Brussels (le parler bruxellois)
Inleiding / Introduction
Brussels is een deel van het Brabants, één van de drie dialecten van het Nederlands in België.
Le bruxellois est un parler faisant partie du brabançon, un des 3 dialectes du néerlandais en Belgique.
1 Uittreksels van: / Extraits de:
in : Francis Wanet, Le bruxellois de poche, Assimil 2000
ballekes |
boulettes |
nen goïe Charel |
un bon Charles (gars, type) |
Dagh ma klaïen tichke ! |
Bonjour, mon petit (gars) ! tichke : petit gars /petit sexe/ < Tiste (Baptiste) |
Poupa – Mouma |
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bompa – boma |
grand-père – grand-mère |
kadei |
garçon, plutôt adolescent (t. affectueux) |
ket |
fils gamin |
matantje (Vl : Jeannette) |
tapette |
voïel Jeanet |
femme malpropre, qui néglige l’entretien de sa maison |
Chaerel Flup Louwée (Louis) Mile Piteke Rée (Henri) Susse (François) |
Amelée Belle (Isabelle) Gusta Méeke (Marie) Nelle (Cornélie) Stans (Constance) Tine (Christine) Tréene (Thérèse) |
‘t euske |
les WC |
kaberdouch |
cabaret |
bloumpanch |
(bloum = farine ; panch = boudin) spécialité bruxelloise : en forme de très gros boudin, fabriquée à base de sang de porc, de farine et de morceaux de lard et servies en tranches. |
bousterink |
hareng saur |
lammekezaut |
hareng à frire |
chenüeseklüete |
(testicules de Chinois) caricoles froides / ou escargots chauds cuits dans un bouillon de légumes fortement assaisonné |
chausels (ou choezels) |
un pancréas de bœuf ou de veau, cuisiné à l’étuvée pendant des heures avec de la queue de bœuf, de la poitrine de mouton, des pieds de mouton, des ris de veau, des boulettes de viande hachée, des oignons, des des champignons, un ou deux litres de lambic, des épices et du vin de madère. |
ètekeis |
fromage à pâte molle au goût et à l’odeur très prononcés (= stinkedekeis : fromage puant) |
potekeis |
= on mélange de moitié du platekeis (fromage blanc) au ètekeis |
kipkap |
charcuterie : fromage de tête, dont la gelée est légèrement vinaigrée. (kap : coup de hache oud e couteau) |
smoutebolle |
(smout : graisse) + bolle : croustillons, beignets |
koukembak |
crêpe |
mastel |
(giroflée) une petite coque ronde au sucre |
spikeloes |
spéculoos : biscuit d’apparence brune (sucre candi, cannelle et clous de girofle) et cuit dans de grandes formes en bois sculpté, représentant la plupart du temps des personnages moyenâgeux ou des formes architecturales. |
verlaürebrüet |
« pain perdu » : tranches de pain ou de brioches rassies trempées dans un mélange de lait ou de sucre vanille, badigeonnées d’œufs battus et ensuite poêlées (= gewonne brüet (pain gagné)) |
raconter un stüet |
raconter un bobard ou qqch qui s’est déroulé |
zinneke |
bâtard ou chien bâtard ; de père flamand et de mère néerlandophone (ou vice-versa) |
Meyboom |
Un grand arbre est transportéà bout de bras et planté au coin de la rue des marais et des Sables. Le plus étonnant, alors que l’on aprle de l’ »arbre de mai », est que cette rtrdition se perpétue tous les 10 août. En l’an de grâce 1311, le Duc Jean octroya à la compagnie des erchers de Saint-Laurent l’autorisation de planter un « arbre de mai » pour les remercier de s’être portés au secours des participants à uine noce assaillie par des Louvanistes (habitants de Louvain). La Saint-Laurent se fête le 10 août, d’où l’explication de cette date. (p.85) |
chaukeléef |
petit chou d’amour |
broubeleir |
bredouilleur |
klachkop |
chauve |
zievereir |
baveur ; imbécile |
Ne chiken bak |
un bac à chiques (appareils distributeurs de chewing-gums) |
Janmenklüete |
(Jean mes couilles) Jean-foutre |
D’aene djoum djoum |
Ce méli-mélo (se dit de qqch qu’on n’apprécie guère (de la musique par exemple) |
2 Louis Quiévreux, Dictionnaire du dialecte (sic) bruxellois, éd. Nélis
NB En fait, le Brussels (bruxellois) est une variante locale, un parler, faisant partie du Brabants (brabançon), l’un des trois dialectes du néerlandais en Belgique.
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(oud) : vieux. â met : Vieux-Marché. Den aven â mèt : l’ancien Vieux-Marché, qui se trouvait à la place Anneessens. â bakke (vieux cuit) : rassis, usé. Hij heit van den aa man (il a du vieil homme) : il est sénile, il a un coup de vieux.
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AAIZER |
(ijzer) : fer ; exclamation argotique employée pour annoncer l’arrivée ou la présence d’un agent.
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AAR |
(ei) : œuf. âren of joengene ? (des œufs ou des poussins ?) : Eh bien ! vca[s décidez-vous ? Quel parti allez-vous prendre ? Are sloege (Frapper des œufs) : divertissement populaire consistant à casser des œufs suspendus à des ficelles.
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A BAKKE |
(oudgebakken) : rassi. ’t Es gebakke ! C’est cuit ! L’affaire est dans le sac.
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ABERDOEN |
(vient du nom de la ville d’Aberdeen, en Ecosse) : morue séchée. Rotten aberdoên (morue pourrie) : insulte. Le marchand ambulant qui vendait de la moutarde criait au début du XVIIe siècle : « Mostaert op de hesp en abordaen!» (Moutarde sur le jambon et la morue). (Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael-Dicht, etc.)
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ABOZA |
Beaucoup de revendeurs achètent aux dispersions à l’encan. Certains d’entre eux, qui conviennent de ne pas hausser « l’un sur l’autre » se réunissent après la vente et procèdent, entre eux, à de nouvelles enchères. Cela s’appelle « faire la révision » ou faire « aboza » ou, en dialecte flamand, « mij lekke » (lécher avec). Admettons qu’un lot ait été adjugé officiellement pour 1.000 F. Pendant l’« aboza », les revendeurs haussent sur cette somme. Le dernier enchérisseur paie son enchère et les 1.000 francs. «Aboza » a une construction castillane, mais, à première vue je ne puis le rattacher à aucun mot espagnol indiquant l’opération visée, à moins qu’il ne s’agisse de «boisa», traduction de «bourse»? « Mij lekke » serait plutôt « mij legge », surenchérir. En espagnol le verbe « abozar » signifie: bosser, retendre la voile qui tenait par sa corde l’ancre dans la mer. « Aboza » pour les pirates espagnols voulait dire : partir pour une nouvelle expédition. Quand les revendeurs font « aboza », ils repartent, eux aussi pour une nouvelle expédition.
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ABREVIATIONS |
La langue populaire de Bruxelles fourmille d’abréviations, de phrases ramassées qui étonnent et déroutent parfois. Ma ich zeen : Fais donc voir (provient de : laat mij eens zien), littéralement : Moi une fois voir.
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ACHEL |
fagotin de bois à brûler, imbécile. Achelkes : petits fagots pour allumer le feu. Zei gâ nen achel ! : que tu es bête ! Mènen achel : mon imbécile de mari. Ne vezen achel : un drôle de coco.
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ACHELE |
bégayer.
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ACHELEIR |
bègue.
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ACHTERSTE |
postérieur, le derrière.
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AFBEIE |
(bieden : offrir) : marchander.
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AFBLAAIVE |
(afblijven) : ne pas toucher. Afblaaive of trâve ! (ne pas toucher ou bien le mariage) : ultimatum signifié par une fille vertueuse à son galant. On dit aussi : Hanne van de koech of trâve : les pattes de la voiture, ou épouser. Et encore : Hanne van de koech of ge rad ni mei !
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AFFOUREIRE |
doubler de tissu (ne paltot affoureire). |
AFFRONTEIRE |
(du flamand affronteren) faire un affront à quelqu’un, répondre avec hargne. Ho tède gâ ma affronteire ? : Tu oses répliquer ?
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AFGANG |
diarrhée.
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AFKEURE |
(du flamand afkeuren) : exprimer sa désapprobation, réformer (à l’armée), éliminer. Afgekeurd : réformé.
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AFRAMMELE |
administrer une tripotée, plus énergique que rammelen.
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AFRANSELE |
administrer une tripotée. Hij krijgt ransel : il attrape des coups. (Schuermans)
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AFCHRABSEL |
terme injurieux signifiant râclure, rognure. « Afchrabsel van metekouwskluûte »: ignoble injure bruxelloise ; littéralement : rognure de testicules de singe !
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AFSLAG : diminution de prix ou de salaire.
AFTOEKKE : administrer une raclée, donner des coups jusqu’à épuisement de la victime.
AFZEEN : souffrir.
Hem kik met da waaif afgezeen ! : ai-je souffert par cette femme !
Hij zeet af : il souffre.
AFZETTER : voleur. Figure dans le Dictionnaire de Bargoensch, d’I. Teirlinck, mais n’appartient pas exclusivement à l’argot.
AGA (algauw) : tout de suite.
Kom agâ : viens vite I
AJOEN (ajuin) : oignon, agent de police, quelqu’un qu’on méprise.
- De Cort rapporte que les gamins se moquent des agents de police de la façon suivante :
- Wa doot à mèke in de soep ? » (Que met ta mère dans la soupe ?) demande un gosse. Et les « ketjes » de répondre en chœur :
- Ajoen !!!
Ajoên, ajoên, a gat es broein ! (Agent, ton cul est
brun) : insulte que lançaient les « ketebbs » aux policiers.
Ajoênboor (paysan aux oignons) : Alostois.
AKE ! ou èke ! : interjection exprimant le dégoût, fi !
AKLIEKOPPER ou ôkliekuuper (du flamand : oudekleêr- verkoper) : fripier.
ALINCH : même pas.
ALLEIE ! : allons donc, aussi allo-do !
Très vieille expression, elle figure dans « Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael-Dicht, etc », donnant les cris des gagne-petit à Bruxelles à la fin du XVIe siècle et au commencement du XVII1‘.
- « Combien votre Fromage, venez icy.
- Six sols pour un petit, deux pour un grand.
- Allez, allez, vous êtes un cher Marchand. » Certains y voient une survivance de l’« olé » d’Espagne.
ALLEMOE ou allemoer (alleman) : tous, toutes.
AMBRASS : embarras, chichi.
Ambrassmoêker : prétentieux ou faiseur d’embarras.
AMERICAIN :
Den Américain : ainsi les Bruxellois appelèrent-ils les premiers trams à chevaux.
AMIGO : dépôt communal prison de la ville. Il servait pour les délits bénins, surtout ceux d’ivrognerie. Diverses hypothèses ont été fournies pour expliquer l’usage de ce mot espagnol qui signifie ami.
La plus répandue est que les Espagnols, au temps où ils occupaient Bruxelles confondirent le mot flamand « vrunte » (enclos, endroit fermé) donné à la prison de la ville, avec le mot « vriend » (ami) qui se traduit dans leur langue par « amigo ».
- Van Vreckhom, dans « Le Marollien », dit :
« Le Français dira « une maison amie » pour indiquer la maison où il a des amis. L’Espagnol parlera dans le même sens de « casa amiga » ou encore « local amigo » ; il dit « ir al local amigo » (aller dans une maison amie). N’a-t-on pas abrégé par ironie, d’où « ir al amigo» (aller à l’amigo), là où les amis de hasard se rencontrent malgré eux ? ».
Voici une autre explication fournie par M. J. Cuyle, professeur à Gand (Het Laatste Nieuws, 26-7-1941) : « Dans « Don Quichotte » de Cervantès, on trouve « guarda-amigo » et « pieda amigo » comme dénominations de différentes espèces de fers, soigneusement décrits par Rodriguez Marin. Le « guarda amigo » était un collier d’acier. Ces fers devaient être utilisés ailleurs qu’en Espagne, car nos musées possèdent des instruments qui y ressemblent. Probablement les mots « guardo-amigo » et « pieda- amigo », par extension de signification, désignèrent les endroits mêmes où on s’en servait. Un texte espagnol non daté, mais selon toute probabilité d’avant le XVI” siècle, donne simplement « amigo » comme nom des fers assujettis aux pieds. Je ne connais pas d’exemple en Espagne, où «amigo» désigne la prison ».
Un dicton populaire dit que nul n’est un vrai Bruxellois s’il n’a passé une nuit à l’Amigo. Vers 1880, l’Amigo était tenu par M. et Mme Plétinckx, de là vint l’expression : « coucher chez Plétinckx » ou « à l’hôtel Plétinckx » ou « chez Madame Plétinckx ». Cette dernière expression permettait des sous-entendus triviaux.
AMOULETTE : gifle (viendrait d’amulette, d’après D. De Keiper, « Le Français de Bruxelles ») ; mais nous avons entendu plus souvent : armolette.
ANKER : drôle de type.
- P. Hermant, dans son «Glossaire de l’Argot» l’orthographie « heinker » (type, individu) et le fait dériver du vieux flamand « hencker » (bourreau). Anker en zonne : ancre, pique et soleil, jeu de bon- neteur. (Voir un jeu de ce genre ou Musée du Béguinage, à Anderlecht.)
(Ankeraar (bedelaar) : mendiant. Schuermans.)
ANTROESE : anxiété, angoisse.
« Mi vaaif vingere en antroese » (avec cinq doigts et de l’angoisse) : locution exprimant l’action de dérober, de commettre un larcin. (Lu)
APOSTEL : apôtre.
Veezen apostel : drôle de pistolet (figure dans Schuermans).
APTEIKER : pharmacien, parfois aussi rebouteux.
’t es ne veeze apteiker ! : c’est un drôle de corps !
ARA ! : façon vulgaire de dire « voici ».
«Ara! Du biscuit anglais avec une brokske du truffe de Périgord » (Protestation de Jef Krollekop. «Le Sifflet» 11 septembre 1904).
Autre signification (H. Van Vreckhom « Le Marollien ») : Ara, de Ala (I remplacé par r), cri de guerre du peuple en Espagne : Ala ! du mot arabe Allah ! Le Marollien criera : Ara !
Le cri de combat des Flamands était « Arrat » ou «Arras». Ce dernier terme est resté en usage dans nos régions et particulièrement à Bruxelles où l’on dit « arra » guand on donne ou voit donner un coup ou lorsqu’on veut encourager un combattant. On l’emploie encore en signe de provocation, par exemple, lorsque les Marolliens crient : « arra, nen boukei » (bruit produit par les lèvres avec la main comme porte-voix). (Folklore Brabançon. Mentionné par M. P. Hermant. Décembre 1936.)
Une « ara » : tartine très grosse qu’on jette devant quelqu’un en disant « ara » au lieu de « voici ». Schuermans écrit « arè » : soort van tussenwerpsel, dat men in Brabant gedurig hoort, in de zin van « ziedaar », het Frans « tenez » b.v. « arè, daar is wat gij gevraagd hebt ».
La «loi-wet» en action. — Un peintre s’en revenait dans la nuit par le quartier des Marolles, fort égayé, à la suite d’une soirée passée entre amis à Saint-Gilles.
Au détour d’une rue, il se voit accosté par un naturel du quartier, dont le débit embarrassé trahit de trop longues stations dans les débits de faro et d’« half scheut ».
- Mossieu, est-ce que tu saies siffler une fois ?
- Certainement, répond l’artiste en riant, et fort bien encore.
- .. tu saies, tu me faut faire… faut faire un plaisir… Voilà mon mison… et… quand ce que je reste trop tard sur le «staminet», je siffle l’air « Wij zijn van Meulebeek ! » et Vergenie, mon femme, elle vient à la fenêtre et me jette la « sleut» dihors… la clef, allô ! A présent… mon langue, elle est comme trop lourde… je peux pas… pas siffler, savez-vous.
- Eh bien, je vais siffler pour vous, répond le peintre. Et s’approchant de la maison, il attaque l’air demandé.
Bientôt, une fenêtre du premier étaqe s’ouvre et le malheureux artiste reçoit sur la tête le contenu d’une cuvette, pendant qu’une voix de femme, indignée, crie dans le silence de la nuit et dans le langage des Pitje et Nèlleke de la rue des Vers :
- Arra ! Zatlap ! Voilà pour vous !
(«Le Tirailleur» 1891)
ARADÈ : Le 21 juillet 1881, Jefke Trullemans étant en l’estaminet
enseigné « In de Spytigen Duivel » y apostropha deux gendarmes
par les mots :
– Goddouche ! De pakemans zijn daar !
Jefke, joignant le cynisme du geste à celui de l’expression appliqua
à l’extrémité de son nez sa main ouverte et exécuta le simulacre
ironique d’un solo de clarinette.
Au tribunal, le président lui demanda :
– Et ce pied de nez que vous avez fait dans la direction du
brigadier ?
Trullemans : — Monsieur le Juge, ce n’était pas un pied de nez,
c’était un aradé. (Du «Journal des Tribunaux, 2 décembre 1881)
ARBORÉ : employé erronément à Bruxelles dans le sens de
« planté d’arbres ». « A vendre, belle propriété, bien arborée, etc.
Figure trop souvent dans les annonces notariales.
ARCHITECT : insulte.
Ecoutons Thyl, dans « Les Injures marolliennes » (National
Bruxellois du 3 août 1926).
« Smeergen architect » est une autre injure marollienne qui a une origine bien bruxelloise. Pourquoi diable le bon peuple des Marolles a-t-il voué depuis quelques lustres une haine aussi féroce qu’injustifiée à la corporation respectable entre toutes des architectes ? Ah ! C’est que ceux qui questionnent de la sorte ne se souviennent plus des fureurs maroliennes d’il y a quelque cinquante ans. Alors, la pioche des démolisseurs fit tomber foule de bicoques vétustes entre la rue aux Laines et la rue des Minimes. Cela afin de faire place nette pour l’édification de l’énorme Palais de Justice. Depuis lors « architecte » et « ennemi » devinrent pour les Marolliens évincés des synonymes également exécrables. »
C’est de l’époque de l’expropriation des Marolles pour la construction du Palais de Justice que date aussi la création du Quartier du Chat à Uccle.
« La construction du Palais de Justice, dit G. R. dans «Le National Bruxellois» du 12 avril 1936, par Joseph Poelaert, entraîna, au siècle dernier, la démolition d’une importante portion du quartier des Marolles. De là, l’irascible rancœur de nos Marolliens contre cet « architecte ». On sait qu’ils commirent quelques déprédations lors de l’inauguration de ce monument gigantesque. On les dédommageait cependant, lorsqu’on les expropriait. Mais toucher aux Marolles, détruire leurs venelles, leurs impasses natales, cela leur paraissait un crime ! » Nos concitoyens donnent parfois aux mots français une signification bien fantaisiste.
Ainsi la jeune prévenue, belle enfant du beau quartier des Marolles, que M. le Président interroge sur ses antécédents, répond en pleurant : « Nous sommes de braves gens, il n’y a pas d’architecte dans la famille» — et les habitants des rues du Faucon et de l’Eventail, qui ont envahi la salle d’audience, semblent admirer le tact et l’à-propos de cette réponse.
C’est, du reste, l’expression « architecte » qui a amené une scène de pugilat entre la demoiselle en question et un commissionnaire. A la honte du sexe fort, le commissionnaire a été honteusement « tombé ».
Mais écoutons la prévenue qui, interpellée en flamand, a répondu avec une modeste fierté : « Monsieur le Juge, je parle français sais-tu ! ». J’avais été acheter du pétrole, dit-elle. — Le commissionnaire qui a « une pique » sur ma famille a crié «Tu es une scandale, et ton frère est un architecte ». Alors, ça m’a mis en colère et je lui ai donné, sur sa figure, une « clache » avec ma cruche à pétrole.
- le Président. — Parce qu’il vous avait appelée scandale ?
La prévenue. — Non ! Ça, je sais prouver que je le suis pas. Mais il a dit que mon frère est architecte ; (éclatant en pleurs) mon frère est un brave garçon, soldat dans les guides ! Jamais une punition !
Un agent de police, cité à décharge, déclare qu’en effet la prévenue et son frère ont une excellente conduite. Il ajoute que s’il avait entendu le mot « architecte » il eût conduit l’insulteur « au bureau ». La belle pétroleuse en est quitte pour dix francs d’amende. Mais voilà la jurisprudence fixée sur le sens du mot «architecte». (Journal des Tribunaux, 1883.)
Schieven architect (architecte de travers) : autre insulte.
ARDONTCHE : peut-être d’« arduin », pierre de taille. Synonyme d’armolette, gifle bien appliquée.
ARMOLETTE : voir amoulette.
ASCHLIEP ! : exclamation de dérision, de moquerie dont se servent les gosses bruxellois.
Elle s’accompagne rituellement du geste de l’index droit frottant l’index gauche comme un fusil aiguisant une lame.
Nous y voyons la racine « slijpen » : aiguiser. La relation entre le geste d’aiguiser et la moquerie me semble obscure.
A Ostende, les gosses disent « sliepe-sJiepe ! ». Un Ostendais m’a dit que l’expression pourrait dériver de « geslepen » (malin) et il ajoute que ce sont toujours les enfants les plus rusés qui se moquent ainsi de leurs camarades.
Dans le Limbourg, on retrouve le même geste accompagné d’interjection « â slip ! ».
« A slip » serait la forme populaire de « uwe slip » (ton pan), moquerie à l’égard des gosses dont la culotte déchirée laisse passer un morceau de la chemise.
En toen de meester zich wendde Lachte en schoof de guit Zijn wijsvingers over elkander En « sliepte » zijn makkers uit.
(Et lorsque le maître se retournait — l’espiègle riait et frottait ses index l’un sur l’autre — et faisait « aschliep » à ses camarades.)
Extrait de « Sliep ! Sliep ! » par J. A. Torfs. (« Histo- rische en Letterkundige Mengelingen », uitgegeven door Alex Tillot, Louvain 1876.) qJ)
ATTENDS, JE VIENS ! : expression bruxelloise passe- partout, à la mode il y a 50 ans et plus.
« La Gazette» du 20 mars 1883 écrivait :
Sait-on quelle est l’origine de ce cri populaire : Attends, je viens ?
Un estaminet de la Grand-Place possédait naguère un garçon, très connu des habitués de l’endroit et très familier avec eux.
Quand on l’appelait pour lui demander un verre de faro ou de brune, sa réponse invariable était : — Attends, je viens !
Cette réponse, prononcée avec un accent marollien très pur, fut bientôt à la mode parmi les consommateurs de l’établissement susdit. Puis, de l’estaminet elle s’est propagée au dehors, petit à petit… Le même journal racontait :
Un Bruxellois vient de perdre sa femme.
Il a fait placer sur la tombe de la défunte une
grande dalle de marbre blanc, avec cette épitaphe gravée
en lettres d’or :
Le Ciel, ô femme chérie,
A mon amour t’a ravie.
Tes plaisirs étaient les miens ;
Sans toi je ne peux plus vivre ;
Dans la mort je veux te suivre…
Attends, je viens !
AUBETTE : ce joli mot bruxellois assimilé à l’« au- bette » (« petite aube ») n’est pas admis par le Dictionnaire de l’Académie française, mais il a droit de cité chez nous tout comme «pistolet» et «drève». Aubette, terme militaire du XVIIe siècle, désignait un lieu de réunion pour officiers, à l’aube, pour la distribution des billets de service.
A Bruxelles, nous avons les aubettes à journaux, les aubettes de trams, les aubettes de l’ancien octroi. ; ij) tvAJlàte.
AURMENTER : augmenter.
Tout aurmente au jord’ojordhui !
AVEN A MET : (l’ancien Vieux-Marché), désigne encore aujourd’hui la Place Anneessens et ses abords immédiats, là où se tenait autrefois le marché aux ferrailles, aux vieux habits, aux vieux livres, etc, installé à présent à la Place du Jeu de Balle (Vieux- Marché).
AZAAIN : vinaigre.
’t Es de doCHter van d’azaainbravera (c’est la fille de la vinaigrerie) : c’est une pisse-vinaigre (voir zeurproeimer). On dit aussi : azaainpisser.
BAAITE : mordre, d’où l’expression « hedde ’t bijt ? » (cela mord-il ?) : as-tu compris ?
Baaiter : (qui mord), dent.
(Appartient plutôt au bargoensch ou argot des voleurs.)
Z’heit er van, z’heit in ’t pateike gebete, ze lupt mi en tonneke (elle en a, elle a mordu dans la tartelette, elle marche avec un tonnelet) : elle est enceinte.
BABBEL : bavardage.
Babbele : bavarder, commérer.
Babbelkont et babbelkontche : bavarde, commère. Hij heit babbelwoêter gedroenke : il n’arrête pas de parler.
BABBELEIR (ba bbelaar) : bavard, sorte de bonbon au sucre que De Ro, cité par I. Teirlinck (Woordenboek van Bargoensch) décrit comme suit : « On cuit ensemble du sirop et du sucre. On durcit le mélange en l’étirant et on le coupe en petits morceaux ». Quant à l’origine du mot, on croit que pour manger cette friandise, il faut se livrer à une gymnastique de la bouche, comme fait le bavard. (^Ç^JbuiaxÀ. Babbelkous : bavard(e).
BABIOEN ou babiontche : (viendrait de «babiller»), quelqu’un qui, en bavardant à tort et à travers, révèle des choses qu’il devrait garder pour lui. Schuermans dit : « Babbiaan (babbel-aan) voor bab- belaar, die altijd aan babbelt ».
BAF : coup. (jv)
Baffe : frapper avec le pfoing, manger gloutonnement.
« Baf » est une onomatopée. En Flandre, on dit parfois « baffe ».
Baffer : goinfre (cf. bâfrer).
BAFFON (den) : Les Bas-Fonds. Ainsi désignait-on le quartier en contrebas de la Colonne du Congrès, démoli pour l’érection de la Cité administrative.
BAISE : baiser, coup bien asséné. Dans ce dernier sens, employé fréquemment par le public des combats de boxe.
BAK : bac, récipient.
Le bac désignait la marmite que portaient autrefois les marchands ambulants de pommes de terre en robe des champs et d’esprot.
In den bak : à l’amigo ou à la prison.
Bak à schnik : assommoir. -@
« Bac à ordures », dit-on, à Bruxelles, au lieu de « bac aux ordures ».
BAKKES : figure, gueule.
Cité par Schuermans : «Hij heeft een leelijk bakkes». De « bucca » et « bouche ».
Dans les farces bruxelloises du XVIIe siècle et notamment dans « Den uytghetapten Koopman ofte Mis- lukten Dragonder », de Joan De Grieck, on trouve « Hout strax u backhuis toe » (tu vas la fermer !). Backhuis ou bakkes seraient-ils l’équivalent de «four», l’endroit où on cuit ?
’t Was bakkes gekreit (c’était de l’agace-bouche) : un repas bon, mais pas assez plantureux.
BAL : balle, bal (danse), un franc.
(Figure, dans cette dernière acception, dans « Het Bargoensch van Roeselare », par H. De Seyn-Ver- hougstraete.)
BAL OP DE BOETCHES (bal sur les petits bateaux) : expression usitée à Bruxelles pour dire qu’il y a des disputes : ’t es bal op de boetches.
L’origine de cette expression est assez discutée, mais elle semble remonter au temps d’avant la guerre de 1914-1918, quand aux Fêtes Nationales, le peuple courait au Bassin du Commerce où avaient lieu des réjouissances nautiques dont le « bal op de boetches ».
Les « vaartkapoenen » donnaient leur fête annuelle à laquelle assistaient les notabilités bruxelloises. Devant la tribune se trouvait un bateau dont le mât incliné presque horizontalement portait un petit panier avec des balles blanches. Il s’agissait pour les débardeurs de grimper le long du mât jusqu’au panier et à en retirer les balles. Mais le plus souvent, ils tombaient à l’eau à cause du savon noir qui enrobait le mât. Est-ce à cause des difficultés que présentait ce concours qu’est venue l’expression relative aux disputes ?
D’autres prétendent que « bal op de boetches » proviendrait des bals populaires qui avaient lieu sur les bateaux, pendant les Fêtes Nationales, entre la Porte du Rivage et le Pont de Laeken. Dans la première acception, « bal » se traduirait par « balle » et dans la seconde par « bal ». Dans son livre « Van Ketjes en Kiekefretters » Cypriaan Verhavert, dit que l’ensemble des réjouissances au canal, pendant les Fêtes Nationales portait le nom de « bal op de bootjes ».
BALLEKES : boulettes de viande hachée, de bœuf ou de veau. On dit aussi : fricadelles.
Ballekes zeen : avoir faim.
Ballekesdeef : autrefois, celui qui chapardait dans les cuisines.
BALLON : ce mot a servi à former plusieurs variantes qui procèdent toutes du nom de Nadar, le célèbre aéronaute du siècle dernier.
C’est ainsi qu’on trouve « ballon-adar, ballon-nadar, ballongadaâ, etc ».
Dans son ouvrage « Cinq Jours avec Ch. Baudelaire », Maurice Kunel a raconté une ascension que fit Nadar au Jardin Botanique.
Ce Nadar fit une telle impression que son nom est passé dans le langage bruxellois, non seulement pour ce qui a trait à l’aérostation mais aussi dans le mot « barrière-nadar » ou « barrière-adar » désignant les barrières servant à canaliser la foule lors de fêtes ou de cérémonies publiques.
BANAME : banane.
BARDAF : exclamation lorsqu’on donne ou qu’on reçoit un coup ou lorsqu’un objet lourd tombe. Van Vreckhom y a consacré la note suivante : « Ver- douf, de l’espagnol « verdugo » (bourreau), dans un sens d’impression que laisse le coup de fouet sur la peau. Le v = b, l u = ou, l’o final supprimé = berdoug ou berdouf. Ces deux expressions sont celles prononcées lorsqu’on donne ou reçoit des coups ». r w) Z’Sl\AjoJ
BARON CRAYON : sobriquet d’un type populaire bruxellois d’avant la guerre de 1914. Sale, dépenaillé, il logeait le plus souvent rue Haute dans une de ces infâmes maisons de logement qui avaient nom « Bij Berreke » ou « In de vijf centie- men » ou bien à l’Armée du Salut ou à l’amigo.
BARON ZIEP : nouveau riche.
Appellation péjorative issue de la guerre 1914-1918, désignant ceux qui s’enrichirent en fabriquant du savon, et par extension tous les mercantis et margoulins.
BARQUETTES : pieds particulièrement longs.
Aussi violekas : étui à violon.
BARRIERE-Nadar : voyez « Ballon ».
BARRIERE ADAR : (Nadar) voir « Ballon ».
BAS : contrebasse (instrument de musique).
Dat hem ik nuut op nen bas huure speile : je n’ai jamais entendu jouer cette air par une basse, je n’ai jamais entendu cela.
BASSE (bassen) : aboyer, tousser.
Dans une pièce bruxelloise représentée en 1559 « De Bervoete Bruers », nous avons trouvé cette expression du terroir « gy en hebt maar den bas » (tu ne sais qu’aboyer) que K. Stallaert explique par « ge kunt bassen, maar niet bijten » (plus de bruit que de mal) (chiens qui aboient trop ne mordent Pas). (Q) Inanité* .
BASTOED : bâtard.
Bastoêd zaain : étant en société, ne pas payer de tournée.
BATAILLON CARRE : grand immeuble contenant beaucoup de locataires, impasse.
L’expression se rencontre dans les bulletins des séances du Conseil Communal de Bruxelles au XIXe siècle.
BATTERE (battre) : se battre.
BAZOEF : Voici la définition qu’en donne H. Van Vreckhom (Le Marollien) : « Bajouve, de basofia =
relief de repas, nourriture peu ragoûtante. Le ia final est remplacé par e.
Basofe ou bajove = bajouve. Bajouve signifie les reliefs de la table
réservés aux pauvres dans les maisons bourgeoises.
Basoef, aussi de basofia, s’applique par extension à l’homme gui boit
beaucoup et mange salement». En espagnol : bazofia = graillon, restes,
ramassis d’un repas ; aussi : gazofia, de bazo : la rate.
De G. Freddy (Bruxelles Inconnu) : « Le « bedelaar » a de vastes
poches où s’entasse la « mitraille » et un panier, un cabas où
s’enfouissent les victuailles. Celles-ci sont consommées par le
mendiant lui-même, sauf le pain, gui est vendu aux vachers, aux laitiers,
et les restes de restaurant gui sont cédés à des petits industriels des
quartiers populeux, lesquels en confectionnent des plats économiques.
C’est ce qu’on appelle à Paris un « arlequin » et qu’on désigne aux
Marolles sous le nom de « bazoef », nom emprunté à l’innovateur, mort
depuis des années, mais dont la veuve continue les affaires, rue des
Vers. Un des plus importants fabricants de bazoef, disparu aujourd’hui,
était fort populaire rue des Tanneurs sous le surnom de Tistje Vet».
(Bruxelles 1904.)
Ajoutons que le marchand de bazoef vendait aussi, au détail, des restes
de viande à des clients peu fortunés.
La plus importante maison de «bazoef» était rue de l’Epée. Des
ouvriers triaient les reliefs amenés dans de vastes tonneaux par un
camion à deux chevaux. Avec le «bon» on faisait du «bazoef»,
agrémenté de salade et de petits oignons, vendu aux gens du quartier.
Avec le restant
on préparait des aliments pour les bêtes.
Le dimanche, il y avait une file de charrettes à chiens dans la rue de l’
Epée pour venir acheter des restes. Les plongeurs des restaurants
récoltaient les moindres morceaux de graisse qu’ils vendaient à Bazoef
pour la préparation de « keukevet » dont les petites gens se servaient
pour frire le poisson. Bazoef est aussi le pseudonyme sous lequel le
financier et journaliste Léopold Pels écrivait des articles en français et
en marollien, notamment dans « La Casserole » et « Le Petit Bleu ».
Voici un extrait typique de « Œufs durs et Mastel- les » de Bazoef :
« Poiète, ça c’est un état comme un autre. Si bien qui n’a des cadeies
qu’on est fabriquant de carabitjes, of ramasseur de scramouilles of qu’il
faie dans les draps, moi je suis t’un qu’il faie dans les versses et on faut
pas me méprisée pour ça. I n’a eu une fois un appleie Jef Casteleyn. A
bien ça étions pas des wallebak, sais-tu ! ».
BEBE : jeu de la marelle.
BEC OUVERT : bec à gaz (corruption de bec Auer).
BECHESPEL : jeu de bêches, c’est-à-dire des osselets.
BED (bed) : lit. Beddepisser : qui pisse au lit, qui n’ose pas, timide.
BEDONDERE : fa ire de l’orage, dans le sens de salir un W.C.
Hem bedondere : l’emmerder.
BEDREEGPUT (trou trompeur) : jeu d’enfants consistant à creuser un trou dans lequel on dépose des immondices qu’on recouvre de branchages et qu’on camoufle d’une légère couche de terre. Ces préparatifs se font en l’absence d’un gosse niais et crédule, choisi comme victime. Les comparses organisent alors un concours de saut en longueur, chacun prenant bien soin de sauter en-deça du trou fatal. Le « snul » s’impatiente et dès qu’arrive son tour, il veut montrer qu’« il saie mieux que les otes ». Son élan l’envoie en plein dans le piège rempli de « smochter » (voyez ce mot) à la grande joie de ses cruels partenaires.
BEIDELEIR : mendiant.
BEIE : marchander.
— len de ! ge meûgt hee alinsch ni beêie ! »
Comment, on ne peut même pas marchander ici ? (Exclamation entendue communément au Vieux- Marché.)
BEGOT : corruption de : bij God (par Dieu). Exclamation destinée à renforcer une affirmation.
Janferdekke, que t’es joli !
Begot, si t’chifflot ressemble à t’casaque…
(Quetje Corbeau, par Coco Lulu.)
BEIR (beer) : ours.
Beir op zokke (un ours à chaussons): se dit de quelqu’un qui vient à pas de loup. A rapprocher de l’expression picarde: «I buque à pieds décaux»: il fait du bruit en marchant pieds-nus.
BEIS : groseille, baie.
Hij eit en beis op : il est éméché, il est dans les
vignes du Seigneur.
lel/beize (aardbezië) : fraises.
Waainbeize : raisins.
Steikebeize : groseilles à maquereau.
Rue beskes : grosseilles rouges.
De iètbeize zaain good gelukt deis joer (les fraises sont bien réussies cette année) : se dit au propriétaire d’un gros nez écarlate.
BEIT : attrape.
Beit kraaige : attraper quelqu’un, prendre l’avantage sur quelqu’un pour une manœuvre plus ou moins honnête.
BEITERE (beteren) : améliorer.
’t Zal beitere : cela ira mieux, est une expression employée souvent à Bruxelles. Elle reflète bien la philosophie des classes pauvres. Nous l’avons retrouvée dans une pièce comique « De Bervoete Bruers », représentée à Bruxelles en 1559: «’t sal beteren ».
BEIZE : dracher (voir ce mot).
En beis : averse, ondée.
BEK : bec, bouche.
Mo da’s gien spelc vé â bek (ceci n’est pas du lard pour ta bouche) : tu n’auras pas cela, cela est trop beau pour toi.
Get nog geil on â bek (ton bec est encore jaune) : allusion au bec jaune des oisillons, tu es un béjaune.
BÈKE ! Pouah ! exclamation de dégoût. Aussi : « êke ! âke ! ». – (.0
A Mons « bek » (Dictionnaire du wallon de Mons, par J. Sigart).
BEKANST ou BAKANST (bijna) : presque.
BELEUBERE : se salir les vêtements en buvant pendant le repas.
Ze sprekt mé en beleuberde toeng : elle zézaie.
BELLEKE (beeldje) : image, journal enfantin.
BERDACH : Van Vreckhom le fait dériver du mot espagnol verdasca = verge^ et aussi coups de verge. Voir bardaf.
Verdasca : rameau fin ordinairement vert.
Verdascaza : coup donné avec une verge (Dictionnaire de l’Académie Royale Espagnole 1925). Berdach doit être un mot périmé car nous ne l’avons pas entendu à Bruxelles.
BERG : Mont de Piété (situé rue Saint-Ghislain, Sinte- Gelanchstroet).
BERKOOS (ou berkuus) : maraîcher, précoce.
BERWETT : voir Plank.
BESCHOND (beschaamd) : honteux, confus. L’expression ’k Hem men sCHomsCHoone oeitge-
doen (j’ai enlevé mes souliers de gêne) signifie : j’ai dépouillé toute honte.
BESSEME : verbe employé par les ouvriers carriers de Bruxelles et de Vilvorde pour exprimer que la terre ayant été enlevée, la pierre est désormais à nu. Hoe verre zijt gijlie al met uwen put ? — Ah ! Morgen gaan wij bessemen, c’est-à-dire demain, nous pourrons commencer à extraire la pierre. (Schuermans) peut être mis en relation avec bessem (balai), la pierre ayant été mise à nu, on la balaie avant de l’attaquer.
BESTE : meilleur, éclater, se fendre.
Hij hei zoe doenig gefret dat hem goe beste : il a tant bouffé qu’il va en éclater.
BE STEIKEN complimenter quelqu’un à l’occasion d’une fête: « Meiter, ‘t es vandoeg â oeved » En merge â dag » ’k hem d’ier dak a besteike mag ».
(Marraine, aujourd’hui est la veille de ta fête et demain est ta fête. J’ai l’honneur de pouvoir te fêter.)
Schuermans dit: «besteken»: iemand op zijnen naam- of verjaardag een geschenk aanbieden.
BETCHES (beetjes) : petits morceaux, familièrement : la pâtée des animaux familiers.
Dans un programme humoristique de la Kermesse des Marolles, à la fin du siècle dernier, on trouve cette mention, à propos de personnages trônant sur un char de cortège : « nuilwerkessen avec leurs bêtjes ».
Il s’agit de dentellières) mais avec quels « bêtjes»? Ce dernier mot est encore usité, mais il désigne la nourriture qu’on donne à un animal familier : « Boby va recevoir des betches ! ».
En réalité, les « betches » ou petits morceaux, étaient les pièces que fabriquaient les dentellières, travaillant à plusieurs à un grand ouvrage, chacune se chargeant de la confection d’une partie d’une robe, ou d’un manteau de baptême, ou d’un col d’apparat, ou d’un voile de mariée, ou d’un couvre-lit. Toutes les «bêtjes» étaient assemblées. Encore un mot : « nuilwerkes » désignait la dentellière travaillant à l’aiguille, l’orthographe fantaisiste étant évidemment celle du rédacteur du programme de la kermesse !
BEUL (beul) : bourreau, tyran.
Beûlestroêt : rue du Faucon.
«Rue du Faucon» encore (1845) connue vulgairement sous le nom de la rue du Bourreau, « de Buyl strate ». (Henne et Wauters.)
BEULEMANS
Le langage d t « beulemans » est un mélange de mauvais français et de mauvais flamand parlé par une classe de parvenus ignorants que Fonson et Wicheler ont portés à la scène dans leur pièce célèbre «Le Mariage de Mademoiselle Beulemans». « Monsieur Beulemans », s’il affecte de parisianiser d’une façon comique, est au demeurant un très brave homme, respectueux des traditions et possédant un cœur sensible.
BEUSSEM (bezem) : balai.
Beussemmoekers : fabricants de balais. Sobriquet donné aux habitants de Boitsfort, un grand nombre d’entre eux tirant autrefois le principal de leur subsistance de la confection de balais, la forêt de Soignes étant toute proche. Il y a encore, à Boitsfort et à Uccle, des lieudits : Coin du Balai.
BEUSTEL (borstel) : balai, brosse.
’k Sloeg a den beustel op a kop. (Je vais te frapper avec le balai.)
Mé den dikken beustel ou mé den groffen beustel
(à la grosse brosse) : le travail a été bâclé, a été fait sans soin. Av)
Beustelgeld : argent qui pppartiendra à celui ou à celle qui le trouvera à terre en balayant.
Den beustel danst : jeu de société consistant à former un cercle autour d’un des participants qui tient une brosse pendant qu’un autre joue un air de musique. Au moment où, brusquement, l’air s’arrête, chaque femme choisit immédiatement un cavalier et chaque homme une danseuse. Celui ou celle qui demeure seul reçoit la brosse et doit prendre place au milieu du cercle qui se referme, puis la musique reprend et le jeu continue.
BEUSTELE : balayer, se battre (borstelen).
Beusteling : borsteling : rixe, bataille.
BEUZZE (beurs) : bourse.
« geif mo beuzze, Gérard (bis)
« Zoe lang Gérard zal leive,
« Zal hij beuzze geive ! »
(Refrain bruxellois pour encourager quelqu’un à
persévérer.)
BIBBERE : trembler, frissonner.
Bibbere van de kâ : trembler de froid.
BICH : viande.
Bich frette : manger de la viande.
Bich op toêfel : jeu d’enfants.
BICHKE (petite bête) : pou, puce ou toute espèce de vermine.
Da menneke ei bichkes : cet enfant a des poux.
BIET : nez de grosse dimension. (De beet : betterave.)
BIK : nourriture.
Bikke : manger.
- Teirlinck donne « bek » = eten.
BILLES (du chemin de fer) : traverses (oignant les rails. (
BINK : garçon, à peu près le même sens que « kadei ». Comparez à « bing » (« Woordenboek van Bar- goensch, door I. Teirlinck, 1886) : meester, vader.
BINNE (binnen : à l’intérieur) : hij es binne : il a fait fortune, il a réussi, il est au chaud.
BINTCHE (beentje) : croc-en-jambe, courte-échelle.
« Mets tes deux jamb’en l’air
»Tu m’vas donner un’bintj’. » (Coco Lulu.)
BISQUER (faire bisquer quelqu’un) : le taquiner.
« Je l’ai fait en exprès pour le faire bisquer. » (Léopold Courouble : Notre Langue.)
BLAD : partie disparue de la Marolle, près du Palais de Justice et dont le nom provenait de celui de la rue des Feuilles (Bloêrestraat, Bladerenstraat). Kermesse d’el blad : fêtes marolliennes dont Joe Dirickx de ten Hamme a reproduit un programme commençant par ces mots : « Gazette de tout ce qui s’ra à voir avec el Kermesse d’EI Blad à I’ Marelles, el samedi 1er jour…».
BLAFFE : aboyer.
Ne blaffer : 1.000 francs.
BLAFFETUR : volets, oreille.
Ouvre ton blafture tout grand : ouvre tes oreilles. (Le voyage de Jef Krollekop, «Le Sifflet», 9 octobre 1904.)
Blaffetures désigne surtout de grandes oreilles. Schuermans donne blaffetuur, blaftuur et plaffetuur :
volet.
D’une note du professeur J. Vercoullie : « Le châssis de toile huilée et particulièrement celui de papier huilé, s’appellent en flamand « blaffeturen ». Je ne connais pas l’origine du mot, mais elle doit être la même que celle de «blaffaert», qui désigne un registre de papier. Aujourd’hui encore on nomme « blaffeturen » ou « fenteneelen » les volets intérieurs. Le papier huilé des châssis porte en français le nom de champi ».
Mon savant confrère Antoine Seyl croit que « blaf- fetur » pourrait être issu de l’anglais « baffledoor » : contre-porte.
BLEIS : personne boursouflée, grosse (du flamand blaas : vessie); stigmates de l’alcoolisme (signalé par De Kelper : « Le Français à Bruxelles »). Schuermans donne : « de blees hebben. — Bolster : in sommige streken van Brabant gebruikt voor bol, opgeblazen, opgezwollen in het gezicht, van onge- zondheid of dronkenschap ».
« Bleiske je sais tout» : sobriquet d’un étudiant de l’U.L.B. à l’époque ou le périodique «Je sais Tout» connaissait une grande vogue (début du XXe siècle).
BLETE : chialer, pleurer, se plaindre. Viendrait de « bleren » qui a le même sens ; bêler comme un agneau ou un mouton.
BLETER : pleurnichard.
BLIGNE (blind) : aveugle. Nen bligne zoeterdag : un samedi où l’ouvrier n’a pas touché sa paie.
BLINKDUUS : boîte de cirage, nègre, montre.
Par ironie, aussi toute boîte en métal précieux.
BUNKER : briller. Le soleil y blinkait sur les postuur en marbre… (Potage printanier, par Bazoef.) Faire blinquer ses bottines.
BLODCHE (blaadje) : feuille de papier à cigarettes.
BLOECH : creux produit par un coup. Bloech in de koêk : personne aux joues émaciées.
BLOEM : farine, poudre de riz.
In de bloem gevalle (être tombée dans la poudre): être outrageusement poudrée.
BLOEMEKEI : bouquet, aussi : pet.
