19e siècle

Les tentatives d’affaiblissement, voire d’invasion de la Belgique par la France

après 1815, au cours du 19e siècle

PLAN

1815-1830

1830: la Révolution belge : secrets d’Etat et autres faits

1831, …

1848

1852

Les années 1860 

Les années 1870 et 1880

Les années 1890

1815-1830

 

Monument slag bij Waterloo toe aan opknapbeurt, in : De Telegraaf 12/05/2007

 

Veerman Ronald, ‘Hollandse’ leeuw kwijnt weg

 

Het weerhield zijn vader Willem I er echter niet van om op de plek waar de prins een schotwond opliep bijna 300 duizend kuub aarde tot een fraaie kunstmatige heuvel te kneden. Bij Cockerill in Luik werd de 4,5 meter hoge gietijzeren leeuw gesmolten. ,,En niet uit buitgemaakte Franse kanonnen, zoals heel vaak beweerd. Dat is echt een fabeltje », benadrukt Lambrigts.

 

(…) Als hier op deze plek Napoleon immers niet was verslagen, hadden we nu niet alleen in heel België maar waarschijnlijk ook bij jullie in Nederland land allemaal Frans gesproken.

 

Ludo Baeten, Verschillende talen en toch maar een beschaving, in : Delta, 10, 2003, p.14-16

 

(p.14) Het prinsbisdom Luik groepeerde dertien Dietse en twaalf Waalse steden, De tweetaligheid heeft er nooit de interne vrede verstoord.

 

De taalproblemen werden pas in het leven geroepen door de centraliserende Jacobijnse geest. Voor het gemak van het bestuur heeft men getracht één enkele officiële taal op te leggen: het Frans tijdens de aanhechting bij Frankrijk, het Nederlands tijdens de vereniging van Nederland en België (1815-1830) en opnieuw het Frans na 1830. De Grondwet beperkte er zich toe te stellen « het gebruik van de in België gesproken talen is vrij het kan niet worden geregeld dan door de wet en alleen voor handelingen van het openbaar gezag en voor gerechtszaken ».

In feite betekende dit een totale verfransing van de administratie, van het gerechtelijk apparaat, van het leger en van het middelbaar en hoger onderwijs.

 

Cure de rajeunissement pour le « Lion de Waterloo », AL 28/12/1987

 

« /La butte =/ Celle-ci, érigée de 1821 à 1826, représente un volume de 300.000 mètres cubes de terre à Ohain par des « boterèsses » (porte-faix) liégeoises recrutées par les usines Cockerill (où le lion avait été fondu conformément aux indications du sculpteur malinois Van Geel). »

 

1830

1830 - secrets d'Etat de la Révolution belge

ent :

Secrets d’Etat de la Révolution belge

D’après les mémoires du Major-Général Baron de Failly, Ministre de la Guerre de Léopold Ier en 1831

de Damien Failly, éd. Mols, 2005

  

EXTRAITS

 

(p.15) /à propos du Major-Général Baron de Failly:/ Chevalier de la Légion d’Honneur le 7 février 1813

Sous le régime hollandais, il reçoit la distinction de chevalier du Lion Belgique le 4 juillet 1829.

(p.24) /25 août 1830/ La bourrasque du soulèvement que la bourgeoisie regar­dait avec sympathie, la veille au soir, se déchaîne brusquement contre la propriété privée. De toutes parts, les ouvriers accourent pour rejoindre les émeutiers, détruisent les ateliers, brisent les machines. De cette foule brusquement livrée aux excès, des cris fusent: «Vive Napoléon! Vive le duc d’Orléans! Vive la France!» Cela donne une idée de l’origine de certains agitateurs qui entonnent la Marseillaise.

(p.25) Pendant tout un temps, c’est le drapeau français qui flotte à l’hôtel de ville. Sans aucun doute, l’insurrection est dirigée par la France, donnant ainsi une coloration internationale au soulève­ment populaire. À lui seul, ce fait révèle la présence sur le sol belge d’une forte communauté française en exil ayant fui les répressions de la révolution de juillet à Paris.

 

(p.27) De toutes parts, les Volontaires affluent (…). /Ainsi/ en quelques jours, l’émeute se termine. On n’entend plus crier « Vive la France » et c’est le nouveau drapeau belge qui flotte sur l’hôtel de ville de Bruxelles.

(p.28) Pour les Hollandais, il est difficile de lancer la troupe contre les révolutionnaires car les soldats sont belges en grande majorité. Ces derniers pourraient se retourner contre leurs officiers hollan­dais mettant le feu aux poudres d’un conflit meurtrier, ou prendre en otage les chefs de Corps pour forcer Guillaume 1er à céder. L’ar­mée ne semble pas vouloir suivre l’exemple de Paris où les soldats français se sont couverts d’infamie en tirant sur les citoyens.

Dans chaque ville se constituent des «Commissions de Sûreté ». Ce changement d’autorité a la faveur du public qui adopte les hommes nouveaux. L’objectif est de calmer les gens et surtout de se les concilier en faisant appel à toutes les bonnes volontés sans distinction de classe, à plus de civisme et à coopérer à la sécurité. Un calme relatif règne, entrecoupé de brusques sursauts

(p.31) /8 septembre/ Des étrangers, aventuriers, mercenaires, agitateurs, agents politiques, jacobins oeuvrent ouvertement.

 

(p.39) Chaos et anarchie / Octobre 1830

Le jeune gouvernement provisoire s’installe et crée plusieurs commissions qui sont les embryons des futurs ministères. La Belgique est en marche vers son indépendance plus vite que ne l’avaient prévu ses grands voisins qui considèrent la révolution belge comme un scandale.

Les troubles de Bruxelles créent une suspicion parmi les Cinq Puissances signataires des traités de Vienne car chacune soupçonne la France d’être à l’origine de la situation. Cela d’autant plus qu’en Belgique, le rejet inconditionnel du Hollandais engendre un rejet de tout ce qui rappelle la culture néerlandaise en faveur de la culture et de la langue française. Nous en trouvons un écho dans la lettre que Max Veydt écrivit à sa sœur, en septembre 1831 : «Je vous l’avoue j’étais indigné depuis 15 ans d’appartenir à la race batave la plus vile et la plus astucieuse qui existe sur le globe. La Providence toujours juste nous rendra à nous-mêmes et malheur à celui qui s’y opposerait. Avec le Roi qu’on nous a donné, on a fait un pacte ; nous ne permettrons jamais qu’on le déchire, toute la haute noblesse est de notre bord, tous portent le fusil, les Ligne, les Merode, le prince de Grimberge, les ducs d’Arenberg, les Robiano, les Chasteleers, tous sont aux corps de Gand »l.

Personne n’oublie que c’est le drapeau français qui avait flotté sur le pignon de l’Hôtel de ville de Bruxelles et que c’était

 

1 Veydt, Max, à Madame Poggioli, sa sœur, résidante à Paris, le 4 septembre 1831.

 

(p.40) la Marseillaise et non le Wilhelmus que le peuple avait chantée en parcourant la ville. Pour les Cinq Puissances, cette révolte est contraire au traité de 1814. Elles craignent surtout que la Belgique ne choisisse le rattachement à la France et que celle-ci ne prenne le territoire jusqu’à Anvers.

(p.43) Lieutenant-colonel depuis le 15 octobre, Niellon est envoyé à travers le pays à la poursuite des Hollandais. Il reçoit sous ses ordres la Légion belge de Paris (le Corps de Pontécoulant – Merode) formée de deux bataillons totalisant 900 hommes, auxquels s’ajoutent les Volontaires de Louvain, Diest, Aerschot, Tirlemont qui constituent deux bataillons supplémentaires. Il obtient aussi une artillerie, commandée par Kessels secondé par le lieutenant Cohen, soit deux pièces de 6, un obusier de 15, trois caissons et des chevaux de paysans. Il est finalement à la tête d’une armée de 2.110 combattants. Au cours de sa campagne, il augmente encore ses effectifs de 400 soldats après la reddition de Lierre, et d’officiers dont les capitaines Godard, Coussement et Parys10. Pendant ce temps, les escarmouches entre Belges et Hollandais n’arrêtent pas n.

Le Gouvernement Provisoire et le Congrès reçoivent chaque jour des nouvelles des succès militaires de Niellon et de Mellinet sur l’arrière des troupes hollandaises. À la suite de ces

 

9 II est important de connaître cet état d’esprit de Niellon pour comprendre son comportement par la suite.

10 Niellon, Ch., Histoire des événements militaires…, p. 78.

11 Le comte Frédéric de Merode est tué quelques jours après son arrivée, dans un accrochage entre les volontaires belges et les troupes hollandaises, le 24 octobre 1830 à Berchem. Dans un dernier soupir, il demande que le major de La Gotellerie, ami de la famille, soit reçu dans les rangs de l’année.

 

(p.47) En fait, durant ces deux mois, l’union sacrée pour chas­ser l’occupant explose en autant de partis qui s’opposent pour ravir le pouvoir. Les catholiques se dressent contre les libéraux, les orangistes contre les patriotes, les anarchistes contre ceux qui réclament ordre et sécurité, les révolutionnaires contre les traîtres, les monarchistes contre les républicains, les promoteurs d’un rattachement à la France contre les indépendantistes natio­nalistes, les Volontaires contre l’armée. Tous contre tous. Chaque groupe, chaque groupuscule tente de rassembler l’opinion par des actions d’éclat plus que douteuses et des discours qui rivalisent de démagogie. Dans le désarroi général, chacun tente son propre coup d’État.

(p.64) Gendebien, soutenu par le courant francophile «rattachiste», intrigue à Paris en faveur du duc de Nemours comme roi des Belges. Le Congrès opte pour cette candidature malgré l’avis contraire de la France7. Avis déjà exprimé dans un courrier diplomatique suite à la première visite de Gendebien. Le Palais Royal envisage cette possibilité avec «terreur».

 

7 Musée de Mariemont, manuscrit autographe, 2 pages : cette proposition faite au Congrès d’élire le duc de Nemours est signée de plus de cinquante noms, dont Surlet de Chokier (1769-1839), E.C. de Gerlache, J.B. Gendebien, le baron de Woëlmont, de Brouckère, le comte F. de Meeus, Gendebien, père, Félix de Merode, Werner de Merode. Bruxelles. 24 janvier 1831.

 

(p.67) Par son obstination aveugle et ses refus successifs aux pro­positions de la Conférence de Londres, la Belgique a créé les conditions de l’échec à son indépendance. La France n’accepte pas la restauration des Pays-Bas et l’Europe ne consent pas à lui céder la Belgique. Par contre, la France souhaite, à sa frontière nord, un pays ami et si possible, souverain et indépendant, avec lequel elle pourra traiter. La France a en vue la destruction des forteresses dirigées contre elle: «un cercle de fer»13, selon Louis-Philippe. Aux mains des Pays-Bas et de la Sainte Alliance, ces forteresses sont un instrument de guerre dirigé contre elle, tandis qu’aux mains d’un pays ami et pacifique, elles sont sans objet.

 

13 Discours du Roi Louis-Philippe au Conseil des ministres, le matin du 4 août 1831.

 

(p.68) La plupart des Français en résidence à Bruxelles s’offrent à diriger des opérations militaires. Ainsi les corps de Volontaires deviennent une « force politique » armée et appréciée dans les débats en faveur d’une solution «française», soit l’indé­pendance de la Belgique soit le rattachement à la France.

Dans ses Mémoires, Niellon raconte comment, fin janvier, par l’entremise d’Alexandre Gendebien il entre en rapport avec le général Belliard accouru de Paris14. Ce dernier écoute avec inté­rêt les propos de Niellon et il lui demande un rapport que le chef des Volontaires s’empresse de lui rédiger. Il devient ainsi de fait l’agent de renseignement de Belliard.

 

Ce fait confirme bien «l’intelligence» qui relie les corps de Volontaires et les agents de la France. Niellon, Grégoire et consorts ne tiennent aucun compte des mesures du Gouvernement Provi­soire. Ils prennent leurs consignes auprès de certains membres du Congrès particulièrement favorables à la diplomatie française tel un Gendebien par exemple.

 

14 Sur le plan strictement militaire, Niellon était sans doute un bon soldat, ses exploits le prouvent. Il manque cependant de discipline militaire. En ce qui concerne ses positions politiques, il y a de quoi exprimer de sérieux doutes. Il est foncièrement bona­partiste et républicain. Son parcours a de curieuses ressemblances avec celui de Napo­léon sous le Directoire en 1795. Niellon veut aussi défier l’Europe et exporter la guerre révolutionnaire à l’étranger tout comme son aîné. En poussant une pointe jusqu’à Raevels, pour défier deux divisions avec sa maigre brigade contre l’avis de Tiecken, il s’est trouvé enveloppé par l’armée hollandaise. Beaucoup lui ont reproché cette indiscipline sur le champ de bataille. Prétentieux, il n’a pas toujours conscience ni de ses limites ni de son ignorance. Bon rédacteur, il a su exploiter ce talent pour rédiger des faits d’armes à son avantage et donner une image de sauveur de la Belgique.

 

(p.69) Les milieux militaires belges estiment qu’une solution «hol­landaise » est préférable. Elle représenterait pour eux un avantage sur le plan de leur carrière. L’armée a pour consigne de n’obéir qu’au Gouvernement Provisoire et à son commissaire à la Guerre. Sur le plan intérieur, cette position garantit le maintien de l’ordre public. Les milieux modérés recherchent une solution pacifique.

Quant au parti orangiste, il s’empresse de recruter des adhé­sions dans les milieux d’affaires et d’opinion modérée : industriels, banquiers et bourgeoisie aisée. Beaucoup adhèrent à cette posi­tion qui semble, dans l’état des choses, la plus sensée. Même Emmanuel d’Hoogvorst apparaît comme chef de file de cette option. Au sein du gouvernement, Van de Weyer et Merode ne sont pas hostiles à cette solution qui se trouve être celle du moindre mal et du pragmatisme.

Compte tenu des risques d’un conflit armé ou pire, d’une guerre civile, cette solution est largement admise par les Cinq Puissances et semble la plus rationnelle. Déjà en septembre, Charles de Brouckère15 était un partisan de la séparation

 

15 de Brouckère, Charles (1796-1860). Il est né à Bruges dans une famille bour­geoise. La famille suivit le père, gouverneur du Limbourg. Charles de Brouckère, au caractère instable et violent, est capable de volte-face déroutantes. Les électeurs de sa province du Limbourg l’envoient comme leur délégué à la députation permanente aux États Provinciaux et, en 1826, à la seconde Chambre où il siège au côté d’un autre libéral qui ne cessera de le protéger, Surlet de Chokier. Dans le cercle politique belge de cette première époque, il est connu comme intransigeant dans ses convictions fréquemment changeantes. Il a trente-quatre ans au moment où éclate la révolution. En août 1830, il ne participe pas à la révolution ni aux journées de septembre mais se prononce pour la séparation administrative, avec pour vice-roi pour la Belgique le prince d’Orange. À Anvers, il retrouve le prince d’Orange et fait partie de la commission administrative mise en place par ce dernier pour organiser la séparation administrative tout en restant uni à la Hollande. Orangiste convaincu dans un premier temps, il quitte le prince d’Orange pour devenir révolutionnaire et républicain en s’investissant comme membre de la com­mission chargée d’élaborer un projet de constitution. Le 24 janvier 1831, il est au nombre des membres royalistes du Congrès, acquis à la candidature au trône de Belgique du duc de Nemours. Après avoir soutenu la séparation administrative, le voici soutenant la can­didature du prince de Nemours afin de rattacher la Belgique à la France. Il ne croit pas à l’existence d’une Belgique indépendante et souveraine. Le 20 mars, il démissionne et entre en conflit avec Van de Weyer parce que ce dernier souhaite reprendre contact avec la Conférence de Londres. Le 26 mars, il entre dans la nouvelle équipe gouvernementale et adhère au mouvement national francophile et rattachiste. Le 16 mai, il entre en conflit avec Lebeau parce qu’il est contre l’arrivée du prince Léopold et, avec fracas, il donne sa démission qu’il dit irrévocable. Devenu subitement antiroyaliste et républicain convaincu, il combat l’élection de Léopold 1er et vote contre les Dix-Huit Articles. Il manifeste une antipathie envers de Failly et vote contre le budget de l’armée. Fin juillet, il demande une audience au Roi et entre au gouvernement le 3 août suivant. H deviendra ministre de la Guerre de septembre 1831 à 1832. Bourgmestre de Bruxelles, on le retrouve professeur à l’ULB. Il décède en 1860.

 

(p.70) administrative16 avec, pour chef d’État, le prince d’Orange. Le refus de ce dernier de se prononcer clairement à Bruxelles fait «basculer» de Brouckère dans le camp de ceux qui souhaitent le rattachement à la France parce qu’il ne croit pas que la Belgique puisse exister comme État souverain.

Mais après le refus par Louis-Philippe de la couronne de Belgique pour son fils, le prince Frédéric redouble d’effort et envoie des missions de conciliation auprès des militaires belges restés en place. Le colonel comte Dumonceau17, brillant officier au service de Guillaume 1er, « mène plusieurs missions de conciliations auprès des Belges appartenant aux régiments hollandais »18.

Les perspectives de la Belgique sont à l’avantage de Frédéric d’Orange. Les journaux orangistes : Le Courrier Belge, Le Lynx, Le Messager de Gand vont être ses porte-parole. Les milieux favorables à ses visées forment un groupe important d’orangistes. La Belgique se divise en deux grands courants d’opinion oppo­sée : les francophiles désireux d’un rattachement à la France et les orangistes favorables à une restauration hollandaise. Entre les deux, une masse silencieuse souhaitant l’indépendance et la souveraineté. Malheureusement, les intellectuels et une partie de l’aristocratie ne croient pas non plus à la viabilité d’une Belgique indépendante et penchent pour la restauration19.

 

16 Leconte, J.R., Le général Daine a-t-il trahi?, Bruxelles, 1938, p. 46. »La séparation administrative était le principe de base largement admis par le Gouvernement Provisoire. La Régence avait un penchant coupable vers une restauration en faveur du prince d’Orange ». À défaut de mieux et de trouver un souverain, c’était la moins mauvaise solution à ce moment-là.

17 Dumonceau, Jean-François, comte (1790-1884), hussard dans l’armée des Pays-Bas. Il avait épousé Thérèse comtesse d’Aubremé (1797-1861) et habitait à Vilvoorde.

18 Dumonceau, J.Fr., Souvenirs de 1830-1831, p. 18 n° 142. W. Brabant

19 Plusieurs familles de la noblesse belge ont l’un des leurs qui continue à faire carrière dans les armées de Guillaume 1er. Outre le colonel comte Dumonceau, on relève les noms suivants: Posson, Bellefroid, Limburg, d’Ursel, Waha… Honni soit qui mal y pense, c’est le propre des familles dont les racines sont européennes. Même le Régent reçoit, chez lui, des émissaires et ne s’en cache pas. Dumonceau, J.Fr. Souvenirs de 1830-1831.

