deux avril. Notons qu’on ne lie pas un substantif singulier à l’adjectif qui le suit, sauf si la consonne finale du substantif se prononce (parc) : un sujet intéressant. Au pluriel on hésite, mais on omet généralement la liaison. On ne lie pas le t de fort ni l’s de vers ni l’r final des verbes en er.
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in: Hella A., Les liaisons dangereuses, VA, 29/04/1995
“A une différence de liaison peut correspondre une différence de sens. “Le premier-r-indien” est le premier homme de race indienne, tandis que “le premier indien” désigne le premier ministre de l’ Inde. De même, on distinguera ‘avoir un pied-t-à-terre’ et ‘avoir un pied à terre’ (sur le sol); ‘les Etats-z-Unis’ et ‘des Etats unis par un traité’.”
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in : Joseph Hanse, Nouveau dictionnaire des difficultés du français moderne, 3e éd., De Boeck-Duculot 1994
L’adverbe « plus »
Prononciation. Dans tous les cas, en liaison avec une voyelle (sauf devant un nom propre) on prononce z : Il est (ou il n’est) plus étonné. Il travaille de plus en plus fort. Il est d’autant plus ému que… En dehors de la liaison, l’s ne se prononce qu’en finale ou devant une pause, lorsque plus signifie « davantage « . mais il ne se prononce pas dans ne…plus. On le prononce donc dans : J’en veux plus (davantage) mais non dans : Je n’en veux plus. À l’intérieur de la phrase, on prononee toujours s quand plus marque l’addition et assez souvent devant que. Deux plus trois. J’en ai plus que lui Mais non dans J’ai plus faim que lui. On hésite dans sans plus, d’autant plus, où, même en fin de phrase, l’s parfois ne se prononce pas. La tendance à ne pas prononcer s est très forte.
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