BLOEMPANCH (bloedpens) : sorte de gros boudin, d’un diamètre d’environ 10 cm, fait de sang, de farine et de morceaux de gras de lard, toujours servi en grosses tranches.
Le bloempanch est appelé aussi bufsteik mè roeite
(du beefsteak avec des carreaux) et jambon du Congo.
Bloempanchgang : rue de l’Abricotier. « Gang », parce qu’autrefois, c’était une impasse.
On n’est pas d’accord sur l’origine de cette dénomination. D’aucuns disent que l’inventeur du bloempanch habitait rue de l’Abricotier. D’autres prétendent que c’est parce que si on dépose, dans le haut de la rue, une boule de bloempanch, elle roulera jusqu’à la rue Haute, tant la déclivité est forte. Dans les quartiers populaires, les charcutiers débitent « du chaud », c’est-à-dire du bloempanch chaud qu’on appelait aussi « du wermechaud ».
BLOKSKES : petits sabots.
De blokskes kommen op : la dispute commence.
BLOQUER : étudier ferme en vue d’un examen, piocher.
BLOSKE (blaasje) : petite bulle d’air. Bloskes moeke : faire des bulles de savon.
BOBANTCHE : petite bobine, goutte d’alcool, synonyme de « kwak ».
Une chansonnette bruxelloise dit :
« O ! Mieke Paaipekop »
Geif ma nog e bobantche,»
Leever e gruût as e klantche,»
As het mo geneiver en es ! ».
(O, Mariette Tête de Pipe — donne-moi encore un petit verre — plutôt un grand qu’un petit — si c’est seulement du genièvre I)
BOBBES : homme bâti en hercule, « armoire à glace ». Ce mot s’apparenterait-il à l’anglais « hobby » désignant le policeman monumental et athlétique de Londres ?
BODDINK (de l’anglais « pudding ») : sorte de gâteau commun et très lourd, fait avec les déchets de pain et d’autres gâteaux, et agrémenté de raisins secs. Boddingstamper : personne de petite taille.
BOECHE et TOOBOECHE : boucher, obstruer. Boechedevol : plein à craquer.
BOEIK (buik) : ventre.
Ziëp on â boeik en de dui oeit ! (Du savon à ton ventre et à la porte) : mis à la porte, congédié. On dit aussi : ziep on â boeik en de trappen af !
(Du savon à ton ventre et en bas des escaliers !)
BOEILT: bossu.
Boeiltje : petit bossu.
Un jour, un spons (homme à la figure grêlée) se moqua d’un bossu, lui tâta la bosse en disant :
- Wat zit er in da boeiltje ? (Qu’y a-t-il dans cette petite bosse ?)
- Dot es en bo’leke mastic vé de goête van â smoôl toô te plekke ! répondit le bossu. (C’est une petite boule de mastic pour fermer les trous de ta gu… I)
Boeiltkarkas : carcasse à bosse, c’est-à-dire bossu. Comme synonyme injurieux de bossu, nous avons relevé hoekschraproê (voir au mot schaproê).
Voici un petit refrain injurieux chanté à Molenbeek et recueilli par A. De Cort :
« Boeilt, carabas Viooltje op den bas Een kofferken met geld Waar dat den bult op spelt».
Il existe encore, rue Haute, un estaminet populaire à l’enseigne « Bij den Boelt» (Au Bossu).
Les pauvres peuvent y loger à bon marché.
BOEIS ou buse : tuyau, échec.
En boeis emme ou avoir une buse : subir un échec. (Voir aussi « buse ».)
BOEK: I ivre.
’k Zal a boekske ope legge (j’ouvrirai votre petit livre) : je révélerai tout ce dont vous êtes coupable.
BOEMELE : s’ enivrer régulièrement. > (h)
BOEMES ! (onomatopée) : bang ! pardaf ! Aussi : enceinte. Dij mei es boemes : cette femme est enceinte.
BOEIZE (buizen) : boire beaucoup.
- De Cort cite les synonymes : drinken, potten, zuipen, gieten, heffen, buizen.
BOEKEG : sournois.
BOENTCHE : haricot, fève, béguin.
« Les petites bêtes qui drachent du plafond comme les boentjes sur une platine.» Lettre de Jef Krolle- kop. («Le Sifflet», 24 juillet 1904.)
Avoir une boentje pour quelqu’un : avoir le béguin. Legt er a boentches op te waaik (mettez tremper vos haricots là-dessus) : ne comptez pas sur cette promesse.
BOERGONSCH (bargoensch) : argot des voleurs. Corruption de « baragouin ». N’a rien à voir avec Bourgogne, dit I. Teirlinck.
BOES : patron d’estaminet, maître.
Wee es de boes hee ? : Qui est le maître ici ?
BOESTRINK: hareng saur.
Boestrink in gruuten teneu (hareng saur en grand uniforme) : personne maigre, efflanquée.
Il y eut à Bruxelles une société pour l’avancement des sports
aéronautiques qui s’appelait « Boestring- club » (vers 1930).
Afgelekte boestrink (hareng saur léché) : personne efflanquée.
Avoir été sevré avec une tête de boestrink : avoir la dalle en pente.
BOIT (baard) : barbe.
On crie derrière un barbu : Ons Sier hei boêt ! (Le Bon Dieu a de
la barbe.)
Boêtziekte : maladie de la barbe.
Den boet trekke : faire l’école buissonnière.
BOKE (de boterham) : petite tartine dans le langage des petits.
BOLUUGE : yeux exhorbités.
BOMBAZAIN (bombazijn) : futaine, tissu grossier que portaient les
pauvres, jadis.
BON J’aurai ça de bon : vous me le devrez (de l’argent ou un
service).
Pour du bon (sérieusement). (G)
Pour du rire (pour rire).
Avoir bon : ressentir une impression de bien-être.
Avoir quelque chose de bon : avoir quelque chose
à son crédit.
L’expression eut les honneurs du Parlement belge à une séance de février 1913, lorsque M. Wauwermans dit : « Suivant une expression populaire, certains marchands, lorsqu’on leur réclamera une note, se diront : « J’aime mieux avoir cela de bon… ».
BOOL : sac d’ouvrier, contenant les outils avec lesquels il se rend au travail, capharnaüm.
Al da bool : tout ce fatras (du flamand, boel : amas, tas).
« Bool » désignant le sac de l’ouvrier pourrait provenir de « baal » (ballot). Stijn Streuvels parle du « baalzak » de l’ouvrier flamand qui va faire la moisson en France, le double sac de l’aoûteron wallon.
BOOR : paysan, imbécile.
Zoe stoem as nen boor : bête comme un paysan. (Voir « mansardeboor ».)
Boorentram : tram vicinal.
Nen boor es mo nen boor, kiert hem oeme, ’t es nog nen boor : un paysan n’est qu’un paysan, retournez-le, c’est encore un paysan.
G’het booremense en g’het boorebieste : il y a des paysans qui sont des hommes et des paysans qui sont des bêtes.
BOORELEIVE (vie de paysan) : existence agréable, sinécure.
« Booreleive dat ès plèzant (bis)
» En en dikke panch »
En en snij van ’t verke ! »
(Chanson bruxelloise.)
BOORETIEN : fève des marais (orteil de paysan).
BOSCHBEIR (bosbeer) : ours des bois, l’instituteur, un bourru.
BOTCHE : un franc.
Un vieux Bruxellois consulté sur l’étymologie probable du mot « botche » nous déclara que cette expression devait avoir pris naissance lors de l’apparition des premières pièces d’un franc à l’effigie de Léopold II, le grand roi à la grande barbe (botche viendrait de baartje). (R. Cornette, dans le « Folklore Brabançon », octobre 1925.)
Avoir de l’argent se dit aussi hij hei boete (il a des barbes) ; en haif botche : une pièce de 50 centimes.
BOTER : beurre.
Boter bij de visch (du beurre avec le poisson) : paiement comptant.
Voeil boter en voeil visch (beurre sale et poisson sale) : l’un ne vaut guère mieux que l’autre.
Veul boter en veul visch (beaucoup de beurre et beaucoup de poisson) : être à l’aise.
Hij es mé za gat in de boter gevalle (il est tombé avec le derrière dans le beurre) : il a fait une bonne affaire, un bon mariage, etc.
‘t Es boter on de galg (c’est bu beurre sur la potence) : cela ne sert plus à rien, inutile d’insister. Erm mo proper en de kam in de boter (pauvre mais propre et le peigne dans le beurre) : se dit de quelqu’un qui prétend être propre.
Boterbloêm : « fleur de beurre » : renoncule.
Boter bij de vis (du beurre avec le poisson) : ne faites une affaire qu’au grand comptant ; payez et vous serez servi, payez un acompte à la commande, pas d’argent, pas de suisse.
BOTTE : bottes.
In a botte sloege (jeter dans tes bottes) : manger beaucoup.
Hij veigt er zen botten oen : il y essuie ses bottes, c’est-à-dire : il s’en fiche.
Hij kan men boite kusse (il peut embrasser mes bottes) : qu’il aille au diable !
BOZINNE ou boezin : patronne de café.
BRADER : vendre bon marché.
Braderie : vente à bon marché organisée par les commerçants d’un même quartier, à grand renfort d’attractions, de concerts et de toilettes d’autrefois. Brodeur : gâte-métier.
Brader : dissiper, gâter, brader le métier. Braderie : dépense folle. (Du « Dictionnaire du wallon de Mons », par Sigart.)
Verhavert, dans « Onze Goedige Stede » fait une étude étymologique de « braderie ». Il cite le préfixe « bra » dénotant le mouvement.
Je crois que «brader» vient de l’adjectif espagnol barato : bon marché. Le verbe castillan baratar veut dire : brocanter, vendre au rabais et baratear : marchander.
BRAND (brand) : feu, incendie.
Brand spieke (cracher du feu) : se disputer.
A rapprocher du nom donné en 1939 par les Anglais à un avion de chasse très rapide et très meurtrier « Spitfire » (qui crache le feu).
Brand ! : Au feu ! Attention, il y a du danger !
BRAVE : sage. Un brave chien.
BREUI : frère, terme pour interpeller.
Hee breui ! : Hé l’homme !
Breuke : camarade.
La forme bruxelloise du XVIe siècle semblait être « bruers » (« De Bervoete Bruers », pièce de théâtre représentée à Bruxelles en 1559).
BREUK : hernie.
En breuk lache : rire aux éclats (jusqu’à en contracter une hernie).
BRIED (breed) : large.
Hij hei nen brië rug : il a bon dos.
BRIL : lunettes.
Kattenbril : insulte à quelqu’un qui porte des lunettes.
On dit aussi : veer uûge en nog ni seên (quatre yeux et pas encore
voir).
Brille : porter des lunettes.
Hij brilt : il porte des lunettes.
Brillemans : porteur de lunettes.
Bril van ’t heuske : lunette du W.C.
BRISETTES (braisettes) : charbon.
« De Cole-wagens en Cole-kerren,
De knechten die daer by waeren
Die sagen als swert’ Egiptenaeren
En schreeuden een dosyn mael,
Bon Charbon, Briset, in hunne tael. »
(Kluchtigh ende BeJacchelyck Verhael-Dicht, etc.)
BROEBELE : bégayer.
Broebeleir : bègue.
Broebelage : propos oiseux.
George Garnir, dans « Baedeker de physiologie bruxelloise » parle du « broubeleer ».
BROEIN (bruin : brun) : Da kan maaine broeine ni trekke (mon cheval brun ne peut pas tirer ça) : c’est au-dessus de mes moyens, cela dépasse mes forces.
BROEK : pantalon.
Broek over dra : saute-mouton. (Verhavert l’explique par « broek over d’haag ».)
Broekschaaiter : (qui fait dans son pantalon) : lâche, couard.
BROL de même que « bucht » signifie: rebut, ce qui n’a aucune valeur.
BROMMELPOT : grincheux (se dit aussi grommelpot).
BUCHT ou brol : désigne tout ce qui est vieux, usé ou hors d’usage.
Schuermans donne « bacht », « bocht » et «bucht» : iets wat niet deugt.
BUFFEL : gourmand, «goulaf».
BUFTEIK : beefsteak.
Bufteik mi roeite (du bifteck avec des carreaux) : du bloempanch.
BRUUT : brood, pain.
Gewonne bruut : du pain perdu, c’est-à-dire préparation culinaire
avec des tartines, du lait et des œufs.
BULS (’t ès vè) : l’expression « ’t ès vè Buis » signifie « c’est pour rien
», c’est gratuit.
Il paraît que cette expression vient de ce qu’un jour Charles Buis,
le bourgmestre de Bruxelles, avait vu venir sous ses fenêtres un
certain nombre de ses administrés qui, pour célébrer ses mérites, avaient eu recours à une fanfare. Pour les remercier, le bourgmestre, qui ne pouvait les accompagner jusqu’à la Grand-Place, les pria d’y aller boire, sans lui, un verre à sa santé, au « Café du Sac ». Le groupe des joyeux manifestants descendit la rue au son du clairon et du tambour. Le cortège grossit en cours de route d’autant plus que le bruit se répandit qu’on allait boire sur le compte du maïeur. On se disait donc l’un à l’autre : « ’t is voor Buis ». Il paraît que, ce jour-là, la note du premier magistrat communal au « Café du Sac » fut assez impressionnante. (Le Soir)
De biene van Buis : Je point onze au jeu de Zanzibar ou pitchesbak, parce que le bourgmestre Charles Buis avait de longues jambes maigres.
BUSE : h aut de forme, échec, tuyau. (Aussi « boeis ».)
« En Belgique, écrit J. Deharveng, une « buse » signifie un chapeau de soie. Peut-on employer ce mot ? Réponse : en Belgique, pourquoi non ? Toutefois, si vous êtes écrivain et que ce vocable doive tomber de votre plume, ayez soin de le souligner ou de le mettre entre guillemets. La raison ? C’est que ce mot, les Français ne le comprennent pas. »
« Il a été busé » : il a subi un échec à l’examen./W) « Eene buis krijgen » dit is niet gelukken, niet slagen, niet bekomen (Schuermans).
« De mannen met boeize » est l’expression par laquelle les « ketjes » d’après Verhavert, désignent les personnages officiels, c’est-à-dire, ceux qui se coiffent de « chapeaux-buses », et ceux qui « se donnent un air ».
CABILLARD (et parfois corbillard) : cabillaud.
CACHETTE : jeu de cache-cache.
Cachette courir : course poursuite.
Cachette fer: celui qui y «est» ne peut donner une catche (coup) qu’à celui qui ne touche pas du fer.
Cachette plus haut : idem qu’à celui qui n’est pas plus haut que le sol (c’est le chat perché).
Cachette cacheie : cache-cache.
Catche : tape donnée à un enfant à un autre, pour lui signifier «qu’il y est», qu’il est pris.
Catche-vvei goe ni mei : cri lancé pour affirmer que la « contre-tape » ne compte pas.
CADEAU : donner quelque chose cadeau à quelqu’un : lui en faire présent.
CADEIE (de cadet) : garçon, camarade. Terme d’amitié.
« Das ne straffe cadeie » (c’est un type fort).
« Codé of cadè, dit Schuermans, in ’t Frans « cadet », wordt in Brabant, Limburg en Vlaanderen gebruikt voor « karel », « kerel »… « een vieze cadé ». Men gebruikt dit echter niet, als men deftigerwijze van een geachten persoon spreekt. »
CAFEIE (café, koffie) : café.
Cafeie klach : café très faible. Klach exprime que l’eau a été versée brusquement et qu’elle a passé trop vite.
Cafeibuun : fève de café, nom donné à la goutte qui pend au nez d’un priseur, cette goutte teintée en brun par le tabac à priser ayant l’apparence de café torréfié.
CALANDISE ou calendees: les clients, la clientèle. CALICHE : jus de réglisse.
- Van Vreckhom le fait dériver du mot espagnol « caliche » : matière qui a été transformée par le feu dans un récipient ou vase clos.
« On sait que le caliche du Marollien n’est autre que le jus de la racine de la plante réglisse, réduite par décoction et qui forme un vrai caillou ou masse noire. »
Kalichezap : eau de jus de réglisse.
Les gosses ont l’habitude d’introduire un morceau de caliche dans une bouteille remplie d’eau qu’ils secouent pour la faire mousser. Lorsqu’ils ont sucé la mousse hors de bouteille, ils secouent pour en produire de la nouvelle.
Se dit par extension et par ironie de café trop faible.
Kalichenhout : bois de réglisse.
CALEPIN : mallette, serviette.
CALOTTE : gifle, perruque. Le Bruxellois dit « en valse calotte » : une fausse perruque.
CALVERCADE: cavalcade.
« El lundi Sortaye dihors
D’el calvercade ». (Programme des fêtes de la Kermesse d’EI Blad, vers 1895.)
CAMPERNOULLE : champignon.
En 1490 à Tournai « campernoulles ».
Van Doorslaar dit que « campernoulles » vient de « kampernoelli », vieux mot flamand employé pour désigner des potirons ou champignons.
CANAILLE : canaille.
«Tribunal des canailles» : tribunal de simple police, ainsi appelé par les gagne-petit qui y comparaissent pour des délits mineurs.
CANNELE : canné.
Des chaises cannelées.
CARABISTOUILLES : futilités, sottises, bobards, vantardises.
Dans une revue de Théophile de Baudore (alias Félix Hecq) un choeur de contribuables faisait fuir le ministre Colin, en beuglant :
Tout ça, c’est des cara, cara Tout ça, c’est des carabistouilles !
Un écrivain anonyme s’est occupé de ce mot dans «Le National» du 30 janvier 1931.
«Ce mot… superbe et inégalé, est de la même racine (sic) que karabitjes… Une autre friandise, belge, wallonne et locale, celle-là ce sont les « carabibis » d’Ecaussines… Or carabitje et cara- bibis sont bien près de carabistouilles. »
CARABITJES : petits biscuits secs collés sur des feuilles de papier et qu’on gagne à la foire en faisant tourner une aiguille qui s’arrête sur un numéro ou sur une couleur.
Marchand de carabitjes.
Carabitjesmeuleke : petit moulin à carabitjes, attraction de la foire de Bruxelles qui a presque disparu. Verhavert dit : « Voor één cent, mochten zij (de ketjes) draaien op een « karabitjesmeuleke » en, indien zij ’t geluk hadden te winnen, mochten zij er van onder trekken met een hele papierstrook van dat lekker goedje ». (Voyez carabistouilles) Schuermans : karabitje : kinderlekkernij, de gedaante hebbende van eenen kleine macaron op ’t papier geplekt (in ’t Frans : oublie). Aussi : souillures dans la chemise.
CARCUL : calcul.
CARICOLE : caracole, bigorneau.
Caricolegang : Impasse des Escargots.
CARNAS (et parfois canas) : cadenas.
CASAQUE
Il tourne casaque : il change d’avis.
(Locution illustrée par Pieter Bruegel, dans son tableau « Les Proverbes »).
Patate à casaque : pommes de terre en robe des champs.
CASQUETTES GRISES (les) : Bande qui opérait dans les parages de l’Altitude 100, à Forest.
CASTROL : casserole.
CATCHE : léger coup que donne celui « qui y est » dans le jeu de « cachette » à celui qui doit y être. Cri qu’il pousse en même temps.
CATHERINE : une Catherine, ça est un homme qui fait le ménage chez lui et qui lave la vaiselle pour sa femme.
CAVITJE : estaminet (diminutif de « cave »). H. Van Vreckhom le fait dériver de l’espagnol «cavidad»: creux, petit trou, mais cette étymologie nous paraît un peu recherchée, puisque nous avons cavité.
« Les cavitjes, dit-il, étaient autrefois de petits débits de boisson établis dans des sous-sols. »
CENNE : 2 centimes.
Meuleke van ne cens : petit carrousel actionné par des gamins à la foire.
S’emploie péjorativement lorsqu’on veut moquer quelqu’un qui en se vantant fait état de quelque chose qu’il possède.
Ex. : Mi a pciaip va ne cens. Avec ta pipe d’une cen.
Hii zou iene cens in twee baaite : c’est un avare, il mordrait une cen en deux.
CERVOLAS : cervelas.
CH CHUINTANT
Le Marollien ajoute souvent la chuintante «ch» aux mots qu’il prononce.
Exemples :
Zetch a nei en paktch eet : asseyez-vous et buvez quelque chose.
Geldch on de spoerkas gezetch : de l’argent déposé à la Caisse d’Epargne.
Ge kuntch : vous savez.
Moetch : doit.
Kindch : enfant.
Bekentch : connu.
Il existe une phrase typique qu’on s’amuse à lancer, à la Marolle :
Gotch mé a kindch oeit de windch of het wèt blintch (sortez du vent avec votre enfant, sinon il deviendra aveugle).
Le Molenbeekois dira : Zet a nei, geld, kunt, moet, etc.
CHABERNAQUEUR : mauvais plaisant.
«Afin, un vrai chabernaqueur, comme on dit cheie nous autes » (La Noël du Petit Anarchiste, par Bazoef, dans «Le Diable au Corps», 24-12-1893).
CHABRAQUE
Une vieille chabraque : vieille femme désagréable (cité par De Kelper), vieille chose.
Schuermans : « schabrak » : housse.
CHACHELE : vendre.
VerschaCHele : vendre.
ChaCHelen se trouve dans le « Dictionnaire de Bar- goensch », d’Isidoor Teirlinck, qui lui donne également le sens de vendre.
Une expression de brocanteurs utilise un verbe allemand : verkaufen und verchaCHele (vendre ou troquer).
CHALE : châle.
« Den deuvel on à nek, das ne goeie châle ve de Winter». (Le diable à ton cou, c’est un bon châle pour l’hiver), se dit quand on envoie quelqu’un au diable.
CHAMPETTER : champêtre.
Champetter en deef : jeu de gendarmes et voleurs.
CHANDELLEKE : chandelle, morve.
Chandellekes zeen : recevoir des coups, voir trente- six chandelles.
CHAPELLE : bistrot, estaminet. Aller de chapelle chapelle. En flamand : kapelleke.
Dans « Don Dypsy », Walter Starkie écrit qu’en dialecte andalou on dit « visitar los sagrarios » : visiter les sanctuaires.
CHAPPE : discuter à propos de pigeons. Doeivechapper est synonyme de doeivemelker :
colombophile.
CHAREL : Charles.
Ne veeze Charel : drôle de type, homme inquiétant. Da des ne Charel ! : ça c’est un type fort (ou malin). « De Brusselse Ketjes, dat zijn mannen, dat zijn kadés ; dat zijn Sjarels ! » (C. Verhavert).
D’une chanson bruxelloise :
« Charelke (bis) ‘k hem a gat gezeen,
» (bis) en ik zeen het nog !
» Achter Charel zaain er nog ! ».
CHATOUILLER : démanger.
Mon bras me chatouille.
CHIK : chique, tabac à chiquer, grosseur de la joue causée par un mal de dents, frère des écoles de la doctrine chrétienne.
Les gamins criaient jadis «chik» lorsqu’ils rencontraient un écclésiastique à la rue. , \
Aller à l’école des chiques : aller à l’école catholique.
Chiken typ : type élégant.
Chikske : terme d’affection, « mon p’tit bout ».
Hii werkt vé ne frank en en chik (il travaille pour un franc et une chique de tabac) : il travaille pour rien.
Dei mei hei nen hood, woeda heure man zen chik in doot : cette amusante locution que m’a envoyée Madame Julie Icks, veut dire qu’il s’agit d’un vilain chapeau, puisque le monsieur de la dame y dépose sa chique de tabac.
Jef hei ma en chik gerefuzeit (Jef m’a refusé une chique) : l’ami m’a laissé tomber.
CHINUUS : Chinois, mauvais caractère.
Chinuuzevoete : petits pieds.
Chinuuzekluute : escargots.
CHOCOLAT
Chocolat kuupe in nen aaizerwinkel (acheter du chocolat chez un ferblantier) : tromper quelqu’un. Tram chocolat : Nom que le populaire donnait, à cause de leur couleur brune, aux voitures des Chemins de Fers Economiques qui, après la guerre de 1914-1918, fusionnèrent avec les Tramways Bruxellois.
Il y avait jadis, à Bruxelles, un tramway à qui sa couleur d’un beau brun acajou avait valu le surnom populaire de « tram chocolat ». Ce véhicule avait l’air appétissant et rien qu’à le voir, l’envie vous prenait de gagner la pâtisserie la plus proche. Les voyageurs qui devaient l’utiliser, s’ils occupaient un « Bruxellois », tendaient leur monnaie au receveur en proférant ces mots : « Correspondance Chocolat», ou, plus simplement: «Chocolat!». Ce qui ne manquait guère d’intriguer étrangers et provinciaux.
Et cela remet en mémoire le joyeux incident qui mit aux prises, un beau jour de l’été 1910, un couple de jeunes Parisiens et le plus beau type de tramwayman que le potager de la capitale belge ait jamais produit. Les deux Français avaient lié conversation avec une manière de gros négociant de chez nous qui, tout comme eux, se rendait à la fameuse Exposition universelle. L’homme avait reçu aussitôt deux petits papiers d’une valeur nominale de trois sous.
- Siouplaît – Astableeft, dit alors le receveur en se tournant vers le jeune couple.
- Nous y allons aussi, fit-il, dans un parfait unisson.
- Et ousque vous alleïe ?
- Mais à Chocolat, donc.
- Ça je ne connais pas. Tu veux dire une correspondance ?
- Une correspondance ?
- Alleïe. Payez seulement. Faut pas vouloir tout comprendre quansque tu viens à Bruxelles.
(«Libre Belgique»)
Il est chocolat ! : il est pris, il est confondu ! CHOESELS : pancréas.
« Les pancréas, que les Bruxellois appelent choe- sels, sont retenus par les cabaretiers et restaurants qui confectionnent ce plat délicat et délicieux. » (G. Freddy : « Bruxelles Inconnu ».)
Choesels au Madère.
CHOENKELVOOT : pied bot.
Schuermans orthographie ce mot « schonkelvoet ».
CHOUKELEEF : cher petit chou.
« Et je dis : Choukeleef, y fait douf à présent. »
(« Potage printanier », par Bazoef.)
CIGARETTE : A. De Cort a noté comme synonymes : smagge, doemperke (qui fait de la fumée), stink- stokske.
CINEMA : parties du corps qu’on doit cacher et qu’on laisse voir par accident.
Cinéma patei : Cinéma Pathé, nom qu’on donnait à Bruxelles au cinéma, avant 1914.
Cinéma blaaif stoen : lanterne magique.
Couplet bruxellois :
Cinéma Pathé op de ploch Wayez Cinéma, cinéma, op de place Bara !
CITROENWAAIF : vendeuse de citrons ou d’oranges stationnant aux abords de la Bourse et de la rue Sainte-Catherine.
Ces colporteuses, vendant sans permis, sont sans cesse pourchassées par les agents, mais ces derniers, bons enfants, se contentent de les faire fuir. C’est un spectacle comique que celui des « citroon- vvaaive » ramassant en hâte leur panier et s’enfuyant, lorsqu’un casque blanc apparaît.
CLACHE ou CLACHER : claquer.
« J’ai claché la porte sur son nez. » (Léopold Cou- rouble : « Notre Langue ».) (Voir klach.)
CLAMOTTE : un bon verre de liqueur, goutte de genièvre.
Schuermans : een klamotte slaan : een fies uit- drinken.
CLICHE (clenche) : poignée de porte, loquet, clenche, bouton, targette.
CLOQUE : ampoule. « Elle a une cloque à son pifid »
COCO : boisson refraîchissante préparée avec du bois de réglisse et de l’eau.
Marchand de coco : colporteur qui déambule portant sur le dos un bac de zinc peint : récipient central contenant le coco encadré de deux colon- nettes pointues, l’une renfermant de l’eau pour rincer les verres accrochés par des crochets, l’autre les ingrédients nécessaire à la fabrication de la boissons.
« Sur la face postérieure du bac du marchand de coco, dit G. Freddy, dans « Bruxelles Inconnu », se détache en lettres flamboyantes cette typique inscription « Marchand de coco, herberg op straat » (Estaminet à la rue !). »
Dans «Le Peuple» du 15-9-1929, G. Thuns a interviewé un des derniers marchands de coco de Bruxelles.
- Mais comment préparez-vous le coco ?
- Le vieux système, le meilleur : des bâtons de bois de réglisse pilés au marteau, du caramel pour colorer, une peu de menthe pour aromatiser. Le tout placé dans une bourse d’étamine, suspendue dans l’eau du réservoir. Cela « tire » pendant vingt minutes et le coco est prêt.
…Avant la guerre (de 1914) le verre de coco était vendu une cen (2 centimes).
COL : col.
Col en manchette En thoeis giene fret
rien à bouffer : se disait d’un petit employé.
Zemme ma do e colleke gepast (on m’a essayé là un col) : on m’a roulé dans les grands prix ; j’ai été arrangé !
COLIDOR : corridor.
COMMISSION
Faire sa petite commission : uriner.
Faire sa grande commission : aller au W.C.
COMPASSE (e final accentué) : pitié, compassion.
« En kréger compassé mé » : et j’en eus pitié.
(« Brusselsche Dialect », J.-F. Willems.)
COMPTEUR (à gaz).
Hii ei ne slag op zene compteur gat : il est un
peu fou.
Un compteur de 23 becs : une poitrine opulente. COMPTOIR
Pisseur de comptoir : habitué de cabaret qui scie le patron ou la patronne par des « zieverderâ ».
On de comptoir plekke (coller au comptoir) : être saoûl.
CONTRAIRE : mauvais, erroné.
«J’ai mangé quelque chose de contraire.» (Léopold Courouble : « Notre Langue ».)
«J’ai pris le chemin contraire» pour «j’ai pris le mauvais chemin ».
Il n’est pas contraire : il a un caractère accomodant.
CORINTE (de la ville de Corinthe) : raisin de Corinthe. S’emploie au pluriel : des corintes.
En flamand bruxellois : korente (krent).
Cramique aux corintes. (jÿ)
Korentekoek.
En 1490 à Tournai : corente.
COROJE ! : courage !
« Coragie, goede vrienden » : dans « De Ghedwon- ghe Griet», farce bruxelloise du XVIIe siècle.
Doet a coroje oen : mettez votre tablier, il est temps de travailler sérieusement.
CORPENDU : court-pendu (pomme).
CORTELETTE : côtelette.
COUQUES DE SUISSE : Elles faisaient, avant la guerre de 1914, les délices des petits Bruxellois. D’après le « National » c’étaient des « agglomérats informes de pâte parsemée parfois, de bruns raisins sultans ou de noires corinthes. Une sauce au beurre et dusucre brun, dit cassonade, complétaient le goût de cette friandise ».
Certains prétendent qu’il faut dire : « couilles de Suisse ». Je laisse, à ce sujet la parole à un lecteur de « Pourquoi Pas ?» (13 août 1948). Notre bon vieux « Pourquoi Pas ? » sombrerait-il dans une triste pruderie ? C’est ce que j’ai pensé en lisant, dans le n° 1546, la miette intitulée «Salade russe». Dans une énumération de mets, je relève — hor- resco referens ! — l’hypocrite euphémisme de « cou- ques de Suisse ».
Apprenez donc, et ici j’invoque le souvenir du grand George Garnir, qu’il n’y a jamais eu de couques de Suisse, mais bien des « couilles » de Suisse ! Parfaitement : couille : bas latin : colia ; latin : coleus ; grec : koléos.
Et voici l’étymologie de l’expression rabelaisienne qui désigne cette succulente spécialité wallonne. Quoi qu’on en pense, les attributs virils des citoyens de la libre Helvétie n’ont rien à voir dans cette dénomination. Il s’agit plutôt de ceux des suisses d’église ou de portiers de grande maison, gaillards avantageusement bâtis, dont les culottes de peau collante mettent en relief la vigoureuse virilité. Or, comme nos friandises wallonnes ont vraiment la forme de ce qu’elles… représentent, la seule expression scientifiquement et moralement valable pour les désigner est bien « couilles de Suisse ». Quant à « couques de Suisse », c’est là un flandricisme que j’estime singulièrement déplacé.
COURT (trop) : manquant, pas assez.
« On m’a rendu cinquante centimes trop court. » (Léopold Courouble : « Notre Langue ».)
COUTTE : mégot, bout de cigarette.
COUYONNER : ennuyer.
«Mais ça couyonnait la boozine… » («Le Cadavre», de Bazoef, dans le «Diable au Corps», 8-4-1894.)
CRABBE : crabe.
« Guernôt en crabbe, caricole ! caricole ! » (cri des marchands d’escargots, de crevettes et de crabes). Au XVIIe siècle selon un témoin, ce cri était « Hebde geen crabben oft sleckhuysen vandoen ? » (Voir : crappe.)
CRAMIQUE : pain fait au beurre et au lait et contenant des « corinthes » ou raisins secs.
Dans certains cafés, principalement aux lieux de promenade, on voit affiché « Café-cramique ». Schuermans : Kraammik : fijn wit of tarwenbrood. Semble provenir du vieux substantif flamand « micke » (pain) et de « kraem » (éventaire).
A un lecteur anonyme de « Pourquoi Pas ? » (juin 1949): L’étymologie de «cramique» paraît évidente: krent : corinthe, mik : pain fait de fleur de farine ; krentenmik : pain blanc aux corinthes. Cramique est une prononciation « corrompue » de « Krentenmik ».
CRAPPE (une) : crabe.
CRICHUUG : yeux chassieux.
CRIMINEIL (criminel) : employé dans le sens de «fort» ou « très » dans « crimineil zat » (ivre mort). Schuermans dit : « Crimineel : zeer, sterk, gewel- diglijk, ook in Vlaanderen : bedronken, doch dan is er « bedronken » onder verstaan (Brabant, Vlaanderen en Limburg).
CROLLE : boucle.
Croller : boucler, friser, crêper.
Krollekcp : tête bouclée.
Ne kroi : homme aux cheveux bouclés ou frisés. Heure neus krolt : elle est fière.
Zé zene neus ich krolle (voyez comme son nez ondule) : regardez comme il est fier et satisfait du compliment qu’il a reçu.
CROMBRAS (rue du) : vieille rue qui existe près de la rue de la Chancellerie.
Tortu, courbé, arqué, voûté.
Crombain : bancal, bancroche.
CROSTILLON (de croustillant) : beignets qui sont vendus à la foire.
Jadis, les marchands de crostillons à la kermesse portaient la coiffure hollandaise avec les petits ornements de cuivre en forme de ressorts.
CROTCHE (diminutif de crotte) : jolie fille, bonne amie, fiancée.
Voici, de Bazoef (Léopold Pels), la « Ballade des Crotjes du Temps jadis » :
Dis un’ fois où, dans quel pays,
Est Mie Katoen, la bell’ bozinne ;
Florke n’avec es’n’ euli’ tout gris,
Siska qu’aviont n’si gross’ poitrine ;
La grande Agath’, la p’tit’ Jujtine ;
Maria qui pleuriont tout le temps,
Felicitei, cett’ sal’ gamine Mo où sont les crotjes d’avant ?
Ousqu’elle est Neleke Cassis Qu’ils saviont chiquei tant d’sardines Et tant des euffs et de l’hachis ?
Zoei qu’étiont foll’s des praniles.
Avec sa smool plein de farine.
Sa bouche ousqu’y manquiont des dents.
Et sa grand’ sœur app’lei Pauline ?
Mo où sont les crotjes d’avant ?
Clara qu’aviont des panaris^
Quansqu’a n’arriviont de Malines ;
Berth’ qui nagiont dans ses habits.
Et fermiont jamais ses bottines ;
La grosse Juli’, v’nu d’Ia Campine Avec deuîe, trois pitits enfants ;
Rachel avec sa crinoline ?
Mo où sont les crotjes d’avant ?
ENVOI
Le jour, la nuit, quansque je dîne, Quansque je soupe of en dormant, Toujours c’t’ idei-là me taquine : Mo où sont les crotjes d’avant ?
CROTTE : excrément. Terme d’affection. Zut !
Etre dans la crotte : être dans la dèche.
CRUIEUX : curieux.
CUMULET : culbute.
Voir toeimeleir.
CUVELLE : cuve à laver le linge, cuvier, cuveau, cuvelte.
CUYTE : nom d’une vieille bière bruxelloise. Est-ce elle qui aurait donné naissance à «avoir la cuite»? A Mons et à Ath : keute.
Kuyt : gemeen bier sedert de XVIe eeuw. (Joan de Grieck : « Drie Brusselsche Kluchten uit de zeven- tiende Eeuw ».)
DACHTERE : Perdre son temps, travailler mal. DAKKOUT : d’accord.
DAS (das) : blaireau, chien, et dans un sens péjoratif : personne laide.
DEEF : voleur.
Deevegge : voleuse.
Un euphémisme pour «voler» : ’k hem da gat mé vaaif fingere en antroese : j’ai eu ça par mes cinq doigts et de l’angoisse.
Deevestroet (rue des Voleurs) : rue des Ménages. DÉGOBILLER : vomir, voir geubbele.
DEMI : verre de bière.
Demitje : 1 centime.
« Mon ami, vous avez une demitje trop court. » (« La Corinthe inabordable, par Jongsk. « Le Sifflet », 13 mars 1904.)
DENTER : signifie «grenier» dans la région bruxelloise, d’après Schuermans.
DERM (darm) : boyau.
Voir « looisenderm ».
« By gans dermen ! » : juron figurant dans « De Bervoete Bruers », pièce comique représentée à Bruxelles en 1559.
Wolvenderm (intestin de loup) : gros mangeur.
DESERTEUR VAN 7 KERKHOF : malade, gringalet, faiblard, qui « a déserté du cimetière ».
DEURJOEGER : qui mange beaucoup (de « door » : à travers, et « jagen » : chasser) et qui, malgré sa gloutonnerie, reste maigre.
DEUVEL (duivel) : diable.
Hij es te biest vé veu den deuvel te dansen : il
est trop bête pour danser devant le diable (se dit de quelqu’un de particulièrement borné). Deuvelshoek (coin du diable) : quartier de la rue Notre-Dame du Sommeil.
Den deuvel on â nek ! (Le diable à ton cou I), se dit quand on envoie quelqu’un au diable.
Den deuvel on â nek, das ne goeie châle ve de Winter, ou, den deuvel on â nek, das ne goeie foelard ve de Winter ! (Voir châle.)
Ge zet den deuvel te plat : Tu es trop malin. Den deuvel es duud (le diable est mort) : je ne vous crois plus.
Deuvel doed al (diable fait tout) : personne habile, ingénieuse, adroite de ses deux mains.
Vé gienen deuvel ! (pour aucun diable) : pour rien au monde !
’t Es percees dat hem den deuvel hei gezeen :
ça le met en colère.
Lup no den deuvel ! Va-t-en au diable !
DEVIS : nom d’un grand marchand de charbon de Bruxelles.
Hij werkt bij Devis : il est sale.
DEVUURE : devoir.
Mot qui a une grande importance dans la population ouvrière de Bruxelles.
« Doet altijd goet a devuure », diront des parents à leur fils pour l’inciter à se conduire toujours honnêtement.
Mazereel rélève que parfois on emploie le mot néerlandais «plicht» mais que l’expression «hij moôt zem plicht doôn » signifie « il doit faire son service militaire ».
DIABLE-AU-CORPS : nom du cabaret chantant de la rue aux Choux, qui disparut, après la guerre de 1914, pour céder la place à des agrandissements de l’Innovation.
Que veut dire cette expression ? Je l’ignore, mais je tiens à noter une vieille figure espagnole s’appliquant aux hypocrites : El rosario en el cueilo y el diablo en el cuerpo : le chapelet au cou et le diable au corps.
DIHORS : dehors.
Dire toute la vérité dihors.
DIK : gros.
Hei mokt hem dik (il se fait gros): il se vante, il fait le matamore.
Doemei ben ik dik ! (avec cela je suis gros) : cela me fait une belle jambe !
DIKKES (dikwijls) : souvent.
DINCHTAG (dinsdag) : mardi.
DJOL
Mene leeve djol : nom que, dans ses moments de tendresse, la krotche donne à son bon ami.
DJOUMDJOUM : timbré, un peu fou.
DOBBEL (dubbel) : double.
Dobbel en dik : beaucoup, très cher.
DOEFFE : à plat, désargenté.
DOEIF : pigeon (du flamand duif).
Doeivemelker : amateur de pigeons (du flamand duivenmelker).
DOEIGE (in doeige valle) : tomber en ruines, faire fiasco.
’t Leit in doeige : c’est fichu.
DOEIKER : plongeur (du flamand «duiker»), diable. Hamelaaiken doeiker : hypocrite (diabolique).
DOENECH (danig) : fort, violemment.
’t es doeneCH slecht weir : il fait très mauvais.
DOGGE : chien, dogue.
Doggesmool : visage gros et plat, hargneux.
DOIT
Il doit avec : il est obligé d’accompagner.
DONTCHE : petit air à la mode, mélodie souvent répétée, rengaine, scie.
« Wel, kinders, wat een deun. » (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle.)
DOP : toupie, voir « klachkop ».
Dans la pièce comique du XVIe siècle « De Bervoete Bruers », se trouve l’expression « van hongher drayt myn hooft gelyck een doppe » (ma tête tourne de faim comme une toupie).
DOPPE : terme anversois : aller toucher une indemnité de chômage.
Dopper : chômeur.
DOUF : lourd, étouffant, pet.
Y fait douf : il fait lourd.
Voici ce qu’on dit, H. Van Vreckhom (Le Marollien) : « Douf, de l’espagnol tufo : vapeur chaude qui s’élève de terre ou d’une place surchauffée, air malsain, gaz délétère ; u : ou et l’o final supprimé touf ou douf. Il fait douf : il fait chaud et malsain ». Douffer : lâcher un bruit incongru et… délétère. « Nen doef op zen zokke loete goên » : péter sans bruit.
Doeffer : celui qui douffe.
Dans son livre « Van Ketjes en Kiekefretters », C. Verhavert raconte qu’au cours d’une fête de « vaartkapoenen » (débardeurs), près du Petit-Château, le roi Léopold II questionnait des vainqueurs d’épreuves nautiques (voir « bal op de boeties ») s’attira cette réponse :
— Il fait doef, Sire !
Attraper une douf : être vaincu.
DRACHE : pluie torrentielle, averse.
Drache nationale : pluie qui, habituellement, tombe à Bruxelles les (ours de fête, et particulièrement le soir de l’ouverture de la Foire du Midi. Drache vient du flamand dretsen : pleuvoir. Dans le langage bruxellois, « ets » devient « ache », comme dans « klets » (klache), « metser » (mâcher).
Le mot « drache » est employé aussi dans certaines régions de la Wallonie.
Dans le langage populaire d’Anvers et du Brabant on entend parfois « dratsen » pour « dre’
DRAPIKKEL : trépied, quelqu’un qui s’aide d’une béquille (drijpikkel).
C’est le trépied sur lequel les ménagères posaient leur cuvelle à faire la lessive.
Le « Drijpikkel » est l’enseigne d’une vieille auberge, à Meysse.
DREVE (dreef) : allée plantée d’arbres, habituellement devant l’entrée d’un château.
DRICHE : patauger, errer.
Schuermans dit : « drets : loop, gang. Die jongen is altijd op den drets ».
DRINGUELLE : pourboire. . C’est, le mot flamand
« drinkgeld » froncise/V^J/emire
DRUPNEUS: nez qui goutte.
DRUUG (droog) : sec.
Nen druuge : rabat-joie, pisse-vinaigre.
Druuge leiver (foie sec) : ivrogne, buveur.
’t Es en druuge processe (c’est une procession sèche): il n’y a rien à boire.
DUI (du flamand door) : porte, à travers.
Er van dui trekke : partir (souvent : partir de mauvaise humeur).
DUUD (dood) : mort.
Den duud van hoelen (dood van halen) : en avoir peur.
Hei de duud giene hoenger ? : La mort n’a-t-elle pas faim ? Expression de pitié railleuse sur la misère des petits.
Ailes da duud es baait nemi (tout ce qui est mort ne mord plus) : morte la bête, mort le venin.
Ge zait zoe lielek as en duudzonde : tu es aussi laid qu’un péché mortel.
ECOURT : Nous empruntons à H. Van Vreckhom (Le Marollien) :
« Ecourt ou écout, de l’espagnol escudo : bouclier, giron u : ou et o final supprimé : escout ou écout. Prendre l’enfant sur ses genoux ou dans son giron : prendre sur son écourt ou écout».
Remarquons cependant que le Dictionnaire de l’Académie royale espagnole, Madrid 1925, ne donne pas l’acception « giron » pour escudo.
EFFENAF ou euffenaf : immédiatement, tout de suite, sur le champ.
EITE (eten) : manger.
A De Cort cite les synonymes (ou presque) suivants : frette, bikke, smeire, binnespeile, knabbele, boeffe, smikkele, kassuule, in zen botte sloege, deujoêge, kasse, zen smikkel vulle, zen derm vulle, zen kas vulle, smochtere, taluurlekke, sloebbere.
EIZEL (ezel) : âne.
Eizelskop : tête d’âne, idiot, ignorant.
ÈKE ! (ou bèke !) : exclamation de dégoût, pouah !
ENCOURIR (s’) : s’enfuir.
Il s’est encouru.
ENFANT
Quelques expressions de « zwanze » féroce s’adressant à l’auteur d’un rejeton rachitique ou contrefait : Hei doêveu in a hanne moote spieke ? (Tu as dû cracher dans tes mains, pour ça ?)
Hei doêveu moote a maave opsCHeusse ? (Tu as dû retrousser tes manches, pour ça ?)
Hei doêveu moote a vrâ wakker moeke ? (Tu as dû reveiller ta femme pour ça ?)
Hei doêveu moote a broek afdoon ? (Tu as dû enlever ton pantalon pour ça ?)
A propos d’un bébé rachitique dont la tête s’affaisse : Da kind zene kop haaft mè sleCHte laaim
(la tête de cet enfant tient avec de la mauvaise colle).
ENQUIQUINER : ennuyer, se fiche de.
«Tout qu’y pouviont enventeie pour enquiquineie son famille,y ne l’faisont. » (« La Noël du Petit Anarchiste », par Bazoef, dans « Le Diable au Corps», 24 décembre 1893.)
EN VOIE : dehors, ailleurs, plus loin.
« I demande comme ça s i veus’e porteie en voie le zattekuul. » (« Le Cadavre », par Bazoef, dans «Le Diable au Corps», 8 avril 1894.)
Jeter en voie : se débarrasser.
« Et on devu l’jeter envoie. » (Coco Lulu.)
Balayer en voie : balayer.
Couper en voie : retrancher.
Etre en voie : être parti.
Gratter en voie : effacer.
Mener en voie : emmener.
Tirer en voie : ôter, etc.
ERM : pauvre, misérable, bras.
De langen erm : la pompe.