 

(p.71) Guillaume 1er continue sa pression auprès des plénipotentiaires à Londres. Il le fait tellement bien que le projet de royaume séparé a de sérieuses chances d’aboutir car l’Angleterre lui reste favorable et les autres pays ne s’y opposent que mol­lement. Entre toutes les idées émises au sein de la Conférence de Londres, une seule inquiète : c’est l’idée de partage de la Belgique entre ses puissants voisins.

«Lors de l’avènement du second ministère du Régent, un grand danger existait pour la Belgique. Le mot de partage avait été prononcé dans le sein de la Conférence, et le souvenir de (p.72) l’odieux partage de la Pologne n’y avait fait frémir personne. Aucun document officiel n ‘a jamais établi ce projet de partage, mais au milieu de tous les embarras d’une situation si compliquée, c’est une idée qui se présente si naturellement qu ‘il est impossible de ne pas ajouter foi aux révélations faites sur ce point par des hommes initiés aux secrets des cabinets»20.

(p.80) Par une tendance naturelle comme par opposition, les natio­nalistes et les partisans du rattachement à la France se rallient autour de Bresson et de Belliard3. Ceux-ci cherchent un appui auprès des corps francs des Volontaires. L’origine française de ses chefs, la proximité de la France et l’usage d’une langue commune sont des avantages sur l’Angleterre.

 

20 Belliard, Augustin, lieutenant général (1769-1832). À Bruxelles, il achève une carrière assez remplie comme général d’Empire et ministre plénipotentiaire. C’est certainement un homme remarquable avec beaucoup de qualités vu ses états de service. Titré comte et pair de France, il est major général. Ambassadeur à Vienne en 1830, il est envoyé en Belgique en janvier 1831. Il a bien servi son pays et déshonoré la Belgique.

 

(p.86) Au même moment, le Luxembourg se révoltait pour être réuni à la Belgique, alors que la Conférence de Londres avait confirmé son rattachement aux Pays-Bas.

« C’est ainsi que, pour mater la révolution luxembourgeoise, le roi Guillaume 1erpropose d’y envoyer le duc de Saxe-Weimar comme gouverneur, mais aussi pour y organiser la défense.

Au Congrès, Monsieur Gendebien propose de mettre l’armée sur pied de guerre, d’augmenter les effectifs de 12 bataillons de tirailleurs, entraînant un budget de 24 millions de francs. Monsieur de Brouckère, alors ministre des Finances, s’oppose à cette mesure tout en cherchant à amener à lui la population du Luxembourg».

Mais, dit Lebeau : « L’obstacle principal à cette intervention ne se trouve pas du côté de l’armée belge, mais bien du côté des corps Volontaires, qui avaient gardé leurs chefs de la révolution»9.

Cette remarque nous apprend que les corps de Volontaires, dont le chef principal est Niellon, refusaient d’obéir aux injonc­tions du Gouvernement. Ils étaient «indépendants» et entendaient mener leur propre guerre ; l’obéissance était donc conditionnelle. Ils ne répondaient qu’aux injonctions de certains hommes politi­ques présents au Congrès. Il est notoire que Niellon entretenait une relation privilégiée avec Gendebien, chef et fondateur du parti nationaliste Association Patriotique10.

 

9 Lebeau, J., Souvenirs personnels.

10 L’Association Patriotique ou Nationale n’hésitait pas à déclarer la guerre comme on peut le lire dans son manifeste du 23 mars 1831 : «Avec un chef imposé, ou seulement indiqué, par l’étranger, notre indépendance ne serait qu’une chimère, et notre révolution, que du temps et du sang perdus. Soyons Belges, et terminons la révolution comme nous l’avons commencée, par nous-mêmes. Mais avant tout, soyons prêts à la guerre. La guerre, puisqu’il le faut, aux barbares qui occupent encore une partie de notre territoire. La guerre, pour mettre fin à un ordre de choses qui, loin d’offrir les avantages matériels de la paix, froisse, plus que k guerre, les intérêts du commerce, de l’industrie et de l’agriculture. La guerre, pour rejeter le fardeau de la dette hollandaise, pour échap­per au morcellement de notre territoire, et à l’opprobre européen que nous réservent les complices de Guillaume. La guerre, pour couper court aux tentatives de corruption ; il est temps d’opposer le fer à l’or. La guerre, puisqu’il le faut, pour faciliter toutes les solu­tions. » Curieusement cette volonté nationaliste s’est traduite par une volonté politique  » de se rattacher à la France et donc de renoncer à cette indépendance. Cette association dite nationale regroupait surtout les Volontaires de Bruxelles et le milieu francophile.

 

(p.113) Quelle est la politique de la France concernant la révolution belge? D’abord et surtout, elle veut pouvoir jouir de l’accès aux ports d’Anvers et d’Ostende et ce, pour des raisons économiques. Ensuite sur le plan stratégique, elle souhaite le démantèlement des places fortes 9 qui jouxtent sa frontière nord, pour y être bor­dée par un pays allié. Et enfin sur le plan diplomatique, elle veut rompre la Sainte-Alliance entre les pays vainqueurs à Waterloo qui lui sont hostiles et ainsi augmenter son influence européenne10. Il faut donc briser l’état tampon que représentent les Pays-Bas et créer les conditions pour que la Belgique sollicite, sous la contrainte d’une agression hollandaise, la protection de la France. Voilà ce que l’ambassadeur Belliard prépare secrètement.

 

9 Philippeville, Dinant, Namur, Huy, Liège, Ypres, etc.

10 de Waresquiel, E., Talleyrand, p. 569: «La révolution de Bruxelles est l’occasion rêvée d’une nouvelle croisade en faveur des peuples opprimés par la Sainte-Alliance des rois. La reconquête des anciens départements français de Belgique est à la portée des fusils de la révolution de Juillet […].

 

(p.115) L’affaire de la citadelle d’Anvers est l’occasion, pour le général Belliard, de créer une «brèche» dans le dispositif belge, laissant littéralement la ville d’Anvers à la merci des canons hollandais. Cette manœuvre serait facilitée par l’aveuglement du Congrès qui renâcle à doter la Belgique d’une puissance militaire crédible pouvant appuyer ses revendications d’indépendance et de souveraineté. Trop de membres du Congrès et du Gouvernement11 souhaiteraient un ancrage de la Belgique à la France. Les consta­tations suivantes n’en sont-elles pas des preuves ?

En février 1831, le Congrès avait voté en faveur du duc de Nemours, choix de Gendebien, comme futur roi des Belges. Il renonçait ainsi de fait à la souveraineté du pays. Maintenant, en mai 1831, le Congrès accepte l’intervention d’un diplomate français, le général Belliard, sans qu’un seul membre du Congrès ‘ ou du Gouvernement n’intervienne. Le Gouvernement ou le Con­grès renonce ainsi à son indépendance politique. Et surtout, en tergiversant sur l’organisation de sa force armée, les dirigeants renoncent à doter le pays d’une puissance nécessaire.

Il n’y a plus que deux tendances qui dominent les débats du Congrès. Les partisans de la restauration – les orangistes – et ceux qui sont en faveur d’un rattachement à la France – les rattachistes majoritairement francophiles. Il reste cependant des hommes intègres qui tentent par tous les moyens de trouver des solutions «belgo-belges» sans aide extérieure12.

Les agents anglais ont renoncé à soutenir le parti orangiste et les esprits sont si bien travaillés par les agents français que la tendance politique dominante s’oriente en faveur de la France. Cette politique sera poursuivie longtemps par la Belgique. La conclusion de ce projet débouchera sur l’entrée triomphante des troupes françaises en libérateurs à Bruxelles le 13 août 1831.

Dans   leur  logique, les tenants de l’ancrage français combattent le choix du prince Léopold au trône de Belgique, choix proposé par Van de Weyer et Lebeau. Ils refusent toujours de

 

11 Le Gouvernement ne comportait que cinq ministères et ne faisait pas le poids contre les 196 membres du Congrès.

12 Ce sont Van de Weyer, Lebeau, l’abbé de Foer, Merode, Failly, etc.

 

(p.116) signer les Protocoles dit des XVIII Articles et de traiter avec la Conférence de Londres.

Dans un courrier du 13 mai 1831, le roi Louis-Philippe exprime son inquiétude : « Ce qui m’afflige, c’est l’état de la Belgique où je vois arriver du grabuge. Je persiste dans mes regrets qu’il n’y ait pas encore de Prince choisi. Mais à présent, il faut attendre ce qui se fera à Londres et ce qui se passera à Bruxelles »13.

Le seul pays voisin capable de fournir l’aide armée nécessaire est la France. Depuis plusieurs mois, des troupes françaises sont massées aux frontières sud du pays, prêtes à intervenir. Personne ne peut l’ignorer et encore moins les partisans du rattachement à la France. Il est donc indispensable, dans la logique «rattachiste » que la Belgique ne puisse s’en sortir par ses seules forces. Il devient clair que le maintien en état d’infériorité des forces armées belges est un dessein politique qui faciliterait l’intervention souhaitée.

Si le général Belliard avait été honnête, il aurait soutenu la contre-offensive belge et obligé le général Chassé à évacuer la Lunette Saint-Laurent, voire plus. Mais il a préféré laisser un avantage militaire à l’armée hollandaise.

Si l’on avait laissé faire le général de Failly, la citadelle lui tombait dans les mains et la Campagne des Dix Jours aurait eu une autre dimension, car il ne fallait plus laisser de troupes en face de cette citadelle.

«Par la lecture de toutes ces pièces, on pourra aisément découvrir le secret de la diplomatie. La Belgique était alors sous la tutelle de la Conférence, et les deux puissances rivales, voulant éviter à tout prix une complication qui aurait pu ajouter des difficultés nouvelles à la solution d’un arrangement définitif et compromettre leurs intérêts opposés, préférèrent jeter le blâme sur la conduite de l’autorité militaire supérieure d’Anvers et peser sur le gouvernement belge.

Le général Belliard comprenait que mon père aurait toujours été un obstacle à la politique de la France, et l’incident d’Anvers ne fut pas étranger aux intrigues qui éloignèrent le général de Failly de la personne du roi lors de la reprise des hostilités, au mois d’août. »

 

(p.115) (rem.) Belliard, son expérience et son âge eurent certainement une influence auprès de Niellon, de Brouckère, Gendebien et d’autres dans le milieu politique belge.

 

13 Collection privée Van der Elst.

 

(p.127) «Le mardi 4 juin, après un long débat de plusieurs jours, le scrutin fut ouvert, et le prince Léopold de Saxe-Cobourg fut élu roi des Belges par 152 membres contre 44. C’était un premier pas défait, mais rien n’était terminé11. Déjà des troubles éclataient de toutes parts et ces troubles nécessitaient la dissémination de l’armée dans les villes.

L’Association Patriotique, organisée sur de larges bases, ne restait pas en arrière. Par son énergie, elle avait contribué à sauver le pays d’une restauration mais, comme adversaire de la diplomatie, elle était aussi ennemie du Ministère. Ce qu’elle demandait, c’était la guerre, la guerre dans laquelle elle comptait bien que la France serait entraînée, sans songer que la guerre aurait entraîné l’anéantissement de la Belgique, de quelque côté que la victoire se fût fixée.

À la suite de l’élection du prince Léopold, l’Association Patriotique12 tint de nombreuses réunions et fit, à la politique du Gouvernement, une opposition vigoureuse qui paralysa l’action du pouvoir jusque dans les plus simples mesures d’administration.

Pour se faire une idée de la préoccupation dans laquelle l’élection du Prince mit les esprits jusqu’à la fameuse discussion sur les XVIII Articles ouverte le 1er juillet, il faut lire les journaux du temps, et notamment l’Émancipation des 6,16, 21 et 27juin,

 

11 Les 44 voix contre représentent donc 22% d’opposants. Les bulletins de vote sont conservés à la bibliothèque de la Chambre. On relève parmi les votes hostiles les noms de Defacq, Jottrand, Rodenbach, de Haerne, Ch. de Brouckère, Al. Gendebien et Forgeur. Charles de Brouckère précise son choix en disant: «tenant son élection immédiate pour contraire aux intérêts de la Belgique ».

12 Nous avons vu que les cadres hollandais occupaient la majorité des fonctions dans l’administration. Ces cadres ont été assez vite remplacés par du personnel belge. L’Association Nationale avait comme président Van Meenen, ex-ministre, comme vice-président lîelemans et comme secrétaire A. Gendebien, ex-ministre de la Justice. Elle avait aussi comme membres des personnalités les plus en vue comme de Brouckère, Chazal, Rogier, Ducpétiaux ainsi que Niellon. Ces personnes ont aussi participé à l’embauche du personnel de l’administration dans les divers rouages des ministères, comme de Brouckère, ministre depuis les premiers jours du Gouvernement Provisoire, l’a fait. En sorte que tout ce personnel leur était dévoué et répondait aux mots d’ordre. « Un état dans l’état», écrit de Failly.

 

(p.128) Le Prince s’était exprimé d’une manière plus formelle encore dans une lettre au Régent, qui fut rendue publique. Il lui donnait le véritable sens de son acceptation:

«Aussitôt que le Congrès aura adopté les Articles que la Conférence de Londres lui propose, je considérerai les difficultés comme levées pour moi, et je pourrai me rendre immédiatement en Belgique16.

La discussion desXVIIIArticles, communiqués au Congrès le 28 juin, futjbcée au 1er juillet. Voici le tableau que fait Ch. White de la situation du pays à ce moment11: À cette époque on redou­blait d’efforts, à l’intérieur étal ‘extérieur, pour jeter de la défiance dans le ministère et exciter les préjugés populaires contre les Pré­liminaires. On déclarait qu ‘ils n ‘étaient que le résumé des proto­coles détestés, déguisés avec art. La presse fulminait les plus vio­lents articles contre eux. L’opposition et l’Association Patriotique

 

13 Le Courrier Belge, Le Courrier de Gand, Méphistophélès sont, parmi d’autres, des publications orangistes.

14 Résidence du prince Léopold.

15 de Failly, A., Mémoire Explicatif, p. 48.

16 Mémoire Explicatif, p. 49.

17 White, Ch., Histoire de la Révolution belge, t. III, p. 55 et s. Cité dans le Mémoire Explicatif.

 

(p.129) ne mettaient pas de bornes à l’expression de leur mécontentement. Trente-neuf députés, faisant partie de l’opposition extrême et la plus active, rédigèrent une protestation violente au Congrès, dont les tribunes étaient constamment remplies d’individus renou­velant par leurs vociférations et leurs clameurs le tableau des scènes les plus effrayantes de la Convention. Des placards étaient distribués, des menaces anonymes étaient adressées à ceux qui soutenaient les propositions, les murs étaient couverts d’appels incendiaires, les ministres étaient assaillis de grossières diatribes, et plus d’une fois ils furent l’objet d’insultes personnelles de la part des émissaires de la propagande ou d’autres, dont la mission était d’exciter l’anarchie. L’irrésolution et le désordre régnaient dans la Chambre, la défiance et l’émeute au dehors. Des complots et des conspirations s’organisaient activement. Les orangistes et les républicains livraient un dernier combat à mort.

Que les vœux secrets de la majorité aient été pour l’accepta­tion des Préliminaires, cela n’était pas douteux. Mais telle était la crainte des haines populaires, telle était leur timidité que, lorsque l’heure de la discussion arriva, la plupart étaient disposés à abandonner leur tâche, et pendant quelque temps, aucun n’eut le courage suffisant pour s’opposer à ces préliminaires odieux.

À la fin, Monsieur Van Snick, de Mons, se leva et s’écria hardiment: « On a demandé quel serait parmi les députés celui qui oserait assumer la responsabilité morale de proposer l’adoption des XVIII Articles. Messieurs, je serai ce député, et je le suis parce que je crois faire une bonne action18.  » (…) »

 

18 White, Ch., La Révolution belge de 1830, t. III, pp. 113-114.

 

(p.144) Il est donc injuste de s’en prendre au général de Failly ou aux autres ministres de la Guerre du Gouvernement Provisoire. Les budgets nécessaires n’existaient pas et la demande du 2 juin avait été boycottée et refusée par le Congrès. Comment, dans de telles conditions, les divers gouvernements auraient-ils pu mener une politique de restructuration de l’armée? Agir avec tant d’impré­voyance, c’était empêcher que le pays puisse se doter d’une force armée capable de «résister» à une agression et laisser la popula­tion sans défense face aux exactions de troupes étrangères.

Il devient de plus en plus clair que l’opposition du Congrès a participé à la débâcle qui surviendra treize jours plus tard. En effet, revenons aux discussions violentes et orageuses, citées par tous les témoins7, à propos de l’élection du prince Léopold et l’adoption des Dix-Huit Articles acceptées le 9 juin. Un échec cui­sant pour l’opposition républicaine et francophile. La réaction est à l’échelle de la déception. Le groupe des opposants très actif au sein du Congrès et dans la presse va tout tenter pour saboter l’ap­plication des protocoles et l’arrivée du futur souverain. Il va semer la confusion, le désordre dans le pays afin de décourager le Roi et le faire renoncer à son engagement. Tout sera mis en œuvre pour y

 

7 Nothomb, Lebeau, White.

 

(p.145) parvenir. Proclamer une guerre pour le 30 juin et refuser un budget pour l’armée, par exemple, sont les plus sûrs moyens de fragiliser le nouveau chef d’État. La majorité, favorable au Souverain et aux protocoles, a littéralement démissionné face à l’agressivité de l’opposition conduite par de Brouckère, Gendebien et les membres de l’Association Nationale et Patriotique.

« Pourquoi ces projets belliqueux ont-ils fait place à des sen­timents tout pacifiques ? Le ministre de la Guerre, dit encore le baron Victor de Failly, ne partageait pas cette illusion, puisqu’il recommandait une forte organisation militaire. Mais la majorité du Congrès, moins prévoyante, éblouie par l’annonce d’une paix mal assurée encore, servait, sans s’en douter, les projets [secrets] des factieux. Ceux-là, par système et par calcul, s’opposaient à toutes les mesures prises dans l’intérêt de l’ordre, et servaient, de ce fait, la politique française».

Dans tout cet épisode, il y a d’abord un conflit d’autorité entre le Congrès et le Gouvernement Provisoire. Il apparaît de plus en plus que des membres du Congrès détenaient des informations. Ces dernières intentionnellement non communiquées aux ministères. Ces instructions étaient distillées par les agents de la France qui entretenaient des relations privilégiées avec certains membres du Congrès. Il serait intéressant d’étudier le rôle de Belliard et de relever ses relations et ses fréquentations au sein du Congrès.

Belliard détenait avec certitude des informations en prove­nance de la Conférence de Londres et de Paris. Celles-ci auraient donné toute assurance qu’en cas d’attaque hollandaise ou des Puissances du Nord, le gouvernement français aurait garanti l’intervention de ses forces massées aux frontières sud du pays. Pour la France, l’entrée en Belgique d’un seul soldat hollandais ou prussien aurait été considérée comme une déclaration de guerre. Le souhait secret de la France n’était-il pas que cette faute soit commise ? Et le général Belliard n’avait-il pas été chargé d’organi­ser des conditions favorables à ce plan ?

La Belgique quant à elle devait s’abstenir d’avoir une année suffisamment puissante. Ainsi mise d’office en position (p.146) d’infériorité, elle aurait été obligée de faire appel, par la voie offi­cielle, à un secours des armées françaises. Une belle revanche sur la débâcle de 1815.