Van de langen erm : raillerie : j’en doute fort, c’est impossible.
Van de langen erm gijve : baptiser le lait.
Ermetteg : miteux.
Erm mo braaf : pauvre mais honnête.
Erm, mo proper, en de kam in de boter (Pauvre, mais propre, et le peigne dans le beurre) : se dit de ceux qui se vantent toujours d’être propres, et ne le sont qu’à demi.
ESBROUFFE : vanité. Faire de l’esbrouffe.
ESCOFIÈRE : Nous citons Van Vreckhom (Le Marol- lien) : « De escofiar (espagnol) : coiffer d’une résille serrée, mettre ses cheveux sous un réseau, les cacher. Le Marollien dira aussi scofière pour cacher, faire disparaître ».
ESPECÉDERA : épices et en général, tout ce que vend l’épicier, épicerie.
La forme de ce mot a-t-elle une relation avec le mot de vieux picard « espesserie » qui se trouve dans le glossaire latin-français de Scheler (1885) ? « Espesserie » est la traduction picarde du vieux latin « apotheca ».
ESTAMINET : Quoiqu’il figure dans Littré, ce mot typiquement belge et bruxellois mérite une mention dans ce lexique.
« On ne sait, dit Littré, où Bescherelle a pris ce qu’il dit, que «estaminet» vient du flamand « sta- menay », dérivé de « stamm » (sic) : souche, famille, et qu’on a nommé « stamme » des assemblées de famille où l’on buvait et fumait. Quant à l’espagnol « estamenta », assemblée d’états, il n’a rien à faire ici ».
«La Nation Belge» (29-2-1940) risque une autre hypothèse : « Le mot estaminet est purement flamand, il viendrait de l’espagnol « esta un minuto ». « Esta un minuto » voudrait dire « demeurer une minute ». Estaminet serait l’endroit où l’on passe en hâte boire un verre ».
Je pense simplement qu’« estaminet » dérive d’« es- taim » (étain). Jusqu’au XVIIe siècle on se servit du mot « estamoie » qui désignait un pot à couvercle, à une ou deux anses, contenant plusieurs pintes, généralement en étain, mais parfois aussi en orfèvrerie ou en verre. L’endroit où on se servait d’«estamoies» ne pourrait-il pas être l’«estaminet»? D’autres pensent que « stamenij », « stamenee » dans le dialecte ostendais pourrait dériver de « stam » dans l’acception de « famille ». D’après les vieilles chroniques, écrit « Volk en Staat » (26-8-1941), au cours des réunions de famille, les hommes ingurgitaient un nombre considérable de « pots » ce qui déplaisait aux épouses. Les maris, piqués, décidèrent de se réunir là où leurs femmes n’auraient pas accès. Les réunions continuèrent sous l’appellation de « stam » qui devint « staminets ». D’aucuns font encore dériver «stamenee» de «stamelen»; bégayer, infirmité passagère provoquée par l’ivrognerie.
Enfin, dit le journal précité, en Flandre, des tenanciers, pour attirer l’attention des voyageurs sur leur local, inscrivaient sur la façade « Sta, Mijnheer» (Arrêtez-vous, Monsieur). Cette inscription devint proverbiale au point que pour inviter un ami au cabaret on lui disait « Veux-tu venir avec moi au «Sta Mijnheer»?
Ge zaait beiter in a klaain stameneike as in en gruute kerk (on est mieux dans un petit estaminet que dans une grande église) : dit par un pilier de cabaret qui n’est pas un pilier d’église.
ÈT (hart) : cœur.
Et (hard) : duur.
Ik zal van men èt ne stien moeke (de mon cœur je ferai une pierre) : je serai impitoyable, ou inaccessible à la pitié.
Et are : œufs durs.
Dans les vieux cafés bruxellois, les clients bruxellois cent pour cent adorent manger des œufs durs froids arrosés de lambic.
ETAT-MAJOR : Ainsi appelait-on pendant l’occupation allemande de 1914 à 1918, les groupes de Bruxellois aux carrefours ou aux places publiques réunis pour se communiquer les « dernières nouvelles de la guerre », la plupart des bobards.
« … Réunions que beaucoup de Bruxellois ont pris l’habitude de tenir à heure fixe, entre camarades sûrs qui se forment tout le long du jour sur la voie publique. Le Bruxellois qui s’y rend vous dit, moitié- sérieux, moitié-narquois : « Je vais à mon état- major ». Les anciens militaires, les hommes qui ont de vagues relations avec la diplomatie, ne fût-ce que comme amis du concierge d’une légation, sont fort recherchés dans ces réunions. » (Gille – Ooms – Delandsheere : «Cinquante mois d’occupation allemande ».)
ETEN : petits pois.
Etenteller (compteur de petits pois) : individu d’une avarice sordide, un harpagon.
ETTEFRETTER (mangeur de cœur) : misanthrope, ronge- cœur, personnage désagréable envers lui-même et envers son entourage, taquin, pessimiste.
« len de, zij ga nen ettefretter ! » (Eh bien, toi, tu es désagréable !)
Schuermans : Hertenfretter : grolpot of een die het hert opvreet. Fransch : chicaneur ; homme d’une humeur chagrine : ’t is een echte hertenfretter.
ETTE JOEGE (harten jagen) : le chasse-cœur au jeu de cartes.
ETTEKIJS : fromage de Bruxelles, petit cinéma de faubourg, ainsi nommé à cause de la mauvaise odeur, comparable à celle de l’« ettekijs », qui y règne habituellement.
EURGEL : orgue de Barbarie (du flamand orgel). Eurgeldroeier : joueur d’orgue de Barbarie (ou de Barberi).
EVERANST (ergens) : quelque part, leverands, ieverhands : ergens (Schuermans).
FAÇADE : façade, figure.
Ne klop op a façcide : un coup sur ta figure. Façadeklacher : peintre en bâtiments, par extension, peintre sans talent, sobriquet de Hitler.
FAFOEL : « frotteur de manche », flatteur, le chouchou de l’instituteur, celui qui se mêle des affaires des autres.
Mé fafoel : une mêle-tout.
FAIBLE
Tomber faible sur : avoir un faible pour, se préci- cipiter sur quelque chose qui fait envie.
FAILLE : Nous empruntons à H. Van Vreckhom (le Marollien) :
« Faille ou foïlle, de l’espagnol falla : bande
d’étoffe. Laine, soie ou dentelle que les femmes se mettent sur la tête lorsqu’elles vont à l’église ». Des gravures ont popularisé la faille de la Bruxelloise.
« La faille était une pièce de soie noire qui descendait en ligne droite de la mantille espagnole, et que les Flamandes ont su porter avec une grâce toute spéciale… Ce vêtement existait encore dans la petite bougeoisie en 1845.» (L. Hymans, «Bruxelles au Temps jadis».)
Il semble cependant que la faille des Bruxelloises ne soit pas d’origine espagnole, car Henne et Wauters {Histoire de ‘.la ville de Bruxelles, tome 1, page 173) écrivent: «Déjà, à cette époque — XIVe siècle — les bourgeoises avaient adopté la faille, ce vêtement si commode et dont l’usage se perd de plus en plus» (c’est-à-dire vers 1845). Une note cite les mots flamands « twee falien » d’un acte de donation faite par Siger de Heetvelde à Jean van Heerlen, clerc secrétaire de la ville et « unam chlamidam dictam falie » dans une donation
faite par Mademoiselle Vander Meynaertshoven à la fabrique de Sainte-Gudule. (Lettres échevinales du 28 janvier 1391 et du 14 mai 1399, aux Archives de Sainte-Gudule.)
FAIT A FAIT (t sonore) : au fur et à mesure. Schuermans donne «à fait»: onmiddellijk, naar- mate. « Zoodra hij zijn daghuur trekt, drinkt hij ze fait à fait op. »
FAK : curieux exemple de corruption d’un mot français.
Dans l’expression « op fak stoen » (veiller), fak et stoen viennent de faction.
FAQUIN : homme élégant (par moquerie).
FARCE : taquin (employé comme qualificatif), il est farce.
FARO : célèbre bière bruxelloise.
« Le nom de la bière bruxelloise viendrait-il de ce qu’en la buvant, on a l’esprit plus lucide, qu’on voit plus clair ? » (H. Van Vreckhom expliquant son étymologie : faro de l’espagnol faro : phare.)
« Le nom de faro a été donné par les Espagnols à notre bière bruxelloise, dit Joe Diericx de ten Hamme, à cause de la ressemblance de sa couleur avec le vin de Faro, cru du Portugal très estimé en Espagne. »
- A. Harou (Folklore de Godarville, 1893), pense autrement : « le nom de la bière si chère aux Bruxellois dérive du mot castillan «farro»: liqueur d’orge ».
Selon Larousse (Grand Dictionnaire du XIXe siècle) le « farro » est un potage espagnol qui se fait avec de l’avoine cuite dans du bouillon gras ou maigre, ou dans un lait d’amandes.
Toujours d’après Harou, « certains auteurs croient que « farau », «faraud», vieux mot employé jadis pour désigner un homme qui sentait son brave, pourrait bien avoir donné son nom à la bière : bière des farauds, d’où faro ! ».
Voici ce que disait le poète Ch. Baudelaire du faro : « Buvez-vous du faro ? dis-je à M. Hetzel ;
Je vis un peu d’horreur sur sa mine barbue » Non, jamais ! le faro ! je dis cela sans fiel,
C’est de la bière deux fois bue ».
Hetzel parlait ainsi dans un café flamand,
Par prudence, sans doute, énigmatiquement ;
Je compris que c’était une manière fine De me dire : « Faro : synonyme d’urine ».
Une expression disparue et qui datait du temps où les chevaux abondaient à Bruxelles. Quand l’un d eux faisait pipi et que son urine moussait sur les pavés, les ketches disaient: «Y fait du faro ! ». Hé tappe ze faro, doe tappe ze bee (ici on soutire du faro, là de la bière) : se chante en voyant un boiteux. (Voir aussi gueuze, kriek, lambic.)
FAROCRATE : Nom donné, jusqu’en 1914, aux grands amateurs de faro.
FATTY : du surnom de l’acteur de cinéma Arbuckle qui était très gros. Fat (anglais) : graisse. Fatty (plein de graisse) : gros homme.
FERMIBON : terme dont se servaient les enfants au jeu, quand ils voulaient imposer un veto à une manœuvre de l’adversaire. Fermi vient de « ver- bieden » (défendre), prononcé « verbée ».
Aux billes, l’interdiction de jouer deux fois se disait
« fermidobbele ».
FERSEEBEKKE : passoire.
FLA (du flamand flauw) : fade, ennuyeux.
Flâ proet : discours oiseux, bavardage inutile.
Flave : personne peu intéressante ou qui se rend ridicule.
FLACHE : mou, sans consistance.
Van Vreckhom le fait venir de l’espagnol « flaco » : maigre, décharné, sans énergie, faible.
FLANELLEBIENE (jambes en flanelle) : jambes faibles.
FLEÇAA1N (flerecij n) : rhumatisme, goutte.
Vleegende fleçaain : « goutte volante » ainsi dési- gne-t-on les rhumatismes qui envahissent tout le corps et déforment les articulations.
FLEDDERE : aller, dans le sens de « comment ça fled- der ? » (comment cela va-t-il?).
On répond : « ça beustel bien » (cela balaie bien). Schuermans : « Fledderen » : flatter, « frotter la
manche ».
FLESSEVRINGER (tordeur de bouteilles) : buveur, soiffard.
FLEUR DE MATRAS (fleur de matelas, crin végétal, varech) : tabac de mauvaise qualité.
FLEURUS : pleurésie.
FLEUS (fluks) : tantôt.
Tôt fleûs : à tantôt.
FLIKKE : arranger, faire, doper un cheval.
Flikker : entrechat, danse.
Flikkere : danser.
Schuermans dit: «Flikker»: dans, sprong (entrechat).
Dans une traduction marollienne de la fable « La cigale et la fourmi» la fourmi dit: «Ah! ti… ti sifflais, qui dit el fourmi ; eh ben ! t’as qu’à faire des flikkers pour t’échauffer, puisque t’as pas fait une spourpot pour l’hiver ».
A la salle de danse, si le Marollien n’a pas trouvé de dame pour danser il boutonne son veston et attend. La mesure arrivée, il part et débute par un flikker (entrechat) à toutes les lampees, puis il danse comme lui seul sait danser… et c’est encore par un flikker à cinq battements qu’il retombe. (« L’Echo de la Presse », dans un numéro paru entre 1914-1918, à Bruxelles.)
Flikkeren : dansen : « Algemeen gebruikt idiotism. Behoort dus niet tôt het bargoensch, maar wel tôt de volkstaal ». (J.-B. Courtmans, « Zonderlinge Taal » te Zele.)
In zen bluûfe flikker : tout nu.
Slecht geflikt : mal foutu, mal habillé, pas bien.
FLOCHE : gland (d’un rideau, d’un bonnet de police, etc), tache dans la chemise.
FLOEIME (fluimen) : glaires. En français bruxellois : des flumes. En 1490, à Tournai : «flemmes».
FLOEIT (fluit) : flûte.
Mé zen floeit oeitgoên (sortir avec sa flûte) : tromper sa femme. Cette expression rabelaisienne n’a pas besoin d’autre explication !
Meuge goên floeite (pouvoir aller siffler) : être congédié.
Get er veer goên floeite : tu as été tirer quatre
jours de prison.
FLOOSKES : balivernes, fadaises, inepties.
Schuermans dit : « Flauwskens : te Brussel en Leu- ven : leugenen, valsche verschooningen, flauwskens vertellen, mensonges, balivernes ».
FLOTCHESBEE : bierre de guerre, extrêmement légère. Mot populaire en 1940-1944.
Flotchesmelk : lait écrémé qui remplaça le lait entier pendant la guerre de 1940.
Henne et Wauters, dans leur « Histoire de Bruxelles » rapportent qu’en 1572, à la suite d’un conflit, les brasseries chômèrent et que devant l’irritation du peuple privé de ses boissons favorites, les magistrats louèrent des ustensiles de brasseurs et firent brasser de la petite bière dite « cuyte » qui d’après De Potter, un contemporain, n’était que de l’eau. En 1941 on l’aurait appelée de la « flotches- bee ».
FLOUTE (vient de flauw) : faiblesses.
’t Es van floute, dit-on, par exemple de quelqu’un qui est fatigué ou qui a un étourdissement.
’k Hem en floute : j’ai un peu faim ; appelfloute : grand faim.
FLUIS : tantôt, opposé à « seffes » : tout de suite. « Nu krijgh ick weder moet, maar flus was ick benouwt » (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle).
FOERT : au diable, zut.
D’aucun prononcent «fort» traînant longtemps sur l’o.
Je l’ai même entendu en patois picard, près d’Ath : « fourte » (avec l’accent sur l’e muet).
Schuermans dit : « Foert : weg, voort, van welk het eene verbastering is ; komt voort is : foertgaan… Hij is foert : hij is weg. Men gebruikt het steeds in een verachtelijken zin ».
FOLLE (voir faille).
Une vieille chanson bruxelloise disait :
Wo da men ons me dekke ’t Es de folle van men vrâ,
Ze sCHeult as men er mé trekke Den ligge we in de râ.
Nous nous couvrons (au lit) avec la faille de ma femme ; elle se déchire quand nous tirons dessus, alors nous en sommes peinés.
FORDIST : crotteux, sans le sous.
Vient de « Ford », la marque populaire d’automobile américaine.
Expression qui vit le jour peu après 1918, quand Ford inonda l’Europe de voitures bon marché.
FRANC: hardi.
Il est assez franc pour aller sur le toit. (« Le Français à Bruxelles », par De Kelper.)
Franc (argent) : bal, boêt, kadol, klopper, botche. FRÉQUENTEIE : avoir un amoureux ou une bonne amie.
FRETTE (vreten) : manger goûlument, « bouffer ».
Fret : aliments, repas, la « bouffe » (comparer avec l’allemand : fressen, qui exprime l’action de manger vulgairement).
Voir : EttefreHer.
Hij fret zen kas op : il se fait de la bile, il s’en fait. Ik hem ma doer oen en boelt en twee keut erme gefret : j’ai mangé beaucoup et c’était bon.
Buune frette : rager.
Z’es altaaid sCHuun opgezet, mo thoeis hei ze giene fret (elle est toujours coquettement habillée, mais chez elle il n’y a pas à manger) : se dit d’une coquette, sacrifiant tout à sa toilette.
FRICADELLE : boule de hachis, boulette.
FRITKOT : baraque à frites ; péjorativement : friture.
FROECHELE (frutselen) : tripoter.
Froecheleir : tripoteur.
GANG : impasse, allée, corridor.
Gangske : petite impasse (synonyme : strotche).
Na goen we ne gang ! : cette fois, on va fort !
GARÇON : garçon de café.
Garçon in ’t mosselhoeis (garçon au débit de mouies).
« Deze uitdrukking werd gebezigd voor een jong mensch die zich voorstelde « i e m a n d » te zijn. « lemand die zich hoog opsmeet », die buiten of boven zijn stand gekleed ging. « Garçon in ’t mosselhuis » was de laatste graad in het kelner- schap. Vôôr den oorlog waren er weinig « mossel- huizen » waar een garçon dienst deed. De « baas » en de « bazin » met de kinderen hielden het zaakje recht. » (Cypriaan Verhavert, dans « Het Laatste Nieuws » du 13 juillet 1937.)
GARDEVIL : agent de police, hareng saur, «boestrink». « La Régence vient de charger quelques gardes de ville de stationner dans l’Allée Verte pour y maintenir l’ordre.» («Indépendant», 1-7-1833.)
Dans l’acception : agent de police, garde de ville ne s’entend plus.
La chanson, si populaire, annonçant l’arrivée de la police, parmi les « ketjes » disait :
Lup, lup, lup ! de gardevill’ es doe !
De gardevill’ es doe (bis)
En hadde ni geluupe G’had er oên geweist (bis)
GARDINAGE (vient de garder) : Le « National Bruxellois » (12-11-1926) s’est occupé de ce mot bien bruxellois : « Le plus souvent, l’acquéreur (à une vente publique) n’a pas le temps de ranger lui- même ies objets qu’il vient d’acheter, et tandis qu’il paie au comptant, un Marollien dévoué va parquer sa marchandise en lieu sûr. Il y a là (au dit lieu sûr) un gardien, voire plusieurs gardiens, veillant avec des yeux de lynx sur les acquisitions faites par les amateurs à la vente…
C’est dix francs d’habitude pour un gardien durant une vente. Mais quel nom donner à pareil « travail»? Du mot «gardien» nos Brusseleers ont fait « gardinage », le mot «gardiennat» leur étant, on le conçoit, totalement inconnu ».
GASTHOEIS (gasthuis) : hôpital.
Gelukkige meense dee gezond in ’t gasthoeis ligge :
heureux ceux qui se trouvent en bonne santé à l’hôpital.
Avant la guerre de 1914, maints pauvres diables faisaient cette réflexion et ce, avec envie. A cette époque, les hôpitaux disposaient d’une salle spéciale où on hébergeait de vieux ouvriers se prétendant caducs et qui étaient un tantinet carottiers. Il s’agissait de peintres, de couvreurs, de maçons et autres travailleurs du bâtiment pour la plupart âgés. Ils passaient ainsi les mois d’hiver au chaud et bien nourris.
Couplet bruxellois :
« Ze zaain mé heum de Peremansstroêt opgereye — En recht de paut van ’t Gasthoeis in » (on a grimpé avec lui la rue des Vers — et entré à l’hôpital).
GEARE : vanité, orgueil (genre).
« Ça est tout le grand geâre alors ? » (Bazoef).
« Grand geâre in e klaain strotche » (du grand genre dans une petite ruelle) peut se traduire par cette autre expression bruxelloise : faire de l’es- brouffe (de l’épate, diraient les Parigots).
GAT : derrière, cul.
Dé ze gat verbrandt moo mo op de bloeze zitte
(qui se brûle le derrière doit s’asseoir sur les cloques) : il faut en subir les conséquences.
Hij hei ma ne poeter op ma gat gesCHilderd (il a
peint un moine sur mon derrière) : il m’a possédé dans les grands prix.
Zen biene van onder ze gat luupe (courir ses jambes hors de son derrière) : détaler à toute vitesse.
Gat op gat (trou sur trou) : choses qui s’arrangent bien, qui s’assemblent bien.
Stopt da kind za gat (cachez le derrière de cet enfant) : se dit de quelqu’un possédant une superbe calvitie.
Kop en gat : désigne un homme ou une femme de petite taille, mais gros.
Dâ n’hei ne klachkop tôt on za gat : il est chauve jusqu’à son derrière.
’t Komt percees oeit den hond ze gat (ça semble sortir du derrière d’un chien) : se dit d’un vêtement fripé.
Sprekt teige ma gat, mene kop doo zier (parlez à mon derrière, ma tête me fait mal) : fichez-moi la paix.
GE1L (geel) : jaune.
Ne geile : 20 francs.
Het geil : la jaunisse.
GEIRE (gaarne) : volontiers.
Geirezat : qui est volontiers ivre.
Geirebluut : femme qui ne fait aucune difficulté pour se mettre au lit avec le premier venu.
Geire bâ ! : volontiers avec ! Terme ironique des miliciens exprimant qu’ils sont heureux (!) d’entrer à l’armée.
Wij hadden geren raedt : Nous voudrions bien ^..o conseillés (dans «De Ghedwonghe Griet», farce du XVIIe siècle).
GEKAPT : hachis, viande hachée.
GELD : argent.
Hij lupt me ’t geld van de coiffeur (il court avec l’argent du coiffeur) : il doit se faire couper les cheveux.
GELUL : radotages.
GEMUL : bric-à-brac, déchets.
Schuermans dit : « Gemul : allerlei kleinigheid of brokkelingen. In Brabant zegt men ook : «gemot» voor « gemul », van mullen ; in ’t Fransch : se rompre en petits morceaux ».
J’ai trouvé ce mot dans une ordonnance communale sur la Senne publiée à Bruxelles (1341-1354) et reproduite par « Belgisch Muséum» 1837, Gand : « In den iersten, dat een iegelije sijn gemul, dat comt van sijns selfs huse, sal gaderen binnen sinen huse, ende doent wech voeren, op sijns cost».
J.-F. Willems commentant cette ordonnance, traduit «gemul» par « stof, gruis, vuilnis ». Il s’agit des ordures que les gens doivent évacuer, à leurs frais.
GENDARM : gendarme.
De Cort relève comme synonymes : hoeremoech (haremuts) : bonnet à poil et pakkeman : celui qui prend les hommes.
Nos jass, à l’Yser appelaient les gendarmes « piotte- pakkers» (ceux qui prennent les soldats) parce que les gendarmes, patrouillant à l’arrière, arrêtaient impitoyablement les jass qui tentaient de s’en aller sans permission.
Gendarmes et voleurs : ieu d’enfants.
GENEIVEUST : qui aime le genièvre et l’alcool, ivrogne. Voir zattecul.
GENOFFEL : girofle.
GEPERMETEID : permis.
Dat es ni gepernieteid ! (Cela n’est pas permis I) : c’est scandaleux ! C’est injuste !
GEPLEUMT ou GEPLEUMTCH : enplumé, bien habillé. Hij es gepleumtch : il est bien nippé, ou, il a tout perdu.
GÉRARIUM : géranium, pélargonium.
GEROKTAAID (du flamand geraaktheid) : attaque d’apoplexie.
GESLIJPE : aiguisé, aiguillonné.
Op eet geslijpe zaain : avoir envie de quelque chose.
Schuermans dit : « op iets geslepen zijn : geneigd zijn om iets te hebben ».
GEST (gras) : gazon.
Poentches on ’t gest vaaile (limer l’extrémité du gazon) : se dit d’un fainéant qui passe son temps à ne rien faire.
GETETERD : se dit de quelqu’un qui a une grosse tête. Coup de tèter : coup de tête employé par les batailleurs des quartiers populaires et par les « veu- vechters » des salles de danse.
GEUBBELE : vomir.
Geubbeleir : quelqu’un qui vomit.
Geubbeling : vomissure.
Geubbeling van den deuvel : vomissure de l’enfer (insulte).
Schuermans dit : « Geubelen : in de gemeene spraak gebruikt voor : braken, overgeven ».
GEZICHT (figure).
A gesculteid gezicht (un visage sculpté) : visage grêlé.
GICHELE : rire bruyamment.
GIEZE : jeune fille.
Quoique appartenant à l’argot des voleurs, ce mot s’est introduit deci delà dans le parler bruxellois. Is. Teirlinck l’orthographie « geeze ». Kiliaen lui donne aussi l’acception de prostituée.
GNOUF : de nono, l’espagnol pour caduc, tombé en enfance (Van Vreckhom).
GODOUCHE : juron, comme « godoeme ».
GOECHNOEME (IN) (au nom de Dieu !) : Pour l’amour du ciel ! Je vous en supplie !
GOEN (gaan : aller).
Hij zal nemi lang goen (il n’ira plus longtemps) : il ne vivra plus guère.
Da goet a mei : cela vous va, cela vous convient. Da goet a teige : cela vous contrarie.
GOENCHTAG (woensdag) : mercredi.
Quaden Goensdach : le mauvais mercredi (Bra- bantsche Yeesten).
GOERE (garen) : fil à coudre.
’k hem hem on men goere (il pend au fil de mes
vêtements) : je ne parviens pas à me débarrasser de cet importun. Il ne me lâche plus.
GOESTE : goût, manière.
Eeder zen goeste : chacun à sa façon.
GOESTING : goût, dégoût, autant qu’on en désire. Ik kraaig er men goesting van : J’en suis dégoûté, j’en ai assez.
(«…die broot hemme no ulle goesting. » « Brus- selsch Dialect», J.-F. Willems.)
GOOD (goed) : bien, bon.
Hij zit er good veu : il est dans l’aisance.
GOTFERDOUME : blasphème.
(Anglais : goddam.)
GOULAF : gourmand, glouton.
Van Vreckhom le fait dériver de l’espagnol « gula »: intempérance, voracité.
GOZETTE : chausson aux pommes.
GRABBELOEIS ou GRABBELINK : action de jeter des friandises ou de menues pièces de monnaie que les enfants se disputent ; fonds de bocaux.
(En néerlandais : te grabbel gooien : jeter à la gribouillette.)
En confiserie : déchets de gâteaux.
Grabbelink van de moule : le dernier-né.
GRAREBARE : pommes grisettes.
GRATTE : égratignure.
GRECQUE (pain à la) : spécialité de la pâtisserie bruxelloise. E. Ned, dans « Les Idées de M. Goed- zack » écrit : « Elle fut inventée (la spécialité) autrefois par un pâtissier de la rue Fossé-aux-Loups qui s’appelait en flamand « gracht ». D’aucuns certifient même que ce furent des moines qui la créèrent. Mais on prononçait « grecht » et la pâtisserie nouvelle s’appela « brood van de grecht ». Vous voyez que de là à la traduction actuelle « pain à la grecque », il n’y a qu’un pas.
GREEF (graaf : comte) : ancien mot désignant la fête de la Mi-Carême ou Half-Vasten. Dans le Brabant et surtout à Anvers, les enfants recevaient des présents.
Le « comte de la Mi-Carême » ou « de greef » arrivait, chargé de bonbons ou de verges, pour récompenser les uns ou punir les autres. C’était somme toute, la Saint-Nicolas de jadis.
- Meynkercken a encore entendu ce mot à Bruxelles ,en 1876.
GRÈMPE : pleurnicher (s’applique surtout aux bébés). GRENADEER : grenadier.
GREUNWAAIF : « verdurière », fruitière (groensel-
vrouw.
GROENSCHEL (groenvink): verdier. On l’appelle aussi: greûnvink.
GUELORE (gloire) : vantardise, prétention.
Mé Guelore : Marie la Vantarde.
GUERNADIER : grenadier.
Guernadier in twee gezoegd (grenadier scié en deux) ou in twee gekapt (haché en deux) : un homme de petite taille. Synonymes de half spauce (demi-portion).
GUERNOTE : crevette.
« Guernôt en crabbe ! Caricole ! Caricole ! » (cri des marchands de crevettes et de bigorneaux).
GUETTES: Guêtres.
Tu auras ça à tes guettes : tu en porteras la responsabilité.
GUEUZE : la plus populaire des bières bruxelloises. « Un savant», écrit M. Gironino, « dans le « Bulletin de l’Union Civique » nous apporte, à propos, de « gueuse » une indication plus précise et peut-être à tout prendre, digne d’une certaine confiance : il est question dans un compte de 1760, d’un certain Gueus, brasseur bruxellois, qui aurait donné son nom à une bière spéciale inventée par lui. »
Une explication, plus ingénieuse que scientifique, a été donnée par Joe Diericx de ten Hamme dans « Souvenirs du Vieux Bruxelles » : « Ce nom », écrit- il, « paraît lui avoir été donné par les Français, qui, ne se doutant pas de la force de cette bière et voyant qu’après en avoir seulement ingurgité une couple de verres, ils ne pouvaient plus faire usage de leurs jambes, tout en conservant la tête très saine, s’écriaient : « Cette gueuse de bière ! ».
Le lambic, mis en bouteilles, prend le nom de gueuze. C’est un mélange de lambic jeune et de lambic vieux.
En 1950, à l’occasion de la journée de saint Arnould, patron des brasseurs, bruxellois, j’avais versé une larme sur la disparition des vieilles bières bruxelloises : faro, lambic, panaché. A une réunion au Vieux Saint-Pierre, rue d’Anderlecht, un monsieur, haut de taille, replet de ceinture, me prit par le revers de mon veston :
- Monsieur, dit il, vous avez déploré l’absence de vieilles bières bruxelloises. Voulez-vous venir me rendre visite, rue des Capucins ?
- A qui ai-je l’honneur, Monsieur ?
- Albert Vossen, secrétaire de l’Union syndicale des Marchands de bière, un des trois frères, mousquetaires de la Mort Subite.
- La Mort Subite, M. Vossen, est un vieux et noble titre bruxellois, cher aux lampeurs de gueuze. Les uns disent que ce nom vient de ce que des fils de cafetiers se noyèrent au défunt bassin de natation du Nieuwmolen, les autres, qu’il est une allusion au zanzi qui, d’un coup sec, élimine un adversaire et qui se joue de préférence devant un bon pot. Que désirez-vous me montrer, rue des Capucins ?
- Des tonneaux, des éprouvettes, des densimètres, vous faire goûter des bières.
Je n’ai pas regretté ma visite. Errant dans les rangées interminables formées par des centaines de tonneaux de gueuze en formation, j’ai fait une découverte : celle d’une maison seigneuriale, cachée entre les rues Blaes, la rue Saint-Ghislain et la rue des Capucins. O vous, qui, aux jours de dèche, allez porter chez «Ma Tante» — In den Berg, pour parler le dialecte du lieu — les plus chéries de vos possessions, savez-vous ce qu’il y a derrière les guichets et les bureaux ? Un petit parc, avec une belle et noble maison à colonnades, ornée d’un balcon à ferronnerie ancienne. J’ai vu ce paysage de rêve en ouvrant une fenêtre du dépôt de bières de M. Vossen. De beaux arbres croissent dans le jardin désert, orné d’une pièce d’eau. L’hôtel, pareil à une de ces bellles maisons de plaisance qu’on voit encore à Boitsfort, est inhabité.
- Vossen me tend un verre.
- Buvez ceci, me dit-il.
Je bois.
- C’est du lambic, dis-je.
- Du lambic. Alors à quoi riment vos regrets sur la disparition des vieilles bières bruxelloises ? Apprenez que le lambic est leur mère à toutes et qu’elle vit encore puisqu’il y en a ici. La fermentation du lambic est très longue et demande au minimum un an, parfois deux ou trois ans avant qu’on obtienne la finesse et le bouquet caractéristiques. Cette longue fermentation requiert de vastes et nombreux locaux et une futaille formidable. C’est la raison pour laquelle il existe, dans l’arrondissement de Bruxelles, en dehors des brasseries, le groupement des Marchands de bière qui
fait brasser à façon, c’est-à-dire qu’il achète les moûts de brassins entiers qui fermentent dans leur propre matériel et dans leurs magasins.
- C’est ce que vos centaines de milliers de litres sont occupés à faire ici, dans la fraîcheur, l’obscurité et un arôme qui doit faire défaillir les cœurs de tant de Bruxellois ?
- Ici, nous faisons de la préparation. L’art du préparateur consiste à faire des coupages judicieux, de divers brassins, suivant qu’il voudra les vendre sous la forme de faro, de lambic doux, de gueuze au tonneau ou de gueuze en bouteilles.
- Alors, le faro, qu’est-ce ?
- Un mélange de lambic à 5°5, avec de la mars édulcoré au moyen de sucre. Le lambic pur avec addition de sucre sera le lambic doux. La gueuze au tonneau et la gueuze en bouteilles sont des lambics secs, non sucrés.
- Il n’y a pas de sucre dans la gueuze ?
- Pas plus que dans cette eau.
Et M. Vossen, armé d’un densimètre, me fait la démonstration, puis conclut :
- La gueuze est donc la seule bière permise aux diabétiques.
- O, chère gueuze, si injustement bafouée par Baudelaire ! Si je le rencontrais, celui-là, au coin de la rue Chair et Pain…
Passant d’une « pipe » à l’autre, prélevant des échantillons de-ci de-là, examinant à la lumière des bouteilles de gueuze pour évaluer leurs dépôts ou constater des traînées insolites, pareilles à des voiles d’algues, M. Vossen m’a fait toute une conférence sur l’art de la préparation. J’avoue humblement que je n’y ai pas compris grand-chose. L’art du brasseur bruxellois n’est pas une science qu’on assimile en deux heures. Il faut des années avant de jongler avec le « Bacillus Viscosus Bruxellensis », qui fait filer le lambic, avec les excès des jeunes bières qui font sauter les bouchons (plus de 3 millions de bouteilles de gueuze furent perdues à Bruxelles, en 1948). Dans ces caves de la rue des Capucins, me voici bien éberlué par la science d’un monsieur qui consacre sa vie à la gueuze. Je suis, tout entier, plongé dans d’étranges réflexions quand une question bizarre m’en extrait :
- Monsieur, dit M. Vossen, qu’est ce que la bière ?
- La bière… euh ! la bière… c’est ce que je bois quand j’ai soif, c’est ce que Jef Lavvaait se paie quand il rencontre une tof-mokske.
- Non, Monsieur ! La bière, c’est du pain !
- Hein ?
- Lors de l’Exposition de Bruxelles de 1910, deux chimistes prouvèrent, par analyse, qu’un litre de lambic équivaut, en valeur nutritive, à 200 gr de pain, 180 gr de viande, 72 centilitres de lait, c’est- à-dire, par temps de guerre, un petit repas à la Gargantua. Dans sa composition, entrent 40 p.c. de froment et 60 p.c. de malt (orge germée).
- Et le panaché, qu’est-ce ?
- Un mélange de lambic doux et de gueuze au tonneau.
- Mais la gueuze, alors ? J’aurais dû commencer par vous demander cela.
- Le lambic, mis en bouteilles, prend le nom de gueuze. C’est un mélange de lambic jeune et de lambic vieux. Après un été de bouteille, cette bière, d’un goût spécial, agréable, obtient, sauf accident, un moelleux, une mousse et un bouquet parfait, directement assimilable par l’estomac, les sucres ayant été fermentés à 100 p.c.
- Et la kriek ?
- La kriek se fabrique en juillet par adjonction de 60 kg de cerises de Schaerbeek à tête plate, par tonneau de 250 litres. Elle est mise en bouteilles au début de l’hiver, après décantation. N’oubliez pas non plus que le lambic forme son mousseux en bouteille. Un dépôt se crée. C’est la raison pour laquelle la gueuze doit être servie avec soin, comme le bourgogne.
Servons-la avec soin, servons-la religieusement. Elle mérite cela, la bonne vieille gueuze bruxelloise. (Voir aussi faro, kriek, lambic.)
HA (had) : ik ha (j’avais).
Dans «De Bervoete Bruers » (Bruxelles 1559), se trouve la forme « ic ha ».
HABLADOR (espagnol : celui qui parle. Du verbe « hablar » : parler).
Désignait autrefois à Bruxelles celui qui parlait à tort et à travers, sans rien connaître. Le mot semble disparu. Il avait passé de l’argot dans la langue populaire.
HALF EN HALF : boisson composée moitié de faro, moitié de lambic.
Halve : demi.
Nen halve : infirme.
Halfke (un centime) : une demitje.
En halfken in veer en en scheut in iene ki (une demitche coupée en quatre et un verre de genièvre bu en une fois) : se dit pour exprimer que quelqu’un se conduit tantôt comme un avare, tantôt comme un prodigue.
Halfcenskesbrug (pont d’un centime) : pont du
Nieuwmolen, sur la Senne, entre les communes d’Anderlecht et de Saint-Gilles pour la traversée duquel on percevait, jusqu’en 1914, un droit de péage de deux centimes.
HAMELAAIK : hypocrite.
Hamelaaikement : hypocritement.
HAND : main.
Oeit ter hand (hors de la main) : achat d’occasion. Comparer à l’anglais «second hand purchase » et au français «vente de la main à la main».
Hij laCHt op zen aaigen hand (il rit à sa propre main) : il rit tout haut quoique étant seul.
Ge moet mier op zen hanne lette as op zen tanne
(vous devez faire plus attention à ses mains qu’à ses dents) : il a les doigts trop longs, il vole.
HANDGIFT : le premier client de la journée, étrennes. « Ge zet men handgift » (vous êtes mon premier client de la journée), dit un commerçant, qui d’après la qualité, l’humeur ou la réputation de ce client, augure du bon ou du mauvais pour le reste de la journée. Si le «handgift» n’a, par exemple, pas de monnaie, c’est un mauvais signe.
« In Godts name, daer is u gelt,
» Om dat myn hant-gift is…»
(Kluchtigh ende belacchelyk Verhael-Dicht, etc.) «Toe, handgift mij. » (Schuermans)
HANNE ou HANNEKE : pie.
« In de manken hanne » (« A la pie boiteuse » enseigne d’un cabaret des environs de la Grand- Place, qui disparut vers 1930).
Le veilleur de nuit s’appelait jadis à Bruxelles : Hanneken-uyt ou Handuyt.
HEIMEL (hemel) : ciel.
As ek a nemi zeen, in den heimel : si je ne te vois plus, rendez-vous au ciel.
HESP : Jambon.
Vé vaaif cens hesp : drâ snije moeger en de rest
vet (Donnez-moi pour dix centimes de jambon : trois tranches maigres et le restant de la graisse) : demande, prière, requête candidement exagérée.
HEULPE (helpen : aider).
Hij heulpt Jan ; wa too Jan ? Niks (Il aide Jean ; que fait Jean ? Rien.) : Il ne travaille pas.
HEUSKE : W.C. (de « huisje» : petite maison).
De sCHilders zaain in ’t heuske gepasseid (les peintres sont passés par le cabinet) : le W.C. a été souillé.
Ingelsch heuske (cabinet anglais) : vélo démodé, usé.
Zene neus zit op ’t heuske (son nez est assis sur le cabinet) : il a le nez camus.
HIRSCH-PAR-TERRE : le Vieux Marché.
Hirsch était le nom d’un couturier select de la rue Neuve. Ses magasins ont été rasés en 1964.
HOECHEPOT (hutsepot) : hochepot, brouillamini.
« Men souer, mij glooft, een hutse-pot afsnijen », dans la « tirade des nez », de « Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle.
HOEKSCHAPROË (armoire de coin) : bossu.
HOEK : crochet.
Hij es oeit zenen hoêk (il est décroché) : il n’est pas dans son assiette.
HOER (haar) : cheveu, chevelure.
Hij es in process met de joenge doeive, hij wet nog ni of het zal hoer of ploeim zaain (il est en
procès avec les jeunes pigeons ; il ne sait pas encore si ce seront des poils ou des plumes) : se dit d’un adolescent aux lèvres et menton ornés d’un léger duvet.
Roezeg in ’t hoer : surabondamment chevelu.
Hoer op de tanne (des cheveux sur les dents) : être robuste, décidé, avoir du poil aux dents.
« Ne veuvechter, da was ’nen type mee hoer op z’n tanne » : un « veuvechter » (voir ce mot), ça était un type un peu là ! (Cypriaan Verhavert, « De Veuvechter »).
Fransch mé hoer op (du français avec des cheveux dessus) : mauvais français.
HOF : jardin.
Hij es in zenen hof (il est dans son jardin) : il est à son affaire.
Gebroken Hof : le Jardin Rompu, vieux quartier, près de la rue des Ursulines.
In den Gebroke Hof : rue de Nancy.
HOLTCH EET OP (haalt iets op) : chantez-nous quelque chose.
HOND (hond) : chien.
Honnendeef : l’individu qui, autrefois, était chargé de capturer les chiens errants au moyen d’un lasso et de les transporter dans un sac à la fourrière communale ou aux laboratoires de vivisection. (Littéralement : voleur de chiens.)
Honnefretters (mangeurs de chiens) : sobriquet des habitants de Forest-lez-Bruxelles (Folklore Brabançon n° 12, juin 1923).
Honnentoeker : individu qui se promène le long des boulevards intérieurs avec de petits chiens qu’il vend à des âmes compatissantes ou à des amateurs, sans montrer qu’il est marchand de chiens.
Z’emme nen hond duut gedoen : elle s’est fait avorter.
Accoucheur van d’honne (accoucheur de chiens) : mauvais gynécologue.
Z’hei en hondche gepikt (elle a volé un chiot) : elle s’est fait avorter.
Hij ès van ’t honnegeluûf, hij hei lever het vlies as de biëne (il a la foi des chiens, il préfère la viande aux os) : il choisit ce qui est bon.
HOOR : prostituée (comparez avec l’anglais whore). Hoorejoêger (chasseur de prostituées) : celui qui les fréquente.
HORA (heure) ou ahora (espagnol pour heure et maintenant) : cri, dit Van Vreckhom, par lequel les chefs de chantiers ou de travaux, aux environs de Bruxelles, annoncent la cessation ou la reprise du travail.
La chose m’a été confirmée en 1940 par M. L. Ber- tels, un vieux Saint-Gillois.
« Lorsque le travail doit cesser à 4 heures dans une maison en construction, m’a-t-il dit, le « miestergast » (contremaître) crie : ERA ! »
HORENDROEGER (porteur de cornes) : cornard, cocu.
HOULLE : charbon.
Houllemarchant : charbonnier.
Broksken Houlle (petit morceau de charbon) : sobriquet donné à quelqu’un dont les cheveux sont très noirs. Synonyme de pekzwet (noir comme la poix).
HUUG (hoog) : haut.
Huugstroet : rue Haute.
Huugstroetgast (hôte de la rue Haute) : habitué du dépôt de mendicité.
HUUGENTAPPER : buse, chapeau haut-de-forme. HUUP : tas, monceau.
Ze mag met den huup meigoên : elle est quelconque (elle fait partie du tas).
IENKE : pleurer, chialer.
IÈR (aarde) : terre.
Poteièr (potaarde) : argile, lètbeis (aardbei) : fraise.
IET : brûlant.
leten boek (bouc en chaleur) : chaud lapin, libertin. IMPASSE
Voici quelques mots qui, à Bruxelles, désignaient ou désignent des impasses (d’après L. Verniers « Les Impasses bruxelloises», folklore brabançon n°s 79-80, 1934) : cul-de-sac, allée, gang, cour, bataillon carré, gat, poort, hoek, straatje, carré, cité, spanras (argot).
INKPOT : encrier, cul.
Fleus geif ek a ne stamp in aan inkpot da ge al sCHraaivende zult voech goen (tantôt je te donne un tel coup de pied dans ton encrier que tu marcheras en écrivant).
IUEKE : un cheval, dans le langage-bébé, (de hue I) INDOEGNER : gourmand, glouton, «goulaf», avare. INSULTES
Une petite brochure éditée en 1896 par Vanbuggen- hout, à Bruxelles, et intitulée « Les Mémoires et Révélations de Pitje Snot » donne toute une liste d’injures bruxelloises. Elles ont leur place ici, car elles montrent bien comment elles colorent la langue populaire de Bruxelles :
Jan men kluute, bazoef, scheile napoléon, doche- kop, woelekaït, woelekop, boer, stoemmen boer, ambrasmoeker, strondroeimer, architekt, voeile avokoet, façadeklacher, pennelekker, spekscheeter, krotter, lawaaitmoeker, galeiboer, bastoed, schieve smikkel, rottekop, genevelneus, platvoet, zwietvoet, voeil tong, schramoelenboeik, hieten bil, snotneus,
boelkarkas, broebeleir, scheile, oeiteider, schaaiter, stinker, zot, vagabont, krummen deef, getrode manshoor, stoeffer, oie kroeik, schramoellenbak, vetlap, schieve lavabo, spons, platzak, dikke papzak, paaipekop, pekdroed, strondboer, slecht stuk, met- teko, moeilezel, buffel, voeilen hond, rotten bastoed, klachkop, dikke smoel, veeze smoel, wolvenderm, onnuzele kluut, manke puut, lange zwik, sloebber, zivereir, spring no ’t vet, loerik, sloekker, zatterik, deef, toefelhoor, zatlap, wallebak, blinkduus, smeir- lap, dikzak, rotzak, bolleke vet, schuun scholle, loeis, voeil teif, krummen hond, krumme teif, voeil verke, oeil, boschoeil, rotte boestring, duigeneet, genevelist, honnendeef, krapul, trekploster, platloeis, moegere sprinkoet, biest, pattatche, patate neus, patate vonk, rotte faro, pateike, poeffer, schandoel, zattekul, plekleer.
JABBERE : boire en se salissant.
Aussi, boire bruyamment et à petits coups.
JALOUSERIE : jalousie.
JANVERMILLE ! : juron.
JAPNEUS : Japonais.
JAS : veston, redingote, habit.
Met de patte van zen jas trekke (tirer les pans de son habit) : poursuivre un débiteur.
Jasse : faire ce que Shakespeare appelait élégamment « la bête à deux dos » (Othello). Allerhaailigejas (paletot de la Toussaint) : paletot d’hiver.
JENOFFEL : giroflée.
JETER (SE) : se vanter, se pavaner.
Un qui se jette : vantard. (Voir : smaaiter et stoeffer.)
JEUDASSE : Judas, méchant, taquin, traître.
JIBBERE : pleuviner.
JIBBERINE : grande fille niaise, une gourde qui n’a pas d’allure.
JOEBBER : indolent.
JOER (jaar) : année.
Verleie joer : l’an passé.
JUCHTE : juste.
« Comme de juchte » : précisément.
JULLEKE : naïf, candide.
Julien : plaisanter, raconter des bourdes.
Hij es beizig on ’t julle : il raconte des bourdes.
JUUGEMEËN (de jasmin) : lilas.
O mâ Rooske,
As ek a zal zeên Zal ek kik a geive Me tekske juûgemeên !
(Paroles d’une chanson populaire de Bruxelles.)
JWOENK (j comme dans Georges) : vilbrequin (qu’on prononce à Bruxelles « fîbrequin »).
Schuermans donne « zwonk ».
Aussi : torgnole : ’k Zal a zoe en jwoenk droeie :
je vais te flanquer une fameuse torgnol.
KA : froid, rhume.
’t es kâ hee : il fait froid ici.
’k hem ne kâ vast : j’ai pris froid, j’ai un rhume.
Kâ keek (poulet froid) : personne douillette.
Mie hâ kâ.
Mie hâ brâ kâ,
Woe hâ Mie brâ kâ ?
Op de met hâ Mie brâ kâ.
A prononcer très vite en liant les mots et faire deviner ce qu’on vient de débiter. (Mariette avait froid, Mariette avait très froid, où Mariette avait- elle froid ? Au marché Mariette avait très froid.)
KAAIKER (de kijken) : pigeonnier.
Hij es wakker on zen kaaiker : il veille dans son pigeonnier, c’est-à-dire : il est vigilant.
Dans divers villages brabançons, on trouve l’enseigne «In den uitkijk» (Au guet).
Ne blave kaaiker : œil au beurre noir.
KAAITCHE : tête (du flamand kei : pierre).
KAAIZER KOEREL : (Charles Quint) faiseur d’embarras.
KABAS : panier, filet à provision, cabas.
Kabas-korf, écrit I. Teirlinck dans son « Dictionnaire de l’argot des voleurs». Il ajoute «thans in gebruik voor armkorf, hangzak ».
Kabasse : marcher à la rue en se donnant le bras, comme si on tenait un cabas.
En wallon « aller à cabosse ». (« Dictionnaire du bon langage », Carpentier.)
Schuermans : Kabassen : arm aan arm gaan.
Il y avait à Bruxelles, la « Cabas straetken » ou ’t Pisstraetken. « Le premier de ces noms, disent Henne et Wauters, provient sans doute du mot flamand « cabassen », et lui fut donné, parce que, jadis, on y vendait, presque dqns chaque maison,
des lisières et d’autres restes provenant des tailleurs. »
Ne vaaigekabas (un panier à figues) : désigne un vilain chapeau de dame.
KABERDOECH : cabaret (De «cabane»?).
Schuermans : Kaberdoes : kleine, gemeene herberg (Fransch : gargotte).
KABERNAAI : carbonnades, grosses lèvres.
KABOEBEL : fainéant.
Suivant Verhavert, s’emploie surtout dans le quartier des Abattoirs. « Kaboebel omvat : loorik, liever- loo-as-muug, maar in veel sterkere mate dan ’n gewoon luiaard. Het toppunt van de kwaliteit « loorik » is « ‘ne kaboebel ». Kaboebel komt voort van : broebel, boebel, brobelen. Broebelen is een spraakgebrek, ook : verward spreken, onzin ver- kopen op flegmatische wijze : te lui zijn om duide- lijk te spreken. »
KACHOUBERA : action de chercher dans un bac aux ordures.
Kachoubere : chercher dans les ordures. Kachoubereir : chiffonnier.
Kachouberesse : chiffonnière.
« Les kajcubereers, ça est des quidam qui de son pique ou de son crochet farfouille dans les bacs à ordures.) (« Protestation de Jef Krollekop », « Le Sifflet», 11 septembre 1904.)
« Les kajoubereirs sillonnent la ville dès 4 heures du matin, sortent les bacs des grandes maisons, restaurants, hôtels, etc. et moissonnent dans ces poubelles avant le passage du tombereau du mest- bak. » (Freddy, « Bruxelles Inconnu ».)
Verhavert raconte qu’un des « kasjoebereers » les plus connus était « voele Susse » (François le sale). Il avait son dépôt dans une cave de la rue de Villers, là-même où il logeait et dormait. Il décéda à l’hôpital Saint-Pierre, mais avant sa mort, il eut l’honneur de voir modeler ses traits par deux sculpteurs ; un Italien et un Français.
KAFEI koffie) : café.
’k Hem kafei gedroenke ; ge zoegt er de reCHte woerhaait oeit (j’ai bu du café, on y voyait l’exacte vérité) : j’ai bu du café très faible.
Kafeigat : buveuse de café.
KAFFER : type, drôle de type (vient de Cafre).
KAJAVEK (i comme dans Jean) : veste longue.
Est-ce « cache à cache avec», c’est-à-dire, une veste si longue gu’on pourrait s’y cacher ?
Blouse de femme, à volants.
KAK : caca.
Kak of giene kak, de pot op (besoin ou pas besoin, sur le pot !). Synonyme de willes of ni : bon gré mal gré.
KAKKE (ou caguer) : fienter.
Kakkebroek : pantalon fendu que portaient les petits enfants.
Kakkedaure : Chaise percée. (Schuermans : kakke- deur, kakkedoor : nachtstoel met opening en onder met een pot om in te kakken.)
Sigart : « Kaker : chier. Ce mot appartient plutôt au marollien qu’au wallon. On ne s’en sert plus guère (Mons, 1866) que pour se moquer de la prononciation flamande „ allaie kakaie à l’verte allaie ” ».
« Wat drommel heb ick in, alweder groote kack » (causée par la peur), dans « De Gedwonghe Griet», farce bruxelloise du XVIIe siiècle.
« Ick kack schier in mijn broeck » (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle). Kackhuys voulait dire « basse chambre ». Certains, surtout chez les paysans, avaient deux lunettes.
« Men sou op beyde wel mijn bril van ’t kackhuys setten », dans la « tirade des nez » de « Lemmen met sijn Neus», farce bruxelloise du XVIIe siècle. « Hij heeft twee hollen, kijckt, als ’t kackhuys van een boer. » (Idem)
KAKKENECHKE : dernier-né d’une nichée ; par extension : le préféré, le petit gâté, celui à qui on permet beaucoup de choses.
Schuermans : Kaggernestje : jongste vogelken in het nest.
Kakkenest, kakkenestje : le jeune oiseau qui est le dernier sorti de son œuf, et qui est plus faible que les autres, moins habile à prendre son envol.
KAKOE5T (kinkhoest) : coqueluche.
A Mons : quintousse. (Q) fkintouÿ
KALLE (koud) zaain : être mort.
KAN : peut.
Het kan er van af : on peut se permettre cette
dépense, c’est-à-dire que la somme nécessaire à la dépense peut être distraite de l’avoir.
Het kan nemi op : Il ne parvient pas à dépenser tout ce qu’il a. Se dit d’un prodigue.
KANT : côté.
Van kant moeke : faire disparaître, subtiliser, se tuer.
KAPIKKELS : jambes.
Kapikkelle : fuire à toutes jambes.
KAPOT : détruit, cassé, abîmé, mort, terme de jeu de cartes.
« Eemand kapot scheete » : tirer sur quelqu’un et le tuer.
Schuermans : Kapot zijn : rot, bedorven, versleten zijn.
Kapot gaan : gaan sterven, bederven, rotten.
« Dat raeckt sijn Sones Neus capot » : le nez de son fils se casse (de « Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siiècle).
Kapotmoêke : assassiner.
KAPPER : goutte de genièvre.
KAPSTOKNEUS (nez en porte-manteau) : Juif. KARIELSTEEN : brique.
’t Es percees en ker karielstiene da’s oeitgeete (on
dirait un tombereau de briques qu’on décharge) : se dit de quelqu’un laissant échapper un fort bruit incongru.
KARTACHE : grosse bille, grosse tête.
Kartachespel : jeu des cartaches.
- Van Vreckhom dit ceci : « Cardache, de l’espagnol carda : réprimandé, semonce, exclamation du Marollien pour annoncer qu’il a reçu ou qu’il va recevoir un reproche : cardache ! ».
Karlachekop : grosse tête.
Kartachuuge : yeux en boules de loto.
Schuermans : kartets, kartetsch.
Du « Dictionnaire du Wallon de Mons » par J. Sigart : « Kartache : biscaïen. Tirer à kartache : tirer à mitraille. De l’allemand : kartatsche : cartouche à mitraille». Au XVIIIe siècle, à Bruxelles: « car- taage » : biscaïen («Chronique de Galesloot » – Tome I – page 62.
KARTRUUS : Chartreux.
De Kartruuzestroet : rue des Chartreux, dont une partie s’appelait jadis : rue Finquet, ou Vinquette (de winket, ou guichet) parce qu’une poterne existait dans les remparts.
LLAP
KAS : caisse.
Dei mei ei kas (cette femme a une caisse) : cette femme est enceinte.
L’équivalent bruxellois de « en dat in à kas » (littéralement : et ça dans ta caisse !) est : « attrape, cocher ! ».
Son origine me paraît devoir être cherchée dans la coutume immémoriale qui consiste à recueillir dans une « caisse » (coffre, tirelire, cagnotte) de l’argent ou tous autres objets précieux.
Le sens premier de l’expression aurait ainsi — comme il arrive souvent — évolué du domaine réel vers le figuré. Les locutions pittoresques de l’espèce fourmillent dans le langage populaire : elles lui confèrent son incomparable saveur. (Eug. Plétinckx, «Pourquoi Pas?», septembre 1937.)
In het kaske hangen (être pendu dans la petite caisse) : avoir l’annonce de son mariage affichée dans une caisse vitrée devant la maison communale. In zen kas kraaige : être enguirlandé. Se dit aussi dans la forme dialectale : recevoir dans sa caisse. Hij lupt mè en horlogekas op zenne rugge (il marche avec une horloge-armoire sur le dos): il est bossu.
De moeize zaain duud in de kas (les souris sont mortes dans l’armoire) : il n’y a plus rien à manger.
KASEMAT (casemate) : lit, logis, endroit.
No sen kasemat : aller dormir.
« El vos y dit… sortons de c’ casematt » (Coco Lulu).
KASSA : chaussée.
Jef van de kassâ : sobriquet du bourgmestre baron Joseph vande Meulebroeck qui habitait la chaussée d’Anvers.
Uustkassa.
— Le peuple désignait sous le nom de « Oost Kassâ » (chaussée de l’Est) le Marché-aux-Herbes et la rue de la Madeleine, parce que ces rues faisaient partie de la vieille chaussée qui, seule, au XVIIIe siècle, mettait en communication les Etangs- Noirs avec les étangs d’Ixelles. C’est l’ancienne
«voie ducale» qui allait de la Porte du Coudenberg (ou de Namur), à la Porte de Flandre.
KASSAITJE : pâquerette.
Au milieu du XVIIe siècle, ainsi qu’en témoignent les farces de l’époque, le peuple disait : « kar- sauw ».
KASSOET : congé imposé (lock-out?). De « kas uit » (plus de caisse).
KASSUUL : casserole.
Kassuule : manger beaucoup et goulûment.
Luppe Kassuul : surnom d’un type bruxellois, bien connu jadis comme « veuvechter» (voir ce mot). Pour plus de détails sur lui, consulter «Van Ketjes en Kiekefretters » par C. Verhavert.
KASTAR : type fort, type à la hauteur, quelqu’un qui est malin, qui tire bien son plan (on dit aussi « crack », comme en anglais).
KAT : chat.
Kattepuuten (kattepoten) : vilaine écriture, gribouillage.
Katche : mot que lancent les enfants, en l’accompagnant d’un coup dans le dos d’un condisciple qu’ils ont réussi à attraper et qui, par ce fait « y est» à son tour. Dans la nomenclature des jeux d’enfants, on trouve ainsi « kachette-courir, kachet- te-plus-haut, kachette-cacher », etc. (Voir catche.) De kat goet op de koor zitte (le chat va s’asseoir à la cour) : cela va barder.
’k Zo er men kat van spreike (j’en parlerais à mon chat) : je ne marche pas.
Hij heit en careur van en afgestripte kat (il a la
carrure d’un chat écorché) : il est très étroit de carrure.
Kat in de pendul : la dispute est dans le ménage. (A Ath, en picard : le chat est dans l’horloge.)
KATEIRE : rhume. Vient de catarrhe.
KATIJF : mot du langage bruxellois du XVIe siècle, aujourd’hui disparu, et qui signifiait « misérable », peut-être « sukkeleir ».
On le trouve dans la pièce comique « De Bervoete Bruers », représentée à Bruxelles en 1559. Karel Stallaert qui a étudié le texte de cette pièce, traduit «arm katyf» par «arme ellendeling ».
KATOEN : coton.
« Mee Katoen » Kom merge noon » We zullen en pintche drinken » We zullen en pintche doên ! »
- Van Vreckhom a noté que « katoen » venant du russe gatov : fini, est le cri poussé dans les ateliers lorsque la besogne a cessé (?).
Katoon geive ou donner du coton : activer la besogne.
KATROL : poulie.
KATTEKOP : bigot, dévot, calotin.
KAVAAIERE : se cavaler.
KAZAKKE: médire, commérer.
En kazakske passe (essayer un casaquin) : médire d’autrui, le blâmer.
KEEK : poule.
Keekefretters (mangeurs de poulets) : surnom des Bruxellois. D’après la tradition, ce surnom tirerait son origine de la bataille de Bastweiler, le 21 août 1371, entre les Bruxellois, commandés par Wences- las de Luxembourg, et les troupes du duc de Juliers, bataille qui aux dires de Froissart fut perdue par les Brabançons à cause des Bruxellois qui « autour du duc estaient sur les champs montés, les aulcuns à cheval et leurs valets derrière eux qui portaient flacons et bouteilles de vin, troussés à leurs selles, et aussi parmi ce, fourages et postez de saumon, de truites et d’anguilles, enveloppés de belles petites tovailles (serviettes) et empeschaient là durement ces gens la place de leurs chevaux, tant qu’on se pouvait aider de nul côté ». Parmi le butin pris par les hommes du duc de Juliers se trouvaient nombre de poulardes de Bruxelles.
En souvenir de cette journée, des statues de marmitons, armés de la broche à poularde, décorèrent pendant longtemps la porte de Flandre. Il y en a sur la Maison du Roi.
Kiekebich (viande de poulet) : celui qui ne compte pas dans un jeu, la chair de poule.
Kiekebeust (kiek, borst) : poitrine de poulet, bréchet. Se dit de quelqu’un qui a la poitrine étriquée et saillante.
Keek mé en lam gat (poule au derrière paralysé) : une poule qui ne pond pas.
Keekemitches : abats de volaille avec lesquels on fait de la soupe.
Keekuug : orgelet.
KEEL : sarrau.
Un vieux couplet (une « dontche ») :
In onzen taaid Was t en ander leive,
En in da taaid
Drége me nen blâve keel,
En as ‘k was joeng Leet’k men ploeime vleege !
(Dans notre temps — C’était une autre vie — En ce temps — Nous portions un sarrau bleu — Quand j’étais jeune — Je laissais voler mes plumes !)
KEIGEL (kegel) : quille, fou.
KEIGELS : les jambes.
KEIR : charrette.
Stuutkeir : charrette à bras.
KEIRE (keren) : balayer.
Stroetkeirder (straatkeerder) : balayeur de rues, ou, comme on dit chez nous « écrivain à la grosse plume» ou «archiviste»!
KEIS : fromage, argent.
Ettekeis (fromage dur) : fromage de Bruxelles. Pottekeis : fromage composé mi-partie de fromage de Bruxelles, mi-partie de fromage blanc.
Plattekeis : fromage blanc.
Keiskop : Hollandais.
‘Keis in de valies : beaucoup d’argent.
SCHeupkeis (de scheppen : puiser, ramasser à la cuiller), appelé à Bruxelles fromage de curé.
A noter que l’ettekeis est désigné aussi sous le nom de stinkende keis (fromage puant) ou stinkende tout court.
KEITEL : chaudron.
Hij ei ne slag op zene keitel (il a un coup sur son chaudron) : son esprit est dérangé. Keitel figure ici la tête, et le cerveau.
KEIZE : rouler, flouer, arranger.
KESSEMIS (Kerstmis) : Noël).
KETJE : gamin de Bruxelles, jeune Marollien.
« Ah qu’on est fier d’être un ketje de Bruxelles » Qu’on est fier d’être un vrai Marollien ! » (Chansons du bon vieux temps, Ernest Verhaegen.) Proviendrait de « kerel » (gaillard, compagnon) dont le diminutif est « kereltje » ou « kerletje ».
« L’Echo de la Presse » (paraissant à Bruxelles pendant l’occupation allemande de 1914-1918) donnait du ketje la description suivante : « La mise du Marollien (ou ketje) est très recherchée : un pantalon collant, un veston très court, de petits souliers parfois vernis, s’il vous plaît ! Une cravate de couleur très vive. Sa coiffure se compose d’une boucle massive qu’il colle sur ses tempes en accroche-cœur, le restant des cheveux rabattus sur l’oreille et plantureusement saturés de pommade sur le choix de laquelle il se montre très difficile. Enfin, comme couvre-chef favori, il campe sur l’oreille, avec un chic épatant une casquette à carreaux, ce qui lui donne cet air rageur et casseur qu’il affectionne par-dessus tout ».
« Quetje Corbeau » Sul tek d’un arbre stampé. »
(Fable de Quetje Corbaud, par Coco Lulu, alias Victor Lefèvre.)
Ketjesschool : jardin d’enfants.
KEUBBER : pigeon mâle.
Par extension : mari, amant.
KEUTELE : chatouiller.
Van Vreckhom dit que cela vient du verbe espagnol cosquillar (chatouiller).
In zene neus keutele : dépendre les « cadres » du nez.
KEUTERHOEK : tisonnier.
KEUTSE (koorts) : fièvre.
Rooie keutse (fièvre rouge) : scarlatine.
KIND : enfant.
Kinderoge (g comme dans Georges) : enfantin. Kinderogerâ : enfantillage.
Schuermans : Kinderage : kinderachtig mens.
E kind vreug oeit de weg (un gosse tôt hors du chemin) : enfant qui a grandi rapidement et qui ne donne plus de soucis.
KINNE : menton.
Kinnebakkes : menton en galoche.
Faire kinnebotche : pincer par jeu le menton d’un enfant.
KIPKAP : déchêts de viande réduits en morceaux et enrobés dans de la gelée.
Faire du kipkap de quelqu’un : le rosser.
A Bruxelles on dit aussi « vlees dee ni kan hange » (viande qui ne peut être accrochée).
Le mot « kipkap » est inconnu dans certaines parties éloignées de faubourgs, notamment dans le fond d’Uccle, où on emploie le mot courant à Linkebeek « koen ».
Schuermans : kipkap : ondereen gekapt vleesch, als : licht, lever, hert, enz.
Le mot « kip-kap » est une onomatopée rappelant que la viande a été hachée menu avant d’être enrobée dans sa gelée au vinaigre.
J’ai retrouvé, dans un luxueux livret-programme, un air chanté par Esther Deltenre et Ambreville, à la gloire du « Kip-Kap national » :
On voit des gens qui sont plats comme une scholle, Tels Monsieur Buis ou m’sieu Hector Denis ; D’autres qui sont gais comm’… le Protocole Et constipés… tel Monsieur Vert-de-Gris !
D’autres, chevaliers de la Witte Figure,
Comme M’sieu de Smet, ont la danse de Saint-Guy… Tout ça, Messieurs, provient d’Ia nourriture.
Et le remède est simple… le voici :
Au lieu de bouffer des boîtes américaines,
Ousqu’y a didans du spitz et du chival,
Si vous voulez gagner une gross’ bedaine.
Tu faut manger du kip-kap national !
Ne sommes-nous pas une réclame vivante ?
On peut prober, tout est sain là-dedans…
Un autre exemple : les vieux d’mil-huit-cent-trente Ne semblent-ils pas rajeunir tous les ans ?
C’est des lapins dont le pays s’honore,
Ils sont toujours debout, toujours gaillards !
Dans deux cents ans, ils s’montreront encore !
J’ôte mon chapeau quand je vois ces castors !
Ils n’bouffent jamais des boîtes américaines Ils n’ont jamais fourré dans leur bedaine Que le bloempanch et l’kip-kap national ! »
KLACH (klets) : fouet, coup, exclamation en donnant un coup.
Klachdop : sabot, toupie actionné avec un fouet. Klache : donner des coups de fouet, jeter avec violence, faire jaillir de l’eau.
Klacht de deu toô ! (Fermez la porte !): café faible.
KLACHKOP (kletskop) : chauve.
Provient du flamand kletskop qui signifie : tête teigneuse.
La véritable traduction de chauve en flamand est : kaalkop.
Synonymes en dialecte bruxellois : blits, moen (lune), litsbol, lits, billardbol, halve moen (demi-lune).
Hij heit e klachkop tôt on ze gat (il a une bille de billard jusqu’à son derrière) : il est tout à fait chauve.
KLAP : caquet.
K!ap vé de voek (parler pour faire bailler) : propos superflus.
Klapsel : bavardage fatiguant.
Dei mei ei veul klapsel : cette commère a la langue bien pendue.
Klap tegen me gat, mene kop doo zier : parlez à mon postérieur, ma tête me fait mal. Expression par laquelle on dit à quelqu’un qu’on en a assez de l’entendre parler.
Klappe : parler, bavarder.
Klappe zaain gien oude (parler n’est pas de l’argent) : ça ne coûte rien, cela n’engage à rien.
KLET : coup, gifle, ban !
KLINKUUG : clin d’œil.
KLIPPER : « Les Bruxellois de 1870», m’a dit M. Meyn- kerken, « se rappellent qu’au temps de leur enfance, la Grand-Place était fréquentée, le dimanche matin, par des marchands de « klippers », couques rectangulaires faites d’une sorte de pain d’épices sec et léger. Ils portaient sur la poitrine une caissette retenue par une sangle. Cette caissette était divisée dans le sens de la largeur en deux parties : l’une rectangulaire contenant un cornet et un dé, l’autre, carrée, contenant les «klippers». Pour cinq centimes, on lançait le dé dans la case et pour chaque point de dé on recevait un „klipper ». »
Le marchand de «klippers» était appelé «krijmer» (kramer : marchand ambulant). Son petit commerce finit par être interdit par la police, parce qu’il permettait à des chalands de se servir de sa caisse pour jouer aux dés pour de l’argent.
KLODDENE : défroques, loques.
Klodderhond : loqueteux.
Dans son « Glossaire de l’Argot », M. P. Hermant
donne « kloddereer, klodderes : marchand, marchande de loques ».
Da zaain allemoê kloddene : ce sont des sottises.
KLOECHE: secouer, agiter.
Les Bruxellois ont fait de « kloeche » le verbe francisé « doucher » : secouer (en wallon : wachotter). Fleske kloeche : secouer la petite bouteille contenant de l’eau et de la réglisse, comme le faisaient les gosses. L’un demandait à l’autre : Lotch ma neki zoeige (laisse-moi sucer un peu).
KLOEGE (klagen) : se plaindre, jérémier.
Lot de kloeger mo los en geift de stoeffer e stuk bruud (proverbe) : laissez faire celui qui se plaint, et donnez un morceau de pain au vantard.
Hij kloegt goête in de stiene (Il se plaint tellement qu’il creuse des trous dans les pierres) : c’est un geignard.
Geift de stoeffer e stuk bruut De kloeger hei giene nuut !
Donnez un morceau de pain au vantard ; celui qui se plaint n’en a pas besoin.
KLOP : coup.
Hij hei ne klop van de meule (il a un coup du moulin) : il divague.
Kloppen : frapper, battre, vaincre.
Le vocabulaire de la gamme des coups est très varié. Voici quelques synonymes de « klop » relevés par A. De Cort : plamoster, toêt, vaaig, vlam, oever- rechte, mossel, caramel, fotje, klach, voenk, kalich, zwollem, boks, lits, pataat, smeer, pretje, figot, smoster, bloes, ommelet, kortelet.
Mé vol geklop : avec tout le cérémonial et tout le tam-tam.
KLOT : morceau épais et lourd, motte, caillot.
Klot boôter : motte de beurre.
KLUUTE : testicules.
’t Es no de kluute : c’est raté, c’est cassé, c’est abîmé.
Kluut: propre à rien, imbécile.
Kluute : embêter, taquiner.
Hij heit vossekluute g’eite (il a manné dM rnuillns de renard) : c’est un rusé
Het geluuf es na toCH no de kluute : la foi n’existe, plus, plus rien ne va plus.
As den oeil stoêt, dan zakt het verstand in de kluute : amour, amour, quand tu nous tiens, adieu prudence.
KNEUDDELE : pâtisserie faite avec la farine, du lait, des raisins, cuits à l’eau bouillante. Aussi : couques de Suisse.
KNEUL: petit homme, petit garçon.
Toffe kneul : beau type.
Du « Woordenboek van Bargoensch » d’I. Teirlinck : knul, m. kind, jongen, zoon, vriend, makker.
KNEURRE (du flamand knor) : cartillage.
Kneurre se dit aussi de la viande dure, peu appétissante.
KNOEFFELEIR : chipoteur, bricoleur.
KNOP : bouton.
’t Es no de knoppe : c’est raté, c’est fichu, c’est abîmé.
Mé knoppe betoêle (payer avec des boutons) : être à sec.
Giene knop bezitte : ne rien posséder, ne pas avoir un rouge liard.
KNOPSGAT (boutonnière).
’t Es famile van ’t zeivenste knopsgat (c’est de la famille de la septième boutonnière) : ce sont des parents très éloignés.
KNOTSIFON : exclamation signifiant patatras ! Egalement épithète injurieuse.
KNUUP : nœud.
Knupt da on ien (nouez cela ensemble) : que concluez-vous de cela ? C’est impossible ! Cela n’a ni queue ni tête.
Hij valt in e knuup : il s’affaisse.
KOCHE : (kuisen) : nettoyer.
Kochvrâ : femme à la journée.
Afkoche : bâcler un travail.
KOCHEBET : femme malpropre, pas lavée, non peignée, non mouchée.
KOECH (koefs) : voiture, fiacre, carrosse, lit, coche. Par koech raaie : rouler en voiture.
Zen smool raait par koech (sa gueule roule en carrosse) : il se régale.
Met de leste koech raaie (se promener dans la dernière voiture) : être enterré.
Hanne van de koech ! : Bas les pattes I
De voit nen hier oeit zen koech (un monsieur tombe de sa voiture) : quelque chose d’étonnant arrive.
Zottekoech : voiture servant au transport des
aliénés. La dernière se trouvait à l’hôpital St-Jean. Deevekoech : panier à salade.
Kingerkoech : voiture d’enfant.
Hanne van de koech, ’z es ves gesCHildert (bas les pattes, la voiture est fraîchement peinte) : dit par une maman à son gosse quand celui-ci met un doigt dans la crème au la confiture. Dit aussi par une fille sage lorsque son galant devient trop entreprenant.
KOEK : joue.
Koekslag : partie de son salaire que l’ouvrier ne remet pas à sa femme.
Koekslag doôn : garder pour soi une partie de son salaire.
Dans son étude « Enkele verzen van « Die Hexe » folkloristisch toegelicht» (De Brabantsche Folklore n° 111-112), le professeur Dr J. Gessler a mentionné « iets op zijn kaak slaan ». Ce proverbe a été étudié par le Dr J. Grauls dans son étude « Les Proverbes de Pieter Bruegel, le Vieux ».
« Hij speelt op die kake » : il s’approprie frauduleusement quelque chose. On dit maintenant dans la Néerlande du Sud : « iets op zijn kaak slaan : retenir quelque chose ».
Comme tant d’autres, ce proverbe figure dans le tableau de Bruegel, le Vieux, au Kaiser Friedrich Muséum de Berlin. On y voit représenté un musicien jouant de la vièle à l’étage d’un pilori du type de Braine-le-Château.
« Bruegel, dit le Dr Grauls, fait un jeu de mots sur „ kaak : pilori ” et « kaak : joue »
Reste à trouver le rôle que remplit le mot « joue » dans ce proverbe. Est-ce une allusion à certains animaux qui dissimulent des provisions dans leurs bajoues ou leur bec ? Je suis tenté de le croire, car à Bruxelles, le verbe « slagen » (sloege) est souvent employé pour « mettre », comme dans « eet in zen botte sloege », c’est-à-dire « s’en mettre plein dans la panse ».
« Iets op zijne kaak slaan » : zich iets ongeoorloofds aanmatigen (Schuermans).
Dans son livre « In onze goedige Stede », Cypriaan Verhavert a consacré un curieux chapitre à « Koek- slag », qu’il explique par «s’emparer de quelque chose à la dérobée, rouler quelqu’un sans qu’il s’en rende compte. Un mari qui gagne plus d’argent qu’il ne le déclare à son épouse et qui cache le surplus, fait du ” koekslag « ».
Le proverbe dit « ’n bekke veul koekslag is nog verre van stelen » : un peu de « koekslag » est loin d’être du vol.
KOEKENBAK : crêpe.
« Gooie werme koekebakke ! » : cri d’une vendeuse de crêpes aux Vieux-Marché.
’t Es percees ne mislukte koekenbak (on dirait une crêpe manquée) : c’est raté, c’est moche, c’est un avorton.
KOEKOEK (coucou).
t’ Es allemoe koekoek iene zang : c’est tout pareil.
KOEMER (kamer) : chambre, pièce.
Koemerenbosch : Bois de la Cambre.
Ter koemere : nom du dépôt de mendicité, maintenant disparu, de la Cambre.
KOENKELE (foenkele) : brouillamini, tripotage, aussi koenkelfoos.
KOERSER (coursier) : bon cheval.
KOMMANDE : s’emploie pour désigner quelque chose d’énorme.
Es dat en kommande ! : quelle grosse chose !
KOMME (komen) : venir.
Veu de pinne komme : se montrer, apparaître.
KONT : postérieur, derrière.
’k lal op a kont sloêge ! dit une mère à son enfant qu’elle menace d’une fessée.
KOOIELEUBBER : celui qui allait, à l’abattoir, traire gratuitement, les vaches destinées à être abattues. Le kooieleubber s’adjugeait aussi, dans les échau- doirs, les mamelles des vaches, qu’il vendait aux étudiants. Ces derniers s’en servaient pour jouer des tours pendables aux bourgeois.
KOP : tête.
Ik kan er gien kop of gat oen kraaige : je n’y vois ni tête ni derrière, c’est à n’y rien comprendre ! Kop en gat (tête et derrière) : homme bedonnant. En Flandre, d’un petit homme, on dit « ’t is maar hoofd en gat ».
Kopkedeuzend (qui a mille têtes) : grosse tête.
Kop af : mots que dit le Bruxellois pour donner plus de force à une assertion. Signifie : vous pouvez me trancher la tête si je ne dis pas la vérité.
KOPER : cuivre.
Koperdeef (voleur de cuivre) : qui joue du bombar- don. (Instrument de musique.)
Koper koche (nettoyer les cuivres) : sonner aux portes comme font les petits voyous.
KORE : seigle.
Koerendoef : pain de seigle.
KORENTEKOEK : couque aux raisins secs.
«Au boulanger du coin (den bakker op den hoek) Il s’en va demander une « korentekoek ».
(« La Corinthe inabordable », par Jongsk’. « Le Sifflet», 13 mars 1904.)
Hij heit er mo veer en ne korentekoek : se dit d’un enfant qui n’a pas encore cinq ans.
KORTELET : côtelette, coup.
KOTEER : quartier dans le sens d’un appartement de deux pièces.
Quartier d’une ville « Tussen ’t kottier van den Gruuten Zoevel, de Marollen en den Aa Met… » (C. Verhavert).
KOUS (kous) : bas.
Kousenband : jarretière. Espace entre le niveau de la bière dans un verre et les bords. Le mot est employé souvent dans les cafés, par les clients qui
recommandent au patron ou à la patronne « de ne pas mettre un kousenband » formé par l’abondance de mousse.
Hij zit in de gelapte kous (il est dans le bas rassar- ci) : il est marié.
KOZZE : cousin.
KRAAIT (krijt) : craie.
Mé dobbel kraait schraaive (écrire à la double craie) : compter plus cher. Vient de ce que le patron de café chez qui on foisait du «pouf» (des dettes) inscrivait en double les consommations prises.
KRABBE : crabe (voir crappe), aussi quelqu’un qui va de travers (un cron, une cronte ou crombe, ne krumme ou en krumme).
KRABBER : un incapable, un raté, un bon à rien.
- Teirlinck dit que dans l’argot des voleurs un krabber est également un écrivain, (peut-être parce que sa plume gratte le papier, la traduction de krabber dans cette acception serait donc littéralement gratte-papier).
- Verhavert, dans « Onze Goedige Stede » a consacré une étude au mot « krabber » et à ses acceptions.
Avare (celui qui gratte, qui racle ses sous), celui que les vieux Bruxellois appelaient « arpaga », corruption d’Harpagon, personnage de Molière.
KRAMACHELE (ch guttural) : vivre péniblement à cause d’une maladie.
KramaCHeleir : cacochyme.
Les enfants l’emploient dans le sens de grognon âve kramaCHeleir ! (vieux bougon). Dans ce sens, le mot correspond au néerlandais « brombeer ».
KREOLTCHE : enfant de chœur (koorknaap). Schuermans : Koraal is de naam van de koorknapen of misdieners.
KRÈTE : taquiner, pleurer.
Krètzak : taquin.
« Il y avait aux Augustins de Bruxelles, une chapelle avec un tableau représentant saint Jean dans l’huile bouillante. On l’appelait saint Jean de «krijter» (saint Jean le pleureur). Les mères dont les enfants pleuraient beaucoup venaient y faire réciter par un des moines l’évangile sur la tête de
leur marmot. Au prétendu château de César, à Louvain, existait une chapelle dédiée à saint Jean qui jouissait du même privilège. » (Quelques vieilles coutumes bruxelloise. L’Illustration européenne. 10 juillet 1880.)
KRIEK : bière bruxelloise qui se fabrique en juillet par adjonction de 60 kg de cerises de Schaerbeek à tête plate, par tonneau de 250 litres de gueuze.
KRICHUUGE : yeux chassieux.
’s Vraaidoegs doen dei luxkeuke, dra saute patate en en truite mé krichuuge (le vendredi ils font de la cuisine de luxe : trois sortes de patates et une truite aux yeux chassieux — un sauret) : se dit pour se moquer de vantards qui n’ont pas les moyens de se payer des choses coûteuses.
KRIJMER (kramer) : marchand ambulant fréquentant les marchés et les foires. Quelqu’un qui a une telle veine au jeu qu’il est taxé d’« arrangeur ». Bonneteur. Les « krijmers », la plupart du temps malhonnêtes, sont traqués par la police. Il ne faut pas les confondre avec les honnêtes marchands ou « marktkramers ».
A Bruxelles, vers la fin du XIXe siècle, le « krijmer» était plus spécialement un marchand de « klippers » (voir ce mot).
KRIJMERSLATIJN (kramerslatijn), prononcé parfois « krijmelslataain » : langage incompréhensible.
Le «krijmer» ou marchand ambulant agrémente souvent son boniment de soi-disant mots latins tels que « Okus pokus pax ».
Aussi : argot des bonneteurs. Il fut déjà utilisé, pour correspondre avec ses complices, par Jan de Lichte qui terrorisait la région de la Dendre et surtout le pays d’Alost où ce redoutable bandit finit par être roué vif.
KROEIPE (kruipen) : ramper.
Krapt er van onder ! : fichez le camp !
KROEKEBINTCHE : ennui, avatar, contretemps, pépin, cartillage dans la viande servie à table.
KROEKEBAAIZE : myrtilles.
KROËM (de «kramer» : marchand forain qui débite des mensonges) : espiègle.
Kroêmerâ : Voici un mot curieux. « Kroêmerâ » appliqué à un enfant signifie espièglerie. Si on dit d’une grande personne qu’elle est « vol kroêmerâ » on exprime qu’elle est remplie de méchanceté. (Voir « krijmerslataain.)
KROÊME : taquiner, comme krète.
KROEWOEGEL (kruiwagen) : brouette.
Do kan ne kroewoegel tusse (il peut y passer une brouette) : se dit de quelqu’un qui a les jambes en cerceau.
KROL : boucle, « crolle ».
Ge zaait gekrolt op aan kop gelak e verke on
ze gat : tu es crollé sur la tête comme un cochon à son derrière, se dit de quelqu’un dont quelques rares mèches frisent et se dressent en tire-bouchon comme la queue d’un cochon.
KROT : dèche, fiente, friandise (crotte de Hal), chérie. In de krot zaain : être dans la dèche.
Krotter : pouilleux (désargenté).
- Teirlinck écrit : Krot (vrouwelijk), armoede, gebrek. Frans : crotte. In de volkstaal overgebracht. Krottig : kaal, slecht, arm.
Krot et Cie : bluffeur sans le sou.
KRUM et cron (cronte) : courbé, de travers.
Krumme : bancal.
De krumme, le cron, sobriquet employé souvent. Insultes lancées aux « crons » : krumhol, krumzak, krumme bidon, krummekut, etc.
Le 21 juillet 1860, jour de l’abolition des octrois, la foule, manifestant sa joie à Bruxelles, s’en prit à un pauvre bancal que des zwanzeurs poursuivirent du cri mille fois répété : « Krumme, de rechten zijn af ! », ce qui est un affreux calembour (Bancal, les droits sont supprimés !).
KUUL (kool) : chou, naïf.
Kuulekapper : sobriquet donné au Saint-Gillois. La plupart des auteurs rattachent ce surnom à la profession de maraîcher qu’exerçaient ceux d’Op- Brussel. Nous ne sommes pas de leur avis. Nous lisons, dans « De Ghedwonghe Griet», farce bruxelloise écrite par Joan De Grieck, au milieu du XVIIIe siècle, une scène au cours de laquelle un pleutre, « schijte-broeck » se donne des allures de
matamore en pourfendant un chou « Daer sal een pickel-block staen met een gheslote kool op… Hij kap de kool met sijn sabel in twee stukken…». Ne s’agirait-il pas plutôt d’un terme de dérision donné aux Saint-Gillois par leurs éternels rivaux des Marolles ?
’t Zaain dikke kuule (ce sont de gros choux) : c’est important.
KWAAIT : quitte.
Ik ben men cense kwaait : (je suis quitte de mes sous) on m’a volé mon argent, j’ai perdu mon argent.
KWAK : verre de liqueur, coup porté avec le côté du pied à celui «qui y est» au jeu de saute-mouton. « Une bonne kwak » : un bon verre.
« In de Kwak » : enseigne d’un vieux cabaret qui existait encore à Woluwe-Saint-Lambert vers 1937.
KWAKSMOOL : gueule à gouttes : buveur, ivrogne.
KWAKKELE : palpiter, trembler.
Il figure dans la pièce bruxelloise « De Bervoete Brueurs), représentée en 1559 «van vruechden quackelt myn lever en longere ». Stallaert qui a étudié cette pièce traduit « quackelt » par « pop- pelt ».
KWAKKELGAT : déhanché, quelqu’un qui, par suite d’infirmité ou de vieillesse, fait osciller son postérieur en marchant.
(De kwakkel, en néerlandais : kwartel : caille ? Cf. anglais : quaker : trembleur.)
KWAKKELSTROÊT : rue des Cailles (devenue la rue des Denrées) et où, jadis, habitaient des prostituées. La Cité Administrative l’a fait disparaître.
KWAKSALVER ou kwakkeleir (kwakzalver) : charlatan, rebouteux, guérisseur.
KWAST : nœud, durillon. Au sens figuré : un fat, un sot, un pédant. Insultant à Bruxelles.
KWEBUS : fou.
« In het Brusselsche dialekt : « da’s ne kwibus ! » beteekent : ’n half-onnoozele. (C. Verhavert.)
KWEZEL : dévote, hypocrite, béguine.
Lisons ce qu’écrivait « Pourquoi Pas ? » sur ce mot, dans son numéro du 11 août 1910: «La kwezel,
c’est la bigote, cultivant la dévotion comme un vice et rasant les murs pour se rendre à l’église, comme quand on va dans un mauvais lieu. Elle est souvent médisante. Elle dénature avec un malin plaisir tous les incidents de la vie de ses voisins et de ses proches. Tout en distribuant aux enfants des « bel- lekes » (images) tirées de son livre de prières, elle calomnie avec onction et diffame avec piété. Aussi, quand il lui arrive de mourir, on ne manque pas de dire, dans le voisinage, qu’elle a succombé à un empoisonnement, vu que, par mégarde, elle a avalé sa langue.
» Il ne faut pas confondre la „ kwezel ” avec la „ zieptrintje ”, la petite vieille bien propre, aux rides méticuleusement lavées, savonnées jusqu’au tuf ; la „ kwezel ” est parfois une „ zieptrintje » ; mais la „ zieptrintje ” répond souvent au nom de „Mamoiselle Zozefine » ; pour la „ kwezel », ça va plutôt dans les „ Pelazie » ou dans les „ Madame Emerââce ” ».
KWISPEL : fou.
Un vieux Bruxellois, M. Mijnkercken m’a dit que « kwispel » désigne le gland — ou la «floche» — du bonnet de police.
KWOELIG VALLE (kwalijk vallen) : tomber en syncope. Kwoelig opneime : prendre quelque chose de mauvaise part.
LAAIFSTUK : morceau de prédilection d’un chanteur. Hold a laaifstuk op : entonnez votre air favori.
LAAIK (lijk) : cadavre.
Ze zaain doe met ’t laaik (les voici qui arrivent avec la dépouille mortelle) : se dit quand une chose désagréable arrive à un moment tout à fait inopportun.
LAAISEBET (Elisabeth ?) : araignée faucheuse à longues pattes qu’on appelle « grand-père » au pays wallon. Personne lente.
LABBAAI : Mot aujourd’hui disparu, mais très employé jadis.
« Les boulangers bruxellois vendaient du « labbay- brood », une sorte de couque qui coûtait une « lab- bay » qui, d’après Kiliaan valait 15 mites. La « lab- bayen » aurait été une réunion pendant laquelle on bavardait en buvant.» (Belgisch Muséum, 1837.) « Labben » dériverait de « slobberen »: boire comme un chien. « Slobber » serait apparenté à « labbe- kak » (voir ce mot).
Schuermans : « labbaai : eene samenkomst van
mans- en vrouwspersoonen, waar men, onder voor- wendsel van samen te werken, als : spinnen, naaien, enz, om het licht te sparen, zich daarna vermaakte ».
LABBEKAK : poltron, personne timorée, couillon. Schuermans écrit : « Labbekak : iemand die zich voor laffe kinderachtigheid en weekhartigheid onderscheidt, die flodderend of vleiend spreekt om iets te bekomen ».
Voyez « leubbe » et « labbaai ».
LABBERE : boire salement et en faisant du bruit, laper. Labberdâ : lavasse.
LACHE : rire.
LaCHsmool : qui rit facilement et à tout propos. Opgepast en ni gelaCHe : Maintenant sérieux, hein!
LAFOED (lafaard) : lâche, couard.
LAGEDDER : type.
« Ah bien, ces deuie Sinjoorkes avec son laqedder de garçon, un appelé Teuntje…» («La Noël du Petit Anarchiste », par Bazoef, dans « Le Diable au Corps», 24-12-1893.)
LAM : paralysé. Lam en loe : plus que fainéant.
LAMBIC : bière bruxelloise.
Kriek-lambic : lambic aux cerises.
Gueuze-lambic.
Etymologie incertaine. Ce mot dérive-t-il d’« alambic », appareil utilisé en brasserie? «Une autre solution, écrit M. Gironino, dans le « Bulletin de l’Union Civique», qui ne repose que sur une vague assonance voudrait, en vain, rattacher le nom d’une bière bruxelloise au nom de ce bourg brabançon : Lembeek. »
(Voir aussi faro, gueuze, kriek).
LAMEIR (lammeer) : commère, bavard.
Lameire : commérer.
LAMMEKEZOOT : sorte de hareng qu’on fait cuire dans la poêle.
Lammekezoot karakter : bon caractère allant jusqu’à être bonasse.
LANDMEITER (landmeter) : géomètre, pied long.
Hii ei landmeiters : il a de longs pieds. Probablement parce que jadis, c’est à l’aide du pied qu’on mesurait les dimensions de terrains.
LANGE |
personne de haute taille. J’ai entendu des gamins de Molenbeek crier derrière un des leurs, très grand : « Langeû ! Langeû ! Mak on a gat hangeû ! Vé vischkes te vangeû ! ». (Long, long, puis-je me pendre à ton derrière, pour pêcher de petits poissons ?) Lange weik veû Sinche (longue semaine avant la Pentecôte) : personne grande.
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LANTEIR |
(lantaarn) : reverbère. Lanteireman : allumeur de réverbères. Peke komt, Peke komt Peke, de lanteireman, Vroeg en laat, op de straat Om te zien hoe alles gaat. (A. De Cort.)
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LAP |
morceau d’étoffe, exclamation, coup. I. Teirlinck dit « Spottender wijze zegt men nog lap voor kleedingstuk ». Getrouwde lap : homme marié ; « Letch op, ’t es ne getrouwde lap, maske » (Attention, fillette, il est marié). Twee vleegen in ne tap sloege : faire d’une pierre deux coups. Stukke van zâ lappe (morceaux de chiffon de soie): quelque chose qui n’a plus de valeur. Hii eit hem eet gelapt : il lui en a fait, un tour ! In de pot lappe : abîmer, compromettre le succès de quelque chose. ’t Es gelapt : c’est arrangé, c’est conclu. Op de lappe goên : aller en vadrouille d’ivrogne. (Cf. l’argot anglais : to lap up : s’enivrer. Lap : coup de boisson.)
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LAPLANDER |
Lapon, propre à rien, capable de tout, paysan du Danube.
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LAPPER : grande oreille.
LATAAIN ME GOTCHES (du latin avec des trous) : langage incompréhensible.
LATTEWERK : lattis.
Jadis : corset de femme, à baleines.
LAUTE : tirer des lots, tirer au sort.
LAVETTE : torchon à laver la vaisselle, langue, bavard. Tu en as une de lavette ! : tu as la langue bien pendue !
LAWAAIT (lawaai) : bruit.
Lawaaitmoeker : tapageur.
Veul lawaait in e klaain strotche (beaucoup de bruit dans une ruelle) : bluffeur, sans argent.
Mie lawaait : femme forte en gueule.
Jan lawaait : grand gueulard.
LEEF (lief) : bon ami, bonne amie.
Lievekenshoek : vieux cabaret célèbre en face de l’Eglise de la Chapelle. A été démoli récemment.
LEEGE (liegen) : mentir.
Voyez plus loin : leugenoet.
- De Cort a recueilli les synonymes suivants de mentir : spek scheete, zakke geive, zakke losse, ’t spek van de meur doen luupe, bloeze vertelle, hoeille losse, pailtches werpe, frankskes smaaite, koffers smaaite.