Ce «contrat» diplomatique semble de plus en plus évident lorsqu’on étudie les comportements politiques, les déclarations et les volte-face. Lorsque de Brouckère décide de ne plus participer aux débats, on le retrouve à la tribune du Congrès. Au lendemain de chaque démission «irrévocable», il reparaît, à l’image de ces polichinelles des théâtres de marionnettes. Le Congrès lui-même, après avoir signé la paix, proclame la guerre à la Hollande pour le 30 juin et, quelques jours plus tard, chose curieuse, abandonne ce projet guerrier. Comment expliquer tous ces changements d’attitude?

Géopolitiquement parlant, un pays émergeant ne peut consti­tuer une puissance par rapport à ses voisins. Si ceux-ci consentent à sa souveraineté, ils n’acceptent pas sa force. Cette idée de main­tenir la Belgique en état d’infériorité trouve peut-être son origine à Londres. Si le nouvel État belge doit son indépendance et sa sou­veraineté à la diplomatie de Talleyrand8, c’est encore ce dernier qui refuse une Belgique trop puissante ou trop « conquérante » au nord de la France. Là se trouve peut-être la clé d’étranges comportements belges, initiés et soutenus par les représentants français sur notre territoire.

Plusieurs auteurs ont reproché au général de Failly de ne point s’entendre avec Charles de Brouckère. Il est totalement erroné et simpliste de limiter la dissension entre le Congrès et le Gouvernement à un problème de relations personnelles. Y avait-il une animosité de la part du général de Failly envers de Brouc­kère? Non. Y avait-il une animosité de ce dernier à l’égard du Gouvernement et du ministère de la Guerre ? 9 Oui ! (…)

 

8 La Belgique doit une reconnaissance à Talleyrand. Sans l’intervention de ce grand diplomate, jamais la Belgique n’aurait acquis son indépendance.

9 Charles de Brouckère éprouvait envers le général de Failly une véritable antipathie, considérant ce dernier comme peu crédible.

 

(p.187) avec l’élection du prince léopold comme roi des Belges par le Congrès, la révolution s’achève et le pays commence une nou­velle tranche de son Histoire. Il s’agit d’une victoire de la raison sur les discordes des partis.

Il ne faut pas croire que ceux qui s’y étaient opposés avec tant de violence aient accepté de gaieté de cœur leur défaite et se soient associés à la joie générale. En fait l’opposition, avec à sa tête Charles de Brouckère, les Gendebien, les francophiles, les répu­blicains, les anarchistes, les orangistes, les fauteurs de guerre, change de tactique devant l’arrivée prochaine et inéluctable du Roi. Dorénavant tout sera mis en œuvre pour déstabiliser celui-ci, l’isoler, l’entraîner à commettre des erreurs et lui attribuer des échecs politiques. Leur but est de faire tomber le nouveau Roi, de le faire renoncer à son engagement. Ainsi pourront-ils renégocier les Dix-Huit Articles, déclarer la guerre à l’Europe, opérer le ratta­chement de la Belgique à la France.

(p.209) Un événement important a dû se produire qui impose un rema­niement complet du plan de bataille adopté en juin, au ministère. Ce changement de stratégie fait suite aux négociations, deux jours durant, entre Belliard et Chassé à la citadelle. Ces discussions portaient sur la « non-intervention » de la garnison hollandaise et la neutralité de la ville d’Anvers placée sous la protection de la France. Le gouverneur est ainsi rendu responsable du moindre acte d’hostilité envers la ville.

La citadelle d’Anvers est paralysée par ce nouvel accord. Le général Belliard, fort de son succès diplomatique, en informe le Roi. Sur ces entrefaites, le premier ordre de jonction venait de partir pour le général Daine, à la demande du Roi, imposant la manœuvre stratégique arrêtée depuis juin. Entre-temps, un cour­rier du général Daine adressé au ministre de la Guerre ad intérim annonce l’arrivée, dans son secteur et en direction de Maestricht, d’une très forte colonne hollandaise.

Belliard pense que le plan de jonction par l’avancée vers la gau­che du corps d’armée de Daine, déjà ordonnée par le Roi, devient inutile. Il se base primo sur la neutralité d’Anvers et secundo fort probablement sur des informations distillées dans ses discussions avec le général Chassé, dont on ne sait rien. (…)

 

39 de Failly, V, Réponse au général Eenens, p. 54.

 

(p.211) «Je crois toujours», cela confirme que Belliard maintient une position contraire à celle du Roi et du Conseil, malgré leurs entretiens. Il est de plus en plus probable que cette conviction lui a été communiquée lors des négociations qu’il eut avec le général Chassé. Car le général Belliard revient avec un accord sur la neu­tralité de la ville, mais aussi avec des «informations» intention­nellement fausses sur les mouvements hollandais. Informations destinées, selon toute évidence, à tromper le commandement de l’armée belge et le Roi. Belliard est tombé dans un piège classique qu’il n’avouera jamais. La preuve de cette tromperie de Chassé envers Belliard se trouve dans la rédaction même de ce message où il est fait mention, pour la première fois, des généraux Meyer et Cortheiligers qui effectivement marchaient en direction de Hasselt et donc de Maestricht. Qui pouvait donner une telle information à Belliard sinon Chassé lui-même ?

Belliard entraîne-t-il le Roi dans le piège tendu par les Hollan­dais ? Pousse-t-il à l’erreur le général de Failly ? Quel rôle joue-t-il ? Quoi qu’il en soit, la réaction de colère de Tiecken, la surprise du major-général, la confusion de Daine ont certainement des consé­quences au Q.G. royal.

Le plénipotentiaire français souhaite-t-il prendre en main la direction de cette campagne? Considérant les autorités belges incapables et ignorantes des véritables intentions hollandaises, il écrit dans le même courrier que les Hollandais se retirent, et prétend avoir dicté au Roi les mesures à prendre ! «J’ai prié encore le Roi aujourd’hui d’exiger des reconnaissances dans toutes les directions, d’envoyer de tous les côtés des officiers d’état-major, d’en faire prendre et d’avoir des habitants du pays qui se tiennent au courant de tout ce qu’il y a d’important à faire connaître »40.

Le 5 août un ordre du jour interdit l’accès du Q.G. royal à « tout officier de quelque grade qu’il soit revêtu». Une manière élégante de bouter le général Belliard hors du quartier général et d’éviter son ingérence dans les affaires belges41.

 

40 Martinet, A., Léopold 1er et l’intervention française en 1831, pp. 161-162. Courrier de Belliard au maréchal Soult, le 6 août.

41 Archives du Musée Royal de l’Armée. Inventaire n° 3, boîte II, n° 8.

 

(p.272) Nonobstant les courriers successifs6 du Roi, le général Belliard ne crut pas devoir arrêter le mouvement des troupes françaises comme le Roi le lui demandait; en effet l’avant-garde franchit la frontière dès le 10 août. C’est la volonté de la France qui l’emporte sur celle du Roi. Déjà le 9 août, à Maubeuge, le maré­chal Gérard haranguait ses troupes : « L’Armée est appelée à proté­ger l’indépendance du peuple que la France place à la tête de ses amis »7. Ceci prouve que la détermination de la France à intervenir était déjà fixée avant le premier courrier du Roi.

 

6 II faut bien se rendre compte que l’unique moyen de communication se faisait par courrier à cheval. Le Roi ne disposait ni de GSM, ni de radio, ni d’intemet.

7 Archives Générales du Royaume, Fonds de Stassart.

 

(p.273)  «Le 11 au soir, de Brouckère, ministre de l’Intérieur, devenu aide de camp du Roi, arriva avec des pleins pouvoirs. Le général Daine devait exécuter les ordres que l’envoyé du Roi lui donnerait et régler tous ses mouvements d’après des instructions verbales que ce dernier avait reçues et qu ‘il était chargé de communiquer.

Une dépêche reçue dans le courant de la même journée du 11 faisait connaître que, le Roi se portant sur Ttrlemont, il aurait fallu se mettre en route immédiatement pour occuper l’ennemi d’un côté, tandis que le Roi l’aurait attaqué de l’autre10. En agis­sant ainsi, non seulement on aurait jeté la perturbation dans les dispositions de l’ennemi, déjà affaibli par les garnisons qu ‘il avait laissées sur sa ligne d’opération et par l’envoi d’une division sur Tervueren et Bruxelles, mais encore on aurait divisé ses forces, et facilité ainsi le succès de l’entreprise. Une éclatante revanche était offerte et l’humiliation d’une intervention étrangère pouvait être épargnée à la Belgique, explique le général de Failly.

Quelque sage que parût ce plan, Monsieur de Brouckère, se retranchant derrière les « instructions verbales » qu ‘il avait reçues, fit rester l’armée inactive à Liège jusqu’à la défaite de l’armée de l’Escaut et l’intervention française. La manœuvre est limpide, Charles de Brouckère, en retenant l’armée de la Meuse, laissait le passage libre pour une rencontre entre la Hollande et la France. Ce faisant, il humiliait l’armée belge et son chef [le Roi] ».

Or, il apparaît que de Brouckère ne pouvait ignorer la situa­tion délicate du Roi. Lorsqu’on reprend la lecture du courrier du Roi, il n’est pas croyable qu’il ait ordonné de laisser l’armée de la Meuse inactive à Liège. Il s’agit d’une manœuvre (personnelle) de Charles de Brouckère pour exposer le Roi. Un courrier, lui adressé

 

9 Hymans, L., Histoire Populaire du règne de Léopold 1er, Bruxelles 1865, pp. 93-95.

10 Cette disposition correspond au plan royal exprimé dans la lettre à Belliard.

 

(p.274) par un ami non identifié, donne des renseignements précieux sur la situation : « On se bat à Louvain depuis cinq heures du matin et chaudement; les Hollandais sont arrivés jusqu’à Tervueren et je ne vois pas qu’ici on eût les moyens de les repousser si surtout le combat de Louvain ne tourne pas à notre avantage. Le général Belliard nous a annoncé cette nuit, à deux heures, qu’une dépêche venue de La Haye faisait connaître que le Roi Guillaume n’avait jamais entendu se mettre en hostilités avec la France et qu’il transmettait l’ordre à ses troupes de se retirer de tous les lieux où paraîtraient les soldats français»11. Ceci démontre aussi combien Belliard était au courant de toutes ces démonstrations de forces militaires. Son objectif était de convenir aux manœuvres diploma­tiques de la France dont la Belgique était la clé.

(…) «Encore une fois c’est à la diplomatie, si puissante de nos jours, que la Belgique est redevable de n ‘avoir pu prendre la revanche sur l’ennemi. Le doigt de la diplomatie, veut-on le voir? Qu’on lise un discours prononcé par Monsieur Lebeau le 18 mars 1839, lors de la discussion sur le traité de paix et qu ‘on y remarque cette phrase: « Les événements de 1831 ont fait chan­ger les XVIII Articles, car la cause du Limbourg a été perdue dans les plaines de Louvain. « Etplus loin: « Croyez-vous que la France n’a pas applaudi aux événements de 1831, qui ont fait changer les XVIIIArticles en XXIVarticles ? » Les XVIII Articles

(p.275) En ouvrant la session de la Chambre des députés à Paris, le 24 juillet 1831, le roi Louis-Philippe déclarait avec bonheur que la Belgique ne ferait pas partie de la confédération germanique14.

«C’est le 13 août seulement que M. Ch. de Brouckère fit mettre l’armée de la Meuse en mouvement et il lui fit traverser la Hesbaye. Arrivée à Lumay, elle put voir l’armée ennemie concen­trée à Tirlemont opérant la retraite.

Qu ‘on ne blâme pas la France de son intervention, et que l’on reconnaisse qu ‘elle a rendu un grand service à l’humanité en empêchant des combats sanglants dans les plaines de Louvain, nous le voulons bien, dit le général de Failly. Mais pourquoi avoir cherché à humilier notre nationalité en qualifiant nos offi­ciers d’incapacité, et en tournant en ridicule la Garde Civique, tandis que ces braves et courageux citoyens, la plupart étrangers aux mœurs de la guerre, s’étaient portés avec tant de dévouement au secours de la patrie?

fl entrait probablement dans les combinaisons de la diplo­matie que la Belgique n ‘usât pas des dernières ressources qui lui restaient, et ces ressources étaient puissantes encore».

(p.280) Charles de Brouckère, pour des raisons personnelles, ne vouait aucune sympathie au général de Failly. Ce n’est qu’avec cette grille de lecture qu’il est possible de décrypter les comportements étranges de ce personnage6. De là tous les moyens développés pour infliger au général de Failly un affront en refusant le budget demandé. Quelques jours plus tard, dans la nuit du 3 août, c’est lui qui transmit à la presse, avec des commentaires diffamants, la nomination d’Amédée de Failly au grade de major-général et chef

 

6 C’est également pour des raisons de relations personnelles que de Brouckère est entré en conflit avec Van de Weyer en mars disant: «Je ne pouvais pas rester au cabinet avec le préopinant». Voir chap. VII, p. 89. Il en fut de même, en mai, avec Lebeau qu’il menace du poing.

 

(p.281) d’état-major de l’armée. C’est encore lui qui rédigea des arrêtés et des courriers ambigus par les termes employés pour en réduire la portée et le contenu. C’est toujours lui qui conseilla au Roi de ne pas accorder les pouvoirs nécessaires à la mission du général de Failly auprès de Daine afin de créer les conditions de l’échec de la Campagne des Dix Jours. Ce sont de Brouckère et Belliard qui exagérèrent la débâcle de l’armée de la Meuse. C’est de Brouckère aussi qui immobilisa l’armée de la Meuse à Liège. C’est lui qui, avec Mellon, attisa la vindicte populaire. Alors qu’il était arrivé au faîte de son pouvoir au ministère, il en abusa par ressentiment personnel envers les uns et les autres et pour régler ses comptes. C’est par aversion irraisonnée qu’il tenta de transformer la démis­sion du major-général en dégradation et, pour verrouiller cette déci­sion inique, il le fit par voie d’arrêté. Par la suite, c’est lui encore qui laissa lettres mortes les courriers d’Amédée de Failly, retiré de la vie active. C’est toujours lui qui, avec d’autres, dénigra l’action du général de Failly auprès de Huybrecht.

(p.283) Ce mot d’ordre ne concernait que les militaires et non les volontaires, encore moins les étrangers. Les Mémoires de Belliard recueillis par Vinet sont la première publication qui sortit de presse à Paris en 1842. Premier document concernant la Révolu­tion et la Campagne des Dix Jours, il eut un impact certain et une grande influence sur toutes les publications postérieures. Il fut donc la référence de beaucoup d’auteurs. Mais, se demande Victor de Failly, quel intérêt Belliard a-t-il eu à entretenir les rumeurs malveillantes ?

« On se demande en vain pour quel motif et dans quel but le ministre de France reprend ainsi et après coup, pour les relater dans ses Mémoires, des rumeurs dont l’origine était restée incon­nue. Je réponds que le général Belliard avait tout intérêt, même après les événements du mois d’août, à faire accréditer ces rumeurs et il pensait bien que, relatées par lui-même, elles n’auraient pas manqué d’être accueillies comme exposant la situation de l’armée belge sous son véritable jour. Il avait un double but: cacher le jeu  de son gouvernement à l’Europe d’abord, et démontrer ensuite à la Belgique que l’impossibilité dans laquelle elle se trouvait de repousser l’invasion avait été seule la cause de l’intervention de l’armée française. Il éloignait tout soupçon d’intrigues de sa part et se mettait à l’abri de toute accusation de connivence.

Le général Belliard présente aussi l’armée de la Meuse arri­vant à Liège dans la plus complète déroute. Or l’avant-garde de cette armée, avec la cavalerie et l’artillerie presque ‘au complet, fit dans le plus grand ordre sa retraite sur Liège et y arrivera le 9 août, à une heure du matin; le lendemain, 10 août, toutes les dispositions avaient été prises pour mettre l’armée en campagne à l’effectif de 12.000 hommes.

(p.283) L’auteur des Conspirations Militaires de 1831 [Eenens] vient encore à mon aide lorsqu ‘il dit: un fait curieux que nous croyons devoir mentionner, c’est que le général Belliard demanda au commandant déplace un rapport sur l’affaire de Louvain et que lui-même lui dicta ce rapport. Nous lisons, en effet, dans une lettre adressée par ce général à son premier secrétaire, M. A. Sol: « Envoyez le rapport au ministre, je l’ai signé. Le commandant de place a signé; je le lui ai dicté comme rapport qu’il me faisait; vous n ‘en parlerez pas 8. « 

Pourquoi, dit M. Eenens 9, le général se donnait-il la peine de dicter lui-même ce rapport qui ne le concernait pas ? C’était sans doute afin d’avoir une rédaction dans le sens le plus conve­nable à la politique de son gouvernement, qui avait tout intérêt à faire croire que la Belgique, trop faible pour résister seule à la Hollande, ne pouvait se passer de la tutelle de la France ».

Favoriser l’intervention de l’armée française faisait partie des projets de Belliard depuis son arrivée en février 1831 sur le terri­toire belge. Pour le comprendre, il faut remonter à la rencontre du 23 mars 1831 entre Gendebien, Belliard et Niellon. Ce dernier avait reçu des instructions précises de Belliard : « Si la colonne hollan­daise n’a pas encore franchi le territoire belge, ne prenez surtout pas l’initiative de l’attaquer. Ce n’est que lorsqu’elle aura passé la frontière que votre mission sera de la harceler pour retarder sa marche […]. Il est essentiel que l’armée française qui viendra vous secourir trouve un moyen dont elle puisse constater l’existence. Dès qu’une troupe hollandaise quelconque aura franchi la frontière belge, vous m’en donnerez avis »10.

La Conférence de Londres n’ignorait pas les intrigues qu’en­tretenait Belliard dans le petit monde politique et francophile de Bruxelles ; c’est pourquoi, fin mai, elle pria Ponsonby et Belliard de quitter la Belgique, sans délai. Trois semaines plus tard Belliard

 

8 Ceci autorise à se défier des informations que fournit Belliard dans son ouvrage et à le classer également parmi ceux qui manipulèrent l’information.

9 Eenens, Conspirations militaires, t. II, p. 221.

10 Niellon, Ch., Histoire des événements militaires…

 

(p.284) revint. Il est de plus en plus clair que, pour la diplomatie française, il était indispensable que les troupes hollandaises franchissent nos frontières donnant ainsi prétexte à une intervention de la France. Elle finit par y arriver grâce aux manœuvres conjointes de Charles de Brouckere et des membres de l’Association Nationale.

Les attaques à rencontre du général de Failly ont été une opportunité pour la diplomatie. Par la suite, ce climat diffamatoire a été intentionnellement entretenu pour détourner l’attention du public et occulter les errements, les défections, les comportements étranges de certains responsables politiques. Un écran derrière lequel pouvaient s’abriter et agir les vrais comploteurs n qui ten­tèrent de brader notre nationalité et l’honneur de la Belgique. En attribuant les causes de la défaite aux carences de l’armée et à son organisation défaillante, la presse, les romanciers historiographes et les mémorialistes détournèrent les esprits des véritables causes de cette défaite et justifièrent les errements politiques. Une guerre trouve souvent son origine dans la faiblesse de la diplomatie et de la politique et ce sont les militaires qui sont chargés de changer le cours des choses afin de restaurer la diplomatie. La guerre est, dans bien des cas, un prétexte. La diplomatie se pare de la victoire tandis que les armées sont accablées de toutes les erreurs.

Le général Belliard avait trouvé dans notre pays des partisans de sa politique. Il ne serait pas étonnant qu’Alexandre Gendebien lui ait donné tous les moyens pour ce faire lorsqu’il intriguait, à Paris, en faveur du choix d’un prince français et qu’à Bruxelles, il insistait pour faire élire le duc de Nemours par le Congrès. Belliard, profitant de ce courant en faveur de son pays, entretint des rela­tions avec Niellon12, de Brouckere, Gendebien, Chazal, Rogier et autres, favorables à un rattachement de la Belgique à la France. Ainsi noyautée, l’Association Nationale agissait en fonction des mots d’ordre qui lui étaient transmis.

 

11 Ceux-ci se retrouvent dans le groupe de l’Association Nationale et des franco­philes qui la fréquentaient.

12 Niellon représentait la force armée de l’Association Nationale dont il était membre. Il était aussi très populaire. Ancien régisseur de théâtre, ancien journaliste à la plume leste, il bénéficiait de l’attention sympathique de la presse. Il était puissamment soutenu par de Brouckère, Gendebien, Chazal et Rogier. Voir Mergnac, M.O. Charles Niellon…

 

(p.285) Lorsque la candidature du prince Léopold est présentée au Congrès par Van de Weyer et Lebeau, à la suite de plusieurs visites à Marlborough House14 chez le Prince, de Brouckère s’y oppose avec violence. Il s’y oppose parce que le prince Léopold est un ancien général prussien et que la presse orangiste le présente comme un aventurier anglo-saxon. Pour lui, si le prince Léopold est anglais comme le décrit la presse, il est certain qu’il suivra la ligne diplomatique anglaise et obéira aux protocoles de Londres. Ce point de vue est également défendu par certains milieux en France. Le souvenir de la politique anglaise en faveur d’une res­tauration des Pays-Bas reste vivace15. L’Association Nationale ainsi que de Brouckère craignent aussi un arrangement avec Guillaume d’Orange, comme le demande la Conférence de Londres. Pareillement à ses amis, il voit cette éventualité avec terreur. Voilà pourquoi tous les « pro » français deviennent des opposants au Roi Léopold 1er. Curieusement les orangistes se joignent aux franco­philes mais avec des objectifs diamétralement opposés. Quant au général de Failly, il est manifestement en faveur d’une monarchie et par conséquent de l’acceptation des Dix-Huit Articles, si c’est

 

14 D s’agit de la visite effectuée le 22 avril par le comte Félix de Merode, H. Vilain i, l’abbé de Foer et Henri de Brouckère. Ils sont rejoints à Londres le 10 mai par

Devaux, ministre d’État. Le 20 mai, cette commission rend compte au Congrès et, le 25 mai, la candidature du Prince est déposée sur le bureau du Congrès et signée par 87 membres sur 196. Mémoire Explicatif, pp. 46-47.

15 Sur cette question, le duc de Wellington reste fort sensible et son avis pèse dans les débats. Même s’il n’est plus à la tête des Affaires Étrangères à Londres, il est toujours consulté.

 

(p.286) là le prix de la paix à l’intérieur du pays, de la paix à l’extérieur, de notre indépendance et de notre souveraineté. Autant de raisons pour le menacer, même de mort et l’accabler de toutes les injures à la moindre occasion.

La Campagne des Dix Jours fut une opportunité pour les tenants de la diplomatie française qui nourrissaient l’espoir d’une guerre [et d’y entraîner la France] depuis la déclaration de mars et celle de juin 1831. En prenant l’initiative de l’offensive, les Pays-Bas offraient à la France toutes les chances d’intervenir16. Si une intervention était favorable à la France, elle pouvait l’être aussi sur le plan intérieur belge. En effet ce conflit offrait l’occasion de mettre en difficulté le nouveau roi et de le voir ridiculisé auprès de l’opinion par une défaite. Créer un tel chaos pour reconstruire sur un autre programme politique. Pour y parvenir, il devenait indis­pensable que de Brouckère entre au gouvernement afin de s’assu-rrer que le Roi, ancien général, ne puisse pas être victorieux sans le concours des forces françaises. Une défaite belge était nécessaire. Le 3 août au matin, pendant la délibération du Conseil présidé par le Roi, de Brouckère attendait dans les couloirs.

 

16 Wüpermann, W.E., De geschiedenis van de Tiendaagse Veldtocht, p. 83 : ordre du Roi Guillaume 1er d’attaquer la Belgique en date du 31 juillet 1831, à Breda: « Zijne Majesteit de Koning bevolen hebbende dat de vijandelijkheden een aanvang zouden nemen… »

 

NB Pour être victorieuse, une armée en offensive doit être trois fois supérieure à l’armée en défensive. Les Hollandais formaient 4 bataillons totalisant 36.000 combattants, ce qui était insuffisant pour battre les 60.000 combattants belges.

(p.287) Il devenait donc indispensable d’affaiblir le Roi en écartant le général de Failly de son entourage. Ce qui réussit. Et lorsque, avec une seule division et les Gardes Civiques qui l’entouraient, le Roi parvint à repousser les ultimes avancées hollandaises, il enjoignit Belliard de ne pas faire intervenir le maréchal Gérard et ses troupes. Mais les deux intrigants, de Brouckère et Belliard, s’arrangèrent malgré tout, le premier pour bloquer l’armée de la Meuse à Liège, 12.000 hommes prêts pourtant à intervenir, et le second pour faire entrer les troupes françaises sur le sol belge. Leurs machinations réussies, elles ne devaient pas être connues. Il restait alors à présenter l’armée de la Meuse comme anéantie et les officiers comme des traîtres19. Les rumeurs de complot et de trahison convenaient très bien au général Belliard, à Charles de Brouckère et à tant d’autres à leur suite. Ils ne se privèrent pas de les diffuser et d’occulter, par ce moyen, leur responsabilité.

«Le témoignage de Niellon donne raison à Monsieur Eenens, et cette explication de sa part dévoile complètement les agisse­ments de la diplomatie française et justifie tout ce que nous avons exposé», écrit Victor de Failly.

Ceci rejoint ainsi l’opinion du lieutenant-général Dumonceau20 : « Les moins éclairés, les plus fumeux même, commencent à s’aper­cevoir que la révolution belge n’a jamais été qu’une duperie dont le mouvement français21 a été le principal auteur et acteur»22.

 

18 Tout le groupe francophile du Congrès, à la suite de Charles de Brouckère, a certainement fait pression pour écarter de Failly.

19 Pour le général de Failly, Daine n’est pas le traître que l’on a présenté.

20 Dumonceau est belge mais resté au service de la Hollande comme beaucoup d’autres belges.

21 «Le Mouvement français », il faut entendre le groupe profrançais de Gendebien de l’Association nationale.

22 Brabant, W. Lieutenant-général comte Jean François Dumonceau : Lettre à son épouse, 5 juin 1832, p. 33.

 

(p.288) « Monsieur de Brouckère signala son début au ministère de la Guerre par l’introduction dans l’armée d’officiers français de tous grades. Nouvelle preuve d’accords avec la politique française. Cette mesure, contre laquelle mon père s’était toujours élevé pour des motifs longuement développés, fut exécutée avec la plus grande rigueur après les événements du mois d’août 1831 ».

Les fortifications23 sur les frontières sud du pays furent démantelées à la demande de la France dès septembre 1831 et l’accord de démilitarisation signé à Londres le 15 novembre suivant24. Il fallut encore plusieurs mois pour déloger les Hollandais de la citadelle d’Anvers. Quant au général Chassé, fait prisonnier, c’est en France qu’il fut jugé. L’organisation de l’armée belge fut calquée sur celle de la France.

On doit se poser la question de savoir comment tout cela a pu être possible. Il fallait des complicités. N’oublions pas la puissante Association Nationale, État dans l’État comme l’écrit le général de Failly, omniprésente dans tous les rouages de l’administration. N’oublions pas que Charles de Brouckère prend place dans chaque gouvernement, malgré ses démissions répétées et fracassantes. Il a donc eu le loisir d’y faire entrer des personnes dévouées à sa cause, disposées à diffuser sa version des faits à tous venants. On trouve en priorité dans l’administration des francophones bruxel­lois. Par la suite, il a demandé dans les administrations de rayer le nom de Failly, de le mettre sur la touche, comme on dit en jargon administratif25, et pour cela il fallait salir sa réputation. La presse et les écrivassiers s’en occupèrent.

 

23 Cet accord comprend les forteresses de Philippeville, Mariembourg, Mons, Ath et Menin. Le duc de Wellington, parrain des Pays-Bas en 1815, était le plus farouche­ment opposé à cette démilitarisation. C’est le général Goblet qui a été chargé de négocier au nom du gouvernement belge.

24 À la même date, Van de Weyer signait l’accord sur le protocole des XXIV Articles.

25 Toutes références, courriers ou notes rappelant l’existence même du général de Failly ou son passage au ministère de la Guerre ont été systématiquement effacés.

 

(p.290) Peu de temps après la Campagne des Dix Jours, une Com­mission Militaire d’Enquête fut mise en place, à la demande de la Chambre des Représentants.

Le comte de Lichtervelde, dans son ouvrage sur Léopold 1er, fait le commentaire suivant concernant la Commission d’Enquête. « C’est le 25 septembre 1831 que Monsieur Dumortier déposa une demande d’enquête parlementaire sur les causes de la défaite. Monsieur de Brouckère fut le seul à présenter des objections. Mon­sieur Gendebien formula un programme de 79 questions à élucider. L’enquête fut votée par 63 voix et 3 abstentions. Le 6 novembre sui­vant, la Chambre fut amenée à constater que la tâche dévolue à la commission d’enquête était singulièrement ardue ; pour la mener à bien, celle-ci aurait dû être investie de pouvoirs spéciaux; de plus, un de ses membres avait posé 21 questions qui soulevaient des

 

26 Pour s’en rendre compte, il suffit de voir avec quelle célérité et application, le ministère

s’occupa des créances de Niellon, durant plus de 30 ans. Mergnac, M.O., Charles Niellon…

27 La biographie du général de Failly pourrait apparaître dans le Dictionnaire des Belges ou dans les volumes des Biographies Nationales, là comme ailleurs c’est l’amnésie. Par contre, lorsqu’il s’agit de faire des commentaires désobligeants, la souvenance avec sa logorrhée adaptée refait surface.

 

(p.291) problèmes techniques délicats et mettaient directement en cause le Roi, commandant en chef de l’armée. Le 30 novembre, Ch. de Brouckère reprit l’offensive en démontrant le caractère anormal d’une enquête de ce genre. Monsieur Lebeau intervint le lende­main. La majorité sentit que ce serait vain de chercher un bouc émissaire. Par 48 voix contre 31, la Chambre refusa à la Commis­sion les pouvoirs nécessaires. L’enquête fut suspendue »28.

L’échec de la Campagne eut cependant un grand retentisse­ment dans le public et l’on ne se priva pas de crier à la trahison. (…)

 

28 de Lichtervelde, L., Léopold 1″, Bruxelles 1929.

 

(p.292) Afin de brouiller les informations, Charles de Brouckère n’hé­sita pas non plus à les fausser à la tribune du Parlement en décla­rant en janvier 1832 : «Lors de l’invasion, l’armée ne se composait que de 20.000 hommes de ligne».

«Mon père protesta immédiatement par la lettre suivante», dit Victor de Failly:

(p.295) «Ainsi Monsieur de Brouckère ne nie pas que les forces de l’armée s’étaient élevées à 64.000 hommes, mais il soutient que l’armée mobile placée entre Anvers et Maestricht ne comportait que 20.000 hommes seulement».

Ce sujet a été suffisamment développé pour ne plus y reve­nir. En affirmant cela, de Brouckère justifie l’entrée des troupes françaises sur le territoire belge. Il est impératif pour lui d’éviter de faire connaître au grand jour qu’une armée de la Meuse avec 12.000 hommes attendait l’arme au pied à Liège, sur son ordre.

La Commission Militaire supprimée, l’interdiction de publier des souvenirs proclamée, il y eut donc occultation totale de la vérité. Si l’interdiction de publier était justifiée dans le but d’éteindre les passions, ce sont des versions tendancieuses qui furent répandues dans le public toujours avide de scandales. Contre ce flot de demi-vérités, d’amalgames, de faux-vrais, était-il possible de résister?

 

(p.305) Cette Campagne de Dix Jours, qui en a duré onze, présente tant d’incidents, tant de singularités, tant de faits restés incom­préhensibles et apparemment inexplicables. Il y eut tant de négligences et de défections qu’on ne peut en attribuer la défaite à un seul homme. Elle a surtout été suivie d’une intense campagne de désinformation et de manipulation.

De son côté, le Roi rencontra beaucoup de difficultés à maîtri­ser les arcanes et les manigances des partis qui s’affrontaient, au point que, de déception, il songea sérieusement à quitter le pays. Ce qui l’en empêcha ce fut l’attachement du peuple à sa personne. Dans une lettre à Louis-Philippe, son beau-père, il écrit les mots suivants : « Les seuls véritables Belges de cœur et d’âme sont nos bons catholiques, le reste est un salami de cosmopolites « fit for nothing »; eux peuvent donc exprimer leur allégresse au grand Opéra par des jeux et des danses « but I beg to be of the party » ; car détruire dans un pays aussi faible sa meilleure base d’existence sociale et politique est un malheur qu’on peut supporter mais dont à coup sûr on ne peut qu’éprouver de bien grands regrets49».

Un puissant comité central orangiste s’activait à Bruxelles. Une partie de la presse était achetée par les orangistes : Le Courrier Belge, le Messager de Gand, le Lynx, etc. Dans certains milieux de la bourgeoisie et de l’aristocratie, il était de bon ton de se montrer ouvertement grossier envers le Roi. À Anvers, le président d’une société, La Loyauté, conservait dans une fiole les larmes du prince d’ d’Orange.

 

49 Lettre du Roi à Louis-Philippe, Roi des Français, dans laquelle il parle de ses démêlés avec nos illustres radicaux en office au sujet du discours du Trône. Laeken, 8 novembre 1847. Musée de la Dynastie, Bruxelles.

 

(p.308) Il suffisait de se déclarer patriote et révolutionnaire pour devenir le justicier de son voisin. Même Niellon n’échappa pas aux rumeurs lorsqu’il fut gou­verneur militaire des deux Flandres. À cette époque, il ne résidait plus à Bruxelles avec ses amis. Quoique fort apprécié à Gand, une rancœur sourde naquit en Flandre envers la coterie que forment les Volontaires de Bruxelles et les Français jouissant de l’appui inconditionnel des politiques francophiles avec faveurs et petits privilèges. À l’état-major, Niellon n’était plus en odeur de sainteté et son esprit d’indépendance lui est vivement reproché : « Relati­vement aux observations que j’ai faites, lui écrit en avril 1832 le chef d’état-major, je dois convenu » qu’elles auraient été moins fré­quentes si je n’avais remarqué chez vous de la disposition à vous affranchir d’une autorité centrale »62.

 

62 Mergnac, M.O., Charles Niellon un aventurier bourguignon, p. 116.

 

(p.313) Conclusion

Pendant dix ans, Xerxès, successeur de Darius, prépare sa revanche contre les Grecs. Pendant ce temps, la Grèce, divisée, est inconsciente du danger. Certaines cités se déclarent neutres, d’autres sont favorables aux Perses. Seules les villes d’Athènes, Sparte et les cités d’Eubée décident de résister. L’effort militaire le plus important est fourni par Athènes qui, sur proposition de Thémistocle, décide de construire cent navires de guerre bien équipés: les trières.

 

THÉMISTOCLE FUT L’OBJET DE VIOLENTES ATTAQUES de la part de ses ennemis, qui étaient en nombre. Par son attitude, il donnait prise aux critiques et aux calomnies qu’accueillaient volontiers, selon Plutarque, ses concitoyens jaloux de sa gloire.

Les Athéniens, donc, pour rabattre la considération et l’auto­rité dont il jouissait, le punirent par l’ostracisme, comme ils avaient coutume de le faire pour tous ceux qui les gênaient et dont ils pensaient qu’ils s’élevaient trop au-dessus de l’égalité démo­cratique. Car l’ostracisme était un moyen d’apaiser, de soulager cette jalousie qui se plaît à abaisser les hommes trop élevés et qui exhale sa malveillance en les frappant ainsi d’indignité, en les dégradant. Mais on ne déshonore pas un homme qui sait mourir.

La comparaison entre Thémistocle, général d’Athènes, et le major-général Amédée baron de Failly est sans doute audacieuse. Mais, l’exemple du premier permet d’éclairer le destin tragique du second.

 

Alexandre Gendebien, francophile

(coll. Nos Gloires, s.d.)

Frans Van Kalken, Histoire du Royaume des Pays-Bas et de la révolution belge de 1830, Bruxelles, s.d.

 

(p.27) (…) un certain nombre de membres de la classe moyenne désiraient le maintien de la domination française, par attache­ment aux principes de 89, ou par admiration pour la centralisation impériale, mode de gouvernement plutôt opportun — il faut en convenir — dans nos provinces ultra-particularistes. C’étaient pour la plupart des officiers et des fonctionnaires belges autrefois au service de Napoléon, ou des républicains français et des bonapartistes émigrés après la restau­ration des Bourbons. Peu nombreux et isolés au milieu d’une population pleine de rancune au souvenir du régime de coercition qu’elle venait de subir, ils ne semblent guère avoir fait, en 1814, de propagande en faveur de leurs idées.

 

(p..34) Nous n’avons pas à retracer ici, en détail, la période des Cent-Jours. L’armée hollando-belge, à peine créée, fut hâtivement mobilisée, puis encadrée dans les troupes d’élite du duc de Wellington. Quoi­que jeunes et inexpérimentés, les soldats belges et bataves surent, par deux fois, rivaliser en intrépidité et en force d’endurance avec les vétérans de Sa Majesté Britannique (3) : le 16 juin aux Quatre-Bras, en repoussant, sous les ordres du prince d’Orange, fils aîné de Guillaume Ier, les soldats du maréchal Ney; le 18, à Waterloo, en défendant la ferme de la Haye-Sainte et en participant à la dernière attaque contre les grenadiers de la garde (4). Fait à noter : ce furent

 

(3)  Le fait est d’autant plus notoire qu’au début de 1814 l’on avait, dans plusieurs villes belges, dû procéder aux opérations du tirage au sort avec l’appui de la force armée, tant les nouvelles lois de milice, pourtant si nécessaires, avaient été mal accueillies par les jeunes gens et leurs familles. Voir buffin, Documents inédits, Introduction, p. vu.

 

(4) Sur la campagne de 1815, voir F. db bas et comte J. db T’SERclaES de wommersom, La Campagne de 1815 aux Pays-Bas, d’après les rapports officiels néerlandais (3 vol., Bruxelles, 1908, A. Dewit). Ce grand ouvrage, fruit de longues et judicieuses études, met définitivement fin à la légende calomnieuse de la lâcheté des troupes hollando-belges, durant la campagne de 1815.