LEERENEIR (de lierenaar) : couteau effilé employé surtout par la pègre.
A propos de l’assassinat de la servante du curé de Sainte-Gudule en 1833, nous avons retrouvé l’équivalent franais « couteau de Lierre », employé dans un article de «L’Indépendant».
LEIPEL (lepel, cuiller).
Al heure ne leipel (une cuillerée par heure) : chose qui avance très lentement, se dit de quelqu’un qui explique une chose en traînant.
LEIPER : cuiller.
Hij hei zene leiper loete valle (il a laissé tomber sa cuiller) : il est mort.
LEIVER (lever) : foie.
Hij hei nen druuge leiver (il a le foie sec) : il est toujours assoiffé.
LENTERE : traîner.
LESTE (de) : le dernier.
De leste es de beste : le dernier est le meilleur.
LETTE : faire attention.
Let ich : regarde une fois.
LEUBBE : homme complaisant, toujours prêt à rendre service.
On peut lui appliquer les vers suivants :
en ’n gooie man
en ’n brave man
en ne man van complaisance
en hij weegt het kind
en hij rourt in de pap
en hij lot zen vrâ danse.
Schuermans : lobbe, lobben : goedzak (dat is een goede lobbe).
Labbe : sukkelaar, snul, in ’t Fransch : benêt, nigaud. In Brabant hoort men veel : lebbe.
(Voir labbekak.)
LEUGENOET (leugenaar) : menteur.
Leugeneeterâ : mensonges.
Hij es van d’ieste leuge ni gebeste (il n’a pas éclaté de son premier mensonge) : il a l’habitude de mentir.
LEUSTERVINK (pinson à l’écoute) : curieux qui tend toujours l’oreille.
LEUTTER : peu. (Comparez avec l’anglais : little et le vieux flamand luttel. Lettellingen : Petit-Enghien.)
LICHE : attache.
La liche d’un paletot (l’attache qui sert à le pendre au porte-manteau).
LIELEK (lelijk, laid).
Liekehoet ou ne lieleken dag : un vilain, un défiguré. LIEP, liepe : malin, rusé, adroit.
LIER : échelle.
Hij goet met de lier oeit (il sort avec l’échelle) : il va cambrioler.
LIEWERK (leeuwerik) : alouette.
LINK : gauche, maladroit, qui plaît.
Au sujet de ce qualificatif aux acceptions si diverses, M. Paul Hermant écrit dans « Le Folklore Bra- brançon », n° 12, juin 1923: « Link a des significations très différentes : en linke mokke, une femme qui plaît. Ne linken teirlink : un faux dé. Ne linken tap : un vilain chapeau (en argot). Ne linken string : une chaîne (de montre) en cuivre. Ne linke snutter : un nez bizarre, ’t Is link (c’est mauvais). Ne linken bink signifie un malin ».
LINKADOR : arrangeur, qui a l’art de rouler autrui.
LOBAS : lourdaud, benêt, nigaud.
Doit provenir vraisemblablement du néerlandais « lobbes » : benêt, grand nigaud.
Sert souvent de nom aux chiens gros, sans race et aux allures de lourdaud.
Certains croient que « lôbas » de même que « lobbes » proviendrait de l’espagnol « loba » (louve — au pluriel « lobas »). Cela pourrait se justifier en tant qu’appellation pour un chien, mais c’est peut- être aller loin dans l’influence que le castillan eut autrefois sur les parlers régionaux de nos contrées. Nous lisons dans « le Marollien » de H. Vreckhom : lobas (louves, en espagnol).
Les mamans menaçaient les enfants qui ne sont pas sages du loubas, des loups ou d’un autre animal terrible.
Certains appellent leur chien loubas, ainsi firent Félix Timmermans dans son roman «Pallieter» et Paul Vitzthumb, le dessinateur.
LODDER mi zen keuting : fantôme, qui selon la tradition populaire, apparaissait aux passants attardés la nuit. Il les effrayait par le cliquetis de ses chaînes et les pourchassait dans la direction du canal. Le « lodder mi zen keutink » ricanait lorsque sa victime tombait à l’eau.
On l’appelait aussi «Spuuk van Meulebeik» (le spectre de Molenbeek).
LOE (lui) : paresseux (voir loerik).
Loê (lade) : tiroir.
Hij es in de boveste loê (il est dans le tiroir du dessus) : il est bien aimé.
LOEFFER : Se dit d’un plus fort qui ennuie un plus faible.
LOEIME : dormir.
- Teirlinck donne « luimen »: slapen.
LOEIS : pou.
Loeisekop : tête à poux.
Loeishond : chien à poux.
« In de dikke luis », cabaret de la rue Haute fréquenté par les vieilles zattecuts et les vieilles prostituées. Ces habituées, si vous ne surveillez pas soigneusement votre verre, le videront pour vous, ainsi raconte-t-on.
UNE JOUE SOIREE
Tour de polka exquis, jeudi soir, chez la personne du premier, au « Dikke Luis », rue Haute. Remarqué, au hasard de la lorgnette : M. Vander Kassulen- bosch, le vidame Spons, M. Van Plottlabonn, le baron Van Hoogstraeten, M. Onésime Wallebak, le marquis Pissebloemeke, le comte Haafd à Bakes, le comte Lappe – Zazezou – Tègema, M. Van Scra- moule, M. Van Erm-Huishave, le baron Scandaule de la Dikke-Poemp, la douairière Vuiljannette van
Strootjesvolk, Bedelaar de Wallebak, Trintje Vodde- kluut van Wittevischkes, Van der Bulth-Scheelewip, le baron Smeerlap-Tegezegoeste, la comtesse Pan- neflikker van Roggebruud, le comte Konynekop, le marquis Spek van Meulebeek, le baron Rottekop, le vicomte Sleekhuis van Zwietpitche, la douairière Klipsaucisse, la baronne Schuyftrompet, Scheereslip van Heuvelding, etc (« Pourquoi Pas ? »). Loeisegang : raie dans la chevelure (allée à poux). Waloeis : punaise.
Laaifloeis (pou de corps) et platloeis (pour plat) : morpion.
Une insulte favorite à Bruxelles est « luizendarm », qui se dit « loeizenderm » et qui signifie littéralement « boyau à poux ».
Une très vieille Bruxelloise qui a conservé le souvenir de curieuses traditions orales, nous a appris ceci :
Le « loeizenderm » est un conduit du cou qui aboutit derrière l’oreille.
Voici ce que me dit Mmc D. B. (une Bruxelloise de 76 ans), en 1933 : «Tous les cadavres ont des poux. Il faut les laisser. Ils sortent de derrière l’oreille, par le « loeizenderm ».
D’où provient cette macabre croyance ?
Une deuxième explication nous semble plausible, c’est celle de « luizen arm », « pauvre à poux », c’est-à-dire « pouilleux ».
Injurier quelqu’un de « loeizenderm » ce serait donc lui lancer l’épithète de « pouilleux ».
Il est à signaler que, selon certains, le « Luizen- molen », le moulin à vent d’Anderlecht, tirait son nom du fait qu’un de ses propriétaires était pauvre comme Job, « pauvre au point d’avoir des poux ».
LOEISSAK : sac à poux.
Insulte favorite des Bruxellois. Je l’ai retrouvée orthographiée « luysack » dans « De Bervoete Bruers ».
« Wat meyndy, ghy luysack ? » (Que vous figurez- vous, sac à poux ?)
Kiliaen donne « luyszack ».
Henne et Wauters, dans leur « Histoire de Bruxelles » mettent dans la bouche d’un mécontent voyant passer des capucins à Bruxelles, dans une procession en 1790, ces mots : « Men siet die lapdragers en luyssaecken aile kanten ».
LOEIZJENBOET : barbe à poux.
Employé avec : zak, kop, hond, etc, le mot « loeis » fournit une gamme pittoresque d’insultes bruxelloises.
LOEIZEGELD : menue monnaie.
LOEKE (laken) : drap et drap de lit.
Tussche men loekes : dans mon lit. LOEMBOESSEKEEK : poule, coucou de Malines. LOEIMKE (lonken) : jeter un coup d’œil.
LOEREN : épier.
Op de loer zaain : être aux aguets.
LOERIK (luiaard, luierik) : fainéant ; se dit aussi du lambic qui ne mousse pas.
LOGEMÈNT (logement) :
Maisons à dortoirs où les pauvres passaient la nuit. Avant la guerre de 1914, une nuit coûtait 20 centimes, avec un bol de café ou de soupe. Pour les ivrognes, il y avait le «logemènnt» dit « à la corde ». Pas de lit, pas de paillasse, pas de planche. Les « zatlappe » s’effondraient, le cou reposant sur une corde tendue à travers la chambre. Le matin, le tenancier décrochait la corde et tout le monde roulait par terre. La nuit coûtait 5 centimes. La rue de l’Eventail n’eut pas moins de quatorze maisons de «logemènnt», tenues par Dikke Leeze, Leeze den Bienhâver, Dikke Treen, Dikken Toône, Lange Maria, Polyte, Donat, etc.
LOODER : lourdaud.
Looder viendrait de lied : homme, compagnon dont on retrouve la racine en allemand : leute ; en russe : « lioudi » (hommes, gens, etc).
LOOIE (luiden) : sonner les cloches.
LOQUE : torchon.
Loque à reloqueter : torchon à nettoyer par terre.
LORIAS : fainéant, coquin, vaurien, lourdaud.
«…voit dans un staminet Un bouc grand lorias Qu’avait mis ’s posse ias »
(Cocu Lulu)
(’s posse ias : sa redingote de Pâques, c’est-à-dire son plus bel habit.)
Dans « Le Marollien », H. Van Vreckhom dit : « De « loro », espagnol pour perroquet et du mot flamand « jas », corruption de jak (jaquette). Lorias veut dire celui qui a tous les défauts du soudard ». Les Marolliens donnaient ce nom aux soudards espagnols dont la conduite était déplorable ; ces soldats étaient habillés de gris et de rouge, comme le perroquet.
Loro se dit aussi d’une couleur brun-noir qui pouvait s’appliquer au teint brun et aux cheveux noirs de ces soldats venant des provinces méridionales de l’Espagne, où les traces arabes persistent toujours.
Schuermans : lorejas, lorias, lorrejas.
Kiliaen « lorenfaes » : lui mensch (paresseux). Spaanse overheersing dagtekent, en van « los rios » ontstaan is. Doch wij menen dat dit woord niets anders is dan « lorrejas » hetzelfde als bij Kiliaen « lorenfaes » : lui mensch.
LOS : défait, en liberté.
Lot hem mo los (laissez-le seulement en liberté) : laissez-le faire et vous verrez de quoi il est capable.
LOUAGEUR : loueur.
LOUCHE : cuiller à pot (voir « poleipel »).
Du «Livre des Mestiers » (Bruges 1340): «louches de bois et potlouches : houten lepelen ende pot- lepelen ».
A Tournai, en 1490 « louce ».
LOWISKE (petite Louise) : inverti, tapette, matantje.
LUERAFAES : vieux mot aujourd’hui disparu. Il figure dans le sens de « valschaard » (trompeur) dans la pièce comique « De Bervoete Bruers ». (Voir « lorias ».)
LUKKE: réussir par hasard, aussi lukker.
« Ça veut just lukke que je vous vois. »
LULLE : radoter, divaguer, dire des sornettes.
— Wa luit hem ? (Que radote-t-il ?)
Schuermans : lui : fjauwe praat.
LUNDI PERDU (Verlore Moendag) : le premier lundi après l’Epiphanie.
Sa célébration tumultueuse dans les cabarets, par les ouvriers, est tombée en désuétude en 1914. Autrefois, dès le matin, les gens de tous les métiers: portefaix, garçons-brasseurs, ramoneurs, maçons, manoeuvres, etc, se mettaient en route, quêtant des pourboires, de porte à porte. Endimanchés, ils portaient leurs insignes corporatifs sur leurs blouses : balais, tonneaux, échelles, pelles, etc. Une fois la quête terminée ils hantaient les cabarets où ils se gavaient de bières et d’alcools.
Pendant les quelques jours qui suivaient, l’Amigo regorgeait de pensionnaires. La police devait intervenir dans des rixes sanglantes. De leur côté, les cafetiers et les marchands de tabac offraient des primes : boissons, cigares, à leurs habitués.
Le « lundi perdu » ou « lundi parjuré » ainsi nommé parce qu’il était chômé, était une des plus vieilles traditions du pays. On en trouve mention dès le XVIe siècle.
LUP : lèvre.
Dikke lup : lèvre tuméfiée par un coup au cours d’une rixe, sobriquet donné à un lippu.
Luppe as bore van pispotte (des lèvres comme le bord d’un vase de nuit) : des lèvres épaisses.
LU U PE (lopen) : courir, aimer l’amour.
’t Es geluupe : d’accord.
Opgeluupe : excité, emballé
MA : mère.
Borna : grand-mère.
MAA (mei) : mai.
Mâbloem : muguet.
Le 1er mai, Bruxelles fourmille de vendeurs de muguet, fleur porte-bonheur.
« Keest aile mâbloem ! » crient les vendeuses, « ach- ter vandoêg est te loet ! » (Choisissez votre muguet, après aujourd’hui, il sera trop tard !)
Mâbuum (Meiboom) : arbre planté au coin de la rue du Marais et de la rue des Sables, d’après une tradition séculaire.
En 1939, les Louvanistes enlevèrent le «mâbuum» aux yeux et à la barbe des Bruxellois. La plantation du « mâbuum » donne lieu à des réjouissances, à un cortège et à des danses qui comportent des intermèdes mimés et parlés de la meilleure tradition rabelaisienne.
MA (mouw, manche). Au pluriel : mâve.
Hij zit in men mâ : je l’ai dans la manche.
En broek mé keutte mâve : caleçon d’été, slip.
AA A AI NE (menen) : penser.
’f Es gemaaint : c’est sérieux, c’est bien décidé.
MABOULE : fou, simple d’esprit, lunatique.
MACHE (de metsen) : maçonner, gâcher mortier. Mâcher : maçon.
Machersknoep : grosse tartine comme en ont les aides-maçons (de mâcher (metser) : maçon et
(knaap) : aide).
De machers goen moote in greif goen (les maçons devront faire la grève) : remarque faite à quelqu’un qui laisse pousser une chevelure absalonienne, privant ainsi les maçons d’une matière indispensable (autrefois !).
MADOLLE : médaille.
MAF : fou.
MAG : aimer manger.
Da’s iene dee niks en mag : c’est quelqu’un à qui rien ne goûte, ainsi dit-on, avec ironie, d’un obèse.
MALLETTE
’t Es mallette : expression des ouvriers pour dire qu’il est l’heure de manger. (A cause des tartines emballées dans une mallette.)
MANKE : boiter.
Mankepuut : boiteux.
Kiliaan : Mancke pied.
MANNE (mand) : panier.
« Want de Boerinnekens van Boitsfort comen aen : Hebde geen Mane vandoen ? »
(Kluchtigh ende belacchelyck Verhael-Dicht, etc.)
MANSARDEBOOR (Mansardeboer) : littéralement « paysan de mansarde ».
Ce nouveau surnom du Bruxellois a été relevé par C. Verhavert, en août 1941, à l’époque où les parcs, les avenues, les terrains vagues étaient transformés en potagers.
« Mansardeboor » est plein d’humeur et d’amertume à la fois et on se figure aisément l’ouvrier de la ville, sortant de sa mansarde chaque jour pour aller, avec des gestes d’amateur, planter ses pommes de terre ou sarcler ses poireaux.
MARIER : Dans les milieux peu cultivés, marier est employé pour épouser : il a marié la fille du droguiste.
MARMITTEGOUD : cuivre (or de marmite).
MAROLLES : un quartier de la rue Haute.
Marollien : habitant de ce quartier, nom du langage parlé par lui.
- Van Vreckhom fait dériver marollien du mot espagnol marruliero : fin, rusé, qui cajole pour obtenir ce qu’il convoite. (Nous rectifions cependant l’orthographe de ce mot qui s’écrit marruliero. Dictionnaire de l’Académie Royale Espagnole. Madrid 1925.)
Quelles sont les limites des Marolles — ou plutôt de «la Marolle»? Si vous voulez en faire le tour, partez de la Porte de Hal, montez la rue du Remblai, prenez la rue aux Laines jusqu’à la rue Wynants qui est l’ancienne « rue des Sabots », continuez par la rue des Minimes, descendez la rue du Temple et rejoignez la Porte de Hal par la rue Haute.
Il s’ensuit que le côté droit de la rue Haute (en partant de la Chapelle) ne fait pas partie de la Marolle. (Pas plus que le Vieux Marché, comme certains, à tort, se l’imaginent.)
- Verhaevert (Brusselsche Typen) écrit que d’après des historiens, le Marollien, ou langage des Marol- liens, daterait du XIVe siècle lorsqu’un certain nombre d’ouvriers wallons du sud du Brabant s’établirent à Bruxelles, principalement dans le quartier des Brigittines, de la rue des Tanneurs, etc. Afin de se faire comprendre de la population, les Wallons durent employer des mots de leur patois que les Bruxellois adoptèrent en échange de mots flamands qu’employèrent les Wallons. Le dialecte hybride ainsi formé devint le marollien.
Il y a peu de traces du marollien écrit. On trouve des mots dans des pièces de chambres de rhétorique et dans les oeuvres des Coco Lulu, Pitje Laids, Lowitje Peperkoek, Neele Coppenfrons, Susse Clot’- pijp, Bazoef, C. Verhavert, George Garnir, Roger Kervijn.
Ik wuûn op de Marolles : j’habite la rue Monserrat.
MASKE (meisje) : jeune fille, fillette.
’t Es e maske van gooie avers :
heu meike doe kachouberess of heu aaige,
en heu pei mokt zen cigarettes.
(C’est une fille de bonne famille, sa mère est chiffonnière à son compte et son père fait ses cigarettes lui-même) : se dit pour se moquer méchamment de petites gens.
Maskes van plezeer : filles de joie.
MASTELLE: petite couque ronde. Schuermans écrit « mastel ». Viendrait de « mêler ».
Il y avait jadis à Ruysbroek, sur la Senne, un pont dit « des Mastelles ».
A Mons : galette croquante aromatisée avec de la cannelle.
MASTIC : mastic.
«J’ai surveillé d’abord le mastic. On sait que le mastic consiste dans le nettoyage et la mise en ordre du café. A tour de rôle, les garçons viennent dès 6 ou 7 heures du matin enlever les poussières et faire l’argenterie. » (G. Freddy, « Bruxelles Inconnu ».)
MASTOUCHE : nom donné à la capucine.
Devenir mastouche : avoir l’esprit dérangé.
« Klach, ça y est, il est dv’nu mastouche ! » (J. Bou- ley dans «La Gazette» du 3 août 1936.)
A Mons, mastouche : capucine, cresson indien. Italien : masturzo. Espagnol : Mastuerzo. Latin et anglais : nasturtium.
MAT-A ! : prends garde à toi ! Je t’aurai !
MATANTJE (petite tante) : inverti, tapette.
On dit aussi une « Lowiske » (petite Louise).
Bij matantje goen : aller chez matante, au clou, au Mont-de-piété.
MATCHE : petite mère, petite vieille.
MATEIRE (matière) : pus, cérumen.
A Mons : matière.
MATRASS : matelas (une).
Mie Matrass : Marie couche-toi là.
MÉ MOEIAL : une femme qui se mêle de tout. Aussi mé fafoel : qui s’occupe des affaires d’autrui.
MEEKLAPITTE (de «moeder» et « klappen ») : vieille bavarde, ou aussi ivrognesse.
MEIKE : mère, petite mère, vieille femme, de mei : mère, femme.
MENNEKE : petit garçon, gamin.
Menneke Pis.
Op ze mennekes (comme un petit garçon) : réponse qu’on donnera à la question : Comment allez-vous? Cela voudra dire : je me porte bien.
Une femme dira : op ze maskes, comme une fillette.
MENOENKEL (mon oncle) : mot par lequel on s’adresse à son oncle. Mont-de-Piété (par analogie avec « ma tante »).
MERLO (merel) : merle.
A Uccle existe la vieille brasserie du «Merlo». Elle est surmontée d’une immense girouette représentant un merle du plus beau noir.
MES : couteau.
Hij snaait mèt ’t zilver mes (il coupe avec le couteau d’argent) : se dit d’un commerçant parcimonieux ne fournissant qu’à peine le poids légal.
MEST : fumier.
Mestbak : dépôt d’immondices, capharnaüm, logis ou régnent le désordre et la saleté.
Il existait encore à Bruxelles, au début du XIXe siècle une « rue du Mest-Bak ».
MET (markt) : marché.
Vreugemet : marché matinal.
METTE (Martin ?).
Ik geef de paaip on Mette (je donne la pipe à Martin) : j’y renonce, je donne ma langue au chat, j’y perds mon latin.
Schuermans : De pijp aan Merten geven : het op- geven, aile hoop verloren geven.
Dans des farces bruxelloises du XVIIe siècle, on trouve « Mantje-peck », « Mondje-pick », « Monnen », « Moenen », comme noms du diable. (Voir « paaip ».)
METTEKO (marteko) : singe (comparer avec le wallon : marticô).
Voeiie metteco ! : sale singe !
METTRE. Mettez -vous : asseyez-vous.
MEULBER : bille.
MEULE : moulin.
Hij ei ne slag van de meule (il a eu un coup du moulin) : son esprit est dérangé.
Curieuse expression. Se rattache-t-elle à l’exploit de Don Quichotte attaquant les moulins à vent ?
MEULEBEIK : Molenbeek.
Hij komt te pas gelak de pompeers van Meulebeik
(il arrive à propos comme les pompiers de Molenbeek) : Jadis, m’a raconté M. Boreux, et bien avant l’an 1900, les pompiers de Molenbeek n’avaient que des effectifs réduits et un matériel rudimentaire. Conclusion : ils arrivaient sur les lieux d’un sinistre alors que l’incendie avait déjà fait de grands ravages. De là l’expression signifiant arriver en retard ou, comme on dit aussi en flamand, quand le veau est noyé.
Chant de guerre de Molenbeek :
« Waaile zaain van Meulebeik » van de Marolle gien verveit ».
Nous sommes de Molenbeek en n’avons pas peur des Marolles.
MEULEKE : petit carrousel.
Loeisemeuleke (petit carrousel à poux) : se dit d’un petit carrousel que les gamins faisaient tourner, moyennant quoi ils pouvaient parfois prendre place sur un cheval de bois.
MEUTKESKNEENE : genoux cagneux. (De «meutte»: agneau).
MICHMACH : mortier, boue.
MINEEME (Min imes).
Hij es in de Mineeme getrout (il s’est marié à l’église des Minimes) : il s’est marié sans l’autorisation de ses parents, (il paraît que l’église des Minimes était la seule, à Bruxelles où on pouvait contracter mariage sans la permission des parents.)
MINUTE
Tenir les cinq minutes qvec quelqu’un : eemand de zot mei hâve, tenir le fou avec quelqu’un : se moquer.
MISSE : manquer, perdre la raison.
Da kan ni misse : c’est évident, cela doit arriver.
Ge mist : tu dis des sottises (Ghij mist, dans « De Ghedwonge Griet », farce du XVIIe siècle.)
MISTANFLUT : corruption de Mistinguett.
Hoer à la Mistanflut : cheveux coupés courts, à la Mistinguett.
MISMOKTE : mal bâti, contrefait, infirme.
MITCHES : dattes.
MITCHESSOEP : soupe d’abattis de volaille. Une grosse assiettée coûtait, avant la guerre de 1914, quinze centimes, chez Treiske Volscher, à la place Stéphanie.
MITCHESUUGE : petits yeux.
MISVAL : fausse-couche.
Un garçon coiffeur comparaissait vendredi devant la Chambre correctionnelle de Bruxelles, sous la prévention d’outrages à un agent de police.
Cet agent est probablement le plus petit de la police bruxelloise ; il apparaît à l’audience, maigre, imberbe et petit ; il n’a rien de la prestance redoutable des légendaires « brigades centrales » du Second Empire.
Le prévenu l’a, une nuit de saoulographie, dans les parages de la rue des Eperonniers, interpellé d’une façon peu aimable : il l’a traité de « misval » (fausse couche).
Est-ce une injure ? Le tribunal fut d’abord interloqué ; un des assesseurs dut expliquer au président un terme qui ne figure pas dans le Dalloz, mais qui traduit en deux mots une idée qu’Aristide Bruant émettait en sept: «Allez donc dire qu’on vous finisse ! ».
Le tribunal a jugé qu’il y avait injure : il a condamné conditionnellement le garçon coiffeur à 26 F d’amende.
(«Petit Bleu», 1893.)
MOECH (muts) : casquette.
Blinge moech : Colin-Maillard (blinde muts).
Bal in de moech : balle dans la casquette (jeu populaire des enfants).
Familemoech : casquette sale et usée.
MOEFFE : puer.
Moeft dat hee ! : comme il pue ici !
MOEIS (muis) : souris, sexe féminin.
MOEMA : mère, maman.
Borna : grand’mère.
MOEZELKES (mazelen) : rougeole.
MO(l)NDAG (maandag) : lundi.
Verlore moindag : lundi perdu (voir ce mot).
MOK MA ZWEUT (noircis-moi) : divertissement populaire consistant à se noircir mutuellement le visage et sans rire (Haaft a serieus !).
MOKKE : bonne amie (syn.: leef), jeune fille.
Toffe mokke ou schuûn mokske : belle poule. Viendrait de l’espagnol « moza » : jeune fille.
MOLTJCHE : sac en toile ciré dans lequel les ouvriers transportent leurs tartines.
MONONK: mon oncle.
MOOIER (moeder) : mère.
Une expression qu’on entend souvent est : « Sprekt a mooier’s toel ! » (Spreekt uw moedertaal I), lorsqu’un Bruxellois de la classe populaire se mêle de parler le français.
Dans la pièce « De Bervoete Bruers », représentée à Bruxelles en 1559, un père dit à ses enfants qui avaient dit quelques mots en français « kinderkens sprect uus muerkens taie ».
SCHuumooier : belle-mère.
MONPERE : père.
Son monpère : son père.
«…qui lui disait: de t’ n’ enfant, j’ s’rai I’ monpère…» (Coco Lulu).
MOPSE : Les Mopses étaient les membres d’une société secrète « Les Mopses », fondée à Bruxelles au XIXe siècle. C’étaient en réalité des zwanzeurs qui prétendaient posséder le véritable secret, les rites et coutumes des maçons du Temple de Jérusalem.
En 1920, j’ai encore entendu des Molenbeekois se dire « Mops » l’un à l’autre. Le mot semblait vouloir signifier « Espèce de Blagueur ! ».
« Mopsus » ou « Mopsos », en grec, dit Joe Diericx de ten Hamme, est le nom d’un devin fameux à Argos. On appelle encore « mopse » une sorte de carlin au pelage couleur gris-fer, au museau écrasé.
MORIAAN, MAURIAAN, MORIANE : nègre, maure, du latin mauritanus. Sujet familier des vieilles enseignes bruxelloises.
MOSSEL : moule, crachat glaireux, quelqu’un sans volonté, gifle, soufflet.
Hij roept waal mossele (il crie à nouveau « des moules ! ») : il crie trop tôt victoire.
Z’heit en schuun stem vé « mossele ! » te roope
(elle a une belle voix pour crier « des moules ! ») : jugement féroce sur la voix d’une chanteuse.
Mosselwaaif : marchande de moules.
Ze komme goed overien gelak twee mosselschelpe :
ils s’entendent comme les deux valves d’une moule.
MOSTOED : moutarde.
Curieuse mostoedpot : curieux.
Jadis, lorsque le marchand de moutarde circulait par les rues, en criant sa marchandise, les ketches le poursuivaient en bandes, à une distance prudente et hurlaient : Wa sCHat a vrâ ? (Que chie ta femme ?) Le malheureux était bien forcé de répondre « Mostoed ! ».
MOT : mite, gifle.
Mot in ’t hoer (des mites dans les cheveux) : atteint de pelade.
Ik hâ het in de mot : je m’en doutais.
MOTCHE : bébé du sexe féminin, petite fille.
MOURU : mort.
Il est mouru.
MUGGE : moustique.
Mugge mé ne col (un moustique avec un col) : personne au cou très maigre. Aussi : Muggevet (graisse de moustique).
MUSCH : moineau.
Muskeshoer : premier duvet.
E musschepiske : un pipi de moineau, c’est-à-dire quelques gouttes de pluie.
Zoe zot as en musch : plein de gaieté, gai comme un moineau.
MUURE : bouilloire.
Teut van de muure : bec de la bouilloire, certains s’en servaient en guise de pipe.
NACHT : nuit.
NaCHtgroef (comte de la nuit) : noctambule.
NARIEN : rien (de ne rien).
« Le monpère de le petit garçon, y n’avait narien dit… » (« La Noël du Petit Anarchiste », par Bazoef, dans «Le Diable au Corps», 24-12-1893.)
NAAIPE (nijpen) : pincer.
Dane nept er op : il les pince (les cordons de sa bourse), c’est un avare.
NI (nauw) : étroit, avare.
Da stekt zoe nê ni : « ça ne pique pas si près ».
Da komt er zoe nê ni op : il ne faut pas y regarder de si près.
Nè ! : abréviation de « tenez ! ».
NEIGEMANNEKE : ancienne pièce de monnaie, d’une valeur d’un y2 liard ou d’un gigot (1 centime). Enseigne d’une habitation d’Anderlecht.
NEK : cou.
Eemand in de nek zeen (voir quelqu’un dans le cou) : tromper.
Zen biene in zene nek sloege : détaler à toute vitesse.
Zen biene oeit zene nek iuupe : idem.
Dikke nek (gros cou) : vantard. (Cf. anglais : swollen neck.)
NEUS : nez.
’t Es vè â n’aaige neus in te slikke (c’est à en avaler son propre nez) : c’est inimaginable.
NIKS : rien.
As niks komt tôt eet, dan kent niks zen aaige zeulve neet (quand quelqu’un de petite condition, parvient à quelque chose, il ne se reconnaît plus lui-même) : se dit d’un orgueilleux, d’un parvenu qui a honte de son origine modeste.
Niksmendâle ! Rien du tout ! Je ne marche pas !
NOEGEL (nagel) : ongle, clou.
Just de noegel op de kop ! (juste le clou sur la tête I) : argument précis.
Daa man hei ne vriedege noegel deu zene zaul steike (cet homme a un fameux clou qui lui perce la semelle) : il a un énorme appendice nasal.
Hij hei giene noegel om za gat te krabbe : il n’a
pas un clou pour se gratter le derrière.
NOEGELEMBOEIK : nombril.
Z’es braaf tôt on heu noegelemboeik (elle est sage jusqu’à son nombril), dit-on. Et des cyniques d’ajouter : « mo ni onder » (mais pas en dessous).
NOTCHE : petite noix. Tête, comme dans ’k Hem paain in me notche : j’ai mal à la tête.
NUCHTER : à jeun.
OCHERME ; (och arme !) : quel malheur ! Hélas ! Orthographe : ochermen en 1622.
OCH GOD ! : exclamation de pitié ou d’étonnement. Och God en hiere toch ! (Dieu et Notre Seigneur I)
OCOGE (g comme dans Georges) : occasion.
OEIL (uil) : hibou, imbécile.
Kerkoeil (hibou d’église) :dévôt.
Men oeile zaain foert : je n’ai plus d’argent.
Oeilekot : vient du flamand uilekot, endroit haut perché où logent les hiboux. Désigne, au théâtre, les places le meilleur marché, tout en haut, au paradis.
L’analogie entre «oeilekot» (ou uilenkot) et «paradis » est rapportée dans une petite anecdote parue dans « Méphistophélès », journal satirique bruxellois, du 25 janvier 1838.
Un particulier était allé demander au curé de Sainte- Gudule ce que coûterait un service pour sa femme nouvellement trépassée.
- Il y a des services de première classe, de seconde et de troisième, lui répondit le curé.
- Quel avantage y a-t-il de prendre plutôt l’un que l’autre ?
- Avec un de première, on est aux premières loges dans le ciel ; avec celui de seconde au parterre et avec celui de troisième classe, on est à l’« Uylenkot ».
- Eh bien, dit le veuf, va pour l’« Uylenkot », on y est bien plus près des anges qui volent continuellement en l’air !
Hee hemme oeile gewunt mo ze zaain verhoeist
(des hiboux ont habité ici, mais ils ont déménagé) : l’expérience apprend qu’il ne faut plus se laisser prendre aux pièges.
OEIT : dehors, hors.
Lot het oeit ! : cesse !
Oeitgesloepe (qui a fini de dormir) : malin, éveillé. Oeitsezoôn (hors de saison) : vieillard.
Oeiteider : phtisique (s’emploie comme injure). Oeitbloeze : se moquer.
OEMACHT (de onmacht) : faiblesse.
In oemacht valle : tomber faible, s’évanouir.
OEMBAKKES (mombakkes) : masque de carnaval.
OENDOON : mettre (un vêtement), se faire de la bile. Ik doon het ma ni oen : je ne m’en fais pas.
OENGESTUUTE : habillé, tourné.
Vees oengestuute : vêtu drôlement.
OENGOEN : partir.
Gooi oengoen ! (veux-tu partir I) : disparaissez ! F… le camp !
OENLOKKER : « aboyeur » : l’homme qui, devant un magasin de confections ou de lingeries, attirait le chaland.
OEP (du flamand aap) : singe.
Eemand vè ne oep pakke : se ficher de la fiole de quelqu’un.
OESEM (du flamand adem) : souffle, respiration. Keutten oesem : haleine courte.
Stinkenden oesem : mauvaise haleine.
OEVERECHT (averechts) : à l’envers.
Oeverechte : homme récalcitrant, giffle donnée avec le dos de la main.
OGNON : grosse montre.
OL, OLEMENT : anus.
Aux jours de carnaval, des ketches déguisés en voeil Jeannette (voir ces mots) braillaient au long des rues :
Do was ne ki en vrâ Dé gien snoeif en hâ,
Ze klopte op heuie ol En giei heuie duus was vol.
Do was ne ki en vrâ Die gien tette en hâ,
Ze klopte op heuie ol En giei heuien boeik was vol.
(Il était une fois une femme qui n’avait pas de prise. Elle frappa sur son derrière, et toute sa boîte en fut pleine.
Il était une fois une femme n’avait pas de seins. Elle frappa sur son derrière, et tout son ventre en fut rempli.)
OLE : huile.
Ole komt bove (l’huile surnage toujours) : tout finit par s’arranger.
OLJTCHE : petit hibou.
En oltjche vangen : faire un somme.
Peut-être parce que le hibou est un oiseau nocturne ? (Voir puus.)
ONNUZEL : innocent, un peu cinglé.
Onnuuzelerâ : bêtises, idioties.
Onnuuzel gebore en zot geweegd (Né innocent et bercé dans la folie) : se dit d’une personne peu intelligente ayant été tenue trop longtemps en tutelle.
OOILE (huilen) : pleurer, crier.
Ooilt zoe neet : ne pleure pas comme ça.
OP EN WEG: sans doute (hop en weg I), sur le pouce, en un minimum de temps.
Opgepast en ni gelache (ch guttural) : attention, on ne rit plus !
OPFRETTER VAN ’T GOUVERNEMENT : soldat (bouf- feur du gouvernement).
OPGEZET : bien habillé.
Hii was opgezet : il était bien habillé.
Opgezet s’emploie aussi dans le sens de content et on ajoute parfois lakkas nen hond me vloeie (comme un chien avec des puces), quelqu’un qui s’en retourne, satisfait.
OPGEZWOLLE : enflé.
Synonyme de papzak et de bleis.
OPGESMEITE : qui a monté à l’arbre, fâché, excité.
OPNEIMVODDE : torchon, «loque à reloqueter». Schuermans : opneemdoek of opneemvod.
OPGESLIJPE : être désireux.
OPSCHINKE : verser.
Cafei opsCHinke : dans les ménages pauvres on n’allumait pas le feu en été et on se rendait avec la cafetière contenant le café moulu et la chicorée chez un commerçant du quartier débitant de l’eau chaude. Pour une « cenne » (deux centimes) la cafetière était remplie.
OPSMAAITE : taquiner quelqu’un pour le mettre en colère.
OPSPEILE : faire de son nez.
Aussi : op zen puut speilen ou jouer sur sa patte.
OPSLAG : augmentation de salaire.
Opslag en de deû ooit : augmentation et à la porte. Expression ironique et amère à la fois par quoi l’ouvrier fait sentir qu’il ne peut espérer une amélioration de condition.
OPSTEIKE : partir.
Ze waaif es opgestoke mè de liergast : sa femme est partie avec l’apprenti.
OS : bœuf.
Vetten os : bœuf gras, personne grosse, enflé.
La fête du « Vetten Os » (bœuf gras) met le quartier des Abattoirs, à Anderlecht, en liesse, à la fin du Carême. Dans un cortège est promené le « vetten os » enrubanné.
OSSENUUTZWEIR : migraine (l’abcès qui donne une tête de bœuf).
OUDE (oorden ; oordje) : liard, terme général désignant de l’argent.
Hij zit zonder oude : il n’a plus d’argent.
’k Hem gien oude : je n’ai pas d’argent.
Klappe zaain gien oude : les belles paroles ne paient pas, les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Gien oude, mo toCH laChe : nous ne sommes pas riches, mais cela ne nous empêche pas de nous amuser.
OVEBICHKE : blatte (petite bête de four).
OVER : au-dessus, au-delà.
Ik kan er ni van over : je n’en reviens pas, j’en suis interloqué.
Overschot : le restent, ce qui est en trop.
Overschot van gelaaik : pleinement raison.
PAAIP : pipe, jambe d’un pantalon, tuyau.
Pei Paaip : le père la Pipe, expression familière. Paaipekop : chevelure hirsute.
Paaipestijle : mèches de cheveux hirsutes et raides. Hij es gien paaip toebak weit : il ne vaut pas une pipe de tabac.
Hij heit zen paaip loete vaile (il a laissé tomber sa pipe) : il est mort.
De paaip on Mette geive : mourir, aussi jeter le manche après la cognée — s’abandonner.
PAAIPEPLEKKER (colleur de pipes) : bon à rien, qui ne s’amuse qu’à des futilités.
PACHACROUTE (insulte) : pouilleux, fainéant, mauvais ouvrier.
PACHOUKEL.
Citons M. Van Vreckom : de l’espagnol «pachon»: homme lent, flegmatique et lourdaud.
Le Marollien désigne ainsi le benêt qui suit les pèlerinages.
PAGADDER : homme très petit.
La note de M. Sandervorst, dans le « Folklore brabançon » (février 1928), est à citer entièrement. « Pagaderke. Ce mot désigne un homme très petit. Les mamans emploient également ce mot comme un terme d’affection. Ainsi diront-elles à leurs enfants « mijn pagaderke ». Le mot « pagaderke » vient du mot espagnol « pagador » (payeur). Le mot est entré dans le patois de Louvain, sous l’occupation espagnole le «pagador» dans l’armée désignant l’« officier payeur ». Pour remplir cette fonction, on désignait le plus petit des officiers. » Schuermans : De «pagador» espagnol pour « payeur ». Lorsque les Espagnols allaient acheter à la ville, ils prenaient avec eux un individu de la classe populaire qui faisait le changeur pour les monnaies espagnole et hollandaise. Le peuple qui détestait les Espagnols prirent le « pagador » en haine. A l’origine «pagador» désignait quelqu’un pour qui on avait du mépris.
PAIN FRANÇAIS Ml EN HUM OEN (pain français vêtu d’une chemise): personne efflanquée et maigre.
PAK : paquet, fourbi.
Mé pak en zak boeite : être expulsé manu militari, ’t Es just mene pak : c’est précisément mon affaire. Pakske : remontrance.
Hij ei zen pakske gat : il a été engueulé. Pakkemans : gendarme.
lene van ’t faain pakske (un du fin paquet) : un privilégié.
PALME : pal me.
Palmhout : buis.
Hij was gelukkeg dat hem in zen bedde lag me ne palmenhout in zen puute (il serait plus heureux d’être dans son lit avec une branche de buis dans ses mains) : se dit de quelqu’un d’incurable, qui souffre le martyre, et dont on souhaite la fin.
Hij stoê mi palme op Palmezondag : (Il vend des rameaux le dimanche des Rameaux) : il ne travaille guère.
PALOKE : fruit du prunellier, prunelle.
Du « Dictionnaire du Wallon de Mons », par J. Si- gart : bulok : prune (arrondissement de Charleroi). A Liège et à Namur : bilok. Vieux français : bel- loche, belloce, beloce. Irlandais, écossais : bulos : prunelle.
PAMPEER : papier.
« Daer is oock een Cremer oft mercenier,
Die in dese stadt verkoopt pen en pompier. » (Description des cris de Bruxelles. Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael-Dicht, etc.)
PANACHÉ : bière bruxelloise, mélange de lambic doux et de gueuze au tonneau.
PANCH (pens) (ch comme dans Georges) : boudin, membre viril.
Panchekermis : kermesse aux boudins. Panchedrooier : charcutier.
« Les bourgeois qui habitent dans les rues avoisin- riant (sic) l’église Saint-Laurent, traitent leurs amis dans l’après-midi, et on donne surtout à manger des boudins. » (Baert. Recueil manuscrit.)
« En nen dikke panch en ne sneê van ’t verke » Boôreleive dat es plèzant ! »
(Chanson populaire)
PANDOERE : pandore, gendarme, jeu de cartes. PANNE : poêle à frire.
Panneflikker : quelqu’un qui a essayé trente-six métiers sans jamais réussir dans aucun.
PAP : pâte, panade.
Hij leit mé pap (il est au régime de la « pappe ») : il est très malade.
Pappe au riz : riz au lait.
Papzak (sac de « pappe au riz ») : grosse personne, enflé.
Nâ stoet hem mè zene mond vol pap (maintenant il est avec sa bouche pleine de pappe): être à quia, ne plus savoir que répondre.
In kâ pap valle (tomber comme de la pâte froide): s’évanouir.
PAPOEIT : synonyme de spring no’t vet, c’est « celui que la peau de son ventre colle à son derrière » : individu très maigre. Contraire de papzak.
PARA : poireau.
- Pee, pee, parâtjes deef Hedde gien paratjes ?
- Neie !
- Hedde gien selder ?
- Holt hem oeit de kelder.
- Hedde gien ajoen ?
- Lot hem den mo stoen. »
(Ernest Verhaegen «Au bon vieux temps». Musique de Jean David.)
PARAPLEU : parapluie.
Parapleuke : bonbon collé à un bâtonnet et que les enfants sucent.
Hij hei zene parapleu toogesloêge (il a fermé son parapluie) : « il a cassé sa pipe ».
PARASOLLEKES (petits parasols) : grandes oreilles. Aussi « blaffetures »; sorte de friandises vendues jadis dans les « bollewinkels » et faites d’un morceau de sucre coloré, rond et plat, monté sur un bâtonnet de la grosseur et de la longueur d’une allumette, offrant ainsi une certaine ressemblance avec un petit parasol.
PARC.
Il lime le gazon du parc : il fainéante.
Z’heit heu gekamt on de grille van ’t park (elle s’est peignée aux grilles du parc) : elle ne n’est pas peignée.
ou : van d’ Hallepoot (de la Porte de Hal).
PASTUUREPLEK : tonsure (tache de curé).
PATAPOEF : gros, bedonnant.
Schuermans donne « patapof ».
PATATE : pomme de terre.
Patate-frites.
Pataat : gros nez, exclamation correspondant à pan! « Bleeft er a gien warme patâte of sprok, Hiere? »: cri que lançaient jadis dans les cafés les marchands ambulants de pommes de terre en robe des champs et d’esprots.
Patates à casaque : pommes de terre en robe de chambre (sic) ou en robe des champs pour parler correctement.
Etre dans les patates : échouer.
« Le Parc du Cinquantenaire, que l’on appelait encore l’Ancienne Plaine des Manœuvres (en 1887), était tout à fait désert. Seuls y subsistaient, avec leurs toits arrondis, comparables de loin à de gigantesques tortues, les deux pavillons, débris de l’exposition nationale de 1880, actuellement incorporés dans les musées. Non loin existaient encore les vestiges d’un champ de courses, tracé en pleins champs, où les chevaux qui quittaient la piste dans les virages, allaient se promener dans les pommes de ierre, ce qui les disqualifiait, d’où l’expression : «être dans les patates»; restée dans le langage bruxellois. »
(Vicomte Ch. Terlinden : « Bruxelles il y a cinquante ans», Bull. soc. royale d’archéologie de Bruxelles, juillet 1937.)
Hij goet zen patâte afgeete (il va vider l’eau des pommes de terre) : il va faire pipi.
PATATESTEKER : celui qui a l’habitude de s’inviter à manger chez des amis.
PATCHE : petit père, petit vieux.
PATEETERKE : petit terme d’amitié.
Schuermans donne «petieter» et « patieter » : petit doigt. « Een klein petieterken » : een klein manne- ken, een klein dingsken.
PATEIKE : petit gâteau, petit homme ou enfant éveillé ou intelligent.
« Da es e pateike !» : ça c’est quelqu’un !
A Bruxelles, on dénomme « petits pâtés » ce qui se dit en bon français « petits gâteaux ».
Les petits pâtés, selon les codes culinaires, doivent contenir un peu de viande, or ce n’est pas cela, n’est-ce pas, que dégustent les bons Bruxellois, l’après-midi, dans une des multiples pâtisseries qui ont poussé dans notre bonne ville, comme des champignons !
In ’t pateike baaite (mordre dans le petit pâté) : recevoir une semonce.
PATRAQUE : machine usée ou mal faite et de peu de valeur ; personne faible et débile. (Le mot est français, mais joue un grand rôle dans le langage populaire.)
Schuermans : « Patrak » : voorwerp dat oud, slecht en versleten is. On dit généralement une vieille patraque.
PATTE : puut, patte, jambe, pied.
« Avd a recht op a puute » : tiens-toi droit sur tes jambes.
Jouer sur sa patte : op zen puut speile : récriminer. Léopold Courouble dans «Notre Langue» donne comme équivalent de « Il joue sur sa patte » : « il est en colère ».
PAYELLE : poêle à frire.
(Vient peut-être de l’espagnol : paella, le riz à la Valencienne, préparé dans une grande poêle appelée « sarten » ou du vieux français payelle signifiant poêle.)
On trouve ce vieux mot français dans les « Comptes de Louis XI » où il est parlé de « payelle bachi- noire ». i
La « payelle » des Bruxellois a, en effet, la forme des vieilles bassinoires avec lesquelles on chauffait les lits avant de se coucher, l’hiver. En 1490, à Tournai, «payelle».
PEE KIEK
«Hij es bij Pee Kiek » : il est mort (expression relevée par M. P. Hermant).