 

(p.35) Durant cette grande journée de Waterloo, les généraux, officiers et soldats du prince d’Orange payèrent héroïquement de leur personne. Le prince fut même blessé à l’assaut final. Certains historiens étrangers ont cherché dans la suite à diminuer la valeur des troupes hollando-belges, avec l’intention de mettre d’autant plus en relief les mérites de leurs compatriotes. Les Alliés, en 1815, furent plus justes. Le général Pirch, s’adressant au maire de Namur, disait : « De tous temps, les Belges se sont montrés un peuple brave, généreux et vail­lant. » Blücher, dans une. proclamation « aux braves Belges », les apostrophait ainsi : « Vous êtes un peuple brave, loyal et noble… »

 

Jusqu’à la fin de la guerre les soldats du nouveau royaume firent loyalement leur devoir, participant à l’envahissement du nord de la France et aux sièges du Quesnoy, de Condé et de Valenciennes.

 

(p.41)  La première session des États généraux fut des plus mornes. Les députés, dont un grand nombre étaient de naissance aristocratique, ne sortirent de leur torpeur qu’à propos d’une loi sur la chasse. Le pro­tocole de Londres avait, fort heureusement pour les Belges, stipulé que la Grondwet hollandaise serait révisée « de commun accord » avant d’être appliquée dans le nouveau royaume. Une commission de vingt-deux membres, composée de onze Belges et d’autant de Hollandais, sous la présidence de Van Hogendorp, fut réunie à La Haye, le 22 avril 1815. Les délégués du Sud avaient été choisis de façon à représenter toute la gamme des opinions du temps.

 

(p.43) Il fut décidé, sans difficulté, que le pays serait divisé en dix-sept provinces et que Bruxelles et La Haye seraient alternativement, d’année en année, ville capitale et siège du Parle­ment (1). Après de longs débats, on admit que le pouvoir législatif, conservant le nom un peu suranné de Staten-Generaal (États généraux), comprendrait : 1° une Chambre Haute, de quarante à soixante membres, nommés à vie par le roi, et où l’emploi de la langue française serait exclusif; 2° une Seconde Chambre de cent dix députés âgés de trente ans au moins, et où l’emploi des deux langues serait facultatif (2).

 

 (1) Les dix-sept provinces du royaume des Pays-Bas furent : Anvers, Brabant méridional, Brabant septentrional, Drenthe, Flandre occiden­tale, Flandre orientale, Frise,  Gueldre,  Groningen,   Hainaut,  Hol­lande, Liège, Limbourg, Namur, Overijssel, Utrecht, Zélande.

(2) De même, l’emploi des deux langues fut   facultatif au conseil d’État. Le Staatscourant (journal officiel) fut bilingue. Le gouvernement usa des deux idiomes pour ses communications importantes. Quant au roi, il se servait du hollandais lorsqu’il parlait aux Chambres.

 

(p.44)  Il fut alors établi que le Parlement comprendrait un chiffre égal (55) de députés des deux nations (i). Cette solution qui, en i8i5, ne rencontra guère d’opposition, devait dans la suite, lorsque le peuple belge s’éveilla à la vie politique, lui apparaître comme injuste et humiliante.

 

(p.44)  On sait que le catholicisme — tout-puissant sous l’ancien régime — avait su con­server en Belgique d’excellentes positions, même après avoir subi la tourmente révolutionnaire et le régime impérial. S’appuyant sur une population très fervente, sur la noblesse et la vieille bourgeoisie réactionnaires, le clergé, bien discipliné, avait fait, dès 1814, de grands efforts pour obtenir la restauration de l’ancien régime. Rentré de l’exil où l’avaient mené ses démêlés avec Napoléon Ier, l’évêque de Gand, Maurice de Broglie (…).

 

(p.55) La grande disette de 1816-1817 fournit à Guil­laume, dès le début, l’occasion de révéler ses hautes qualités (2). Le peuple affamé s’étant mis à piller les boulangeries, à Bruxelles et dans plusieurs autres villes, il contribua, par des avances personnelles d’argent, à ramener l’ordre sans devoir recourir à la répression violente. Il montra les mêmes sentiments d’humanité et de générosité lors des terribles inonda­tions de 1820 et de 1825.

 

(p.58)  Le paupérisme disparut, vivement combattu par la Société de Bienfaisance (Maatschappij van Weldadigheid, 1821). On ne signalait pas cinquante mille indigents dans tout le royaume, en i83o!

Guillaume ne se borna pas à porter de l’intérêt seu­lement aux questions d’ordre purement économique ; il voulut aussi relever le peuple en l’instruisant. Dans le Sud sa tâche fut à la fois très dure et très délicate. On sait combien les Belges, peu favorisés par le sort, manquaient de culture intellectuelle. Avec l’aide d’Anton Reinhard Falck, son excellent ministre de l’Instruction publique, des Colonies et de l’Industrie depuis 1818 (i), Guillaume Ier agit en prince plus éclairé qu’aucun autre de son époque : il rénova l’enseignement à tous les degrés (2). Dès i8i5, la loi scolaire hollandaise de 1806, établissant un enseigne­ment primaire, neutre, gratuit, donné par des instituteurs diplômés, (p.59) sous le contrôle de l’État, fut étendue à tout le royaume. Un maître d’école néerlandais, catholique, excellent pédagogue, Schreuder, fut mis à la tête de la nouvelle école normale de Lierre. En quinze ans, près de quinze cents écoles primaires furent édifiées, près de deux mille jeunes gens reçurent le brevet d’instituteur leur assurant une carrière juste­ment rémunérée, plus de trois cent mille élèves fréquentèrent les quatre mille écoles élémentaires de l’État ! Dans ces conditions favorables, le chiffre des analphabètes entra en décroissance rapide (1).

Les études moyennes et supérieures furent réorga­nisées par le règlement du 25 septembre 1816, créant plusieurs athénées (Bruxelles, Maestricht, Bruges, Tournai, Namur, Anvers, Luxembourg) et établissant les trois universités de Louvain, de Liège et de Gand. Tout en nommant dans ces dernières, en règle générale, des professeurs belges, le gouvernement fit également appel aux lumières de savants allemands et hollandais, tels Warnkoenig, Thorbecke, futur ministre et chef de cabinet, homme d’État célèbre, qui enseigna les sciences politiques à Gand, Schrant, pro­fesseur de littérature, prêtre amstellodamien, connu pour la fière indépendance de son caractère. Soutenu par les dons en espèces de particuliers généreux, le gouvernement multiplia le nombre des cours publics, musées, observatoires et laboratoires. Tandis que la Société Tôt Nui van ‘t Algemeen (d’Utilité publique) créait partout des cours d’adultes et des bibliothèques populaires, il rétablissait l’ancienne Académie royale des sciences et des belles-lettres de Bruxelles, fondée par Marie-Thérèse (1816), installait dans la capitale

 

(1)   Selon le rapport ministériel du Ier janvier 1826, on ne rencontrait plus, à cette époque, dans tout le royaume, que 241,392 illettrés sur 6,157,286 habitants. Sur ce chiffre, 228,000 analphabètes habitaient les petites communes belges.

 

 

(p.60) une commission chargée de publier les ouvrages des anciens historiens et annalistes belges, les Scriptores rerum belgicarum, favorisait les arts et la littérature, protégeant avant tout les institutions susceptibles de développer, dans l’âme des citoyens, les sentiments de patriotisme et les vertus civiques.

Telle fut, en résumé, l’œuvre de réorganisation du roi Guillaume. Il la conçut avec une grande élévation de pensée, dans le désir sincère de témoigner à tous ses sujets une égale bienveillance. S’il faillit parfois à ses devoirs d’équité, il faut reconnaître que ce fut plutôt à l’avantage des Belges et de leur industrie et au détriment de ses compatriotes. Aussi Guillaume fut-il pour la majorité des usiniers, manufacturiers et grands commerçants du Sud, le souverain idéal. Ses réformes dans le domaine intellectuel frappèrent moins le grand public encore peu à même de les apprécier. Une petite élite seulement applaudit à ses efforts tout en regrettant qu’ils eussent parfois une tendance trop antifrançaise et que, pour lui, le terme esprit national se confondît trop souvent avec celui d’esprit hollandais.

 

(p.61) Durant les cinq ou six dernières années du règne de Guillaume sur les Pays-Bas, ce royaume ne fut plus, en réalité, qu’un « État napoléonien à façade constitutionnelle », comme l’a dit sévèrement Thorbecke. Resté seul à la tête des affaires, seul chef de l’administration, le roi devait, seul aussi, supporter toute la responsabilité de ses actes. Or, parmi tant de décrets rendus par lui, beaucoup, trop absolus, trop hollandais de tendances, ou formulés mal à propos, constituèrent des mala­dresses. Certaines catégories de Belges, blessées dans leurs sentiments ou lésées dans leurs intérêts, en vinrent bientôt à formuler des plaintes. (…)

(.62) —

Ayant à parler ultérieurement des réclamations contre les abus gouvernementaux dans le domaine administratif, signalons tout d’abord la question des langues. Se basant sur ce fait que le néerlandais était parlé par les trois quarts de la population du royaume, Guillaume Ier voulut en faire l’idiome natio­nal. Sous les régimes républicain et impérial, le fran­çais avait été d’emploi officiel exclusif. Par un décret fort équitable, du Ier octobre 1814, le prince souve­rain avait commencé par rétablir le libre emploi des langues, comme sous l’ancien régime. Malheureu­sement son initiative ne s’en tint pas là. Le i5 sep­tembre 1819, il décrétait qu’à partir du Ier janvier 1823, le néerlandais serait d’usage légal, dans les administrations, les cours et tribunaux, l’armée, etc., à l’exclusion de toute autre langue, dans les provinces d’Anvers, de Limbourg et les Flandres ; le 26 octobre 1822, il étendait cette décision aux arrondissements de Louvain et de Bruxelles. Aussitôt naquit une agitation fort vive au sein de la bourgeoisie, même de celle du pays flamand qui, au temps de la Répu­blique et de l’Empire, s’était de plus en plus attachée à l’emploi du français. Les fonctionnaires wallons, les membres du barreau, les avoués, notaires et étudiants, les officiers, et, en général, tous ceux qui occupaient les carrières libérales, réclamèrent vive­ment le maintien de l’emploi facultatif des deux idiomes. Le peuple des campagnes, parlant ses dialectes locaux, se désintéressait de la question, (p.63) mais, sous l’influence des châtelains, des curés hos­tiles à la diffusion de la littérature hollandaise protes­tante dans leurs paroisses, il en arriva à partager le mécontentement général. Durant la période trien­nale où l’emploi des deux langues fut autorisé facul­tativement, aucune cause ne fut jugée en néerlandais. Guillaume ayant néanmoins persisté dans sa manière de voir, beaucoup de difficultés d’ordre pratique surgirent. A la Seconde Chambre, les rapports entre députés hollandais et belges devinrent aigres, surtout lorsque ces derniers se mirent à réclamer avec quelque affectation la traduction fastidieuse et mono­tone des discours néerlandais de leurs collègues.

 

Les réformes judiciaires du roi Guillaume furent conçues dans un sens tout aussi antifrançais (2). Il avait supprimé le jury, le 6 novembre 1814; il n’osa pas faire de même du Code civil, dont il blâmait cependant et la lettre et l’esprit. Ses efforts, en 1820, pour le faire modifier par la Seconde Chambre, échouèrent presque totalement devant l’énergique opposition de Dotrenge et du député de la Flandre occidentale Louis-Augustin Reyphins, orateur dont les gestes trop amples et l’accent de terroir ne parvenaient pas à diminuer la valeur, comme dialecticien rude et énergique. Quelques autres mesures encore, moins importantes, indispo­sèrent la magistrature, tout imprégnée de culture française.

(p. 65) (…), la Hollande voyait sa dette active s’élever à environ 575,5oo,ooo florins et sa dette différée dépasser le milliard ! Or, les puis­sances avaient stipulé que la Belgique supporterait la moitié des charges publiques du royaume des Pays-Bas! On conçoit le mécontentement de nos pères vis-à-vis de cette mesure, assez peu justifiable (2). Pendant quelques années, la Seconde Chambre, non familiarisée avec les questions financières, si com­plexes par- leur nature même, placée d’ailleurs dans l’impossibilité de contrôler la gestion des deniers de l’État par le souverain, resta silencieuse. Puis, peu à peu, une opposition se forma parmi les députés du Sud et bientôt, au nombre de ses thèmes favoris, figu­rèrent l’accroissement continuel de la dette publique (…)

 

(p.85) Vexés par les attaques des bonapartistes réfugiés en Belgique, les Alliés se plaignirent de la ‘licence effrénée de la presse aux Pays-Bas », et poussèrent Guillaume Ier à se montrer encore plus sévère. (…à)

 

(p.126)  /1830/

(…) renforcés dans la nuit par des enrôlés volon­taires, notamment par de nombreux Français, les défenseurs de l’ordre furent bientôt deux mille, parmi lesquels un certain nombre de cavaliers. Ils prirent pour chef le baron Emmanuel Vanderlinden d’Hoogvorst, homme riche et considéré, modéré, intègre et sans ambition ; pour sous-chefs le général Van der Smissen et le non moins intrépide Charles Pletinckx, ex-officier de cavalerie à l’armée des Indes, devenu propriétaire de l’Hôtel de la Paix. Le 27 ils occupèrent tous les bâtiments publics, les banques, les églises.

 

(p.156) Surexcités par les discours enflammés qu’ils y entendaient, des volontaires allèrent, le 18, au mépris de tout engage­ment, provoquer les avant-postes hollandais, à Vilvorde et à Tervueren (i). La commission fit afficher sur-le-champ une proclamation désavouant leurs actes. Le même jour, les délégués de la commission auprès des députés à La Haye, Nicolaï et Vleminckx, revin­rent, ayant reçu pour seule réponse qu’il serait opportun d’entrer en négociations avec le prince d’Orange. En somme, devant les lenteurs calculées de Guillaume Ier, aucun chef de groupe ne savait quelle tactique adopter. Le peuple, travaillé par les émis­saires français et voyant ses chefs indécis, divisés, tiraillés entre cent résolutions contraires, était à bout de patience. Prévoyant une explosion et ne voulant pas attendre que le populaire mécontent vînt « le jeter par les croisées », Pletinckx, sous-chef de la garde bourgeoise, avait donné sa démission le 18, et son exemple avait été suivi par plusieurs notables (2).

 

Pierre Louvigny, Quand les Français offrirent Liège à la Prusse …, LB 08/08/1980

 

‘Dans le livre du baron Camille Buffin sur la jeunesse de « Léopold Ier » (1914), on trouve des indications sur l’attitude du gouvernement français en 1830-31: « Le général Sébastiani (ministre des affaires étrangères) et plus tard maréchal de France et le prince Talleyrand, ambassadeur à Londres, suivaient une autre combinaison au profit des puissances; /ce qu’Alexandre Gendebien, reçu le 6 janvier 1831 chez le ministre Sébastiani, refusa au nom du gouvernement belge/ l’Angleterre prendrait Ostende, Anvers et toute la rive gauche de l’Escaut, la Prusse la rive droite de la Meuse, Maastricht et Liège; la Hollande garderait comme frontière le Demer jusqu’à Liège; la France aurait le reste des provinces révoltées, c’est-à-dire la part la plus considérable … »

 

/Historicus/, De Franse politiek en de Nederlanden (2), in : Delta, jan. 2000, p.15-16

 

Het Belgische leger …stond van bij de aanvang onder bevel van volgende Opperofficieren:

Generaal Niellon (zie ook bijdrage 1)

Generaal Desprez

Generaal Evain (later Minister van Oorlog)

Generaal Nempde

Generaal Picquet

Generaal Grundler

Generaal Billiard

Generaal Hotton

Baron Prisse

Prince Achille Murat, de latere chef van

het vreemdelingenlegioen

 

(p.16) Allen, zonder uitzondering waren Fransen en hebben steeds hun FRANS uniform en hun FRANSE eretekens gedragen!

 

De ware bedoelingen…

 

Uit een brief van Charles Rogier, Fransman herkomstig uit Arras (Atrecht), België’s eerste Minister van Buitenlandse Zaken, aan de Engelse Premier Lord Palmerston:

 » De pogingen van onze Regering moeten er toe strekken de Vlaamse taal uit te roeien, om de versmelting met ons groot vaderland Frankrijk, voor..te bereiden…. » (1931}

 

Uit een geheim vlugschrift van het jaar 115:

  » Er is geen Waalse natie, maar door de gril van de diplomaten van 1830 is er een Belgische staat, verfoeilijke, kunstmatige schepping! Walen! De Rogiers, de Gendebiens, de Surlets waren de welsprekende tolken der Walen. Zij spanden al hun krachten in, om van België een F ranse provincie te maken, onder Frans bewind en zij wilden in dit land de Franse gedachte doen rijpen tot glorie van Frankrijk….. ».

 

Stemmen over 1830:

« de grote fopperij van 1830 » (Prof Fr. Laurent, Gent)

 » Een grove dwaling, een misdaad tegen de veiligheid van Europa » (Prof E. de Laveleye)

« Het grote ongeluk » (Prof Goblet d’Aviela)

 » De Belgische omwenteling heeft als vertrekpunt gehad een opstootje ingericht door de Parijzer clubs, met een Frans doelwit » (Proc. -Gener. de Bavay in  » Histoire de la Révolution belge », 1873).

 

 » Het ware misschien beter geweest dat ons lot, dat zo lang één was, nooit ware gescheiden geweest » (Burgemeester Karel Buls, Brussel, op 18/8/1883 in een rede tot Nederlandse

schutterijofficieren).

 

« Het onzalige jaar 1830 » (Prof. P. Fredericq)

 

Hervé Hasquin, éd., La Wallonie, le Pays et les Hommes, TII, La Renaissance du Livre, 1976

 

(p.11) I – 1830 EN WALLONIE

 

(…) Jusqu’en 1825, l’opposition envers le gouver­nement de Guillaume Ier fut essentiellement le fait des catholiques, surtout dans les provinces flamandes et dans les campagnes où le petit clergé, très proche du peuple, agitait les esprits et préparait des pétitionnements. Les libéraux, anticléricaux, qui prédomi­naient en Wallonie, et de façon générale dans toutes les grandes villes du pays, n’avaient pas eu au début les mêmes scrupules.

 

(p.15) Le raz de marée qui traverse la Wallonie à la suite de la victoire du Parc trouve son écho en Flandre où le peuple se soulève à son tour, et chasse l’armée hollandaise, à l’exception des places fortes d’Anvers et de Maastricht. Le pays est libéré du Luxembourg à Venlo. L’effondrement du régime hollandais crée une vacance du pouvoir. Les dirigeants bourgeois des insurgés, qui lors de l’attaque hollandaise avaient prudemment fait retraite sur la Fran­ce, s’étaient rapidement ressaisis. Rentrés dès le 25 à Bruxelles, ils constituent un Gouverne­ment provisoire, groupant tant des personna­lités libérales comme Rogier, Van de Weyer et Gendebien, que catholiques, le comte Félix de Mérode et le baron van der Linden d’Hoogvorst et s’efforcent de reprendre la situation en main.

 

(p.17) Vers la fin de 1830, les événements révolution­naires sont trop proches et la vigilance du Gouvernement unioniste trop bien exercée pour qu’il soit permis aux partisans de la restauration de s’exprimer trop ouvertement. Au contraire, au moment où ce même Gouver­nement semble se pencher vers une alliance étroite avec la France, les sentiments franco­philes rencontrent beaucoup de sympathie parmi (p.18) les masses. Tous les rapports concordent pour reconnaître qu’en Wallonie, dans le Hainaut, mais particulièrement à Liège et à Verviers un vaste courant fait d’affection et d’intérêts pousse l’opinion publique vers la France.

Les pétitions circulent du Borinage au Pays de Liège, en passant par Philippeville et Fontaine-l’Évêque, demandant la réunion à la France du roi Louis-Philippe. Le bruit court que les drapeaux tricolores français sont prêts et que les cocardes seront distribuées aux ouvriers.

 

Le Gouvernement et les autorités provinciales et communales multiplient les appels au cal­me, mais la propagande réunioniste est réper­cutée en Wallonie par Y Industrie et le Journal de la Province, à Liège, par le Journal de Verviers, par l’Observateur du Hainaut. Devant l’hostilité déclarée des grandes puis­sances et des unionistes envers la solution réunioniste, l’espoir de ses partisans s’oriente vers une solution de rechange. Alors que le Congrès aborde la question du choix du futur roi des Belges, ils soutiennent la candidature du duc de Nemours, fils de Louis-Philippe, dans l’espoir de se garantir la sympathie bien­veillante de la France. L’élection de ce prince au trône de Belgique, le 3 février 1831, est saluée avec allégresse dans toute la Wallonie. Le canon tonne à Mons, Charleroi, Binche, (p.19) Liège et Verviers; partout ce sont des feux de joie et des illuminations. Le désarroi est com­plet parmi les partisans de la France lorsqu’ils apprennent que Louis-Philippe a refusé d’accepter la couronne pour son fils. Dès ce moment, le mouvement perd toute la spontanéité qui faisait sa force réelle. Sans doute, confiants dans la profondeur des senti­ments francophiles qui existent effectivement dans les masses populaires — nous en donne­rons encore un exemple significatif —, quel­ques activistes (ils sont peu nombreux), com­me l’avocat Jean-Baptiste Teste, Français exilé à Liège depuis 1815, et le bourgmestre de Verviers, David, s’illusionneront-ils encore sur la possibilité de soulever les masses ouvrières en faveur de la France. Un mouvement dans ce sens fut même envisagé pour le dimanche 16 juin 1831. David devait se mettre à la tête des ouvriers de Verviers et marcher sur Liège, bannières tricolores déployées. Les réunionis­tes liégeois soulevant à leur tour les ouvriers du bassin industriel, devaient, à la faveur de la surprise, s’emparer des postes clefs de la ville, tandis qu’à l’annonce de ce succès, Mons Charleroi et Tournai se seraient soulevés. Seule la pluie aurait entraîné, selon un des conspirateurs, le Comité directeur à postposer la manifestation. En réalité, ce complot était devenu le secret de polichinelle. Le Gouverne­ment était dûment prévenu et avait fait pren­dre des mesures de protection par les com­mandants militaires des provinces wallonnes. Une véritable organisation faisait cruellement défaut dans le mouvement réunioniste; seuls leurs journaux faisaient encore quelques bruits par leurs articles passionnés. Lorsqu’il apparut que décidément — on était alors en juin-juillet 1831 — la Belgique ne rejoindrait plus la France et que c’est un prince allié à l’Angleterre qui monterait sur le trône, les journaux réunionistes exprimèrent le sentiment que les intérêts industriels du bassin Sambre-et-Meuse avaient été sacrifiés aux intérêts de la capitale et des Flandres. Une rogne désabusée les poussa alors à écrire quelques articles irrédentistes, proposant la séparation des provinces du Sud de la Belgique ou même le rétablissement de la principauté de Liège ! (…)

 

Joseph Lefevre, L’Angleterre et la Belgique, à travers les 5 derniers siècles, éd. universitaires, 1946, Bruxelles

 

(p.155) LA CONSTITUTION BELGIQUE INDÉPENDANTE

 

Le royaume hollando-belge. – Les décisions du Congrès de Vienne. – Le duc de Wellington et la campagne des Cent Jours. – Les griefs des Belges. – Les visites anglaises à Bruxelles de 1815 à 1830 – Les journées de septembre.

 

La chute de l’empereur Napoléon posait la coalition de ses vainqueurs devant un ensemble énorme de problèmes à résoudre. Il s ‘agissait de de faire la carte de l’Europe, du disposer du sort des territoires jadis asservis par la France. Comme toujours, au lendemain de la victoire, les peuples se laissaient aller à 1’espoir d’un avenir meilleur. On en finirait une bonne fois avec l’impérialisme français qui depuis deux siècles troublait la sécurité européenne.

 

(p.156).Les alliés envisagèrent deux solutions plausibles de la question belge. On songea d ‘abord à joindre à nos provinces quelques territoires rhénans, voisins du pays de Liége et à constituer ainsi un Etat indépendant. La souveraineté en eût été déférée à 1’archiduc Charles, frère cadet de 1’empereur d ‘Autriche François II. Pareil choix eût rencontré 1’assentiment de larges couches de la population belge. Le souvenir de Marie-Thérèse, de Charles de Lorraine, du paisible XVIIIe siècle n ‘avait pas disparu. L’archiduc lui-même était connu chez nous. Né en 1771, il avait embrassé dès sa tendre jeunesse la carrière des armes, avait participé à la campagne de 1793, qui avait pour quelques mois chassé les Français de la Belgique. Il fut alors le dernier gouverneur général des Pays-Bas. Après la conquête définitive de notre pays, il devint un des principaux généraux de 1’armée autrichienne contre Napoléon. Stratège et tacticien remarquable, il sut plusieurs fois tenir tête à 1’empereur français.

 

Depuis 1808 il est tombé en disgrâce auprès de son frère François Ier et du comte de Metternich, le puissant ministre autrichien.

Un deuxième projet prévalut. On céderait la Belgique au prince Guillaume d’Orange, maintenant roi de Hollande. On établirait de la sorte, au nord de la France, un Etat puissant comprenant les anciens Pays-Bas autrichiens, la principauté de Liège et les Provinces-Unies. C ‘était la reconstitution intégrale de l’ancien domaine des ducs de Bourgogne, augmenté de la région liégeoise, demeurée à travers toute l’époque moderne un Etat épiscopal indépendant. Les avantages de cette combinaison paraissaient évidents. L ‘Etat nouveau servirait de barrière contre une éventuelle invasion française.  Il serait en mesure, sinon de la bloquer définitivement, au moins de la contenir pendant un laps de temps suffisant pour permettre une intervention européenne.  …

 

C’est 1’Angleterre qui fit prévaloir la solution hollandaise. Elle y voyait la réalisation d’un des points essentiels de son programme séculaire : garantir les Pays-Bas du Nord et du Sud contre toute occupation française et par 1à assurer sa propre sécurité. En plus, il y avait des raisons d’intérêt plus particulier. Au cours des guerres contre la république et l’empire français, la monarchie britannique avait conquis plusieurs anciennes colonies hollandaises, notamment celle du Cap. En retour de 1’appui qu ‘il donnait à Guillaume d ‘Orange, le cabinet de Londres escomptait une renonciation complète à toute prétention de restitution de ce domaine colonial.

(p.157) La décision de principe fut prise à Londres et consignée dans un protocole secret, signé par les grandes puissances le 21 juin 1814.  Elle fut ratifiée par le Congrès de Vienne.

La réunion de la Belgique à la Hollande est dans toute la force une décision autoritaire et unilatérale, un impératif catégorique.  Elle méconnaissait ce principe fondamental que les peuples sont des personnes morales, des communautés d ‘hommes libres, que ne déterminent ni la configuration géographique, ni l’origine commune, ni la similitude de langue ou de religion. Vouloir constituer une nation au nom de la sécurité européenne ou pour servir les intérêts d ‘une autre nation, ne tenir aucun compte des aspirations des hommes que l’on y fait figurer, c’est courir une grosse aventure.

(p.170) Le nouveau secrétaire d’Etat au Foreign Office est le vicomte de Palmerston, le véritable fondateur de notre indépendance, celui à qui la postérité a donné le nom de père de la Belgique.  …

 

(p.176) … la sympathie du gouvernement français manifestée au mouvement insurrectionne belge n ‘avait rien de désintéressé.

La France de Louis-Philippe est incapable de reprendre la politique de Louis XIV ou de Napoléon: conquérir de force la Belgique est pour elle chose chimérique. Par contre, elle espère que 1’impossibilité d’en faire un état indépendant provoquera à bref délai sa déconfiture, le partage de son territoire – dont une partie sera englobée dans la monarchie française – peut-être sa réunion volontaire et totale à la France. Le conflit où la Belgique s’engage maintenant contre 1’assemblée des grandes puissances apparaît à Louis-Philippe et à ses ministres l’occasion propice pour arriver à leurs fins. Agissant avec une duplicité insigne, le cabinet de Paris proteste auprès du gouvernement belge accrédité à Paris, M. Le Hon, de ses intentions de reconnaître comme définitive l’indépendance belge. Par ailleurs il recommence ses intrigues à Londres, cherche à obtenir une compensation territoriale au détriment de notre pays. Il profite de l’irritation provoquée par la résistance belge aux décisions de la conférence pour remettre sur le tapis 1’idée d’un démembrement de la Belgique. Puisque celle-ci s’avère (p.177) incapable de sauvegarder les intérêts généraux de 1’Europe, il ne reste qu’à la partager d’une manière compatible avec 1’équilibre européen. La France aurait englobé les provinces wallonnes, la Prusse aurait étendu ses frontières jusqu’à la Meuse. Le roi Guillaume n ‘était pas oublié, on aurait rendu au royaume de Hollande la région flamande de notre pays. Ainsi serait constitué un nouvel Etat des Pays-Bas, moins vaste, mais plus homogène que celui de 1815. Quant à 1’Angleterre, son désintéressement aurait été acheté par la cession des bouches de 1’Escaut et d’Anvers dont elle aurait pu faire un second Gibraltar.

Pareille opération n ‘aurait pas manqué de rencontrer 1’adhésion des puissances de la Sainte-Alliance. Guillaume d ‘Orange s’y fut sans doute aussi prêté. L’Angleterre refusa et son désintéressement sauve la Belgique du danger mortel qui menaçait son existence. Palmerston déclara au cours d’un entretien particulier accordé à un agent belge, le comte d ‘Aarschot : Nous regarderons la Belgique comme indépendante et nous l’aiderons à demeurer telle. Seule de toutes les puissances représentées à la conférence, la Grande-Bretagne était d ‘un désintéressement absolu. Gardienne traditionnelle de 1’équilibre et de la paix, elle considérait que le maintien d’une Belgique indépendante était la seule solution admissible. Le mécontentement du cabinet britannique à 1’égard des Belges n ‘était pas moins évident. Le comte d’Aarschot, que nous avons déjà cité, avait été envoyé à Londres en mission officielle. Palmerston 1’accueillait froidement par ces mots : Tant que vos compatriotes continueront à traiter la conférence d’une façon si peu convenable et à manifester des prétentions qui les placent moralement sinon matériellement en guerre avec les grandes puissances, vous pourrez garder en poche les lettres que vous avez apportées pour le Roi

 

(p.177) On était dans une impasse dont il allait être difficile de sortir.  Les sentiments francophiles avaient envahi la majorité du Congrès national, mais quelques esprits clairvoyants commençaient à faire entendre une voix discordante. L’abbé de Foere et M. Raikem avaient affirmé que les tendances traditionnelles de la politique anglaise étaient les seules conciliables avec les intérêts bien entendus de la Belgique. C’était à Londres, bien plus qu ‘à Paris, qu’il fallait chercher les directives. Un concours de circonstances heureuses allait provoquer une complète évolution de la politique belge. 

 

D’abord Louis-Philippe refusa pour son fils la couronne qui lui était offerte. Un nouveau ministère se constitua à Bruxelles dans lequel M. Lebeau prend le portefeuille des Affaires étrangères. Il était, de nos constituants, celui qui voyait le plus clairement la véritable situation internationale de son pays.

 

(p.219) La date de 1848 marque dans l’histoire de l’Europe l’année des révolutions. Comme toujours, le mouvement vient de la France. Le gouvernement de

Louis-Philippe, constitué au mois de juillet l839, était un fruit de 1’été ; il tomba aux derniers jours de février, à la fin de l’hiver. Nous ne nous attarderons pas à 1 ‘exposé des circonstances qui amenèrent cette révolution, la troisième que le peuple français réalisait en un peu plus de cinquante ans. Le trône du roi des Français avait été dressé à la suite d ‘une émeute ; il fut renversé de la même manière. Charles X s ‘était enfui en Angleterre, Philippe en fit autant. Le souverain déchu ébaucha une ultime tentative pour sauver la dynastie, il abdiqua en faveur de son petit-fils, qui n ‘était qu ‘un enfant. Il envisagea une régence féminine pendant la minorité. La fureur populaire se joua de ces velléités. Elle proclama la république, qui devait durer un peu plus de trois ans, de février l848 à décembre 1851. 

Pour la Belgique, la chute de la monarchie de juillet ne pouvait être qu’une source d’inquiétudes. Nous devions beaucoup à Louis-Philippe, le monarque fugitif avait gardé dans le fond de sa pensée 1’illusion qu ‘un jour, sous une forme ou l’autre, la Belgique, au moins la Wallonie, se réunirait à la France.

 

(p.221) L ‘attitude de la Belgique en face des troubles qui bouleversaient la France constituait une preuve de la sagesse de son roi, de la direction remarquable qu ‘il lui avait donnée. A Bruxelles et en province, on accueillit avec une rare tranquillité les nouvelles venues de Paris. La date de l848 marque dans l’histoire de l’Europe l’année des révolutions. Comme toujours, le mouvement vient de la France. Le gouvernement de Louis-Philippe, constitué au mois de juillet lS39, était un fruit de 1 ‘été ; il tomba aux derniers jours de février, à la fin de l’hiver. Nous ne nous attarderons pas à 1 ‘exposé des circonstances qui amenèrent cette révolution, la troisième que le peuple français réalisait en un peu plus de cinquante ans. Le trône du roi des Français avait été dressé à la suite d’une émeute ; il fut renversé de la même manière. Charles X s ‘était enfui en Angleterre, Philippe en fit autant. Le souverain déchu ébaucha une ultime tentative pour sauver la dynastie, il abdiqua en faveur de son petit-fils, qui n ‘était qu ‘un enfant. Il envisagea une régence féminine pendant la minorité La fureur populaire se joua de ces velléités. Elle proclama la république, qui devait durer un peu plus de trois ans, de février l848 à décembre 1851.  Pour la Belgique, la chute de la monarchie de juillet ne pouvait être qu ‘une source d ‘inquiétudes. Nous devions beaucoup à Louis-Philippe, le monarque fugitif avait gardé dans le fond de sa pensée 1’illusion qu ‘un jour, sous une forme ou l’autre, la Belgique, au moins la Wallonie, se réunirait à la France.

 

(p.221) L’attitude de la Belgique en face des troubles qui bouleversaient la France constituait une preuve de la sagesse de son roi, de la direction remarquable qu ‘il lui avait donnée. A Bruxelles et en province, on accueillit avec une rare tranquillité les nouvelles venues de Paris.  Quand l’orage s’étendit à 1’Allemagne, précipita de son siège le fameux ministre Metternich, contraignit 1’empereur François II à abdiquer, la Belgique demeura obstinée dans le calme le plus absolu. Toute 1’agitation se réclamait de la liberté ; or, disait Léopold I, pour faire le tour de l’Europe, la liberté n ‘avait pas besoin de passer par la Belgique. Les fêtes nationales, fixées depuis la révolution à la date du 21 juillet, furent célébrées, cette année, avec une solennité inaccoutumée. La ville fut illuminée, dans un marché couvert, transformé en une salle de fêtes de style mauresque richement meublée et éclairée, cinq mille artistes exécutèrent des danses et des jeux. 

 

On ne peut dire que les excitations eussent manqué. Le gouvernement provisoire de Paris était sincère dans ses affirmations pacifiques. Mais son pouvoir était limité. Il s’avérait incapable de contenir les mouvements issus de la révolution, les tendances expansionnistes des exaltés qui voulaient promener en Belgique leurs théories républicaines. On recrutait ouvertement à Paris une prétendue légion belge qui vint s’établir près de Lille et tenta un coup de force. On dirait plutôt une opérette qu ‘une tragédie. Les révolutionnaires furent reçus à Risquons-Tout, près de Mouscron, par un petit corps de troupes belges et taillés en pièces, après deux heures de combat. Les fuyards, abandonnant leurs armes, repassèrent la frontière. La coopération de certains agents officiels français était notoire. Ils avaient fait distribuer des armes et des munitions.  Le prince de Ligne reçut ordre de présenter une représentation énergique auprès de Lamartine. On réclamait de lui un désaveu officiel de toute participation de son gouvernement. L’incident fut immédiatement signalé à Londres avec l’exposé des conséquences d’une nouvelle tentative du genre ne pouvait manquer d ‘entraîner. Le danger était insigne ; on ne manquerait pas de clamer dans les clubs de Paris, qu ‘on égorgeait des Français en Belgique et le gouvernement (p.222) provisoire ne serait pas maître de l’agitation. Et Palmerston reconnaissait que la paix ne tient plus qu’à un cheveu. La politique du cabinet britannique ne laissait place à aucun doute. Elle était garante de notre indépendance. A ses yeux les traités de l831 et 1839 conservaient leur force exécutoire. Mais elle n ‘était pas seule à avoir souscrit pareil engagement. La Russie, la Prusse et 1’Autriche se trouvaient liées au même titre. Les deux dernières se débattent en ce moment dans une crise intérieure de gravité insigne.  Interviendraient-elles en cas de besoin?  La chose semblait peu probable. Aussi en était-on réduit en Belgique à ne compter que sur le seul appui de l’Angleterre.

 

Il importait donc souverainement de s ‘informer de 1’attitude que prendrait le cabinet de Saint-James dans une guerre éventuelle entre la France et la Belgique. Lorsque 1’annonce d ‘une imminente invasion de notre pays s ‘était répandue dans la capitale britannique, 1’ambassadeur belge, van de Weyer, s’était empressé de poser la question à lord Palmerston. Il lui avait suggéré d’envoyer une escadre britannique dans 1’Escaut. Ce serait une démonstration décisive; elle forcerait le gouvernement révolutionnaire de la France à renoncer à ses projets d ‘envahissement.