PEER (pier) : verre de terre.
Peereland (pays des vers) : tombe, cimetière. Peeremanstroet : rue des Vers (la traduction française est erronée. Il faudrait dire «rue Piermans », nom propre).
Henne et Wauters écrivaient en 1845 : « Le nom de la rue Piermans a été récemment changé en celui de rue aux Vers, parce qu’un malencontreux traducteur s’est dit que la première de ces traductions signifiait « homme aux vers » tandis que c’étqit une corruption de Piermont, nom d’une famille qui avait beaucoup de propriétés dans ce quartier». Par dérision on appelle aussi la rue des Vers, « rue Royale des Vers ».
PEES (pees) : nerf.
Hij hei ma bij men pees : il m’a coincé.
PEET : homme impuissant, hermaphrodite.
PEI : père, homme, passant.
Peilce : père, vieillard.
Patje : vieillard.
Peierâ : signes de la vieillesse.
Nen â pei : un vieillard.
PEIPERKOEK : pain d’épices.
PEIR (peer) : poire.
De peir zaain : être la poire, être roulé.
PEITER : parrain.
PEN EN INK (plume et encre): onomatopée imitant vaguement le cri de douleur poussé par un chien. Quand il entendait cette plainte, le Bruxellois disait: Hij roept pen en ink.
PENNELEKKER (lêcheur de plumes) : employé, «…vous êtes janvermille pas seulement capabel de riussir un ixamen pour un miserabel place de pennelekker, de z’employé sur la maison communale d’Ixelles!» (La malédiction de Jef Krollekop, «Le Sifflet», 28 août 1904.)
PERCEES : à peu près.
PÈRE : « voir son père » : souffrir, endurer. Correspond au verbe « afzeen ».
PERKUUS : perkoos, boerkoos, c’est-à-dire « maraîcher », vendait des légumes précoces.
Avant la Révolution Française, les « boerkoozen » avaient leur gilde.
Schuermans parle d’une pierre tombale du cimetière de Schaerbeek sur laquelle il est écrit : Oudt deken van het boirkoisambacht, die sterft den 26 Meert 1717.
Un « perkuus » était aussi, à Bruxelles, un revendeur de fruits fins.
D’après Schuermans, « perkoos » serait une corruption du mot français « précoce ».
PERLAGREC : pain à la grecque (noté par De Kelper).
PERMINTELEK : certainement.
’k Hem het permintelek gezeen : Je l’ai vu sans aucun doute.
PERTANG : pourtant.
PEST : injure (peste), mauvaise odeur.
PETARD : derrière, postérieur [substantif).
« Avec une pottrine comme deuie et un pétard comme quatte. » (« Le Cadavre », par Bazoef, dans «Le Diable au Corps», 8-4-1894.)
PEULLEKE : petite pelure.
PEULLEKESDEEF (eu comme dans peur) (de « pel » : pellicule) : se dit de l’enfant qui, envoyé acheter un pain, en arrache de petits morceaux qu’il mange en revenant à la maison.
PETROL IN DE SOEP : disputes dans le ménage.
PEUR (eu comme dans cheveux) : pur, tout à fait. Mot employé souvent par le peuple. Je l’ai retrouvé dans la pièce comique « De Bervoete Breurs » (Bruxelles, 1559).
« le worde puer gram » (je me fâchai tout à fait). Ik ben het peur meûg (j’en suis complètement fatigué) : j’en ai assez ! d’où il ressort que « peûr » veut dire «tout à fait».
PEUTKESUUSGES : yeux en petits trous (De « putte- kes » : petits trous).
PICAILLONS ou PICALIONS : argent.
« On doit nous aut’ souvent crachei des piccalions. » (Protestation de Jef Krollekop, «Le Sifflet», 11 septembre 1904.)
PICHE : pincer, faire des pincettes.
« Hij doô ma niks as piche !» : il ne cesse de me faire des pincettes !
PIEIT (paard) : cheval.
Pièruug : œil de cheval, c’est-à-dire 5 francs et œuf sur le plat.
Pierrestrond : crottin de cheval, aussi pierrendoef. Hij es nog al rap te pieit (il est très vite à cheval) : il se fâche rapidement.
Hij zit altaaid op zen aaigueste pieit (il est toujours sur le même cheval) : il a sa marotte, il enfourche son dada favori.
’t Es te pieit gekomme, ’t goêt te voot weg (c’est venu à cheval, cela s’en va à pied) : un accident est vite arrivé, mais guéri lentement.
Hij kan nog etter leege as dat e pieit kan luupe : il ment plus fort qu’un cheval ne peut courir, ou, hij kan beiter leege as e pieit, mo hij kan zoe rap ni luupe : il ment mieux qu’un cheval, mais il ne sait pas courir aussi vite.
Ne zucht gelak ne pièrescheit (un soupir comme un pet de cheval) : un gros soupir.
PIETERSILLE (peterselie) : persil.
Ge kunt er piëtersille in zoeie (on peut y semer du persil) : se dit de quelqu’un qui a les oreilles sales.
PIKKE : voler.
Pikkendeef : voleur.
Viendrait de l’espagnol : picaro : méchant, vaurien, fripon.
Existe dans la forme française « piquer » (voler) à rapprocher de l’anglais « pick-pocket ». « Dedans I’ tiroir pikait. » (Coco Lulu)
’t Es pikken doenker : il fait tout à fait obscur (sans doute parce que cela permet de voler sans être vu).
PIKKEL : jambe (voir kapikkele).
Drapikkel (trois jambes) : trépied, boiteux, béquil- lord.
PIKKELE : jeu d’osselets.
PIKKELONTCHES : petits sujets en sucre rouge piqués sur des bâtonnets et donnés jadis, aux enfants, à la Saint-Nicolas (Klontche : morceau de sucre candi).
P1KKENOTCHE : le jeu du bec, ou de la pinoche, avec un bout de bois pointu aux deux extrémités et qu’on fait sauter en l’air à l’aide d’un bâtonnet. C’est une forme populaire du cricket.
PIKONDCHE : (ou plutôt « Pikhondche ») : nom que, jusqu’en 1955, le peuple donna au carrefour devenu «Jardin des Olives». On disait « spiekhondche » ou « pikhonche ». En 1954, j’interrogeai un agent de service à cet endroit, au sujet du nom du site. II me répondit : « Nous z’autes, nous disons : On a été de service au « pikhondche » ou « on va au pikhondche ». Place du chien volé ? L’explication ne me satisfait pas. Jadis le site portait le nom de « rue Finket » corruption de « Winketstratie » ou «rue de la Poterne» mais j’imagine difficilement que « winketstratie » ait pu donner naissance à ‘< Pikhondche ».
Alors, reste l’explication « Pikkelontche » (voir ci- dessus).
PILEIRBAAITER (mordeur de pilier) : grenouille de bénitier, bigote.
PIMPELMIES : femme très délicate.
On dit d’une femmelette : Ze kan deu de boites aux letter binne : elle peut entrer par la boîte aux lettres.
PINK ZEEN (de pinken : cligner des yeux) : voir trouble. On dit aussi «voir pink ».
PINNEMOECH : bonnet de nuit, parfois aussi béret. Bonnet de police.
Schuermans : « pinnemuts » : mansslaapmuts.
PIOT ou PIOTTE : soldat de l’infanterie de ligne.
Is. Teirlinck donne « panjot » : soldat. Il ajoute «c’est peut-être le même mot que « piot » qui, dans toute la Belgique est employé pour „ fantassin ”». Schuermans (Algemeen Vlaamsch Idioticon) dit : «fantassin, en général, de petite taille, aussi, un petit homme ». Le même linguiste prétend que « piot» viendrait de l’espagnol « piota », en français « pied », mais je n’ai pas trouvé « piota » dans le Dictionnaire de la Real Academia Espanola. Piottepakker : gendarme, mot issu de la guerre de 1914-1918, lorsqu’au front de l’Yser les gendarmes étaient chargés d’arrêter les déserteurs.
« Piotche trou-la-la (ter) ça fait un bon soldat ! »
(Refrain chanté à Bruxelles, le jour du tirage au sort pour le service militaire).
PISSE : uriner.
Aile woeters heulpe, za ’t bogantche, en ze pistegue
in de zee (toutes les eaux viennent à point, dit la béguine, et elle pissa dans la mer) : tout vient à point.
Des coiffeurs humoristes pastichent cette locution et disent « Aile boete heulpe », toutes les barbes contribuent à la recette du jour.
Zoe stoem as en pissebloem : rester a quia (être bête comme un pissenlit).
Ge kent zoe ver pisse : cet endroit n’est pas loin. Comme bien on le pense, « pisse » s’emploie dans ombre d’expressions injurieuses et grivoises. Près de l’église des Recollets, à Bruxelles, il y eut au XVIIIe siècle la ruelle du Cabas (Cabasstraetken) qu’on appelait vulgairement « pisstraetken ».
Pispof : vase de nuit.
Pisseur de comptoir : client qui s’attarde au comptoir d’un café en y débitant des fadaises lorsque la patronne est une belle bozinne.
« Want ’t is het vuylste dier (le porc), dat oyt op pis-pot sat. » (Car c’est le plus sale animal qui oneques s’assit sur un vase de nuit.) Dans « De Ghedwonghe Griet», farce bruxelloise du XVIIe siècle.
PISKOUS (bas à uriner) : fille, fillette.
- Une telle a un bébé
- Qu’est-ce ?
- Oh, une « piskous ! ».
Schuermans : « Die heer heeft vier kinderen, maar ’t zijn allemaal piskousen ».
PISLAP : lange qu’on met dans le berceau d’un bébé pour l’empêcher de mouiller ses draps.
Menneke-Pis, et non « Manneken Pis », telle est la prononciation exacte bruxelloise du nom du plus vieux bourgeois de Bruxelles. Telle est la raison pour laquelle, «Les Amis de Manneken-Pis », cette sympathique association, devrait, en réalité, et pour obéir au strict folklore local, s’appeler « Les Amis de Menneke-Pis ».
Aucun Bruxellois connaissant le dialecte flamand
ne dira « Manneken », le mot reconnu est « Men- neke ».
D’autre part, l’analyse grammaticale et syntaxyque de «Manneken Pis» pose des problèmes. Il y a là quelque chose d’irrationnel, de contraire à l’évolution logique d’un dialecte. Tout s’éclaircit cependant quand on examine de près le plan de Bruxelles dessiné en 1576, par Braun et Hogenberg, et sur lequel on lit « T Meneke Pist » (Le garçonnet pisse).
PISWAAIF : femme de cour, préposée aux W.C., « Madame Caca ».
Ce mot fait l’objet d’un commentaire dans l’opuscule curieux écrit par Julius Hennig et édité à Heidelberg en 1926 « Die franzôsische Sprache im Munde der Belgier und die Marollemundart Brüs- sels ».
Il s’étonne qu’à Bruxelles, dans certains établissements, la « piswaaif » doive payer une somme d’argent au patron pour pouvoir tenir l’emploi de femme de cour. « Beaucoup d’entre elles, devenues vieilles, connurent des jours plus brillants au temps de leur jeunesse. Sic transit gloria mundi ! »
PISTOLET : petit pain.
Pistolet : personnage peu agréable, qui ne se laisse pas faire. « C’est un drolle de pistolet. » (Léopold Courouble : Notre Langue.)
Comme « drève », le mot «pistolet» est un de ces vocables qui, à l’étranger, révèlent tout de suite la nationalité d’un voyageur. Dans l’acception de « petit pain », il est tout à fait de chez nous. Pourquoi, du reste, hésiterions-nous à l’employer, puisqu’il est sonore et pittoresque ?
On se pâme devant les expressions désuètes des Canadiens, des Suisses, voire des Sud-Africains, et on se moque des particularités de notre langage. C’est une erreur. Les mots «drève» et «pistolet» sont bien jolis. Continuons donc de les employer. D’ailleurs, pour nous faire plaisir, sans doute, la dernière édition du gros Larousse donne au mot « pistolet » l’acception belge de « petit pain ».
Mais d’où provient donc ce mot ?
Certains ont hasardé l’analogie avec « pistole », pièce de monnaie qui, à leurs dires, représentait la valeur d’un «pistolet».
C’est ridicule, car la pistole valait environ 10 livres, ce qui ferait au moins 40 francs de notre monnaie… Qui imaginerait donner 40 francs pour un « pistolet » ?
Au hasard d’une étude sur le vieux français du XVe siècle, nous feuilletions « Le Catholicon de Lille », glossaire latin-français, publié par Aug. Scheler, par les soins de l’Académie de Belgique (1885), lorsqu’un passage curieux tomba sous nos yeux.
Ce glossaire, vraisemblablement compilé par un écolâtre, donne des mots de latin vulgaire avec leur traduction en français ou en picard de l’époque. A la page 21 du « Catholicon » se trouve le mot « artocopus » que l’auteur a rendu par « pain déli- cieulx ».
Une note de Scheler dit :
«Artocopus signifie à la fois le pâtissier et son produit, „ panis PISTUS IN OLEO ”…».
Les trois derniers mots de cette citation « pain pétri dans de l’huile » nous ont frappé. Ne serait-ce pas « pistus in oleo » qui aurait donné naissance à « pistolet » ?
Dans son dictionnaire, Bescherelle spécifie qu’à Bruxelles, des pistolets sont de petits pains au lait. Actuellement, la plupart des boulangers fabriquent leurs pistolets avec de la pâte ordinaire, mais dans certaines villettes de province, le pistolet est encore un pain au lait.
Autrefois, ce devait toujours être le cas, si on en juge d’après les savoureuses scènes des tableaux de l’école flamande dans lesquels figurent des pistolets blancs et tendres à en faire venir l’eau à la bouche.
Dans ce cas, le mot «pistolet» pourrait provenir d’une forme équivalent à « pistaulaict» venant elle- même de « pistus in lacté ».
De toute façon, il semble bien que « pistolet » (arme) et «pistolet» (petit pain) n’aient rien de commun comme origine et que ce soit le hasard seul qui leur ait donné une physionomie identique.
PIT : habit, queue de morue.
Aussi pit en l’air.
PITCHE (dim. de Pit, Pierre) : Pierrot.
Pitche de Duud : la mort, personne très pâle. Pitchevogel : c’est ainsi que les enfants appellent un oiseau.
PIZEWISS : pipi, en s’adressant à un enfant. Avant de partir en promenade la maman dira : Dut ne schuune pizewiss : fais un beau pipi.
PLADISSE, plaïs, pladaais : plie.
PLAISIRS : oublies, sorte de pâtisserie légère. Le marchand ambulant de plaisirs vendait aussi, dans des cornets, des déchets de couques.
PLANK : planche.
Hij leit de plank af (il est en bas de la planche) : il a raté le coup.
Cette expression provient d’un jeu de quilles ancien, avec cendrée et boule ferrée.
Lorsqu’un joueur lançant la sphère dépassait la planche ou la jetait à côté, le coup était annulé et on criait : « Berwett ! ».
PLAQUETTE : anciennement pièce de 5 francs, crachat.
PLAT (prononcez platt) : plat.
Plat af : crûment, sans mâcher ses paroles, en appelant un chat un chat.
Plattekeis : fromage blanc.
Platzak : moule, sans volonté, désargenté. Plattenblok (sabot plat) : paysan, rustre.
Platneus : nez camus.
Plekgendarm : fruit de la bardane, que les gosses lançent sur les vêtements.
PLEKKE : coller.
Voir plekpot en ploster (pour plekploster).
PLEKKER : plafonneur.
De plekkers zaain in grève : (Les plafonneurs sont en grève). Se dit à quelqu’un qui devrait aller chez le coiffeur car ses cheveux sont trop longs ; jadis, les plafonneurs utilisaient les cheveux coupés pour les mélanger à la chaux.
PLEKLEIR (cuir collant) : raseur.
PLEKPLOSTER (plakplaaster, plekpleister) : flâneur,
raseur, importun, qui fait l’impression d’un emplâtre.
PLEKPOT : pot à colle, quelqu’un qui ne se lave pas souvent, qui ne brosse pas souvent ses vêtements ou n’en enlève pas les taches de graisse.
PLETINCKX : voir « Amigo ».
PLOCH : place (de plaats).
Plochgeld : redevance que paient les maraîchers pour leur échoppe au marché.
PLODDE : prostituée (synonyme de « hoer »).
PLOEIM (pluim) : plume.
Ploeime : plumer (au sens propre et au figuré).
PLOET : argent (vient de l’espagnol « plata » : argent).
PLOSTER : prostituée, plâtre, emplâtre.
Trekploster : pilier de cabaret, pisseur de comptoir (parce que l’arracher au cabaret, c’est aussi difficile qu’arracher un emplâtre qui colle bien !).
POCHEENCE : patience.
« En betche pocheence » (un peu de patience).
PODEKKE : juron.
PODOEMMEKE (de potferdoemme ! juron) : petit pain gris avec beaucoup de raisins de Corinthe.
PODOUJE : juron.
POECHENEL ou pouchinel : polichinelle.
Hij es oengestuute gelak ne poechenel van Toone
(il est fagoté comme une marionnette de Toone) : il est accoutré de façon ridicule.
POECHENELLEKELDER (cave aux polichinelles) : théâtre des marionnettes.
Poechenellespel (poesjenellenspel) : pièce pour le théâtre des marionnettes.
POEF : dette.
Poeffer : emprunteur, débiteur.
Poef doôn et faire du pouf : emprunter de l’argent. Poeffer ! Poeffer !
Met uw gat vol schuld Ge moet uw schuld betalen Of ge krijgt nen bult. (A. De Cort)
A Mons : « su l’pouf gratis » : sur le compte d’autrui.
POELINK ! (paling) : anguille, cri des marchands d’anguilles qui déambulaient par les rues avec leur marchandise vivante contenue dans un grand panier sur une brouette.
Aussi : personne maigre.
Style poelink (style anguille), style nouilles, ainsi désignait-on les nouveautés lancées par Victor Horta dans l’architecture et l’ameublement.
POEMP (pomp) : pompe.
« De mannen van de dikke poemp » : ceux qui font de la jactance.
Poempbaksmoôl : menton en galoche (en bac de pompe).
Zen poemp es af : il est à bout.
POEP : poupée, femelle d’oiseau.
(Aussi « poepke ».)
POEPA : père.
Boempa : grand-père.
POÊPE : prêtres.
Poepegang : rue des Prêtres.
Poêpeneus : nez en bec de corbin. Jeu d’enfant qui consiste à se coller sur le nez la samare (fruit) de l’érable.
POEPPERS : la peur.
Avoir les poeppers : avoir peur.
POESKE : petit chat, terme d’affection entre amoureux.
POETER : père (curé).
Poeter klach af : jeu du cheval fondu.
POLAK : Polonais.
Polakkegang : impasse de Varsovie.
POLEIPEL (pollepel) : cuiller à pot, louche. Il y avait à Bruxelles une rue Pollepel ou rue Cuiller-à-Pot (actuelle rue des finances) où habita, vers 1840, le guitariste et professeur d’Italien Zani de Ferranti. lene dee ’t verstand me poleipels opgeiten eit (quelqu’un qui a mangé l’intelligence avec des cuillers à pot): un malin.
POLLEKE : menotte.
POLENEER (poeleneer) : marchand de volailles. POLICE
Sobriquets donnés aux agents de police par les « ketjes » de Bruxelles, recueillis par Madame Laura Bataille – Hiel, dans « Oostvlaamsche Zanten », octo- ber – november 1944.
- Pour annoncer l’arrivée d’un agent : Max za kindj es doê (allusion au bourgmestre Adolphe Max); « Minuit Chrétien stoêt op ! », « Just op d’eur » (juste à l’heure I); Prosper Verboêl (procès-verbal); « Lup, lup, lup, ’k zal a kraaige ! » (cours, cours, cours, je t’attraperai); « Kak op de meulber » (merde sur le marbre); « Aaizer ! » (fer); « Den dâne mè zen lat» (celui-là avec son sabre), « Vreug en loêt ! » (tôt ou tard); « Champetter ambrass» (le champêtre aux embarras) ; « RoCHelpot, spâv het oeit ! » (crache ça, glaireux); «De kassâstoem- per » (l’enfonceur de pavés); «De veeze numéro» (le drôle de numéro); « Wit en zwet » (noir et blanc); « Dra elle vè ne franc » (trois aunes pour un franc).
- Pour désigner un commissaire ou un officier de police: « Sinte Pieter », « Haailige Roches» (Saint Roch).
- Pour désigner certains agents : « Karpat », « Moer- zoek », « Lagardère », « Spons Pilate », « Sherlock », « Cartouche », « Cyrano », « Chariot », « Zigomar », « Ravachol », « Pandour », « Jan Petrol », « Jan Gat- speegel », «Turk», « Chinuus », «De Milord».
Les sobriquets désignant des agents sont empruntés aux vocabulaires de la botanique, de la zoologie. Ils rappellent des aliments, des défauts physiques ou moraux et des vêtements. Nous trouvons ainsi : « Bloemkuul » (chou-fleur); « Panheiring » (hareng à frire), « Krummenhond », « Colibri », « Rattevergift » (mort-aux-rats); « Loeizenderm » (boyau de pou); « Pièrestront » (crottin de cheval); « Cervolas », « Bloempanch », « Bloemzak », « Jan jKoleere », « Jan Arroje » (en rage); «Jan Lawaait» (bruit); « Waai- vetoekker » (batteur de femmes); « Hettefretter » (pisse-vinaigre), «Muudenèr» (assassin), « Genèvel- flesch » (bouteille de genièvre), « Pachacroute », « Roméo, de platvoet », « Jef Moustache », « Jan Trompet», «de Neus », «de Schieve », «de Bleis » (le gonflé); « Zonder oêsem » (sans haleine), « Plat- ten boeik » (ventre plat); «Den Totteleir» (le ba- fouilleur); «Accordéon», «Tire-bouchon».
PONT : I ivre (poids), cent francs.
POOIERING : râclée, tripotée.
Schuermans : « poedering », « poeiering » : een pak slagen, eene afrossing, borsteling.
POON : argent.
On lit dans Schuermans « Algemeen Vlaamsch Idio- ticon » : Hij heeft geen poen : hij heeft geen geld (pays d’Alost).
Synonymes : geld, ploet, oude, kloppers.
- Paul Hermant compare « pôn » à « pognon », en argot de Paris.
POOT : porte cochère, impasse.
Hij wunt in de poôt : il habite l’impasse. Wallooisepoôt : impasse saint-gilloise, dite des
punaises.
Poôtebienen : jambes arguées (en forme de porte cochère).
A veuie poot stoet ope (votre porte de devant est ouverte) : se dit de quelgu’un qui a omis de boutonner sa braguette.
POQUETTES : variole.
POSPAPEE : papier de soie.
Hij es in pospapee (il est en papier de soie) : il est très frêle.
POQUETTES (les) : variole.
POSSE (Pasen) : Pâques.
Posâr (Paasei) : œuf de Pâques.
Possejas : meilleur veston ou redingote, qu’on met aux jours de Pâques.
« Un bouc grand lorias Qu’avait mis ’s posse ias. »
(Coco Lulu : « El Bouc et l’rinard ».)
Hij es op zaain posbeste : il a mis ses meilleurs vêtements (étrennés à Pâques).
POST
Ne post pakke : aller très vite, aller un train de poste, tomber, se flanquer par terre.
POSTUUR : statue, statuette.
POT : pot.
pot-pot : jeu de cache-cache commençant par un coup de pied sur une boîte à conserves.
Potstamper (celui qui donne des coups de pied à un pot) : footballer à la manque.
POTAFER : pot à fer, chaudronnier.
Zoe zwet as potafer : noir comme un pot de fer. Potafer doit avoir été un croquemitaine, car il figure sous cet aspect dans « Vlaamsche Kinder- spelen uit West-Brussel », signé A. De Cort.
« Den Pot-à-fer, sat van den Brandewijn,
» Schreeuwden oock als een mager Swyn » Pot-à-fer, Pot-à-fer, herrom conquerrom. »
Hy sagh daer uyt als eenen moriaen En conde schier op syn beenen niet staen. »
(Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael-Dicht, etc)
(Le Pot-à-fer, saoul de genièvre — criait aussi, comme un porc maigre : Pot-à-fer, Pot-à-fer, herrom conquerrom.
Il ressemblait à un Maure — et tenait à peine debout sur ses jambes.)
Jadis, dans les rues de Bruxelles, d’Anvers et d’autres villes, on voyait circuler un réparateur ambulant de chaudrons, de casseroles, de seaux, etc. Il criait, à la ronde : « Potafer ! Potafer ! ». Cet appel donna naissance à l’expression « noir comme potafer » appliquée aux gens malpropres. Or, en 1921, dans l’intéressant périodique « Nederlandsch Tijd- schrift voor Volkskunde », le Dr Robert Foncke publia une petite note au sujet de ce qu’il orthographie « potafeir » et « pottefer ». Les chaudronniers ambulants étaient, la plupart, des bohémiens, parlant un français corrompu et criant : « pot à faire!» devenu «potafer». Il ne s’agissait donc pas, comme on pourrait le supposer de « pots de fer». En Espagne aussi, les chaudronniers ou « cal- dereros » sont, la plupart, des gitans très habiles dans l’art de forger et de réparer les métaux.
POTTEKEIS : fromage composé moitié de fromage de Bruxelles, moitié de fromage blanc.
« Quetje Corbeau
Sul tek d’un arbre stampé.
Tenait dans s’bek un pottekees. »
(« Fable de Quetje Corbeau », par Coco Lulu.)
Recette de pottekeis : vous prenez des parts égales de fromage blanc (plattekeis) et de fromage de Bruxelles (ettekeis), vous mélangez, vous ajoutez de la moutarde, vous hachez des échalottes, vous travaillez bien le tout, vous y versez, en mélangeant bien une demi-gueuze, vous laissez reposer un peu et vous dégustez.
POTTEZOEIPER : se dit de quelqu’un qui sait boire beaucoup de « pots » (verres).
POUR : dans l’expression « Qu’est-ce que c’est pour un ?» (Qui est-il ? Quel genre de personne est-ce ?). Se trouve dans le dialecte flamand et notamment dans : « Wel Man, wat voor een Mensch zijt ghii ?» (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle.)
POURRITE : pourrie.
PRAKKELEUS : périlleux, dangereux.
PRANILLE : praline.
PRATIQUE : personne réputée pour sa ruse, pour son humour, pour sa façon de se débrouiller, ou pour l’ennui qu elle cause.
«Une fameuse pratique» ou « ’t es e pratikske » :
c’est un original.
PRECEES : exact, précis.
« Ick sal ’t u segghen. En nu in ailes gaen precies en wel uytlegghen. » (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle.)
PREI : paie, salaire.
PRENOMS
Wâre (Edouard).
Dize, Dizerei (Désiré).
Fred, Fretche (Alfred).
Swaske (Françoise).
Lion (Léon).
Mille (Emile).
Tiodoor (Théodore).
Margezèfe (Marie-Josèphe).
Mille (Pétronille).
Taveeke (Octavie).
Treis (Thérèse).
Hiètt, Hièttche (Henriette).
Wannes (Jean).
PRINCHESKOEK (prentjeskoek) : cougnou, cougnolle, couque de Noël.
PRINKÈRE : hanneton.
Les chasseurs de prinkères : célèbre compagnie d’allure militaire qui, autrefois, chaque printemps se rendait à Uccle-St-Job, chasser les hannetons.
Joe Diricx de ten Homme explique ainsi l’origine du mot « prinkère » : l’enfance — cet âge est sans pitié — a pour coutume d’envelopper le hanneton dans un cornet de papier, ne lui laissant de libres que les deux premières pattes. Alors, la pauvre bestiole semble gesticuler de ses deux bras comme un prédicateur dans sa chaire. Chez les vieux Flamands, « preelcheer » signifie un Dominicain, un prêcheur, d’où, par corruption, les Marolliens ont fait « prinkère ».
Les gosses chantaient un refrain qui, croyaient-ils, avait le pouvoir de faire voler le hanneton qu’ils tenaient prisonnier par un fil :
Vleege, vleege, meuleke,
Da bichke goe no ’t meuleke
Over de blokke
Over de zokke
Over ons Leevrâ kerkhof !
(Vole, vole, petit moulin — cette petite bête va au petit moulin — au-dessus des sabots — au-dessus des chaussettes — au-dessus du cimetière de Notre- Dame !)
PROBER et probeiren : essayer, tenter.
De l’espagnol : probar.
Ge moet ne ki probeire : Essaie donc ! (Avec une nuance de défi, pour dire à quelqu’un qu’il n’oserait pas faire une certaine chose, sous peine de représailles.)
Allei, swales dat de processe passeit : allons, tandis que passe la procession ; profitons d’un temps d’arrêt pour boire encore un verre.
PROEIS : Pruss ien.
Hij heit de Proeis gezeen (il a vu les Prussiens) : il est pompette.
PROET (praat) : bavardage.
Flave proêt : insanités, sottises, choses sans intérêt. Stameneiproêt : ragots de cabaret.
PROFAAITELAAIK : avec profit.
L’Espagnol, en quittant la table dit à ceux qui restent, relate H. Van Vreckom : « Buen provecho » (bon profit) que l’on traduit comme profaaitelaaik par « que votre nourriture vous soit d’un bon profit ».
Eet profaaitelek kuûpe : acheter quelque chose bon marché.
PROFAAITERKE (de profit) : chandelier permettant de brûler entièrement une bougie.
PROFECIAT : félicitations !
Lorsque Mme de Selliers de Moranville, emprisonnée à la Porte de Hal, sous la domination française, fut libérée, la foule qui attendait sa sortie de prison, l’accueillit aux cris de « Profeciat ! Profe- ciat ! ».
Et quand, le 26 juillet!821, la célèbre pythonisse M“” Lenormand fut acquittée par la Cour d’Appel de Bruxelles de l’accusation d’exploitation de la crédulité, la foule l’acclama aux cris de : « Proficiat ! Proficiat ! » que Mu* Lenormand orthographie « Pro- phiciat» dans son livre «Souvenirs de Belgique».
PROT : pet.
PUKSKES : poquettes.
PULLEKE : pilule.
A un gosse fourrageant dans son nez, on demande — Mokte pullekes ? Fabriques-tu des pilules ? Pullekes : pelures du pain frais, qui se détachent aisément avec l’ongle.
PUT : puits, trou.
Sterfput : dégagement d’égout, terme technique employé par les architectes, les constructeurs et les administrations communales.
Hij kloegt (klagen) de putten oeit de grond : il se lamente.
PUUS, puuske : un somme.
Ik goên en puuske doon : je vais faire un somme.
PUUT : patte, main.
Puute af : bas les pattes !
Op zen puut speile : réclamer. Se dit aussi dans la forme française : jouer sur sa patte.
D’as de wil van God dat de keeke op heule bluute puute luupe (c’est la volonté de Dieu que les poules courent pattes nues) : se dit à quelqu’un se rebiffant contre la malchance ou l’injustice du sort et pour l’engager à tout accepter avec philosophie.
PUUTELEIR (« tripoteur ») : «chipoteur», un homme qui agace les femmes ou qui veut tâter leurs charmes, qui les « pelote ».
QUACKELBERGH : nom ancien de la Montagne des Cailles.
QUACKELSTRATE : rue des Epingles.
QUAMËME : guand même.
QUART : voir «virdiël », 1,25 gramme.
QUARTIER : log is de deux pièces.
L’avis «quartier à louer» affiché à Bruxelles, fait sourire les François.
Jadis, un « quartier » comprenait parfois plus de deux pièces, à preuve cette annonce que nous avons retrouvée dans le « Journal de la Belgique » d’août 1831 :
« On demande quartier de quatre places (sic) avec cuisine, dans les environs de la ville. »
(A rapprocher du mot espagnol « cuarto » : appartement.)
Anciennement : quartier : bordel ; quartierhoere :
« putaine publique» (Dictionnaire François Flamen, de Van Waesberghe, 1624).
QUETTE CHOSE : quelque chose.
RA (rouw) : deuil, chagrin, peine.
RAAIK (rijk) : riche.
- De Cort a relevé, comme synonymes de riche : ploet hemme, me peiper zitte, me kloppers zitte, er dik in zitte.
Hii es raaik, zen gebeure hâve kooie (il est riche, ses voisins gardent des vaches). Se dit d’un vantard se prétendant fortuné, mais il est le voisin de vachers et lui-même en est un.
RAAIZEBOENTCHE (glijbaan) : glissoire.
RABATCOL : viande de mauvaise qualité, déchets de charcuterie, mot surtout employé à l’armée.
RABOT : ri botte.
RAMENANT : déchet, rebut.
A comparer avec le mot anglais « remnant » : reste, « to remain » : rester, demeurer.
Schuermans : «Rammenant» wordt in Brabant ge- bruikt voor : allerlei mengelmoes, overschot of kleine hoeveelheden tesamen.
RAMMELE : battre.
Rammelink : tripotée.
« Ousque les libéraux se foutaient des baffes entre euss quansqu’ils avaient reçu une rammelink de permichion des calotins. » (Le voyage de Jef Krolle- kop, «Le Sifflet», 9 octobre 1904.)
- Van Vreckhom le fait dériver de l’espagnol ramalazo : coups donnés avec un bout de corde, traces que laissent ces coups.
En rammelink kraaige : recevoir une tripotée.
RAMMOER (rumeur) : vieux mot figurant dans la pièce comique « De Bervoete Bruers », représentée à Bruxelles en 1559.
Sonder1 veel rammoers : en peu de mots.
Il figure aussi dans la « Chronyke van Antwerpen » du XVIe siècle et dans ce sens signifie « rumeur ».
RAMONACH : raifort.
- Van Vreckhom le fait dériver de l’espagnol « remoelacha » : betterave.
Le mot « ramonach » se trouve dans « L’Almanach de Milan pour l’année 1762» imprimé à Bruxelles, chez Jean Léonard, Libraire de la rue de la Madeleine, montant à la Cour, et dans lequel de brefs conseils pour l’agriculture sont donnés chaque mois.
Nous trouvons, au mois d’août :
« On sème des épinars, laitue cresque, choux de Milan, oignons, oseille, cibouilles, cerfeuil, salade des Chanoines, ramonaces ».
Cela prouve que « ramonache » ou « ramonace » a depuis longtemps droit de cité dans notre ville. Ramonachegang : impasse du Corroyeur.
Une annonce notariale, parue en 1822, dans « Le Journal de la Belgique », parle du cul-de-sac « vulgairement nommé Gance (sic) des Rammenas », dans la rue Nuit-et-Jour.
RANDOEILE : faire la vadrouille, vadrouiller.
RANSEL (ransel) : sac, tripotée.
Afranselen: battre quelqu’un (mentionné par Schuermans).
RAPPES : croûtes ulcéreuses.
Rappekop : teigneux.
RAT DE CHAMBRE
Celui qui, autrefois, aux ventes publiques de maisons, poussait les enchères alors qu’il était insolvable. D’après un usage ancien, il recevait une prime quand il avait fait 50 enchères, ce qui augmentait le prix du bien.
Le notaire C. D. Delporte, du Grand-Sablon, m’écrivit : « Les individus douteux, pratiquant le métier de « rat de chambre » étaient la terreur des notaires, parce qu’ils faussaient les résultats des ventes. Depuis longtemps les « rats de chambre » ont disparu, à Bruxelles ».
RATTE : en une fois, tout à coup.
RATTEVANGER (chasseur de rats) : insulte.
RATTEVALLE (pièges à rats) : c’est le cri que lançaient naguère à Bruxelles des enfants colporteurs qui
déambulaient, portant sur l’épaule toutes sortes d’objets de fil de fer, tels que pièges, etc. Ils criaient « Rattevalle, ni pas cher ! ».
RATTEKWAKER : mêle-tout ; qui intervient, sans autorité, dans les conversations.
RAUT (rij) : rangée.
RÉCURER : écurer.
RÉGLOETE : reines Claude.
REKSKE (de rekken : étendre, étirer) : un long chemin.
RELOQUETER (de loque) : nettoyer par terre avec un torchon mouillé.
Loque à reloqueter (prononcé : locarlocté) : torchon. La langue française est riche, très riche ; c’est bien entendu. Tout le monde est d’accord. Et elle a fait ses preuves. N’empêche qu’il lui manque encore pas mal de mots pour être complète. L’Académie du Pont des Arts ne s’en rend sans doute pas compte ; sinon, laisserait-elle passer les occasions de s’enrichir que lui offre, avec une persévérance infatigable, le français du Belge moyen, le petit Belge de Bruxelles, de Wallonie et de Flandre ? La mine en est copieuse et les filons sans nombre. Qu’est-ce qu’une loque ? Les Quarante répondent : « Loque. — Etoffe réduite en lambeaux par suite de l’usure. Exemples : tomber en loques, etc ». Un chiffon, quoi !… Il y a dans cette définition un dédain non dissimulé, un mépris évident pour la chose minable, déchirée, hors d’usage, vouée à la poubelle.
Eh bien, que ces messieurs à l’habit vert demandent donc l’avis des ménagères de ce pays sur leur définition ! Ils les verront cramoisies, le souffle coupé d’indignation et de colère. La loque, leur loque, un chiffon ? Mais c’est un objet précieux, nettement découpé en carré impeccable ! La loque, c’est l’instrument sacré de la propreté des vestibules et des trottoirs. C’est l’une des divinités du ménage !
Et comment l’Académie la nomme-t-elle, leur loque? Un torchon, ni plus ni moins… Un torchon ! A-t-on idée et n’est-ce pas proprement insupportable ?
Ah ! on le voit bien, ces Français ne savent pas ce que c’est que nettoyer, récurer à fond la dalle et le pavé, jusqu’à ce que cela reluise, sans une trace de semelle ou un grain de poussière. Or, la brosse est aveugle, l’eau est indifférente et fuyante. Ce qu’il faut, c’est la loque obéissante et précise, c’est l’œil aux moindres interstices, les doigts intelligents et souples — et la croupe en l’air. La loque reloquette (prononcez rlocte) c’est-à-dire qu’elle finit et parachève l’ouvrage, jusque dans ses détails, à la belge. On l’appelle respectueusement la loque à reloqueter…
(« Pourquoi Pas ? », 21 novembre 1947.)
REMETTRE (ou rendre) : vomir (aussi dégobiller). Commerce à remettre : commerce à céder.
REPPEGE : vilain, galeux, teigneux. En argot des voleurs « rappig » que Teirlinck traduit par « schruf- tig ».
RESTER : habiter.
« Je reste rue Haute. »
REUBBEKES : petites côtes plates de mouton, que les ménagères bruxelloises mettent dans le ragoût.
REUBBENE : côtes (du corps humain).
REURE (roeren) : remuer, agiter.
Zen toeng reure : médire.
Hoe mier da ge in ne strond reurt, hoe mier dat hem stinkt : plus on remue une merde plus elle pue.
REUZE : disputes.
Reuze in ons strotche : on se dispute, dans notre ruelle.
Reuze zeuke : chercher des « ruses ».
RIDICULE : réticule (n’est plus usité). Nous ne résistons pas à la tentation de citer cette annonce parue dans le « Journal de la Belgique » le 3 décembre 1831.
« On a trouvé jeudi, place de la Monnaie, un ridicule contenant differens objets, etc. »
ROCHEL : glaire.
RoCHelpot : celui qui crache des glaires.
ROECHELE : trifouiller, bougonner.
ROEFFELE : écurer (à Bruxelles, on dit «récurer») frotter très fort sur une chose pour la nettoyer. Roef roef : quelqu’un qui se dépêche en travaillant
sans faire son ouvrage soigneusement.
A Mons, une Marie rouf-rouf est une femme qui fait tout à ia hâte (cité par Sigart).
ROEIG : (du flamand ruig : rude, mal léché).
Es da roeig ! : que c’est vilain !
Roeig maske : vilaine fille !
ROEIGOET’ : (du flamand ruigaard : ours mal léché, brute) : laid, vilain.
ROEKELUUS (roekeloos): téméraire, brusque, sauvage. ROEP (raap) : navet, montre.
ROEYE : (Onze Leeverâ ten). Onze-Lieve-Vrouw-ten- Rood ; Notre-Dame-au-Rouge. Quartier de la rue d’Anderlecht qui a ses kermesses et réjouissances annuelles.
On prétend, disent Henne et Wauters, que le nom Onze-Lieve-Vrouw-ten-Rood est une corruption de Onze – Lieve – Vrouw – Raed, Notre – Dame – au – Bon – Conseil.
Remarquons qu’à Uccle, le nom de la rue Rouge est une mauvaise traduction de Rodestraat, c’est-à- dire la rue vers Rode.
ROEZIG : en colère, fâché, enragé.
Roezig van colère : enragé de colère.
ROK : jupe.
Och errrme, da meens heu rok es te keut van vui geweudde ! (La pauvre, la jupe de cette femme est devenue trop courte devant) : elle est enceinte.
ROLLEKES (roulettes).
Het goet op rollekes (ou op willikes) : cela va sur des roulettes.
ROMMEL : bruit, tumulte, bourdonnement.
ROMMELPOT : vieil instrument de musique en honneur autrefois, tant dans les provinces du nord qu’en Espagne où il était appelé « zamboza ». C’était un pot ou une boîte cylindrique, tendu d’une peau de lapin, percée en son milieu d’un trou par lequel passait un brin de jonc. On frottait le jonc de la main légèrement humectée et les vibrations se répercutaient à l’intérieur du récipient. Le « rommel- pot » et la «zamboza» sont encore en honneur, aux réjouissances populaires, en Flandre et en Espagne.
Les Mentonnais ont aussi un « rommelpot » qu’ils appellent « pignatta » (marmite).
A Wakken, petit village de Flandre orientale, le « rommelpotloper » accompagne les vieilles chansons au moyen d’une boîte de fer blanc, de 30 cm de haut, sur laquelle est tendue une vessie de porc percée en son milieu par une baguette piquée dans un morceau de carotte. En frottant ce dernier sur la face intérieure de la vessie, le musicien obtient un bruit sourd.
En Espagne, c’est surtout aux fêtes de Noël qu’on entend la « zamboza » accompagner des «villan- cicos » ou chants de nativité.
RONDHOELER
Celui qui, dans les salles de danse populaires, encaissait une rétribution des danseurs, après chaque danse et qui, à cet effet, circulait parmi les couples.
« D’une force herculéenne, bien que pas très grand, le « Steer » (le « taureau ») était moniteur de boxe française à la Maison du Peuple de Bruxelles et donnait des démonstrations, à ce titre, sur les places publiques, à l’époque du « Bitter Vandervelde » !
Le soir il faisait le service de « rondhoeler » (encaisseur) dans la salle de danse Rubens, rue des Visi- tandines, de là son surnom de « Susse van de Rubens». Il était chargé de mettre les batailleurs à la raison.
A la rue Haute, il était le « veuvechter » dont le coup de tête ne pardonnait pas. Il pouvait supporter un poids de 200 kg sur ses épaules, pour vous donner une idée de sa force.
Son fils, d’ailleurs, a hérité de cette force puisque, lors de son service militaire, artilleur à cheval, il souleva sa monture sur ses épaules ! » (La Lanterne)
ROSE MOUSSEUSE : rose-mousse.
ROT : pourri.
Rotzak : (sac pourri) injure.
Es da ni spaait da zoe e koppeke mo rotte (n’est-ce pas dommage qu’une tête pareille doive pourrir ?) : se dit, à propos d’un haut fait ou d’une action d’éclat, à quelqu’un, pour flatter son intelligence.
ROTTE MAGO
Etant enfant, j’ai souvent entendu, à Bruxelles, une insulte, « Rotte Magot », à laquelle l’adjectif « Rotte » (pourri) donnait un accent particulièrement énergique. En réalité, les deux mots proviennent de « Rothomago », qui était le titre d’une pièce de théâtre jouée au siècle dernier.
D’autre part, « rothomago » est un mot d’argot parisien employé par les saltimbanques et désignant le ludion dont ils se servent pour dire la bonne aventure. Le spectacle avait de quoi frapper les esprits frustes. Le naïf voyait, sur une table, un bocal rempli d’eau, contenant une sorte de petit diable et couvert d’une peau tendue sur laquelle le diseur de bonne aventure posait simplement la main. Une légère pression sur la peau suffisait à faire monter ou descendre le ludion. Par contraction, on appelait aussi le rothomago Thomas.
Il semble que la pièce «Rothomago» ait eu un grand succès à Bruxelles, car, le 26 février 1902, « Le Petit Bleu » dans son « Carnet de la Ménagère » publia une recette :
ŒUFS ROTOMAGOT
Pas mauvaise du tout, cette manière de servir les œufs, trouvée dans un des bons restaurants de Bruxelles.
Je donne les proportions pour deux personnes ; nos maîtresses de maison pourront alors doubler ou tripler ces proportions, d’après l’importance de leur ménage.
Pour quatre œufs, i! faut deux fines tranches de jambon, une petite saucisse au vin, longue d’un doigt ou une saucisse de Francfort et deux ou trois cuillerées de purée de tomates.
Prenez un de ces petits plats ronds dans lesquels on fait les œufs au miroir ; beurrez-le, rangez-y les deux minces tranches de jambon et dessus, cassez les quatre œufs frais, l’un à côté de l’autre. Saupoudrez de sel — moins que d’habitude à cause du jambon — et de poivre ; versez autour des œufs la purée de tomates passée au beurre pendant quelques minutes et, entre les œufs, mettez la petite saucisse tranchée en deux dans le sens de l’épaisseur.
Ajoutez quelques noisettes de beurre et placez au four — à bon feu. Au bout de quelques minutes, les œufs sont à point, c’est-à-dire que le blanc est pris, tandis que le jaune reste mollet.
Servez-les aussitôt dans le plat même où vous les avez préparés.
ROTTERINK : « là où cela pourrit» : marais, marécage.
ROZEMOOS : situation embrouillée, cris, bruits mêlés. Figure dans le « Woordenboek van Bargoensch », d’Is. Teirlinck. « Roezemoezen » rouer (supplice). Schuermans : « Roezemoes » : gerucht, geruisch,
lawijt.
ROUTCHOUTCHOU : personne masquée au Carnaval. Cri des masques. A Mons : routoutiou.
RUES
Voici quelques dénominations populaires de voies publiques.
Aaizermanstrotche (ruelle de l’homme de fer) : rue de la Borne.
Ave â Met (ancien Vieux-Marché): place Anneessens. Azaaingang (impasse du Vinaigre) : rue du Char. Barakkestroet : rue du Canal. Le nom provient de ce que les Espagnols avaient construit contre le mur du Béguinage des baraquements pour y loger leurs chevaux. Ces abris subsistèrent jusqu’en 1782. Bayerstroêt (rue de Bavière) : rue de Dinant. Beulestroêt (rue du Bourreau) : rue du Faucon. Bloempanchgang : rue de l’Abricotier.