 

(p.222) L’Angleterre avait accueilli sans déplaisir la chute de Louis-Philippe.  La monarchie de juillet n ‘avait jamais été fort sympathique à Londres. La déconvenue subie dans 1’affaire des mariages espagnols n’était pas oubliée. Par ailleurs, il se trouvait dans le Royaume-Uni une fraction considérable de l’opinion publique gagnée aux tendances radicales. Celle-ci eût souhaité une reconnaissance immédiate du gouvernement républicain de Paris. Elle arguait du droit de chaque peuple de choisir le régime qui lui convenait. Lord Palmerston définit la position de son gouvernement dans une déclaration faite à la Chambre des Communes, le 2 mars 1848. La politique anglaise, disait-il, consiste – en dehors de ses intérêts propres – à se poser comme défenseur du droit et de la justice. Tant qu ‘elle s ‘en tiendra à ce principe, elle continuera à exercer son influence, à poursuivre sa marche progressive. L ‘existence autonome de la Belgique et son indépendance vis-à-vis de la France et de 1 ‘Allemagne, constituent pour 1’Angleterre un intérêt politique de premier ordre. Pour soustraire ce pays à la domination de la France, elle avait fait la guerre sans trêve ni repos à Napoléon et à la Révolution. Il serait funeste à ses intérêts que la Belgique fût à nouveau absorbée par une conquête semblable à celle de 1794.

 

(p.225) Dix années exactement séparent le coup d ‘Etat de Napoléon III de la mort de Léopold I. Ce dernier connaît alors une décadence incontestable. 

L’antipathie qu ‘il ne cessa de témoigner à 1’empereur des Français, pour justifiée qu’elle fût, exerça sur sa conduite une influence fâcheuse. Il semble avoir perdu au cours de cette dernière période la souplesse et la mesure qui le caractérisaient autrefois. Napoléon I avait nourri des desseins grandioses et s’était efforcé de les réaliser, malgré l’opposition de 1’Angleterre. Napoléon III poursuit une politique de proportions plus modestes. Un de ses principes fondamentaux consiste à ne jamais heurter le peuple britannique, à ne rien entreprendre qui fût en contradiction avec les tendances traditionnelles de la Grande-Bretagne. En cela, Palmerston avait vu juste; le nouvel empereur rechercherait l’alliance anglaise. Cette directive essentielle, Léopold I ne semble jamais en avoir perçu la portée; il s ‘est visiblement exagéré le danger que faisait courir à la Belgique 1’établissement du second empire. Ce fut la raison du refroidissement dans ses relations avec 1 ‘Angleterre, car celle-ci est très vite acquise à 1 ‘éventualité d ‘une alliance franco-anglaise. Il n ‘y avait qu’un obstacle : la reine Victoria et son mari Albert n’éprouvaient aucune sympathie pour Napoléon III. Celui-ci tenta de provoquer un renversement de la situation par un mariage. Son désir était manifeste de prendre pied dans une famille régnante. Il avait recherché la main d ‘une princesse de Bourbon, puis s ‘était avisé d’une princesse russe. Maintenant, il sollicitait l’alliance d’une nièce de la reine d’Angleterre, petite-nièce de Léopold. Le projet échoua devant 1’hostilité des souverains britanniques, attisés par les considérations malveillantes du roi des Belges. En empêchant 1’ascension de sa petite-nièce au trône de France, Léopold commit une faute, d’ordre sentimental, refusa une alliance brillante pour sa famille.

 

(p.234) … une guerre avec la Prusse pourrait faire courir à la dynastie napoléonienne plus de dangers qu ‘une révolution.  … La sagesse eut commandé de s’en tenir à cette première mésaventure. Mais Napoléon tenait à son pourboire. Il changea la composition de son gouvernement et fit faire de nouvelles ouvertures à Berlin. Cette fois la Belgique devait payer la rançon. Les instructions transmises à 1’ambassadeur français accrédité dans la capitale prussienne, 1’ineffable M. Benedetti, portaient que la France se contenterait d ‘un traité lui accordant la possession du grand-duché de Luxembourg que 1’on rachèterait au roi de Hollande. Mais, une annexe destinée à demeurer secrète, y ajoutait que les deux pays concluraient une alliance offensive et défensive, impliquant pour la France le droit d ‘annexer la Belgique. A cette conquête, la Prusse prêterait au besoin le concours de son armée. On sait que Bismarck, maître en roueries, obtint du naïf diplomate français une transcription écrite de cet odieux marchandage. Benedetti copia lui-même le texte de la convention qu ‘il s ‘imaginait être la condamnation à mort de la Belgique. Une fois en possession du précieux document, Bismarck simula 1’indignation. A faire de semblables propositions, 1’empereur des Français ne pouvait avoir d ‘autre visée que d ‘attirer sur la Prusse les foudres de 1’Angleterre qui ne tolèrerait jamais la conquête de la Belgique. La Prusse ne voulait pas se prêter à ce jeu, elle entendait rester en bonnes relations avec la puissance britannique.

Le danger que courut 1’indépendance de notre pays au cours des années 1867 et 1868 est réel. Il causa à nos gouvernants, en particulier au nouveau souverain, les plus vives alarmes. Et cependant, ils n’avaient pas connaissance du marchandage qui s ‘était tenté à leur détriment. Il faut éviter d ‘en exagérer la portée. Que Napoléon III ait considéré 1’annexion de la Belgique comme un point de son programme, la chose était notoire. Il y eut toujours loin de la coupe aux lèvres. Pour arriver à ses fins, il fallait que 1’empereur bravât la puissance anglaise, dont les principes demeuraient immuables.  On peut se demander si l’empereur eut jamais osé se lancer dans pareille aventure. Sa position était si compromise aux yeux de ses sujets, 1’empire autoritaire avait fait place depuis longtemps au régime libéral, il fallait compter avec le corps législatif, qui toujours maugréait au sujet des dépenses militaires.

 

(p.235) Il restait à Bismarck un dernier tour dans son sac. Au lendemain de la déclaration de guerre de la France à la Prusse, le 25 juillet 1870, il fit publier dans le Times de Londres le texte du traité préparé par Benedetti. L ‘authenticité du document ne pouvait être contestée : il était écrit de la main du ministre français. L’impression fut énorme en Angleterre. Jusque là le cabinet britannique avait fait crédit à la sincérité des déclarations pacifiques de la France. Il soupçonnait bien un certain danger. En 1866 Léopold II s ‘était rendu en Angleterre pour faire visite à la reine Victoria et y avait recueilli des impressions pessimistes et des conseils de prudence. Il aurait voulu que le cabinet britannique formulât une déclaration formelle, précisant que 1’invasion de notre pays serait considéré comme un cas de guerre immédiat. Le bon sens de la reine lui faisait comprendre que c ‘était le moyen le plus sûr de préserver la paix.  Les ministres se refusaient à prendre une attitude résolue, ils demeuraient fidèles aux traditions de leur pays. A toutes les époques de l’histoire, le même spectacle se renouvelle. L’Angleterre ne s’engage qu’à la dernière minute, devant le fait accompli, quitte à s’imposer un effort surhumain pour regagner le temps perdu.

 

Maintenant on n’en pouvait plus douter. Quelle que fut la portée exacte du traité rédigé par Benedetti – que le gouvernement français s ’empressa de dénoncer comme un acte d’initiative privée, émanant d ‘un diplomate maladroit, victime de 1’astuce de Bismarck – une chose était certaine, les cabinets de Berlin et de Paris avaient négocié en secret la destruction de notre indépendance. Au Parlement, le ministre lord Russel fut très dur pour les deux larrons, ne faisant aucune distinction entre 1’un et 1’autre. L ‘opinion publique fit chorus sur la France, appelée à bénéficier de la spoliation envisagée à Berlin. Le gouvernement britannique passa incontinent aux actes ; il sollicita la permission de lever 20.000 hommes pour être en mesure, le cas échéant, de tenir ses engagements.

 

La guerre franco-allemande amena le ministère de Londres à faire plus encore. Il réclama des deux belligérants une déclaration formelle sur leur intention de respecter la neutralité et 1 ‘intégrité du territoire belge. Cette déclaration formerait la substance d’un nouveau traité qui confirmerait les engagements pris en 1831. L’Angleterre interviendrait à nouveau à titre de garant. Elle s’engageait, en même temps, à aider de toutes ses forces celui des deux belligérants qui respecterait la neutralité, après qu’elle eût été violée par 1’autre.  Bismarck accepta sans hésiter la proposition anglaise. Le gouvernement de Paris se rendit compte qu ‘en apparence bilatérale, la convention était en fait dirigée contre lui. Lui seul paraissait soupçonné de vouloir attenter à la Belgique. Il finit pourtant par s’incliner. 

 

La guerre ne fut pas exempte de dangers. La fameuse bataille de Sedan se livra à notre frontière. En rangs compacts, les soldats français s’enfuyaient à travers notre territoire pour échapper à l’étreinte allemande. La Prusse menaçait de passer la frontière, si on ne désarmait pas les fugitifs. Ceux-ci se laissèrent faire.

 

(p.236) Il est hors de doute que la guerre de 1870 marque un tournant dans notre histoire. Depuis des siècles, le danger nous était venu inlassablement de notre voisine du Sud. Qu’elle fût gouvernée par Richelieu, Louis XIV, Napoléon, Louis-Philippe ou Napoléon III, la France rêvait toujours de ses frontières naturelles, du jour où elle s’accaparait des plaines de Flandre et de Wallonie. Depuis 1870, la chimère est abandonnée, la troisième république va vivre de longues années sous 1’impression de la défaite. Quand elle porte ses regards au-delà de la frontière qu ‘on lui a imposée, c ‘est pour considérer 1’Alsace et la Lorraine, les deux provinces arrachées de son flanc et dont le souvenir la hante. Elle n’en parle pas, mais y pense toujours.  Elle tentera une diversion plus tard, mais ce sera au loin, en Afrique. Elle ira chercher, sinon sa consolation, du moins le renouveau de son prestige. La constitution d ‘un superbe empire colonial, puis l’alliance russe et enfin 1’entente anglaise lui rendront sa place de grande puissance européenne.

La conquête de la Belgique ne figurera plus jamais à son programme, ni officiel, ni secret.

 

(p.306) A travers cinq siècles, la protection du Royaume-Uni nous est demeurée acquise. Répétons-le une dernière fois, il faut se garder de la placer sur le terrain sentimental : elle est fondée, en dernière analyse, sur une conjoncture d ‘intérêts qui tient sa source dans notre position géographique. A travers les vicissitudes de la vie des deux peuples, l’une est demeurée invariable autant que 1’autre. Et il en sera encore ainsi dans les âges futurs.

 

in : Jacques Pauwels, Europese namen voor de wereld, EPO, 2008

 

(p.219) Vooral Frankrijks ‘Grote Revolutie’ van 1789 ondermijnde echter de eeuwenoude ‘feodale’ politieke en sociale structuren in naburige landen en wekte zowat overal in Europa de gevaarlijke krachten van libéralisme, nationalisme en socialisme. Als gevolg daarvan deden zich in de loop van de 19e eeuw enkele revoluties voor die nieuwe staten met nieuwe namen deden ontstaan.

 

Als het in Parijs regent, druppelt het in Brussel, zegt men. De Parijse Revolutie van 1830 echode na in de rellen die Brussel in de zomer van dat jaar meemaakte. De opstandelingen – of toch een deel van hen – wilden een Anschluss bij Frankrijk, en Parijs zond troepen om hen daarbij behulpzaam te zijn. De Britten staken echter stokken in de wielen en het kwam tot een compromis: aansluiten bij la grande nation mocht niet, maar een scheiding van Nederland mocht wel. Het zuidelijke deel van de Lage Lan­den, dat eeuwenlang achtereenvolgens onder Spaanse, Oostenrijkse en daarna Franse overheersing had gezucht, werd daarmee onafhankelijk. Maar welke naam zou men aan die nieuwe staat geven? Eigenlijk ging het om de ‘Zuidelijke Nederlanden’, maar die naam was te omslachtig en deed te veel denken aan het Nederland waarvan men zich zopas had afgescheurd. Men herinnerde zich dat Caesar het noorden van Gallië Gallia Belgica had genoemd, en dat de humanisten in de 16e eeuw de Latijnse term Belgica (of Belgium) hadden gebruikt als een geleerd synoniem voor de Nederlanden in het algemeen, net zoals ze Gallia gebruikten aïs synoniem voor Frankrijk, Germania voor Duitsland, enzovoort. De term ‘Nederland’ zelf werd sinds de scheiding van de Zeventien Provinciën in de 16e eeuw meer en meer geassocieerd met de onafhankelijke, Noordelijke Nederlanden, ook bekend aïs ‘Holland’. De korte en krachtige term Belgica stond nog altijd ter beschikking, en rolde bovendien zowel in zijn Franse als Vlaamse – pardon: Nederlandse – versie goed van de tong. Het werd dus België / Belgique, wat in de grond hetzelfde betekent als Nederland(en) of Pays Bas.

 

2l   Zie Pauwels, 2007, p.133.

 

Vermeersch A.J., Vereniging en revolutie, De Nederlanden 1814-1830, Uitg. Fibula-Van Dishoeck, Bussum, 1970

 

(p.74) /Het slagen van de revolutie van de Fransen heeft hen / uitbundig gemaakt. Gedurende de lange zomeravonden, in de straten, in de drankhuizen en in het theater, vieren ze hun bevrijding, worden ze onophoudend gefeliciteerd en tonen ze trots hun nationale tricolore. Zij worden door hun Belgische vrienden en geestesgenoten met bewondering en afgunst omringd. In deze Fransen te Brussel heeft men de stokebranden willen herkennen die door Parijs op het koninkrijk der Nederlanden werden afgestuurd om te Brussel het vuur van de revolutie aan te steken. ,,De meet van de muiters lag in Parijs », heeft de Nederlandse historiens C. Gerretson geoordeeld.57 Aldus zou het spontané en natuurlijke karakter van de Belgische omwenteling in twijfel getrokken kunnen worden. Daartegen dient ingebracht dat er alstoen in de Brusselse bevolking zoveel explosieve stoffen opgehoopt lagen dat er wel weinig voorbereide bewerking van Parijse agenten nodig was. Dat Franse agitatoren zouden opgetreden zijn, ligt eigenlijk in de lijn van de verwachting en van de historische ontwikkeling. Hoe dan ook, voor een geheime, breed opgezette en ingrijpende actie van de Parijse autoriteiten, werden nooit afdoende historische bewijzen aangevoerd. De opvatting die een Franse bewerking van België vooropstelt, heeft in ieder geval het probleem in zijn tijdsdimensie verkeerd begrepen. Er is door de Franse radicalen aan de politieke ont­wikkeling in België inderdaad veel leiding gegeven. Zij hebben in Brussel en in andere steden waar zij woonden, agitatie beoefend en zij zijn de revolutionaire mentors geweest van de Belgen. Deze clandestiene agitatie is echter niet in enkele weken, in juli en augustus 1830, vanuit Parijs op Brussel afgestuurd, maar zij was in België on­ophoudend werkzaam geweest sedert 1815. Allé drijverijen die de Fransen toegeschreven worden in de hete zomer van 1830, zijn in al hun vormen existent en naspeurbaar vanaf de oprichting van het koninkrijk.

Ook de bedoeling die men bij sommige liberalen in 1830 ziet opduiken om België met Frankrijk te verenigen – het ‘reunionisme’ – is de beleving van een reeds oud irrédentisme dat in Wallonie, en vooral in Luik, ten opzichte van Frankrijk krachtig was gebleven. Zij was daarbij de zeer natuurlijke vrucht van de sociale en culturele verwantschap die alle Belgen met Frankrijk verbond.58 Dit, en de belangstelling van Parijs voor de gebeurtenissen in België – die er ongetwijfeld is geweest – was de onvermijdelijke herkenning van een oude sociaal-culturele affiniteit tussen Frankrijk en België en de vanzelfsprekende voltrekking van een krachtig politiek en ideologisch beïnvloedingsproces dat vooral met de emigratie naar België van Franse Jacobijnen en Bonapartisten in 1815, aanving en zijn historische wortels had in de jaren van vereniging met Frankrijk. Niet de aanwezigheid van Franse agitatoren in het Brussel van 1830, maar hun afwezigheid zou een historisch probleem opwerpen. Na de revolutie verklaarde (p.75) den Belgische reunionisten: J3de vereniging met Frankrijk zou niet het verlies van onze nationaliteit betekenen, maar wel de terugkeer naar onze waarachtige nationaliteit. Wij maken deel uit van Frankrijk: onze taal, onze zeden, onze gewoonten, onze modes; bij ons is allés Frans ».59 Ook de gloeiendste Belgische patriotten van 1830 zouden veel in deze verklaring hebben willen onderschrijven. Het verschijnsel wordt door de groepgrenstheorie van Dhondt doorgelicht: het Belgisch nationaal bewustzijn was ongemeen sterker tegenover Nederland waarmee de collectieve bewustzijnsgrens zeer opdringerig en duidelijk was, dan ten overstaan van Frankrijk waar de duidelijkheid van de grens zeer zwak was.

 

X. Michaelis, Arlon et la Révolution, 1964, éd. de la Dryade, Virton

 

Pouilleux de Français!

 

Un jour de février 1831, deux gamins de Bruxelles se querellaient dans 1a rue. L’un d’eux lança soudain à l’autre : « Pouilleux de Français!»

A ce moment là passait dans la rue un monsieur plein de dignité qui, frappé par cette injure se retourna vers les gamins et les considéra avec curiosité.  C’était un Anglais, lord Ponsonby, agent accrédité à Bruxelles par la Conférence de Londres et qui avait pour mission de rendre compte des événements belges.  Lord Ponsonby était, à cette époque, fort perplexe.

 

Il méditait sur les difficultés de la situation et semblait favorable au retour du Roi de Hollande a Bruxelles parce qu’il craignait que notre Belgique ne se jette dans les bras de la France, ce qu’en bon Anglais, i1 devait éviter à tout prix.  Or, ce petit incident de rue – raconté par Ruzette – fit réfléchir lord Ponsonby.

 

Dès le lendemain, i1 alla trouver Jean-Baptiste Nothomb, avec lequel le Gouvernement provisoire l’avait abouché et lui demanda à brûle-pourpoint: . « Vous sentez-vous la force de continuer une nation libre? Répondez-vous de ce pays? » Jean-Baptiste Nothomb répliqua carrément « Oui », à quoi le diplomate britannique fit une réponse catégorique: « Comptez sur moi.»

 

Lord Ponsonby confiait plus tard à l’un de ses amis: « Le royaume de Belgique a existé dès ce moment-là.»

 

Mobilisation générale

 

Le 10 mars 1831, le régent Surlet de Chokier adressait aux Luxembourgeois, une proclamation, signée de tous les ministres, par laquelle i1 s’engageait à soutenir le Luxembourg contre qui? contre quoi? et empêcher le morcellement.

 

in: Delta, 2, 2008, p.10

 

Over gans het land was er maar één, zegge en schrijve: één, afgevaardigde te vinden die zich voor de scheiding uitsprak, Ch. De Brouckère, en dit slechts omwille van sentimentele banden met… Frankrijk. Toppunt was wel dat hij afkomstig was uit… Brugge en zijn naam diende te verfransen om in Brussel een grote mijnheer te kunnen worden (hij heeft er een plein en een standbeeld!)