Blokkestroêt : rue Wijnants.
CaricolJegang : impasse des Escargots.
Chaussée (la) : chaussée de Waterloo, à Saint-Gilles. Deevestroêt (rue des Voleurs) : rue des Ménages. Deufkes (op de) (sur les Pigeonneaux) : impasse Deppekens.
Epingles (rue des) : voir Spellekesstroêt.
Gebroken Hof (ferme démolie) : rue de Nancy. Honnestroêt (rue des Chiens, anciennement rue du Nid de Chien) : rue de Belgrade.
Hooreblaaik : rue de la Buanderie (litt. pré aux Putains). Cette rue fut tracée à travers une prairie où les femmes venaient mettre blanchir leur linge. Certaines n’étant point farouches, les gars des environs cherchaient aventure à cet endroit.
Kaftenhof : place Jean Jacobs.
Kattestroêt (rue des Chats) : rue de Villers. Keulsestroêt (rue de Cologne) : rue de Verdun, rue des Fripiers.
Keutte Ridderstroêt : Courte rue des Chevaliers. Klaain Zinneke (rue de la Petite Senne) : rue Van Artevelde.
Kwcikkelstroêt (rue des Cailles) : rue des Denrées. Lange Ridderstroêt (Longue rue des Chevaliers) : rue de l’Ecuyer.
Marolle (op de) : rue de Montserrat.
Meskespoot : impasse du Sorbier.
Moorstroêt (rue de la Boue) : rue d’Alost.
Ons Hier in ’t Hofke (Notre Seigneur dans le petit jardin) : rue du Jardin des Olives.
Parsussenberg (peut-être de « Parnasse ») : rempart des Moines, du côté de la rue de Flandre. Péremanstroêt : c’était le nom de la rue des Vers qui a repris sa dénomination de rue Pierman, du nom d’un propriétaire foncier de jadis.
Petit Villa (petit village) : rue de la Plume. Poêpegang : rue des Prêtres.
Polakkegang (impasse des Polonais) : impasse de Varsovie.
Pondermet : place Saint-Jean.
Ramonachegang (impasse du Raifort) : rue Sainte- Thérèse.
Rattestroêt : rue de l’Economie.
Sabots (rue des) : rue Wynants.
SCHaaifpoot (impasse à chier) : impasse du Cadre. SCHaaitstrotche (ruelle à chier) : rue des Brasseurs. SCHaaz (het strotche van) : rue de la Forge.
SCHramoullekes (les escarbilles) : partie de la rue des Minimes entre les rues de l’Eventail et du Faucon.
Sint-Pietespoot : impasse des Liserons.
Sossée (de) : chaussée de Gand, à Molenbeek. Speegelpoot (impasse du miroir) : impasse du
Roulier.
Spellekesstroêt (rue Vésale) : du nom de l’inquisiteur J. Spelleken (XVIe siècle) qui y habitait.
Stienweg (chaussée) : rue de la Madeleine. Strondgang (impasse de la merde) : impasse Meert. Tienstrotche (ruelle de l’Orteil) : rue de la Betterave. Turfzenne (la Senne aux Tourbes): rue de la Vierge Noire.
Visscherszenne (la Senne des Poissonniers) : rue des Poissonniers.
Vollestroêt : rue du Lombard.
Waloeizegang (impasse aux Punaises) : rue Héris. Werm Vlies (het strotche van ’t). C’était la rue du Saint-Esprit (appelée « ruelle de la Viande chaude ») à cause d’un cabaret où le patron faisait passer un courant électrique dans la barre métallique du comptoir, où s’accoudaient les nouveaux clients à à qui on voulait jouer un tour.
Woelegang (impasse des Wallons) : impasse Roge- reau (rue du Houblon).
Zeekestroêt (rue des Malades) : rue Charles Hans- sens.
RUUMER : verre à pied.
RUSES : disputes.
Faire des ruses.
« Il a eu des ruses avec lui. » (Léopold Courouble : Notre Langue.)
SAAISKE (sijsje) : tarin.
SAKKERE (sacrer) : jurer, blasphémer.
SALUT EN DE KOST : cette expression qui doit remonter à l’époque espagnole est formée d’un mot espagnol et d’un mot flamand.
Salut vient de salud : santé.
Kost est le’flamand pour la nourriture.
Autrefois lorsqu’un voyageur se mettait en route on lui disait « Salut en de kost ! ». (Nous vous souhaitons la santé et le vivre I)
A présent, c’est une façon cavalière qu’ont en se quittant les gens de la Marolle.
Certains disent d’une façon plus complète: «Salut en de kost en de wind van achter », soit pour souhaiter bon voyage, soit pour faire remarquer narquoisement qu’ils sont ravis du départ de quelqu’un.
Le complément «en de wind van achter», «et le vent arrière » est certainement un ancien souhait de bon voyage pour ceux qui partaient en mer.
SAROOP : sirop.
Sarôpekrot : crotte au sirop, crotte de Hal. SAVOIR
Ça ne saie pas dedans : cela ne peut entrer, ceci ne contient pas cela.
(Les Espagnols ont le verbe caber.)
SAYET : I aine tissée pour ravauder ou pour tricoter. Sayo et sayeto en espagnol désignent des casaques larges, sans boutons, surtout pour les enfants.
E plotche sayet : une boule de laine.
SCHAAITE : vulgaire chier, péter.
« Lup schaaite » : va-t-en à la merde.
Il y avait jadis, près de la rue des Six-Jetons, un des plus vilains recoins de Bruxelles, appelé « Scheytpoort », la « Porte à Chier ».
SCHeylstraatke : ancien nom de la rue des Brasseurs.
Het sCHaait : la diarrhée.
« Ick wenschte dat gij kreeght voor uwen loon het schijt. » (« Lemmen met sijn Neus », farce du XVIIe siècle.)
SCHaaitkoek : autrefois, longue couque à saveur de « speculoos » et de pain d’épices, ainsi nommée parce que celui qui en mangeait beaucoup ressentait les effets d’un purgatif.
SCHaaitgang : (l’impasse où on dépose des excréments) : impasse du Cadre.
« Schijte-broeck » : pleutre (dans « De Ghedwonghe Griet», farce du milieu du XVIIe siècle). SCHaaitpapee : papier hygiénique.
Hij sCHat huûger as za gat (il chie plus haut que son cul) : c’est un vaniteux.
le sCHaaite oeit ’t zelfste gat : (ils chient par le même trou) : ils sont très intimes. (Locution illustrée par Pieter Bruegel, dans son tableau « Les Proverbes ».)
SCHaaitkar : side-car.
SCHACHEL : avorton.
SCHACHT: un bleu au régiment, recrue.
Une chanson militaire commence par « Schacht bleu pilou… ».
SCHLACHELBANK : jeu de société que me décrivit, en 1953, l’excellent comédien bruxellois Gustave Libeau : avant la guerre de 1914 il n’était pas de fête de famille, à Bruxelles, qui ne se terminât par un « schlachelbank », que ce fût un mariage, une première communion, un anniversaire, un banquet de « chocheté ». Le « schlachelbank » était un damier de 16 ou 24 carrés contenant chacun un dessin. L’animateur montrait chaque dessin à l’aide d’un bâton et posait à l’assistance des questions qui toutes, devaient se terminer par une rime. Supposons que le premier dessin représente un agent de police, le deuxième une lunette de cabinet, le troisième des seins, le quatrième une chauve- souris.
Le commentateur demandait, montrant le premier dessin :
- Es da ne gardevil ? (Ceci est-il un garde-ville ?)
- Ja, da d’es ne gardevil ! reprenait l’assistance en chœur.
- En ès da en heuskesbril ? (Et ceci est-il une lunette de W.C.?)
- Ja, da d’es nen heuskesbril !
- En ès er wel eemand thoeis ? (Et est-ce qu’il y a quelqu’un à la maison ? Du monde au balcon ?)
- Ja, er ès wel eemand thoeis !
- En ès dat d’en vleeremoeis ? (Et ceci est-il une chauve-souris ?)
- Ja, da d’es en vleeremoeis !
Ensuite venait la critique d’un personnage de l’actualité, comme ceci :
- En ès da Menhier Van Dop ? (Et ceci est-il Monsieur Van Dop ?)
- Ja da d’ès Menhier van Dop !
- En hut da ne klachkop ? (Et est-ce ce qu’on appelle une bille de billard ?)
- Ja, dat hut ne klachkop !
Le mot « Schlachelbank » paraît venir de l’allemand « Schluesselbank » désignant un «banc de serrurier». Le jeu, d’origine juive, aurait été, au début, une méthode de lecture collective pour les enfants israélites apprenant, en chœur, les noms d’objets représentés dans des casiers.
A rapprocher aussi du « schlachelbank » les toiles divisées en rectangles et que des bonimenteurs dépliaient aux kermesses pour montrer les divers épisodes d’un crime affreux qu’ils décrivaient à l’aide d’une canne, en chantant une complainte appropriée.
SCHANDOEL : qui fait parler de lui. Vous êtes quamême un schandoel !
A l’époque — aujourd’hui défunte — du carnaval, les « scandaules » désignaient de joyeux masqués sortis des quartiers populaires.
S’appliquant sur le masque un masque Moins laid que nature parfois Dans la boue et par la bourrasque Vont les scandaules bruxellois Le scandaule…
Est bien une fleur du terroir Que le carnaval fait éclore… écrivait saint Michel dans le « Petit Messager de Bruxelles» le 12-2-1902.
Un ouvrier est prévenu d’avoir, le jour du Carnaval, résisté avec violence à la police, qui venait le gêner dans ses petits ébats. Il nie énergiquement le délit.
- J’étais allé prendre un petit verre à l’Etoile rouge, vous savez bien, monsieur le président ? Alors que j’étais en schandaule avec Jeph. Jeph me dit comme ça : le faro est mieux au Vieux Coq… Vous devez connaître ça, monsieur le président… Voilà le baes de l’Etoile qui se met en colère… moi aussi… on commence à crier Jan Vermile… la police entre et arrête Jeph. Moi, je dis comme ça : M. l’agent, est-ce que vous auriez la bonté de lâcher mon compagnon ?
- L’agent me saute à la gorge, me donne des coups de pied et des coups de poing… une dégelée, monsieur le président… même que voici mon mouchoir qui est tout ensanglanté, et mon foulard, qui est plein de sang aussi, et mon devant de chemise, absolument déchiré et taché…
L’inculpé tire successivement les objets de sa poche et les présente au tribunal.
Le président. — Nous connaissons ce système de défense. C’est toujours la police qui a porté les coups.
- Vous avez sans doute le corps couvert de meurtrissures, que vous avez oublié de faire constater ? Le prévenu, vivement. — Pour ça, non, monsieur le président ! Je n’ai pas la plus petite égratignure ! Le tribunal condamne cet infortuné scandaule à huit jours de prison.
(Journal des Tribunaux, 1884.)
SCHAMPAVIE : faire schampavie : disparaître, subrepticement, filer à l’anglaise.
De l’espagnol « escampavia » : bateau employé par les douaniers militaires pour la poursuite des contrebandiers ; ou de l’espagnol « escampada via » : chemin à découvert ; ou de l’espagnol «escampar»: débarrasser. On dit indifféremment « jouer schampaviê » ou « faire schampaviê ». Schuermans : Hij heeft weêr schampavie gespeeld. « J’ai pris mes claques et j’ai jouei scampavie avec euss dans l’Italie» (Le Voyage de Jef Krollekop, «Le Sifflet», 9 octobre 1904).
Scampavie ou schampavie est à rapprocher du mot wallon «camper»: jaillir, sauter, éclater, du bas latin « scampare ».
SCHAPROË : armoire.
HoeksCHaproê : armoire de coin, encoignure, un bossu (parce qu’il peut mettre sa bosse dans un coin).
SCHAUL (school) : école.
Schaulvos (renard d’école) : instituteur.
Get not sCHaul geweist in de vacance (tu as été
à l’école pendant les vacances) : tu n’as pas été à l’école, tu n’es pas instruit.
SCHAVEIGER (schoorsteenveger) : ramoneur.
Terme familier pour s’adresser à quelqu’un.
A la fin du XIXe siècle, on voyait encore à Bruxelles des orphelins qui remplissaient pour les ramoneurs, le rôle de petits Savoyards. Grâce à leur corps fluet, ils pouvaient s’introduire dans les cheminées.
- A. Bertels, de Saint-Gilles, m’a dit que tout en grimpant dans la cheminée, ils chantaient une chanson qui commençait par ces mots : « Hop, papatche, de sCHâveiger ! ».
« Een Schouw vaegher oft Savoyaer… en riep « Aep ; Aep » op syn manier » (Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael-Dicht, etc).
SCHEER : béguin.
Ne sCHeêr doen : faire un béguin, avoir une touche.
A sCHeêr ei a loete valle ! : ton béguin t’a laissé tomber.
«Tamaraboum, di hé!
A la foire, chaque été,
Les joyeux brusseleers.
Allaient pour faire un sCHeêr. »
(« A la foire de Bruxelles », d’Ernest Verhaeghen.)
SCHEILE : louche, myope, borgne.
SCHeile maton : insulte à quelqu’un qui est myope. Courouble l’écrit « sCHeel ».
C’est aussi l’insulte lancée à quelqu’un qui porte des lunettes ou un pince-nez.
Onze sCHeile : surnom irrespectueux donné jadis par le peuple au roi Léopold II.
SCHeile micmaillon : louche (Mac-Mahon ?).
SCHEIR : ciseaux.
SCHeireslieper (scheresliep) : rémouleur.
« Sliep mes en schaer, »
« Veur kindt en vaer. »
(Repasser, couteau, ciseaux, pour l’enfant et pour ie père), dans «De Ghedwonghe Griet », farce bruxelloise du XVIIe siècle.
SCHEIRE (scheren) : raser.
SCHeire zonder ziep : attraper quelqu’un, le rouler. SCHEIRZOLDER : faux grenier.
SCHEIT : pet.
Da vlies heid e sCHetche geloête (cette viande a fait un petit pet) : elle est légèrement avariée.
SCHELLEVISCH : aiglefin.
SCHELM : mauvais garnement, coquin, fripon.
SCHEPPER : garde de sûreté, membre de la police spéciale créée au XIXe siècle par le collège des bourgmestre et échevins de Bruxelles afin de mater la pègre frondeuse des Marolles, du quartier de Notre-Dame aux Neiges et d’autres lieux où il était dangereux pour un étranger de se hasarder. Le barde des Marolles, Coco Lulu (Victor Lefèvre), raconte qu’il se trouvait un jour dans un cabaret borgne où il assista à une rixe. «…Je m’étais blotti sous une table lorsque des sergents de ville et des gardes de sûreté (des scheppers) firent irruption dans la salle. »
» Ah ! qu’il était beau, ce « schepper » de 1830, la sécurité des foyers bruxellois, tour à tour soldat de la commune, pompier, garde-ville, policier, etc. » (Joe Diericx de ten Hamme.)
Les « scheppers » se recrutaient principalement parmi les « capons du Rivage » (voir voet capoen), ou débardeurs, chargés du service des quais des bassins de Bruxelles.
SCHEPSEL : créature.
Roeig sCHepsel : vilaine créature.
SCHERP : rapiat, avare.
«Il est scherp », écrit Léopold Courouble, dans « Notre Langue », veut dire « il couperait une demi- cens en quatre ».
SCHERREWEG (faire) : voler.
« On m’a fait scherreweg d’un demi-franc. » (Léopold Courouble : « Notre Langue ».)
SCHETTERKE : pet.
Champetterke, champetterke A vrâ die loit e schetterke.
(Cité par A. De Cort, dans « Vlaamsche Kinder- spelen » uit West-Brussel.)
SCHEUPPE: arrêter.
« Zemme den deef gescheupt » (on a arrêté le voleur). Dans la même acception on trouve « schoe- pen » dans « Het Bargoensch van Roeselare », door H. De Seyn – Verhougstraete.
SCHEURF (schurft) : gale, teigne.
SCHeurfhond, sCHeurfzak : galeux.
’k Weens hem ’t sCHeurf, en twee keutte poetches,
dat hem hem ni kan krabbe : ceci ressemble singulièrement à une malédiction gitane : je lui souhaite la gale et deux petits bras afin qu’il ne puisse pas se gratter.
SCHEURPAPEE ou zoevelpapee : papier de verre, appelé à Bruxelles papier de sable.
SCHEUT : verre d’une contenance approximative d’un décilitre (quatre environ dans un demi litre). HalfsCHeut : goutte de genièvre.
SCHeutelke (schoteltje) : écuelle.
Petite assiette sur laquelle le charcutier rassemblait les premières tranches des saucissons, pâtés, « bloempanch », jambon, etc. Quand la « scheutelke » était pleine, elle se vendait 15 centimes (zijve cens en half).
SCHIEF : de travers, de guinguois.
SCHieve smoûl : gueule de travers (insulte).
SCHieve lavabo : insulte.
C’est comme SCHieve Lavabo i Celle qui vous a des airs penchés, celui qui examine ses grâces alors que Dame Nature ne lui a point départi la beauté méritent souvent pareil sobriquet marollien, ne trouvez-vous pas ? Le « lavabo » a beau être prétentieux, déceler des soins corporels que la simplicité marollienne estime excessifs (en quoi elle a tort), si le dit lavabo a un pied détraqué, il devient objet risible et lamentable. Ainsi des hommes. (« Les injures marolliennes », par Thyl. National Bruxellois, 3 août 1925.)
SCHief sloege : voler, détourner.
Het zit sCHief : il y a mésentente, cela ne tourne pas rond.
De kaders hangen sCHief (les cadres pendent de travers) : on se boude dans le ménage.
SCHiefgesloege : personnage mal bâti.
SCHILDER (schilder) : peintre (voir « façadeklacher »). SCHilder van ’t plafond van ’t park (peintre du plafond du parc) : se dit d’un fainéant qui est couché dans le gazon en regardant le ciel.
SCHILLE : préoccuper.
Da kan ma ni sCHille : cela ne me préoccupe pas, je ne m’en soucie pas.
SCHIPPERKE : race de chien bruxellois, ainsi nommée parce que les bateliers (schippers) en ont sur leur bateau.
SCHNIK : alcool.
SCHOBEJAK : plaisantin, parfois méchant garnement. Ma klaain sCHôbejakske : terme d’affection d’une mère à son bébé.
- Van Vreckom dit : scobiak, de l’espagnol esco- billa, petit balai et aussi saleté que l’on balaie. Par extension : propre à rien.
Un « schobbejak » d’apès Schuermans est un genre de blouse ou de sarrau qui était porté surtout par les débardeurs (vaartkapoenen).
SCHOËFELINK : (schaaf : rabot) copeaux.
Le mot est passé en picard : skaufelin.
Style sCHoefelink : c’est ainsi qu’on désignait, à l’époque, le « style esthétique », à la Horta.
On disait aussi : style poelink (style anguille).
SCHOEIVE (schuiven) : glisser.
SCHoeif : tiroir.
SCHoeiftoefel : jeu d’adresse de jadis, dans les cabarets. Sur une table étroite était épandu du sable fin. Au bout de la table se trouvaient de petites quilles de bois qu’il fallait renverser en poussant, au moyen d’une longue tige de bois, de minces disques de plomb.
SCHoeiftrompet : trombone à coulisse.
SCHOENKELVOETE : pieds en dedans, pied-bot.
SCHOÊP (schaap) : mouton.
SCHopke : petit mouton (terme d’affection). SCHoepekop (tête de mouton) : désigne quelqu’un aux cheveux « crollés ».
SCHoepekop in ne voeilen handtoek (tête de mouton dans un essuie sale) : injure.
SCHOFFE : disparaître, se cacher, fuir.
SCHoft a ! : cache-toi, disparais (cri d’alarme lors- qu’arrive un agent).
SCHoftaaile ! : disparaissez.
Weg sCHoffe : faire disparaître, voler, cacher.
SCHOK : secousse.
Mé sCHokskes laCHe : rire par saccades.
Hij es op sCHok : il est en bordée.
SCHOLLE : plie séchée.
« A sCHolle » (vieille plie séchée) : insulte.
Est aussi un compliment :
« Oh, men schuûn scholle Van de Marolle.
Viens jusqu’au Deuvelshoek… »
(« Les Crotjes », paroles d’Ernest Verhaegen.)
Une sCHolle est aussi une ardoise.
’t Stoet op de sCHolle (c’est sur l’ardoise), dit la bozinne au client qui boit à poef, pendant qu elle inscrit, sur l’ardoise, sous forme de oellegewiCHt, les consommations dont il est redevable. SCHollezes : injure (surtout entre femmes se disputant).
SCHollekermis : kermesse aux scholles.
Elle est amusante, l’annotation qu’au hasard de nos lectures, nous trouvons dans les « Curiosités de l’histoire musicale des anciens Pays-Bas », d’Edmond Vander Straeten.
Elle concerne le mot bruxellois « schol » (ou «scholle»), désignant une plie séchée.
Quirin Van Blankenburg, musicien néerlandais, né en 1654, mort en 1739, raconte une discussion scientifique qu’il eut avec D. Schol, organiste et carillonneur de Delft.
Il met également en scène le nommé J.-P.-A. Fisher, carillonneur de la cathédrale d’Utrecht, et comme préambule à une savante discussion sur l’utilité de certaines cloches, il commence par cette phrase à double calembour :
« Pendant que je trace ces lignes, arrive ici un pêcheur qui n’aime guère le schol ».
Le pêcheur, c’est Fisher, et le schol (aujourd’hui on dirait scholle), c’est D. Schol.
Ces lignes furent tracées, il y a environ 250 ans. Elles confèrent des lettres d’ancienneté aux « scholles » qui, aux jours de kermesse, flottent comme des drapelets sur les charrettes à bras bruxelloises.
SCHOLLEZALF : onguent gris.
SCHOONE (schoenen) : souliers.
SCHrikschoone : patins.
SCHORSENEILE : salsifis (scorsonère).
SCHORT (tablier de brasseur) : espiègle.
SCHOTEL : écuelle.
SCHotelvodde : lavette (voir ce mot) et aussi femme mal habillée.
Hij heit en sCHotelvodde in zenne mond (il a une
lavette en bouche) : il s’exprime avec difficulté, il a un défaut de prononciation.
SCHOVERDAAINE : patiner (viendrait de « schoeive » schuiven, glisser ?).
SCHRAMOELLE : cendres du poêle et par extension, ce qui, dans les cendres est encore bon à brûler. SCHramoelle-roeper : ramasseur de cendres. SCHramoullenbak : tiroir aux cendres et aussi, bac aux ordures.
SCHramoellenboeik : insulte.
Schuermans : « Schramhoelie » : verbrande hoelie, die doorgaans tôt brandstof nog dienen kan. De « schrammen » : gratter, ce que font, dans les tas de cendres les pauvres à la recherche d’un peu de combustible.
De sCHramoulekes : l’allée qui se trouve derrière la rue du Faucon.
Sous le titre « Fables de Pitje Schramouille » Roger Kervyn de Marcke ten Driessche (décédé à la fin de 1965) a publié d’amusants tableautins en marol- lien.
SCHUUN : beau (du flamand schoon).
Voici une strophe d’une chanson qu’on chantait jadis pour célébrer la beauté des Bruxelloises : De man da-d-in Brussel wiltch trêve Da des ne gelukkige vent Want in Brussel zen de schuunste vrave Das overal bekentch Schuun uuge, schuun oer Emme’s allemoer
De kinne rond en e klaain monde,he.
L’homme qui veut se marier à Bruxelles est un type heureux — car, à Bruxelles sont les plus belles femmes, c’est reconnu. De beaux yeux, de beaux
cheveux. Elles ont toutes, le menton rond et une petite bouche.
SCHUPSTEIL : manche de pelle.
’k Zit op ne schupsteil, dira quelqu’un qui n’a pas d’emploi stable, dont la stituation est précaire.
Un mot de « Scupstoel » : un des chapiteaux historiés de l’Hôtel de Ville montre des hommes empilant des chaises (stoel) avec des pelles (schup).
Il s’agit d’un rébus fournissant le nom de la maison démolie lors de la construction de la seconde aile de l’Hôtel de Ville. Et le mot « scupstoel » désigne le supplice de l’estrapade qui était pratiqué à cet endroit, là où une partie de la place était un marécage. Le patient ou la patiente était attaché à un siège assujetti à l’extrémité d’un long poteau qu’on abaissait dans l’eau fangeuse et qu’on en retirait.
SEFFES (seffens) : tout de suite, à l’instant, sur le champ.
SELDER : céleri.
SENTINELLE : fiente au milieu du chemin.
SÉYU : sureau.
Boules de séyu : bonbons au sureau. « Vous prendrez une cuiliers de fleurs de ceheus » (d’un manuscrit de remèdes de bonne femme, de 1774, cité par le «Roman Pays de Brabant», octobre 1913).
SINCHE (Pinksteren) : Pentecôte.
De lange weik veu Sinche (la longue semaine avant la Pentecôte) : quelque chose d’interminable, un échalas.
Schuermans dit « Cinksen of Cinksendag (vijftigste dag) van ’t Frans « cinquante », wordt in Brabant gebruikt ».
SINJOOR : Anversois.
De l’espagnol senor, Anvers étant habité autrefois par beaucoup d’Espagnols.
SINTE-GELANCHSTROET : rue Saint-Ghislain.
SISTERN : puits, citerne (comp. anglais : cistern).
SLAINCH : femme mal vêtue, mal peignée, mal lavée, débraillée, sans allure.
SLAAIPSTIEN : pierre à aiguiser. Crâne de celui qui se fait raser les cheveux.
SLACHE : pantoufle, savate.
« Ge kraaigt mene slach in a nek » (Je vais te jeter ma savate dans le cou !).
Slache : se dit lorsqu’une chaussure est trop grande. Slache était le pseudonyme de l’excellent humoriste Marcel Antoine.
SLACHENBAAITER (mordeur de savates) : savetier, parce qu’il travaille avec des clous en bouche.
SLAP : détendu, flasque, faible.
Slaphanger : poisson chiffe molle.
Slaptitude : faiblesse.
SLAPLABAR : personne de faible constitution. SLEUTER : clef.
Hij heit de sleuters van ’t presong in zen uuge
(il a les clefs de la prison dans ses yeux) : il a l’air d’un bandit.
SLEUTERE (slenteren) : traîner.
SLOEBBER : mauvais garçon (d’après Coco Lulu). Sloebbere : (slobberen) manger ou boire salement, comme un chien (voir « labbaai »).
SLOEGE (slagen) : frapper.
Op zen koek sloege (voir « koek »).
Hij es er ni oeit te sloege : il y est tout le temps. Vlies met de moech gesloege : viande de qualité inférieure provenant d’une bête qui était si faible qu’un coup de casquette l’a abattue.
SLOEKKER : gourmand.
SLOEPE : dormir.
Sloepmoech (slaapmuts) : bonnet de nuit ou dernier petit verre qu’on prend avant d’aller dormir (en anglais : nightcap).
Oversloepe : dormir en dépassant l’heure fixée pour le lever.
Sloepstrond (merde de sommeil) : chassie (des yeux).
SLONS : femme sale, prostituée.
Figure dans « Woordenboek van Bargoensch » d’Is. Teirlinck : slons : vuil vrouwmensch.
Schuermans : slons : slordig vrouwmensch. Slonswaaif : chiffonnière.
SLOT : serrure.
Achter ’t slot ziHe : être en prison.
SLUM (si im) : rusé, adroit, malin.
Par dérision : maladroit : « Zij gâ ne slumme » (tu en fais un de benêt I).
Sluin zoet (slim zaad) : rusé, malin.
« El sium zoet de Rinard… » (Coco Lulu).
SLUUR : femme misérable, pauvresse, bonne pâte.
En goei sluur : une bonne poire.
Teirlinck donne « slure » : sloor, ellendig vrouw- mensch.
SMAAITE : jeter, lancer.
Mé stientjes smaaite (lancer de petites pierres) : faire des allusions.
Hij smaait mè stienen in menen hof (il jette des pierres dans mon jardin) : même signification.
Zich smaaite : se lancer dans le sens de se vêtir mieux, manger mieux, parler, agir d’une façon plus distinguée, etc.
Smaaiter : vantard, stoeffer, un qui « se jette ». Smaaiting : tripotée.
SMEIRE (smeren) : graisser, lubrifier.
Smeirlap : torchon à graisser, dégoûtant, saligaud, cochon.
« Of siet men desen stock sal ick u rebben smeeren » (Je te graisserai les côtés de ce bâton), dans la farce «De Gedwonghe Griet», XVIIe siècle.
Dun van leir en dik van smeir (cuir mince et graisse épaisse) : une tartine coupée mince et bien beurrée.
SMOCHTERE : manger salement, faire un abus de bonbons. Peut-on le rattacher au néerlandais « sma- ken » : goûter ? Ou à « snuisterij » : brimborion, bibelot ?
Smochtereir : celui qui mange salement ou qui passe son temps à croquer des friandises.
Smochterès (féminin).
Smochterâ : friandises.
A un gosse qui lèche un gâteau et s’en barbouille le visage, la mère dira : voeile smochtereir, g’ètch a beleuberd.
Smochterkermis : kermesse de jadis dans la banlieue bruxelloise où on s’empiffrait.
SMOKKELAGE : fraude, contrebande.
SMOOL : gueule qui a comme synonymes : smikkel, bakkes, façade, tauter.
A smôl to : ferme ta gueule !
Rottesmôl : gueule pourrie (insulte).
Schievesmô! : gueule de travers (insulte).
Smôlvuller : qui boit et mange aux dépens d’autrui. Smôl berg op (la gueule en l’air) : boudeur.
- Zene smôl past op al de geloeze : (sa gueule s’adapte à tous les verres) : il aime bien boire.
Hij hei ne smool van e vais process-verboel (il a une gueule comme un faux procès-verbal) : il a l’air d’un faux jeton.
Van ’t smoeltche : la « hure » vendue par les charcutiers.
A smôl toe, ’t es pantomine : superlatif pour ferme ta gueule.
Smôltrekkersclub : société de grimaciers. «L’Illustration Européenne» écrivait, en 1879: «Nous avons encore, en Belgique des sociétés de grimaciers… ayant conservé les vieilles traditions de grimaces et descendant, en ligne directe, des Fous qui égayaient les fêtes de nos anciennes chambres de rhétorique. On en compte une à Bruxelles, et il en existe à Anvers, à Gand et dans quelques villes des Flandres… Les concours sont précédés, chez les concurrents, de longs exercices, où les yeux, la bouche, le menton, le front, le nez, les joues subissent un incroyable travail, jusqu’au jour où ceux qui n’obtiennent pas de prix ont au moins l’avantage de se désopiler la rate aux dépens de leurs confrères ».
Dat daane mè zene smôl veu en kelderveenster moest stoen goet er gien ien kat nemi binne (si
celui-là avec sa gueule devait se trouver devant une fenêtre de cave, il n’y entrerait plus aucun chat) : c’est un atrocement laid, c’est un épouvantail.
(Variante : … komt gien ien koeter nemi pisse : plus aucun matou ne vient y pisser.) i Da goet hem gelak ne slag on zene smôl : cela lui va comme un coup de poing sur la figure.
SMOUS : youpin, Juif, avare, individu retors.
Ce serait aussi d’après J. Teirlinck un receleur.
SMOUSEJAS : jeu de cartes.
SMOUTEBOLLEN : sortes de beignets faits de pâte soufflée cuite dans la graisse.
— Le banquet du Jeune Barreau s’appellait « Smou- tebol Party », au début du XXe siècle.
SMUURE : fumer.
Het struut es afgesloege, de verkes smuure cigares
la paille a diminué, les cochons fument des cigares, s’adresse à une personne de petite condition fumant un cigare.
SNAAIE : couper, prendre la bonne amie de quelqu’un.
SNOEIF : tabac à priser.
SNOEIFDUUS : boîte à priser.
SNOEIVE : priser.
SNOL
’t Es snol ! : il n’y a rien à faire.
Se dit de quelqu’un qui se dégonfle au dernier moment. « La peau ! Des clous ! Des nèfles ! »
SNOLLEKE : terme affectueux qu’on donne à un enfant. Equivaut à angeke.
SNOT : mucosités nasales.
Snottebelle : chandelles (du nez).
Snotneus : désigne un béiaune. un jeune qui veut se faire aussi malin qu un adulte.
Snotter : morveux, faiseur d’embarras.
Snotvink : (idem). (Formé avec « vink » : pinson.) Snotgat : nez. Dans la pièce comique « De Bervoete Bruers » représentée à Bruxelles, en 1559, se trouve la phrase « gaet elders, oft gy crycht wat op u snotgat » (partez où vous attraperez quelque chose sur le nez).
Dans la « tirade des nez » de « Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle, on lit: « Ick denck hij is versien seer wel van snotte-beilen ». (Je pense qu’il est très bien pourvu de chandelles.) Snotterke : terme d’affection, mon cher petit enfant. Snotuuge : yeux chassieux.
Snotboeis (tuyau à mucosités nasales) : narine.
Snot anglais : dèche, purée.
SNUL : imbécile, naïf.
SOBRIQUETS : c’est dans l’invention de sobriquets que le Bruxellois déploie le plus d’imagination. Il est matériellement impossible de les noter tous ici, mais en voici quelques-uns. On en trouvera dans le classement alphabétique, quand les personnages qu’ils désignaient avaient une renommée qui s’étendait au-delà du centre de la ville.
Ceux que voici ont été relevés par Franz Mahutte («Le National Bruxellois», 28 octobre 1924 et 20 octobre 1926): « Neus », «De Lup », « Den Dikke », « Blonte Mee », « Zwette Treene », « Boe- strink Loueeke », «Den Doch », «De Genteneir », « De Smous », « Jan Casis », « Scheile Toone », « Bol- leke Vet », « Pommade Kop », « Jef Kasak ».
« Le sentiment et le sens populaires, écrit Mahutte, et le sens beaucoup plus que le sentiment, s’expriment et s’amusent par les sobriquets, surnoms, « spots », déviations, déformations ; ils y créent un soulagement, des caricatures, des vengeances. Ils charrient du même flot, les paillettes et la fange, la boue et l’or, le bon, le douteux, le mauvais, l’abominable. »
Voici quelques sobriquets relevés par Verhavert : «Jan Moustache», « Schieve Jeuf », «Jan Potluud », «Bamboula», «Den Dogge », «Pie den Trekker», « De Liepe », « Le Leubbe ».
Le nombre des sobriquets est infini. Beaucoup sont tellement triviaux que la plume se refuse à les reproduire.
Sobriquets recueillis en 1949 dans le quartier de la rue de Schaerbeek : Pé Kontche (Pierre au petit derrière), Mé de Fledder (Marie le balai), Beloke de Spieker (Barbette la cracheuse), Mé Ghelore (Marie la Vantarde), Nette van de Panne (Nette de la poêle), Maree van Biene (Marie avec ses jambes), Katrine van Wantche Floeit (Catherine, la fille de Françoise à la flûte), Zweut Anna (Anna la noiraude), Krumme Lowis (Louise la bancale), Nette Kozze (Cousine Annette).
Sobriquets recueillis en 1950 dans le quartier de Notre-Dame du Sommeil : Finne de Borinne (Joséphine la paysanne), Leeze Pataat (Lisa patate), Dikke Broek (gros pantalon), Treene de Spons (Catherine, la grelée), Manke Maree (Marie la boiteuse), Scheile Nee (Eugénie la myope), Nette Tet Jeannete aux gros seins), Binet de Neus (Barbette au grand nez), Jantche de Zot (Jeannot l’imbécile), Polie de Neus (Léopold au grand nez).
Avant la guerre de 1914, M. F. Bourgeois, commissaire de police en chef de Bruxelles, son secrétaire, M. J. Fronville et M. V. Tayart, ont relevé toute une liste de sobriquets en usage dans la pègre. Ces sobriquets tirent leur origine : de la taille ou de la corpulence : de Lange (le grand), de Dikke (le gros), de Keutte (le petit), Mèmenne (Petit- Bonhomme), Bolleke Vet (boule de graisse).
De la couleur des cheveux : De Zwette (le noir), Blonte Mie (Marie la blonde), Bruintje (le petit brunj, Rosse Zonne (soleil roux).
D’un défaut corporel ou d’une infirmité : Blinde Tiske (Jean-Baptiste, l’aveugle), Scheile Toone (Antoine, le louche), den Boelt (le bossu), Lomme de Spons (Guillaume, le grêlé).
D’une comparaison avec certains animaux : Metteko (le singe), Jan de Zwalu (Jean l’hirondelle). Susse den Beer (François, l’ours), Scheilen Hond (chien louche), den Eizel (l’âne), Louike Boustrink (petit Louis, le hareng saur).
De la nationalité, du lieu de naissance, de la religion : Den Doch (l’Allemand), de Genteneer (le Gantois), de Rosse van Ingeland (le roux d’Angleterre), de Smous (le Juif).
Du caractère, des penchants, des vices : De Stoeffer (le vantard), Lommeke den Bloeser (petit Guillaume le rougissant), Pagadder (le noceur, le chéri), Zatte Nelle (Pétronille, la saoularde), Mieke den Honden- dief (Marie, la voleuse de chiens).
Du métier : Jef de Plekker (Joseph le plafonneur), Jan de Schoilledekker (Jan le couvreur), Jef Pek (Joseph poix).
Des personnes ou des choses qu’on aime : Karel Mie Crolle (Charles, l’ami de Marie aux boucles), Pateike (petit pâté), Spek (lard), Nette Mostoet (Annette moutarde), Jan Casis (Jean Cassis), Jef Cigaar (Joseph cigare). Jef Cigaar était le sobriquet doné par le peuple au bourgmestre baron vande Meulebroeck. On disait aussi de lui : Jef van de Kassâ, parce qu’il habitait la chaussée d’Anvers.
D’un titre, réel ou fantaisiste : Kapiteintje (petit capitaine), Mie den Avokoet (Marie l’avocate), Jan de Prins (Jean le prince).
D’une ironie ou d’un jeu de mots : Straffe Jan van Waait (Jean le fort de loin), Krummen Ingel (l’ange de travers), Leumme Lomme (Guillaume l’agneau).
SOEIKER : sucre.
Men soeikerpoep (ma poupée en sucre) : mot tendre du Marollien à sa « crotche ».
Bruutsoeiker : sucre blanc scié.
Soeiker in poeier : sucre en poudre.
Kandaaisoeiker : sucre candi.
Soeikerbollekes : dragées (de baptême).
SOEKKELE : peiner, trimer dur.
Soekkeleir : misérable.
Il y a à Uccle de Sukkelweg, sans doute parce qu’il est en pente et dur à monter.
Le mercredi 4 août 1915, à Bruxelles, pour commémorer la déclaration de guerre, des zwanzeurs lâchèrent dans les jambes de soldats allemands, un chien à la queue duquel était attachée une casserole avec ces mots :
« Pauvre sukkeleer » Je reviens de l’Yser » Avec le Kaiser » A mon derrière ».
Schuermans : sukkelaar, sukkelares. Op den sukkel zijn.
Kiliaan : suckelen.
SOJJE : couverture de lit.
Onder de greun sojje (sous la couverture verte) : au cimetière, décédé.
SOOIS : menton en galoche, menton, aussi : kinne- bakkes.
SOOT (soort) : littéralement : de la sorte.
Se dit d’une ou de plusieurs personnes mal élevées. — Es ma da soot ! : en voilà des mal élevés ! On dit aussi « sorte ».
SPADRILLE : espadrilles.
SPAND IS ou SPAND ICH ! : Regarde ! Vois donc !
SPECULOOS (parfois aussi « spéculation »).
Sorte de biscuits bruns représentant des personnages ou des objets, qu’on offre surtout aux enfants à Saint-Nicolas.
La duchesse de Vendôme se fait régulièrement approvisionner par une vieille maison bruxelloise de speculoos et de pain d’épices au melon, les mêmes exactement, que, au temps de son enfance, on lui donnait au palais du comte de Flandre. («Eventail» du 26 septembre 1937.)
Constatons que « Speculo » — venu du mot latin « spéculum » : miroir — est le nom d’une vieille famille de chez nous. Au XIIIe siècle, un Englebert de Speculo possédait, rue de la Montagne, une auberge, celle du «Miroir». L’enseigne se perpétua pendant des siècles pour devenir «Le Grand Miroir» où habita, au siècle dernier, le poète maudit Baudelaire.
Chose remarguable, la rue de la Montagne, du temps que les démolitions ne l’avaient pas mutilée, possédait plusieurs boulangeries et pâtisseries réputées pour leurs délicieux «speculoos».
Elles débitaient aussi « le pain à la Grecht », appelé improprement « pain à la grecque ».
Etant donné l’ancienneté de la rue de la Montagne, on pourrait se demander si « speculoos » n’est pas tout bonnement dérivé du nom propre « Speculo ». Il faut cependant noter que certains Bruxellois — et des provinciaux — parlent de « spéculations » lorsqu’ils désignent le biscuit brun si en honneur aux fêtes de Noël et de Nouvel An. «Spéculation…» faut-il rapprocher le mot d’« épices » ? Le « speculoos » en renferme.
Pour en revenir au pain «à la Grecht», on prétend que cette autre friandise délicieuse aurait été fabriquée pour la première fois par un boulanger du Fossé-aux-Loups, le « Wolvengracht » — dénommé plus couramment, autrefois, par le mot «Grecht», ancienne graphie de « gracht ».
Voici la recette du spéculoos par Gaston Clement : Pour la forme on le fait, toujours en préparation professionnelle, à l’aide de moules en bois que l’on farine et sur lesquels on presse la pâte pour prendre l’empreinte désirée. Mais on peut aussi découper dans les formes que l’on veut, sans se préoccuper du dessin. La cuisson se fait au four pas trop chaud, la pâte brûlant vite par suite de sa grande teneur en sucre. Il faut donc une surveillance sévère, tout en évitant d’ouvrir la porte du four durant la cuisson. Voici un type de pâte qui, répétons-le, doit être fortement travaillée : 1 kg 20 gr de farine, 850 gr de sucre, 6 gr d’alcali en poudre, 350 gr de beurre, un demi-litre d’eau, sel, cannelle, girofle en poudre, muscade râpée, ces épices au choix. Bien travailler le tout, découper et cuire sur platine graissée. Une autre formule : 1 kg 375 gr de farine, 1 kg de cassonnade, 500 gr de beurre, 3 œufs, 12 gr de bicarbonate de soude, sel et épices au choix ; le bicarbonate et l’alcali doivent être bien mélangés à la farine avant tout. Bonne réussite !
SPEILE (spelen) : jouer.
Verlore speile : semer un importun, égarer un objet.
SPEK : lard.
Spekke : mentir, se vanter, raconter des tartarinades. Spekscheeter : menteur, vantard.
SPEL (speld) : épingle.
Spellekesstroêt : rue des Epingles. Encore une mauvaise traduction d’un nom de rue. Il faudrait dire en français : rue Spellekens, du surnom du fameux prévôt jean Grouwels, dit Spellekens, qui y eut sa demeure.
SPIKELOUS : voir speculoos.
SPINNEWEEL : rouet, nom donné à un enfant très nerveux, qui ne peut rester en place.
SPITSFILTJENS : ainsi dit Foppens, appelait-on, au XIVe siècle, les cabaretiers bruxellois. Un « spitvil » est quelqu’un de remuant, qui ne tient pas en place.
SPIONNER : espionner.
SPINNEKOP : araignée.
SPITER (spuiten) : jaillir.
Spitant : excitant.
SPOERE : épargner.
Spoerpot : tirelire.
SPONS : éponge.
Sobriquet donné à celui qui a le visage grêlé. SPREET : braguette.
SPRING NO ’T VET : personne maigre, échalas.
Er over springe : rater une occasion. Essuyer un refus.
SPROEIT : jet d’eau.
Sproeite : arroser.
Sproeitkeir : véhicule servant à arroser les rues. Désigne les femmes coquettes qui étalent leurs toilette comme la «sproeitkeir» jette son eau.
SPROK : esprot, personne très maigre.
SPUUK (spook) : fantôme.
Spuuk van Meulebeik : voir «lodder mi zen keutink». STAAIF (stijf) : raide.
Staaive nek : torticolis.
Staaif in de zaâ : guindé dans la soie.
Désigne une femme qui a mis une belle robe.
Stijve heeft ne stok in zijn lijf En hij kan hem niet bukken Want hij is te stijf.
(A. De Cort)
STAMINEIE : estaminet.
Stameneivoote : longs pieds (probablement comme une salle d’estaminet).
Stameneigast : habitué de café, pilier de cabaret.
STAMP : coup de pied.
Stampvol : plein à craquer.
STANK : puanteur.
Stank vi dank (de la puanteur comme remerciement): oignez vilain, il vous poindra.
STAUF (de stoof : étuve) : poêle.
Staufkabernaaie : carbonnades flamandes.
Ze gat stauve, lakkas de katte : se chauffer le derrière, comme font les chats, se dit de quelqu’un qui se chauffe en tournant le dos au poêle.
STEK : jambe.
Hij komt op zene stek : il revient à lui.
Stekke : jambes.
STIEN (steen) : pierre, caillou.
Mi stiene smaaite : « il jette des pierres dans mon jardin ».
Emile Chantard, dans « La vie étrange de l’argot » (Paris 1931) : «jeter des pierres dans mon jardin» : expression de filles et d’invertis : dire du mal d’autrui, médire, calomnier.
Au XVIe siècle : jeter des pierres dans le jardin de quelqu’un c’est diriger une attaque ou un reproche contre une personne, dans une conversation générale, et sans avoir l’air de s’en occuper.
C’est cette dernière acception qui traduit le mieux l’expression bruxelloise, avec la variante : pour lui faire comprendre aussi, qu’on désire obtenir quelque chose.
STIJSEL (de stijfsel) : amidon.
Stijseltrut : voici l’amusant article que consacra, à ce mot, « Pourquoi Pas ? », le 28 janvier 1910 : « C’est un mot qui a cours parmi les ouvrières des ateliers de fleurs artificielles, de couture et de brochage. Si, parmi les « krotjes » festonnant les corolles de taffetas, faufilant les « plissés-soleil » ou cousant le dos de nos bouquins, il s’en trouve quelqu’une toujours sur son quant-à-soi, une qui fait sa Sophie, gourmée, revêche, gnangnan, à la fois vinaigrée et sucrée, ses « collègues » la qualifient de « stijseltrut », littéralement «Gertrude à l’amidon ».
» Sous le prétexte qu’on doit « se tenir », elle se refuse à frayer avec les ouvrières ; elle a peur de froisser sa robe et sa délicatesse ; elle ne supporte point — « och erme ! » — les histoires grassouillettes ; elle a été si bien élevée, ma chère, que les mots gaillards — qui fourmillent dans le langage marollien comme des vers dans un gruyère périmé — « ça sait la rendre malade ! » ; elle se sent « écœurée » ; elle menace de se plaindre à la surveillante.