 

Wanneer later te Brussel het Nationaal Con­gres (dus zeker geen instelling om de eenheid te herstellen!) bijeenkwam, drukten nogmaals de afgevaardigden hun wens uit om de een­heid te bewaren. Antwerpen sprak zich in die zin zeer duidelijk uit bij monde van Jean Osy. Hij protesteerde dat door de scheiding het Zuiden afgesneden werd van de handel met de koloniën. Ook Lardinois uit Verviers stelde vast dat de afscheiding alles omver had geworpen en hij schilderde in pregnante bewoordingen de nood van de ondernemers   uit   Verviers,   Luik, Namen en Charleroi *. De partijgangers der scheiding konden slechts… de aansluiting bij Frankrijk voorstellen om aan die noden te verhelpen! Zo stel­de b.v. Camille De Smet de republikeinse staatsvorm voor als…   overgangsmaatregel naar een aansluiting bij Frankrijk « in het belang van handel, nijverheid en landbouw ». Dit was overigens ook de bedoeling  der Franse raddraaiers, die de opstand hadden   mogelijk  gemaakt,   bevorderd en aangewakkerd. Zij waren van oordeel dat het Zuiden economisch niet leefbaar was, en dat bijgevolg  het op  korte termijn in de schoot van Frankrijk zou vallen.

 

* M. Josson, De Belgische omwenteling van 1830, D.1, p.45, Lannoo, Tielt

 

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

(naar aanleiding van de stichting van een nieuwe Waalse partij…,)

1830.  Op 3 augustus schreef Alexander Gendebien naar Parijs om te vragen dat men duidelijk zou verklaren dat Frankrijk de Rijngrenzen verlangde. Hij waarborgde een goede uitslag in geval van een gewapende inval.

1830 - Le collabo francophile Goswin de Stassart, nouveau gouverneur de Namur

(VA, 31/12/2008)

1831, …

Petite histoire de la musique à Namur, VA 06/09/1989

 

« De Julien Colson (1797-1864), le légendaire brigadier de l’octroi de la porte de la Plante, citons cette « tchanson patoise » qui se gausse des visées annexionnistes françaises:  /en Feller/

« Choûtez Djan-Djan

qui vos dit qu’en-Afrike

On crococile avala

on-ome tot cru,

Chose di bin pîre,

Chôse qui dit qui nosse Bèljike

Sèreûve avaléye, èt pont d’sauce dissus.

Qu’avoz dandjî do fé

one si grande bouche?

Vos-avalerîz on sôdâr èt s’colbak.

Pardon, èscuse,

on n’in.me nin qu’on /-/î touche

A nosse payis, monsieur de Cassagnat. »

 

Citadel, in: Delta, 7, 2002, p.24

 

* Vele Vlamingen menen dat de citadels van Dinant, Namen en Hoei gebouwd

werden tegen een Duitse inval in België. Dit is echter NIET het geval» deze citadels werden in de 19e eeuw gebouwd als verdediging tegen Frankrijk.

De Belgische staat was weliswaar een Franstalige staat, maar géén Fransgezinde staat, hoegenaamd niet.

 

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

(naar aanleiding van de stichting van een nieuwe Waalse partij…,)

1830, Op 3 augustus schreef Alexander Gendebien naar Parijs om te vragen dat men duidelijk zou verklaren dat Frankrijk de Rijngrenzen verlangde. Hij waarborgde een goede uitslag in geval van een gewapende inval.

 

1831. Lord Palmerston schreef op 23 augustus aan burggraaf Grandville, Engels ambassadeur te Parijs:  » Wij hebben voorzeker nooit voor een moeilijker taak gestaan dan welke wij thans te vervullen hebben, (p.13) nl. België te doen ontruimen door de Fransen, Zij willen er blijven ».

 

1831. Op 20 augustus kwam de Franse diplomaat Markies de Latour-Maubourg naar Brussel om de Belgische minister van oorlog (zo heette dat toen), Z.E. de Meulenaere, de  » note des frais de protection » ten bedrage van 15.294.530,90 fr voor te leggen.

In 1837 werd deze dan ook betaald en afgehouden van de Belgische schuld aan Nederland.

 

Clio, La guerre des paysans (1), L’étonnant Henri Conscience, PP? 15/06/1983, p.69-80

 

(p.72) Le succès du « Lion des Flandres » d’Hendrik Conscience fut sans cesse encouragé, soutenu par l’Etat belge lui-même.

(p.73) « Ecoutez plutôt Georges Eeckhoud: « De mauvais vents soufflaient dans le sud de notre pays à cette époque: des agents politiques de Napoléon III travaillaient les populations des frontières et faisaient de la propagande en faveur d’une annexion à la France: il s’agissait de maintenir l’esprit de nationalité à Courtrai; et quelle meilleure sauvegarde du patriotisme aurait-on pu trouver que la présence de ce Flamand convaincu, de ce rénovateur qui avait doté ses compatriotes d’une littérature, de la pensée écrite, et dont les écrits populaires devaient rattacher plus que jamais les habitants du sol natal? »

 

Petite histoire de la musique à Namur, VA 06/09/1989

 

« De Julien Colson (1797-1864), le légendaire brigadier de l’octroi de la porte de la Plante, citons cette « tchanson patoise » qui se gausse des visées annexionistes françaises:  /en Feller/

« Choûtez Djan-Djan,

qui vos dit qu’en-Afrike,

On crocodile avala

on-ome tot cru.

Chôse dit bin pîre,

Chôse qui dit qui nosse Bèljike

Sèreûve avaléye, èt pont d’sauce dissus.

Qu’ avoz dandjî do fé

one si grande bouche?

Vos-avalerîz on sôdâr èt

s’colbak.

pardon, èscuse,

on n’ in.me nin qu’on-î touche

À nosse payis, monsieur de Cassagnat. »

 

De Franse politiek en de Nederlanden (1), DELTA, 9, nov. 1999, p.18-19

 

De leiders van de omwenteling van 1830 aan het woord…

DELWARDE, lid van het Nationaal Congres, verklaart tijdens de zitting van 5 januari 1931 dat hij een voorstander is van de aanhechting bij Frankrijk « omdat Frankrijk de drijfveer van de omwenteling is geweest »

BARTELS in « Documents historiques sur la Révolution 1830″.  » het uitgangspunt was …. Frans ».

FRÉDERIC DE MÉRODE, in een zitting van het Nationaal Congres: « Zonder Frankrijk zou ik hier niet het woord voeren. »

CHAZAL, in een brief van 28 januari 1831 aan Firmin Rogier: « Mijn innigste wens in de huidige omstandigheden is de vereniging met Frankrijk »

CHARLES DE BROUCKÈRE, in de zitting van het Nationaal Congres op 30 maart 1831 : « Er is geen redding voor België buiten de vereniging met Frankrijk »

DAVIGNON, afgevaardigde voor Verviers, zitting van het Nationaal Congres van 11 januari 1831 : « Het zijn niet enkele inwoners die de aanhechting bij Frankrijk vragen, het is een ganse bevolking. »

 

NOTHOMB, afgevaardigde voor Aarlen, zitting van 31 januari 1831: « Wij kunnen het niet loochenen, mijne heren, Frankrijk zoekt België en België zoekt Frankrijk »

 

Enige hoofdfiguren van de omwenteling in hun ware gedaante…

 

Graaf Antoine de Celles: onderscheidde zich door losbandigheid en allerhande buitensporigheden…

Sylvain van de Weyer « … wij vragen naar de bron van het door deze jonge diplomaat zo vlug bijeengegaarde vermogen » (in  » Biographie des Hommes de la Révolution »).

Generaal A.J Mellinet: hij was Fransman, uit zijn land gevlucht voor misdaden van

gemeen recht en verkeerde door wangedrag in grote moeilijkheden.

Burggraaf de Culhat: eveneens Fransman, uit zijn land gevlucht om aan het Assisenhof te ontsnappen. Later door het Belgisch gerecht voor diefstal vervolgd.

Generaal Ch. Niellon: Fransman, gevlucht voor misdaden van gemeen recht, vestigde zich te Brussel als toneelspeler.

Don Juan van Halen: Spanjaard, beschuldigd van dessertie, verraad en omkoping.

Opperbevelhebber van het eerste Belgisch leger.

(p.19) Burggraaf le Douchet de Pontécoulant : Fransman, hoofd van een avonturierkorps dat de muiters van 1830 kwam helpen, een tuchtloze bende die zich noemde « Légion belgo-parisienne ».

Dat waren de helden van 1830 !

 

Pierre Louvigny, Quand les Français offrirent Liège à la Prusse …, LB 08/08/1980

 

‘Dans le livre du baron Camille Buffin sur la jeunesse de « Léopold Ier » (1914), on trouve des indications sur l’attitude du gourvernement français en 1830-31: « Le général Sébastiani (ministre des affaires étrangères) et plus tard maréchal de France et le prince Talleyrand, ambassadeur à Londres, suivaient une autre combinaison au profit des puissances; /ce qu’Alexandre Gendebien, reçu le 6 janvier 1831 chez le ministre Sébastiani, refusa au nom du gouvrenement belge/ l’Angleterre prendrait Ostende, Anvers et toute la rive gauche de l’Escaut, la Prusse la riv droite de la Meuse, Maastricht et Liège; la Hollande garderait comme frontière le Demer jusqu’ à Liège; la France aurait le reste des provinces révoltées, c’est-à-dire la part la plus considérable … »

 

1848

in : Chronique de la Belgique indépendante, 1987

 

(p.59) 1848 / La monarchie est-elle en danger?

 

29 mars. Le hameau de Risquons-Tout, près de Mouscron, a été le cadre d’incidents très graves qui ont opposé l’armée à quelque 2 000 ouvriers français et belges venus proclamer la république en Belgique. Selon les rapports officiels, ces hommes avaient quitté à l’aube leurs cantonnements situés dans la commune française de Seclin et dans les villages environnants pour se diriger vers la frontière belge. A sept heures du matin, le général-major Fleury-Duray, informé que des bandes armées venaient de pénétrer sur le territoire belge, se mit en marche vers Risquons-Tout avec 200 hommes d’infanterie et 25-cavaliers. Après quelques heures d’un violent combat, l’armée est parvenue à disperser et à refouler  » l’ennemi » au-delà de la frontière française. Un bilan provisoire fait état de 29 morts et 50 blessés dans le camp des ouvriers, Le baron Chazal, ministre de la Guerre, a adressé un témoignage de satisfaction aux militaires qui

se sont distingués à ce combat. Ces événements ne font qu’accroître la tension entre le gouvernement belge et celui des Tuileries. Il est maintenant établi que les républicains belges qui ont organisé ces légions d’ouvriers bénéficient de l’appui de Paris, non seulement en armes mais également en argent. En Belgique, la situation paraît extrêmement grave. Parti de Paris en février, le mouvement révolutionnaire semble avoir fait des émules un peu partout dans le pays. Il y a deux semaines, dans la commune de Vaulx, près de Tournai, 400 ouvriers carriers ont cessé le travail pour manifester en faveur de la république. Le même jour, à Gand, de nombreux ouvriers se sont rassemblés et ont élevé des barricades dans les rues. Dans le Borinage, de semblables incidents se sont déroulés, mais sans conséquences graves. Enfin à Bruxelles, depuis le 28 février, par mesure de précaution, toute réunion de plus de cinq personnes sur la voie publique a été interdite.

1852

Chronique de la Belgique indépendante, éd. Chronique, 1987

 

(p.69) 1852 / Le chantage commercial de la France

 

9 décembre. A Bruxelles, le duc de Bassano et Henri de Brouckère, respectivement plénipotentiaire français et belge, ont renouvelé à titre provisoire le traité de commerce de 1845. On se souvient qu’il y a quelques mois le gouvernement des Tuileries s’était refusé à toute signature, prétextant de l’hospitalité offerte par la Belgique aux responsables du coup d’Etat, ainsi que de la publication sur le territoire belge de journaux français d’opposition. A Paris, l’irritation était vive face à l’impunité dont jouissaient les auteurs d’articles jugés calomnieux. Le gouvernement français nous menaçait même d’une guerre des tarifs. Pour témoigner de sa bonne foi, le cabinet de Brouckère a déposé devant les Chambres un projet de loi visant à punir les offenses commises envers les souverains ou chefs des gouvernements étrangers. A la suite de cette concession, la France a donc consenti à adopter cette convention provisoire jusqu’à la conclusion d’un traité définitif.

Les années 1860

1860s

Emile Bodeux – LB 08/01/1981

 

(Peut-on rappeler à ces messieurs qu’) il y a plus d’un siècle, l’Empereur Napoléon III avait suggéré à Bismarck, le chancelier de fer de « démanteler » la Belgique et de partager les morceaux entre l’Allemagne et la France.  Ce complot s’étendit sur plusieurs années, fut déjoué grâce à la diplomatie de nos premiers Rois, soutenus en cela par l’Angleterre.

 

1866

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

1866. Uit een geheim rapport van Napoleon III:  » Indien Frankrijk de zaak der nationaliteiten omhelst, dan is het van belang, van dit ogenblik af vast te stellen dat er geen Belgische nationaliteit bestaat en het over dat punt eens te worden met Pruisen » .

 

1869. Het wordt tijd dat de Franse vlag wappert over België, dat land van wekelingen en eunuchen, ongeschikt om te regeren en te besturen en met haar eervolle plooien bedekke wat voor de hele wereld een onterende vlek is » (Paul de Cassagnac in  » Le Pays » van 25 mei).

 

1875.  » België is een Engelse uitvinding. Er heeft nooit een België bestaan en het zal nooit bestaan. België is onvruchtbaar en zal dit blijven zolang het niet met Frankrijk verenigd is » ,

(Emile de Girardin, brief tot het Vredescongres)

 

1883. Op het Franse budget komt een post voor van 200.000 fr.  » pour le service d’ une certaine presse en Belgique » en dit onder de benaming  » Fonds secrets » ,

 

1890. De gemeenteraad van Parijs wilde zich laten vertegenwoordigen op de herdenking van de slag bij Jemappes, Raadslid Chauvières:  » het is een politieke daad die wij moeten verrichten en het beoogde doel is de uitbreiding van de macht van de Franse republiek ».

 

1923. Zonder één frank invoerrechten te betalen, worden voor méér dan 20 miljoen Franse boeken in België ingevoerd.

 

 

1866

Chronique de la Belgique indépendante, éd. Chronique, 1987

 

(p.90) 1866 / Napoléon III veut s’emparer du Grand-Duché

 

Août. Les conditions de paix très avantageuses que la Prusse a obtenues de l’Autriche après la bataille de Sadowa ont décidé la France à réclamer des compensations. Pour le prix de sa neutralité, Napoléon III aurait exigé, au début du mois de juillet, la rétrocession à la France des frontières de 1814 et l’annexion à l’Empire du grand-duché de Luxembourg. Même si le baron Beyens, ministre de Belgique à Paris, a obtenu des Français l’assurance que ‘personne au monde n’a plus que nous une conscience nette », le cabinet de Bruxelles reste inquiet. La France négocierait pour l’instant un nouveau projet de compensation qui lui donnerait Sarrebrück, Landau, Sarrelouis et le grand-duché. Un traité secret voudrait l’autoriser à annexer la Belgique avec l’accord de la Prusse.

 

1869

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

1869. Het wordt tijd dat de Franse vlag wappert over België, dat land van wekelingen en eunuchen, ongeschikt om te regeren en te besturen en met haar eervolle plooien bedekke wat voor de hele wereld een onterende vlek is » (Paul de Cassagnac in  » Le Pays » van 25 mei).

 

Les années 1870 et 1880

1875

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

1875.  » België is een Engelse uitvinding. Er heeft nooit een België bestaan en het zal nooit bestaan. België is onvruchtbaar en zal dit blijven zolang het niet met Frankrijk verenigd is » ,

(Emile de Girardin, brief tot het Vredescongres)

 

1883. Op het Franse budget komt een post voor van 200.000 fr.  » pour le service d’ une certaine presse en Belgique » en dit onder de benaming  » Fonds secrets » ,

 

1890. De gemeenteraad van Parijs wilde zich laten vertegenwoordigen op de herdenking van de slag bij Jemappes, Raadslid Chauvières:  » het is een politieke daad die wij moeten verrichten en het beoogde doel is de uitbreiding van de macht van de Franse republiek ».

 

1923. Zonder één frank invoerrechten te betalen, worden voor méér dan 20 miljoen Franse boeken in België ingevoerd.

 

1883

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

1883. Op het Franse budget komt een post voor van 200.000 fr. « pour le service d’une certaine presse en Belgique » en dit onder de benaming  » Fonds secrets » ,

 

La France, ennemie de la Belgique dans les années 1870 et 1880

(in: Grande Encyclopédie de la Belgique et du Congo, s.d.)

Les années 1890

De Franse politiek en de Nederlanden (3), in : Delta 4, april 2000, p.12-13

 

1890. De gemeenteraad van Parijs wilde zich laten vertegenwoordigen op de herdenking van de slag bij Jemappes, Raadslid Chauvières:  » het is een politieke daad die wij moeten verrichten en het beoogde doel is de uitbreiding van de macht van de Franse republiek ».

 

Les ouvriers saisonniers du Hainaut occidental, in : Ministère de l’Education nationale, CAH. 17, s.d.

 

DOC. 12 / « Rixe sanglante entre Français et Belges à Saint-Pol-sur-Ternoise.

 

Une violente querelle, qui s’est terminée par des coups de couteau, a eu lieu, dimanche dernier dans la rue de Béthune, vers 2 heures du matin. Deux jeunes gens de Saint-Pol, Augustin Carette et Henri Lemaire, revenaient de la ducasse de Troisvaux quand, en débouchant dans la rue de Béthune, ils tombèrent sur un groupe de Belges, ouvriers agricoles. Surexcités par de copieuses libations, les deux Français crièrent : A bas la Belgique ! Ces propos soulevèrent naturellement la colère des ouvriers belges, déjà un peu animés par une discussion qu’ils avaient eue dans un estaminet de la ville. Les Belges se jetèrent sur Carette et Lemaire, et l’un d’eux, qui, à l’heure où nous écrivons, n’est pas encore connu, porta à Lemaire un coup de couteau dans la poitrine et s’enfuit avec ses camarades. Le docteur Planque, appelé en toute hâte, a donné des soins au blessé dont l’état, bien que grave, n’est pas désespéré.»

 

L’Indicateur du 07.07.1897, page 3.

 

DOC.13 « Wodecq :

 

Un ouvrier agricole, natif de Wodecq, Jean-Baptiste Siméon, âgé de 22 ans, qui s’était rendu en France pour trouver du travail et qui était embauché dans une exploitation agricole de Grisenoy (Seine-et-Oise) a été dévalisé à Paris d’une somme de 110 francs, toutes ses économies qu’il portait sur lui. Ne connaissant pas Paris, il avait demandé le chemin de la gare de l’Est à deux individus qui le menèrent dans des rues désertes, le rouèrent de coups et disparurent après lui avoir enlevé son argent. « J’ai vainement tenté de retrouver mes voleurs, disait-il au commissaire de police, en se laissant choir, exténué sur un banc. De guerre lasse, je m’adresse à vous, je n’ai plus un sou pour continuer mon voyage. Que vais-je devenir ? »

On a fait porter à manger à ce pauvre homme qui mourait de faim et on lui a promis de rechercher ses voleurs. »

 

La Presse du 18.07.1897, page 3. L’Indicateur du 18.07.1897, page 1.

 

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