Même quand elle demande l’autorisation de quitter deux minutes l’établi pour un pis-aller, comme on dit à Bruxelles, elle affecte un air prude et circonspect… Elle a des vapeurs ; elle ne parle qu’avec élégance « tutu comme de-z-oiseaux » ; jamais, elle n’appelera chameau une de ses camarades ; elle dira : dromadaire.
» Si quelque jeune « gaillard » des Marolles l’aborde, rue Haute, en lui débitant une de ces galanteries invitantes auxquelles le cœur d’une krotje bien née ne résiste pas — par exemple un moule et frites à la « Bonne Source », ou un halve-scheut chez Pie- Passette ; — elle lui répondra : « Passez une fois votre chemin ; je rentre chez ma mère : je suis honnête, saëz-vous. A la fin vous sauriez finir par me faire suer ! ».
» Ce qui l’empêche pas, assurent les mauvaises langues, d’être volcanique à huis clos et de se montrer, telle Lampito, une femme au tempérament excessif — quand les rideaux sont tirés et que son bon ami est dans la place ».
STILLEKES OEN : à l’aise.
STINKE : puer.
Stinke zeiven eure bove de wind (puer sept heures au-dessus du vent) : sentir très mauvais.
Hij heit e kolleke da blinkt, en en hummeke da stinkt (il a un petit col qui reluit, et une petite chemise qui pue) : se dit de quelqu’un extérieurement élégant, mais dont les dessous sont malpropres.
Woe da nen dooie leit te stinke moote me de veenster ope doon (il faut ouvrir la fenêtre là où un mort est occupé à puer) : quand il sent mauvais dans une pièce il faut aérer.
Hij stinkt nog neet (il ne pue pas encore) : se dit de quelqu’un dont lo propreté est douteuse.
STINKSTOKKE : mauvais cigares.
STOEFFE : se pavaner, faire de l’esbrouffe.
Stoeffer (stoeffeur) : vaniteux.
Hij es ne stoeffer : col en manchett en thoeis giene fret (c’est un «stoeffer» il a col et manchettes mais rien à bouffer chez lui).
Nous citons H. Van Vreckhom : stoufe et stoufer de l’espagnol estofa : qualité d’une étoffe. On dit persona de estofa (personne qui a de l’étoffe) : personnage marquant. Se dit par ironie de celui qui veut paraître.
STOEL (staal) : acier.
Stoele tanne en vlekke puute (dents d’acier et pattes de fer blanc) : quelqu’un qui a de bonnes dents et de mauvaises jambes.
STOEM : muet, bête, borné (de stom). Stoemmenduuve : sourd-muet.
Stoemerik : idiot, imbécile.
Stoemmen oeil : hibou stupide, imbécile.
STOEMELINKS : à la dérobée.
Faire quelque chose en stoemelinks : faire quelque chose en se cachant.
Partir en stoemelinks : filer à l’anglaise. Etymologie : de « stoem » (stom) : bête, naïf.
STOEMPE : pousser.
STOEMPKER : charrette à bras.
STOF : poussière.
Stof mi poetches (de la poussière avec de petites
pattes) : des poux.
STOOL (stoel) : chaise.
« Hei gien stole te bieze ? » : cri des rempailleurs de chaises.
STOPPE : cacher.
Stopt a : cachez-vous.
Stop het e weg : cachez-le.
STOUTERIK : méchant.
« Houdt daer, ghij stouterick… » (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle).
STRAAIE (strijden) : contredire, discuter, prétendre avoir raison.
Afstraaie : nier.
STRAAIKE : repasser.
Straaikesse : repasseuse.
Straaikaaizer : fer à repasser.
STRIEP : un quart de bière, la moitié d’un demi, le demi correspondant à un peu moins d’un demi-litre.
STRIJKE : tours, procédés.
Zotte strijke : sottises STROND : fiente.
Strondroeimer : vidangeur.
« Doke de strontroeimer habijé en soleil.» (Programme des fêtes du quartier données à l’occasion de la Kermesse d’EI Blad, vers 1895.)
J’ai entendu lancer comme insulte à quelqu’un :
Prins van Aronje mi a strondgezicht ! (Prince d’Orange avec sa figure de merde !) Je présume que cette expression date de la Révolution de 1830.
Strondzat : ivre-mort.
Strondvleeg : mouche à merde, d’où l’expression « zoe rap as en strondvleeg » : rapide comme une mouche à merde.
Il y avait, dans la rue de la Fiancée, une « Strondt- straetken » qui fut, au XVIIe siècle, enclavée dans une habitation.
Strondbas : voix très grave.
« Broeck vol strondt », dans le sens de pleutre, relevé dans « De Ghedwonghe Griet », farce de Joan De Grieck (milieu du XVIIe siècle).
Strondboeis : le rectum.
Strondpuute (mains de merde) : mains maladroites.
Stronduure (oreilles de merde) : oreilles bouchées. Sous le nom de strondboore (paysans de merde) on
désignait, avec mépris, les soldats du train (corps des transports, service de subsistance).
Hij es me ze gezicht in ne strond mè kezzestiene gevalle (il est tombé avec son visage dans une merde contenant des noyaux de cerises) : il a le visage grêlé (voir « spons »). Jadis, beaucoup d’enfants et même de grandes personnes avaient la dangereuse habitude d’avaler les noyaux en même temps que les cerises. Q
Hij zou nog ni lâche alwoet zag hem ne strond de meur opluupe : quand bien même il verrait une merde grimper sur le mur il ne rirait pas.
Strond, wé heit a gescheite, da ghe zoe stinkt ? se dit à quelqu’un issu de rien et qui se vante.
STRONDPOOT : rue du Miroir.
STROTCHE : ruelle, impasse.
Reuze in ons strotche : querelles dans l’impasse.
ST’UK : morceau.
Employé dans des expressions telles que « stuk agent», «stuk ampayei », «stuk architect », il exprime le mépris.
Stukken of ghiel (brisé ou entier) : à tout prix.
’t Es stukked : c’est cassé.
Hei eit e stuk op : il est éméché.
E stuk in zen botte : idem.
Stuk offeceer (morceau d’officier) : terme méprisant par lequel les Bruxellois désignait un officier de la Garde-Civique.
STUUT : poussée, cortège.
Stuutkeir : charrette à bras.
Stuute : pousser.
Da zaain stuute ! : en voilà, des excentricités !
SUS (corruption du pronom réfléchi soi).
Van zen sus valle : s’évanouir.
Sus, Susse : François.
TAAID (tijd) : temps.
In den taaid van de blieke blâ (sous-entendu : patates) : au temps des pommes de terre bleu clair : à une époque reculée, il y a très longtemps.
TAFFELE : rafistoler.
Taffeleir : bricoleur.
TAGELEIR : individu atteint d’un tremblement nerveux. Le Bruxellois dit aussi hij heit den bibber (il a la tremblotte), (en wallon : le balzin).
TAKSCHAAITER (embrenneur de toit) : pigeon qui, au lieu de rentrer au colombier, à l’arrivée d’une course, reste sur le toit, ce qui rend son propriétaire furieux.
TALTCHE: soucoupe, petite assiette.
Hij heit en taltche gebroke : se dit de quelqu’un tout penaud d’avoir commis une gaffe.
TALUUR (teljoor) : assiette.
Taluuriekker van ’t gasthoeis : (lécheur d’assiettes de l’hôpital) : pique-assiette, parasite, profiteur.
Au XVIe siècle, ainsi que nous l’avons trouvé dans la pièce comique « De Bervoete Bruers » ; l’équivalent de «taluuriekker» était « lecplateel » que K. Stallaert rend par « teljoorlikker ».
Kiliaan donne : talioorlecker (tafelschuimer).
En stem van gebroke talluur : une voix rauque comme d’une assiette fêlée.
TAND : dent.
Hij stond me zene mond vol tanne (il était là, la bouche pleine de dents) : il ne savait plus que dire ou que faire.
TANDVLIES : gencives.
Hij lupt op zen tandvlies : se dit de quelqu’un qui porte des souliers éculés, des bottines dont les talons sont entièrement usés.
TAPER : frapper.
Aussi forme francisée de « tappen » : débiter des boissons.
« Quans’ que l’baus y tapait » (Quand le patron de l’estaminet débitait de la bière). (Coco Lulu)
TARTINE
Quoique ce mot figure dans Littré, les Français reprochent aux Belges son emploi. Ils préfèrent la périphrase : tranche de pain recouverte de beurre ou de confiture. Cependant, nous avons trouvé « tartine » sous la plume de Théophile Gautier.
« D’ailleurs — et j’en préviens les mères de famille, » Ce que j’écris n’est pas pour les petites filles » Dont on coupe le pain en tartines…»
(Poème XCVIII de « Albertus ou l’Ame et le Péché», légende théologique. Paris. Paulin 1833.)
TATCHE LUL : un naïf.
TATOUILLE : gifle, coup.
TCHIPPEKE : poussin.
TCHOUKTCHOUK : marchand levantin au nord africain qui offre des tapis en vente, dans les cafés. Il disait : « Tchouktchouk et pas cher ! ».
TEIGE (tegen) : contre.
Ik kan er teige : je sais tà-contre, je puis le supporter. Teigesmoek : sorte de pressentiment que fait qu’on ne désire pas s’embarquer dans une affaire (contre- goût).
TEIGEROEIMER : personnage désagréable.
- Bouley, dans « La Gazette » du 3 août 1936, dit : « tegeruimer » ; littéralement: contre-crême, se dit d’un particulier dont la présence seule suffit à faire tourner le lait, ou à empêcher la crème de se former.
« Mèm’ qu’on l’app’lait plus que „ le tegeruimer”.»
TEIKE : chien de rue.
De Cort orthographie « ’n tèken ».
Dans le dialecte anglais du Yorkshire, un chien de rue qui se dit à Londres « mongrel », s’appelle « a tyke ».
Voyez « An Etymologica! Dictionary », by Rev. Walter W. Skeat : tike : a dog ; contemptuously, a low fellow. Middle English : tike, tyke.
TEIR (tering) : phtisie.
Keutte teir (vliegende tering) : phtisie galopante. TEIRLINK : dé à jouer.
TERDIOTTE : teinture d’iode (relevé par De Kelper).
TERE (durven) : oser.
Ge zotch ni 1ère : vous n’oseriez pas.
TES : poche en toile que les femmes s’attachaient par un cordon à la ceinture et qu’elles portaient, soit entre le tablier et le jupon, soit entre ce dernier et le jupon d’en dessous.
TESSE : jouer aux dés, surtout aux dés pipés, pour de l’argent.
TET : sein.
Hij vroegt en tet : il dit des bêtises.
« ze Zegge da Meeke gien tetten en heit » Ze leegen er allemoe oen » ’k Hem ze gezeên en ik hem ze gevult » En ’k hem ze getast en ’k hem ze loête stoên. » (Chanson populaire)
Zei gâ en tet ! (Quel sein tu es I) : quel blagueur tu fais !
Tettagere : mot forgé par les Bruxellois pour désigner un corset, un soutien-gorge.
Mé tet : désigne une femme à la poitrine opulente.
TETE D’OREILLER : taie d’oreiller.
TEUT : bec de bouilloire, de cafetière, que des misérables utilisaient comme pipe.
TEUTTER : bouche.
Avt a teutter too : ferme-la !
TEUTTERE : s’adonner, à petits coups, au plaisir de la bière.
TEUTTEREIR : celui qui prend ce plaisir.
THEOETER : théâtre.
Mok van â theoeter neet ! Ne fais pas de ton nez ! TIEN (teen) : orteil.
Faainen tien (fin orteil) : rusé, malin, madré.
TUF : femme (péjoratif), mégère, calamiteuse.
A tijf : vieille femme.
TINKELE : jeter de petites pierres, dans le sens de faire des allusions, le plus souvent pour taquiner.
TINTELE : avoir l’onglée.
TIRER : ressembler.
Il tire fort sur son père.
TOEIMELE : de tuimelen : faire la culbute.
« Faire des cumulets », dit-on à Bruxelles.
Analysant les comptes de Jeanne de Valois (premier quart du XIVe siècle), M. Jules Dewert, y trouva la mention «tumeriaus de Verbrie ».
« Ces tumeriaus », dit-il, « sont probablement des enfants de l’endroit qui se laissaient rouler en boule du haut en bas d’une élévation du terrain ».
Il rapproche ce mot du vocable athois «tour- moyaux ».
Toemeleir : faiseur de culbutes.
TOEKKE : frapper violemment.
Mot qui appartenait jadis au langage des charretiers ivres qui avaient la triste habitude de battre leurs chevaux.
Dans la pièce comique « De Bervoete Bruers » (Bruxelles 1559), je trouve « tuck » : « slag ». Schuermans : «Toeken» : stooten, slaan, nijpen. Toekker : celui qui frappe.
Waaivetoekker : celui qui bat les femmes. Souteneur.
TOENG : langue.
Langetoeng : fruit du caroubier, jadis en vente dans les « bollewinkels ». Bavard qui colporte aussitôt ce qu’on lui a confié.
Voeil toeng : médisant, calomniateur.
Over zen toeng kakke (chier au-dessus de sa langue) : vomir.
TOF : joli, beau, épatant, (fi) – Tof ! : d accord ! (Synonyme : ’t es geluupe !)
TONNEKLINKER : littéralement « qui fait pencher le tonneau ».
« Le Peuple » l’a décrit comme suit : « Ce type spécial d’amateur de faro et de lambic se rencontrait particulièrement à proximité des brasseries et cafés réputés pour la qualité de leurs bières. Dès qu’arrivait le camion de livraison, chargé de tonnes pleines, nos « tonneklinkers » s’amenaient à pied d’œuvre. Et, au fur et à mesure que les tonneaux vides prenaient, sur le camion, la place des tonneaux pleins mis en cave, ils opéraient par couple : l’un inclinant la barrique et la vidant de son fond trouble que l’autre cueillait précieusement en un récipient quelconque — généralement une vieille boîte à conserve. »
Verhavert dit que ce spectacle était fréquent entre 8 et 10 h du matin, les lundis, mercredis et samedis, devant l’hôtel-restaurant « Continental » et devant « Le Laboureur ».
TOOTOOT : mais oui ! mais si !
TOTTELE : bégayer.
ToHeleir : bègue.
Synonyme : broebbeleir.
Schuermans : « tottelen » : hakkelen.
TOULLEMËME : tout de même.
TOUR : la promenade à la mode.
D’après Guillaume a Castro, 1643, le «tour» était à cette époque la rue Neuve et le Quai (ce dernier probablement l’Allée Verte). On disait aussi « le tour à la mode.
TRACTEIRE : régaler, traiter des amis, payer au restaurant ou dans des lieux de divertissement. Schuermans : «trakteren» : ten maaltijd onthalen.
TRAM : tram, lit.
Mé a hoer on den tram hange (pendre au tram par les cheveux) : avoir beaucoup de chagrin.
TRAP (trap) : escalier.
As ge komt es den trap weg : je ne vous laisserai pas entrer (l’escalier aura disparu pour vous).
TRAVAKKE : travailler.
- De Cort relève aussi : slavakke et vlasse.
Is. Teirlinck mentionne: « trafakke » dans son dictionnaire de bargoensch.
TRAVE: se marier…
Trâfiest : noces.
« Trâven es hoeishâve » : les mariés doivent rester dans leur ménage (confrontez en espagnol : el casado casa guiere : le marié aime sa maison).
TREKKEN : tirer, toucher de l’argent.
Da trekt ma ni oen : cela m’est indifférent.
Trekt a van dikte : sauve-toi !
Trekt en hoer oeit ze gat, ’t zal klinke gelak en
belle (tirez-lui un poil du derrière et il tintera) : c’est un avare.
TREKPLOSTER (pleister) : emplâtre, raseur.
TRENTE-ET-UN (se mettre sur son): faire de la toilette. « Il s’est mis sur son trente-et-un », Léopold Courou- ble : « Notre Langue »).
TRIBOULER : tomber en roulant.
« Elle a triboulé en bas de tous ses escaliers »,
(Léopold Courouble : « Notre Langue »).
TRICHE : tricher.
Trichoet : tricheur.
TRIENE (ZEUR) : femme triste, morose.
TRIM (ze doot den frim) : elle fait le trottoir. De trimer. Trimme : faire la grue.
TROEMMELSTOK : baguette de tambour, personne d’une maigreur excessive.
TROENE (tranen) : pleurs.
Zeur troene : larmes de dépit.
TROIS-FRANÇOIS : nom d’un chapeau melon qui, pendant des années, à la fin du siècle dernier, fit fureur à Bruxelles. Il avait été lancé par Victor Méhay, un Français venu de Compiègne et qui avait installé sa chapellerie rue Neuve, à l’enseigne du «Trois François», parce que son couvre-chef était vendu «trois francs soixante». Prestidigitateur, auteur dramatique, chimiste, géographe, voyageur, Méhay quitta Bruxelles après avoir partagé sa fortune entre sa femme et ses enfants, partit pour l’Afrique, revint, complètement désargenté et se tua, d’une balle de revolver, en 1901, rue de l’Etuve où il avait échoué dans une petite pièce misérable.
TROMPE-LA-MORT : personne d’aspect maladif, mais qui résiste longtemps à la mort.
Se dit aussi d’un malade imaginaire.
Trompe-la-Mort : héros d’un roman populaire de
1912.
TROTTE : long trajet. -Æh « Il y a une bonne trofïe jusque là » (Léopold Cou- rouble : « Notre Langue »).
TROUILLE : avoir la trouille : avoir peur.
TURLUT : bruits, cacophonie, vantardises.
TUUVERES : sorcière.
En â tuuveres : une vieille vilaine femme.
TYPES BRUXELLOIS
Bruxelles a perdu tous les « fadas », les originaux, les doux toqués, les maniaques, tantôt gagne-petit, d’autres fois simples fainéants, qui hantaient ses pavés. Evoquons-en quelques-uns, du siècle dernier et du début du présent siècle.
Jan Moustache : marchand et tondeur de chiens schaerbeekois. Il se promenait au centre de Bruxelles avec trois ou quatre petits griffons dans les bras.
Le «Joueur de Flûte»: portant un melon noir et un faux-col, il déambulait dans la rue Neuve, jouant sans arrêt « Tipperary ».
Schieve Jef (Joseph le Tordu) : ce camelot faisait danser, rue Neuve, de petites poupées de bois. En réalité, c’était un compère, au premier rang des spectateurs, qui actionnait les fils des marionnettes. Jan Plezeer : il conduisait, à la Marolle, une petite charrette attelée d’un âne et il vendait du sable. Il criait : « Zooveloo ! Witte Zooveloo ! Schuune Witte Zooveloo ! ».
De Graef, l’« Honnendeef » : le plus célèbre des chasseurs de chiens errants. Sur son chapeau il portait cette inscription : « Marchand et tondeur de chiens. Les prend en pension et leur apprend des tours et chattre (sic) aussi toute espèce d’animaux ». Madame Gaspard : diva de guinguette bien connue à « Moeder Lambic». Accompagnée à la guitare par son mari, elle chantait : « Madame Gaspard va-t-au marché — C’est pour une poule y acheter ! ». L’Homme Blanc : fonctionnaire retraité parlant seize langues. Se promenait, vêtu du blanc, avec un parapluie aux couleurs nationales. Il était toujours accompagné d’une chèvre.
Janneke de Zot : ce nettoyeur de chaussures et d’orgues d’églises hantait surtout Molenbeek et la rue de Flandre. Tous les dimanches, il allait au « Roskam », rue de Flandre, engloutir les restes de portions de lapin.
Le Baron Crayon : se disait le fils d’un noble et vendait des crayons à la Bourse.
Lammeke Vet : petit homme dodu, habitué du cabaret « Dikke Loeis » (rue Haute) où de vieilles ivrognesses vidaient subrepticement les verres des clients.
Jan Slache (Jean la Savate) : cet Ucclois possédait une invraisemblable collection de vieilles godasses qu’il ramassait dans les poubelles et qu’il alignait, chez lui, sur des étagères.
Toone mé zen Blokke (Antoine avec ses sabots) : faisait des pèlerinages à Hal par procuration, pour
- centimes (à pied I). Pour 15 centimes il chaussait des sabots de (huit kg. Pour un franc il allait avec des « blokke » de vingt kg. Quand il avait plusieurs commandes, il cheminait, tout couvert de sabots. François le Toneklinker (François le renverseur de tonneau) : vidait dans une boîte à conserves les fonds de tonneaux que les garçons brasseurs enlevaient chez les cabaretiers.
Luppe Kassul, Blonte Lomme et Den Dogge (Philippe Casserole, Guillaume le Blond et le Dogue) étaient trois « durs » fameux chargés d’expulser, manu militari les perturbateurs, les saoulards et les récalcitrants chahutant dans les salles de danse.
Petites Fleurs des Bois : deux pauvres créatures, les sœurs Anna et Esther Blés. Elles ne connaissaient qu’une seule romance qu’elles chantaient dans les estaminets : «Je l’ai-aime ! ie l’ai-aime ! Petite fleur des bois ! ».
Jef Casteleyn : « poiète » et barde d’Eecloo. Vendait dans les cafés, à Bruxelles, ses vers écrits dans un vraisemblable charabia de français et de flamand, des vers comme ceux-ci : « La locomotive commence, sifflette — Tous les voitures sont en roulette… ».
Monsieur François : barbu, chevelu, vendait, rue Henri Maus, des billets de la Loterie Coloniale.
- parlait en vers :
« Si vous désirez me faire honneur,
» Achetez le billet dont je suis le vendeur,
» Onze francs, le prix de deux verres de bière,
» Qu’on boit sans soif et qu’on jette
dans la pissotière ».
Ronron : cet original de la Marolle fumait une pipe étrange : le bec d’une bouilloire. Etait toujours chaussée d’un soulier noir et d’un soulier jaune. Il portait une calotte de chapeau taupé dont il avait coupé les bords.
Marie Klache Cul : coiffée avec une courte tresse, elle se promenait à Ixelles, une caisse à cigares sous le bras. Elle disait que, fille d’un père noble, elle avait choisi volontairement la pauvreté.
Berdji, Voleur de Mallettes : il volait les tartines des ouvriers sur les chantiers. Les gamins le poursuivaient, criant: «Voilà Berdji, le voleur de mallettes ! ».
Kaa Boet (la barbe froide) : assis sur un banc, vendait des allumettes, près de Moeder Lambic. Le col relevé il faisait semblant d’avoir froid, même pendant les canicules.
Le Père Voglet : vieux chanteur d’estaminet, à barbe grise. Il aimait les romances philosophiques et humanitaires : « La Plébéienne », « La Marseillaise de l’Humanité », « La Guerre au Ciel », « La vie des Moines ». Il déclamait, sans oublier un seul mot, les tragédies de Corneille et de Racine, I « Art poétique » de Boileau, « Le Paradis perdu », de Milton, et le « Précis de Géographie universelle » de Malte-Brun.
Désiré De Grave : cet arracheur de cors-aux-pieds chantait de la musique d’église dans les cafés. Le patron de « La Ville de Turin », à Schaerbeek organisait des concours de chant grégorien que Désiré gagnait toujours.
Ferdinantche de Patatenboor : célébrité du marché de Molenbeek. Tous les matins il était saoul. Il dansait alors sur les mains et rampait dans la boue et les déchets de légumes.
Le Joli Frisé : ketche de Molenbeek, affligé d’une calvitie totale. Il vendait, dans les cabarets, des pommades capillaires.
Le Pacha était un «louf» qui logeait petite rue de la Madeleine. Il était couvert de boutons de gardes-civiques et de médailles en tous genres. Son succès était grand dans les estaminets de la Vieille Halle au Blé.
Le comte de L… s’habillait, en 1890, comme ses ancêtres du temps de Charles-Quint, avec un juste- au-corps de velours noir et un chapeau ressemblant à celui des gardes-civiques, orné d’une petite plume blanche.
Dieu (Théo) : ce Grec payait des portos à tous ceux qui affirmaient l’avoir vu faire sortir de l’or de ses mains.
Pladaais (la Plie) : personnage célèbre du Marché- au-Poisson, décédé à l’hospice de la rue du Canal, en 1936. Il était l’intermédiaire entre la direction de la Minque et les acheteurs, et la providence des colporteuses de poisson de la rue Sainte-Catherine. Rossen Boestrink (le sauret roux) : flamingant notoire, pilier des cabarets des environs des Halles, érudit et disert. Après le quatrième verre de gueuze il entrait dans une colère terrible quand il entendait un mot de français. Il s’avançait alors vers le coupable, secouait son poing devant son visage et criait, en « beschaafd » : « Je suis de Keyem moi ! Et vous êtes un traître ! J’ai été élevé derrière les vaches, mais vous aurez mon poing sur votre gueule ! ».
— C’est vrai, répondait l’interpellé, vous puez encore les vaches…
Alors le « Rossen Boestrink » se calmait, tendait la main à son ennemi et disait, en français : « C’est bien mon ami, je te félicite…».
Rossen Doore (Théodore le Rouquin), mort en 1932, était également surnommé « De Keuning van de Gazettemarchands » (le roi des vendeurs de journaux). Il était à la Bourse, avec ses gazettes, dès l’arrivée des premiers trams.
Le Misanthrope : chapeau crasseux enfoncé jusqu’aux oreilles, pardessus élimé, bottines éculées par où sortaient ses gros orteils, il déambulait nuit et jour, toujours au milieu de la rue, s’immobilisant souvent, mettant dix à douze heures pour parcourir un kilomètre, dans les environs de Sainte- Gudule. Quand une femme le regardait, il crachait par terre, avec mépris. Il tournait le dos à quiconque lui adressait la parole.
Le Misanthrope — André G… — avait l’humanité en horreur, car une femme lui avait brisé le cœur et il ne s’en était jamais consolé. Ses repas : des sardines, des bonbons à la gomme et du fromage, qu’il avalait, sans cesser de faire le Juif errant. Napoléon III : un Bruxellois qui, à l’époque du second Empire, ressemblait, trait pour trait, à Napoléon III. Il en était très fier et s’amusait, à Bruxelles, dans les salons, à se faire passer pour l’Empereur. Sa vanité tomba lorsqu’un jour, à Paris, pris dans une échauffourrée anti-bonapartiste, il faillit être jeté dans la Seine.
Désiré le Garibaldien entrait soudain dans des colères furieuses et hurlait dans les cabarets : « Vive Garibaldi ! A bas le pape ! ». Un jour il quitta Bruxelles pour faire un tour à la campagne. Entrant chez les paysans, il se fit passer pour inspecteur des contributions et examina pendant des heures des baux, des patentes et autres papiers. Dans un crise épileptique il quitta, tout nu, son domicile, rue des Minimes et marcha jusqu’à Boom où la gendarmerie l’interna.
Jef Kazak, c’est aujourd’hui le pseudonyme de l’excellent journaliste et chroniqueur du « Peuple » et de « Germinal », Jean d’Osta, humoriste, folkloriste et pamphlétaire. Mais le vrai « Jef Kazak », de son nom Joseph Damas, était un « voetkapoon » (débardeur) molenbeekois, célèbre par ses cuites. Les jours de fêtes, il ornait son veston (sa casaque) des médailles des premiers prix du bétail à l’Abattoir de Bruxelles. Quand il fallait repêcher un noyé du canal ou décrocher un pendu, c’est à Jef Kazak qu’on faisoit appel.
Le Plukvogel : pseudonyme de Jef Ballegeer, né à Knesselaere et qui tenait une bouquinerie rue Saint- Jean Népomucène. C’était un « poète populaire à rebours », puisque ses poèmes pouvaient être lus tant à l’endroit qu’à l’envers. Exemple : « In de poesjenellen — Bij Jan Krol — Zij smijten met mastellen — De kelder zit vol » (Aux marionnettes — chez Jan Krol — on se bombarde à coups de mastelles — La cave est pleine).
L’Ami des Oiseaux : il s’appelait Pierre Decocker. On le voyait toujours au Parc de Bruxelles avec son chien. Il venait nourrir les oiseaux qui se posaient familièrement sur ses épaules, sur sa tête aux longs cheveux blancs. Il mourut en 1957, âgé de 88 ans.
Marie aux Chiens : elle gardait, aux environs de la Bourse, les ânes et les chiens attelés aux charrettes des maraîchers venant au marché matinal. Son tarif : 3 centimes par chien et 5 centimes par âne.
Bonske travaillait à ses « heures perdues », surtout dans les cafés, nettoyant la cave, rinçant les verres et vidant ceux que les clients avaient laissés. D’autres fois, il parcourait les cabarets pour y raconter des histoires de cape et d’épée, contre une légère rétribution.
Luppeke (petite lèvre), marchand de sable, habitait, à Molenbeek, une masure qu’il partageait avec son baudet. Quand il avait gagné quelques francs il demeurait chez lui avec son âne, jusqu’à épuisement des ressources. Pendant sa dernière maladie il exigea que son compagnon restât à côté de son lit. Il mourut en 1898.
Jan le Propriétaire (Vanderlooze) gagnait sa vie en vendant des anneaux pour trousseaux de clefs. Figurant à la Scala il était fier d’être un acteur et il s’en vantait partout. Il mourut, 51, rue Verte, en 1901.
« Prohibé » (Joseph Mahaux), vendeur de journaux interdits par la loi, criait insolemment, en pleine Bourse « Achetez les journaux prohibés ! ». Sur sa casquette il portait, en grandes lettres, le mot « Prohibé ». Sa carte de visite était un poème : «Joseph Mahaux. Diplôme d’Electorat Provincial Communal. Membre de la Société de Tempérance de Londres. Dessinateur. Architecte. Mécanicien. Conducteur de Travaux. Colporteur de la Pensée. Pourvoyeur du Pain de l’Ame. Acquéreur du fameux porte-cigare historique du général Boulanger. Seul vendeur officiel et autorisé en Belgique des journaux «prohibés» en les années d’interdiction 1891- 1892-1893. Domicilié : 32-34, Quai-aux-Briques, Bruxelles en Brabant ».
ULESPIEGEL : Uilenspiegel (Thyl) : héros de la légende allemande importée en Flandre.
UUG (oog) : œil.
Blâ uug (œil bleu) : œil au beurre noir.
En uug opsloege (jeter un œil sur) : surveiller, remarquer une femme avec l’intention de lui faire la cour.
Zen uuge zaain gruuter as zene boeik (ses yeux sont plus grands que son ventre) : il est gourmand, il prend plus sur son assiette qu’il ne peut manger. Uugske : clin d’œil.
UUKAL (ookal) : aussi.
UUR (oor) : oreille, anse d’un pot.
Hij mokt van zen uur (il fait de son oreille) : il rouspète, il réclame, il se fâche.
D’uure ope doon : ouvrir les oreilles.
Uurring : boucle d’oreille.
Da klinkt in men uur (cela sonne dans mon oreille): j’écoute volontiers.
UUST (oost) : ouest.
VAAIF (vijf) : cinq.
Vaaif cens Harlebeek (dix centimes de tabac de Harlebeek) : jeune éphèbe laissant pousser quelques poils de sa barbe.
Veul vaaive en zesse moeke (faire beaucoup de cinq et de six) : faire beaucoup d’embarras.
Vaaif en ’n korebruudche (cinq et un petit pain aux corinthes) : fou.
VAA1G : figue, gifle.
Vaaigekabas (panier à figues) : chapeau vilain ou démodé.
Portemonneie zoe plat as en vaaig (un porte-monnaie plat comme une figue) : bourse plate.
VAAIS : vis.
Hij eit en vaais los (il a une vis défaite) : il a l’esprit dérangé.
Hij kraaigt in zen vaais (il reçoit dans sa vis) : il est engueulé.
VAAIVE EN ZESSE (des cinq et des six) : des embqrras.
Zonder vaaive en zesse : lorsqu’on fait un travail, ne pas s’y attarder, mener la besogne rondement, sans faire de chichis.
VAGABONT : vagabond, propre à rien.
VAGGER (de vagabond ?) : fainéant qui court la rue.
VALLING : rhume.
VANDOËG (vandaag) : aujourd’hui.
Kom ek er vandoêg ni, ’k kom er merge : si je n’y arrive pas aujourd’hui, j’y arriverai demain, disent les gens qui ne sont pas pressés.
VANGE : attraper.
Vleegevanger : attrape-mouches.
Hij vangt : il est fou, il déménage.
VANSGELAAIKE : autant de ma part.
VAST : ferme, bien tenu.
G’het ma vast : vous m’avez attrapé ; et aussi : m’avez-vous compris ?
VE VAN ! : Vive !
Vé van Borna,
Patate mè saucisse !
Ces deux vers, commençant une chanson d’après la guerre de 1914-1918, sont une corruption de : Vivre à Borna Avec mon Artémise.
VECHTE (vechten) : se battre.
A De Cort relève les synonymes suivants : battere, beustele (borstelen), voenke, doeffe, smeire, troeve, rosse, koeke, pandoer geive, ’n smaaiting geive, ’n toeffeling.
VECHTPARTEE : rixe.
VEERKANTIG : carré, sans compliment.
Veerkantig oeitschaaite : se ficher complètement.
VEES (vies) : drôle.
Veesgezind : mal luné.
VEIGE : frotter.
Oeitveige : effacer.
Ge veigt twee : expression du jeu de cartes dit « couillon » dans lequel on efface sur une ardoise autant de lignes horizontales traversant une verticale qu’il y a de plis. Elle s’emploie au figuré pour se moquer de quelqu’un qui dit une bourde, une lapalissade. « Sa bêtise est tellement grande qu’il est autorisé à marquer deux points d’un coup. » Pour renchérir : neie, de gielen buum : non, il peut effacer tout l’arbre ; buum étant le nom donné au traits vertical traversé de traits horizontaux, d’où l’expression : en bumke speile : jouer une partie de couillon. ,
VEIGSKE : coup.
Veigske zonder lâche : jeu populaire consistant à se noircir mutuellement la figure ; le premier qui riait était éliminé.
VENT : mari.
VER DE VASE Ml NE KOL OËN : personne longue et maigre.
VERBA (voorbij) : au-delà.
VERBAVERE : sidéré.
VERCHACHELE : bazarder, troquer, vendre à bas prix (voir chachele).
VERDACHTERE : gaspiller.
VERDESTREWEIRE : gaspiller, détruire (dont « verdes- treweire est la corruption »).
VERDOEFT : qui sent le moisi (voir douf).
VERDOEMENIS (de « verdommen » : maudire) : que votre corps, votre personne soit maudit !
VERDRINKE (verdrinken) : noyer.
Zemme er zeive verdroenke vé on hem t’have (on
en a noyé sept pour le garder) : expression de dérision avec allusion aux chiots qu’on noie pour en garder un qui, par la suite, ne donne pas satisfaction. z (CÙ)
VERDURIÈR : fruitière, marchande de légumes.
VEREXCUSER : excuser.
« Verexcusé, mossieu…» (Coco Lulu).
Le mot avait presque disparu, mais un vieil ouvrier d’Uccle qui travailla chez moi, l’employait à tout propos en 1940.
VERGUEUL (virgule) : traces laissées par un doigt enduit de fiente sur le mur d’un W.C.
VERMIN ou VERMINCHT : puisque.
VEROUBLIER : oublier.
VERTREKSEL ou VERTREKSELKE (vertelsel) : conte.
A Bruxelles les gosses chantaient :
« Vertrekselke, vertrekselke » De kat zat op het dekselke,
» Het dekselke dat brak, etc».
VERRA PLUS: il est à verra plus ! dit-on de quelqu’un dont on n’a plus de nouvelles, ou qui est très loin.
Cette expression provient, en réalité de « il est à Vera-Paz.
- Leconte, conservateur du Musée Royal de l’Armée, a raconté dans son « Histoire de la marine belge » le lamentable fiasco de l’essai de colonisation belge à Vera-Paz (Guatemala) vers la fin de la première moitié du siècle dernier.
Le 11 novembre 1841, à l’initiative de la «Compagnie belge de colonisation », la « Louise-Marie » quittait Anvers pour Vera-Paz, au Guatemala, afin d’y faire un essai de colonisation. Des terrains situés à l’intérieur de Vera-Paz avaient été rachetés à une compagnie anglaise, et on partit plein d’espoir.
La « Louise-Marie » arriva dans la baie de Santo- Thomas, au fond du golfe de Honduras, le 6 janvier 1842.
Des délégués du gouvernement rédigèrent des rapports peu favorables. On passa outre. Des officiers et des soldats reçurent des congés pour se rendre dans ce qu’on appelait déjà la « Nouvelle Belgique ».
A Bruxelles, on chantait :
« Wee goet er mei, no Vera-Paz ?
» Do moote we ni werke » Eite en drinke op ons gemak « Sloepe gelak verke…».
(Qui part avec nous, à Vera-Paz ? Là, il ne faut pas travailler. On peut manger et boire à son aise, dormir comme des cochons.)
Des paysans belges vendirent en hâte et pour une croûte de pain, ce qu’ils possédaient, et ils se pressèrent devant les guichets afin d’acheter des terres qu’ils n’avaient jamais vues.
En 1843, une première fournée de dupes partit pour la terre promise. Mais quelle désillusion, deux ans plus tard lorsque des passagers belges se rendirent à Vera-Paz afin d’y étudier les résultats de la colonisation !
Presque tous les colons, mal vêtus, souillés de boue, le visage jaune, les yeux cernés et brillants de fièvre, les attendaient sur quelques mauvaises planches formant le débarcadère.
Un grand nombre de Belges avaient succombé à des épidémies. Deux cases étaient affectées à quarante orphelins !
Le 15 avril 1846, la «Louise-Marie» rentrait à Ostende, transformée en hôpital flottant !
La mésaventure causa une profonde impression en Belgique.
VERVEIT : crainte, peur (de « vervaard » : intimidé).
« Waaile zaain van Meulebeik » Van de Marolle gien verveit ! ».
(Nous sommes de Molenbeek et nous ne craignons pas la Marolle I)
Nous lisons dans « Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael-Dicht » :
« Dan quamp eenen Jonch met eenen swarten baert, » So swart als eenen Duyvel, ‘k was vervaert ».
Et dans « De Gedwonghe Griet », farce bruxelloise du XVIIe siècle :
« Veur Tiger of Tiran het minst niet vervaert». VET: graisse.
Doe mei ben ik vet ! (avec ça, je suis gras I) : cela me fait une belle jambe ! cela ne m’avance à rien ! Hé met da vet ! (ici, avec cette graisse !) : donnez cela ici !
Spring no ’t vet : personne maigre.
VETLAP (chiffon à graisser) : personne sale.
VETPOT : personne mal lavée. Littéralement : pot à
graisse.
Désignait jadis de petits pots de verre colorié remplis de stéarine ou de graisse et dans lesquels, aux réjouissances populaires, brûlaient des mèches. On disait des « vetpottekes ».
VEU (voor) : devant, avant.
Kom ich veu : venez ici.
VEURTACH : auparavant.
VEUS (vors) : grenouille.
En veus dé op ze gat zit (une grenouille assise sur son séant) : nez épaté.
VEUVECHTER (de voorvechter) : voorvechter est traduit par «champion d’une idée», mais à Bruxelles, où le mot est d’un usage courant, il désigne les solides bougres qui sont employés par les patrons de salles de bal pour expulser manu militari ceux qui provoquent des désordres. Désigne aussi le « maquereau » ou le « marlou » d’une fille publique. Les Annales du Comité flamand de France (1853), nous apprennent que les habitants de Mont-Cassel (Flandre française) étaient appelés au XVIe siècle, d’après un poème flamand, « Voorvechters van Cassel ». M. De Daecker qui a relevé toute une série de sobriquets, traduit par « Batailleurs de Cassel ».
« Den Dogge daane kost draa stukke van vaaf frank inieneki deubaate» (Le Dogge (surnom d’un veuvechter), celui-là savait percer en les mordant trois pièces de cinq francs ; Cypriaan Verhavert).
Le plus fort des « veuvechters » de Bruxelles était le «Steer» (le taureau) surnommé aussi «Susse van de Rubens ».
De son vrai nom François, il était au service de la firme Fonson dont il était un des hommes de confiance. Il eut un fils, inspecteur de police dans un faubourg bruxellois.
VIGILANTE : fiacre.
Le mot a disparu. Il daterait de 1838. On lit dans un journal d’Anvers : « On vient de former un projet d’association anonyme auquel on ne peut qu’applaudir, car il tend à nous doter d’une amélioration dont n’a été privée que trop longtemps une grande cité comme Anvers. Il s’agit d’un service de voitures de place, qui recevraient le nom de « Vigilantes », et serviraient aux courses à l’intérieur de la ville comme à celles de la Station de chemin de fer». («L’Observateur», Bruxelles, 7 février 1838.)
VILLA : villa.
In de p’tit villa : rue de la Plume. Cette rue s’appelait autrefois rue du Petit Village.
VINGER (doigt).
De vingere zaain van de fiest (les doigts sont de la fête) : il se pourléche les babines.
VINGT-DEUX ou TWËE-EN-TWINTEG
«Ah! Parfait! J’ai compris: le «22 22 22» est un mot de passe entre employés (d’un grand magasin) pour signaler l’approche d’un inspecteur. » (« Bruxelles Inconnu », par G. Freddy.)
« Ancienne expression du jargon des malfaiteurs, signalée par Vidocq, adoptée plus tard par le langage des faubourgs et des casernes (usité au 6e Chasseurs, à Saint-Mihiel, dès 1888).»
Cette exclamation est lancée pour donner l’éveil et annonce l’approche d’un intrus, d’un importun : agent de police, surveillant, etc.
Le « Journal du Camp de Goettingen » (camp de prisonniers français en Allemagne 1914-1918) le définit ainsi avec humour : « Formule magique qui éteint les incendies portatifs et les feux de cheminée » — entendez : les pipes et les cigaettes allumées en contravention au réglement) loriqu’un gardien est signalé.
Ce mot de passe a obtenu un vif succès auprès des prisonniers appartenant à d’autres naticnalités, qui l’ont adapté à leur propre prononciation : les Anglais ont dit « vennt dou », les Russes « vinta dou ». Chez les uns et les autres, le terme conventionnel, on le voit, a été emprunté : nouvelle preuve de la difficulté et de la répugnance qi’éprouve tout idiome à former des mots secrets et artificiels. Il est bien plus commode d’adopter les expressions toutes faites qui tombent sous la main. (« L’Argot de nos prisonniers en Allemagne », Dar Albert Dauzat. Mercure de France, 16 mars 19‘9.)
VIERDIEL (vierdeel) : un quart (de livre).
Lorsqu’ils vont aux provisions, les gens pauvres achètent un «quart» de beurre, ou un «quart» de saindoux. Malheureusement, pour sux, les commerçants bruxellois, au lieu de mettre 125 gr sur un des plateaux de la balance, ne mettent que 120 gr. Cet usage est ancré à un tel point qu’aucun client ne s’aviserait de protester. La balance automatique a mis fin à cette tradition peu honnête.
VISCH : poisson.
Vischwaaif : poissarde, marchande de poissons. Vischmet : marché aux poissons.
As rotte visch oeitmoêke : engueuler comme du poisson pourri.
Vischmetkladde : poissarde femme très vulgaire. Scihuermans: « vischkladde, vischmarktkladde » : vischwijf, gemeen of erg vrouwmensch dat duchtig kan kijven.
Hij heit visch g’eite, de groete komme oeit (il a
mangé du poisson, les arêtes sortent) : il est mal rasé.
Visken in en visken oeit (petit poisson dedans et petit poisson dehors) : jeu des ricochets.
Ik amuseir ma hee gelak as ne vis op en plank
(je m’amuse ici comme un poisson sur une planche): ah ! c’ qu’on s’ennuie ici…
VLEEGE (vliegen) : voler.
Vleeg : mouche.
Drâ vleege mè iene slag (ou, mè iene scheit) :
deux pierres d’un coup.
Vleegmacheen : aéroplane.
Hi| vleegt ve praais : en termes de colombophilie : il fait voler ses pigeons pour des prix, mais l’ex- preision signifie «je l’envoie dinguer».
Vleegepikker : coureur de jupons.
VLEERENBOL (vlierbol) : boule de sureau.
Afgelekte vleerenbol : insulte : hé vilain !
VLEK : ter-blanc.
Vlekke muzeek : boucan que font les gosses en tapant sur des boîtes de fer-blanc ou sur des couvercles de casseroles. Par extension : mauvaise musique jouée par des musiciens en nombre insuffisant ou mauvais. On dit aussi concert à knoebbel.
VLEKSKES : de l’argent.
Vlek veut dire fer-blanc et désigne aussi de petits cercles de fer-blanc avec lesquels jouent les gamins, d’où « jouer aux vlekskes ».
Par analogie avec les pièces de monnaie, « vlekskes » est le nom de l’argent.
« Nâ eit hem veul vlekskes ! » : Maintenant, il a beaucoup d’argent !
VUES (vlees) : viande.
Vliës da ni kan hange : kip-kap.
(Littéralement : viande qu’on ne peut accrocher.) Vliës mé volanskes : intestins, triperie.
VLOEG (vloed) : averse, drache, déluge.
VLOOI (vlooi) : poux.
Vlooiekop : tête à poux.
Vlooiezak : lit.
’t Es ni genoeg om en vlooi e lavement te zette
(il n’y a pas assez pour donner un lavement à une puce) : c’est vraiment trop peu, c’est insignifiant.
Hij goet veuroeit geiak en vlooi in ne pot saraup :
il avance comme une puce dans un pot de sirop.
VODDE : loque, torchon.
En voddeke sloege : nettoyer sommairement le sol à l’aide d’un torchon mouillé.
Vodden en bien : marchand de loques et d’os.
« Ei gien vo-den en bien ! » : n’avez-vous pas de loques et d’os à vendre ! (Cri bruxellois) Voddewaaif ou voddevrâ : marchande de chiffons.
Klodde en vodde, a hum hangt oeit : moquerie lancée à ceux qui sont mal habillés (haillons et loques, ta chemise dépasse I).
Voddene : loques.
Par extension : bêtises, blagues, non-sens.
Da zaain nog al gien voddene : en voilà des histoires ! qui aurait cru cela ?
« Alemo voddene ! » : balivernes que tout cela ! s’exclama, avant de mourir, l’assassin Lambert Ernst, guillotiné devant la Porte de Hal, en 1850.
Gien voddene in de bieCHt (pas de blagues pendant la confession) : dit par le curé lorsqu’il croit que son (sa) pénitent(e) manque de sincérité.
VODDEMAN : chiffonnier.
Les « voddeman » et les « voddevrâve » déambulent à partir de sept heures du matin. Ils lancent à travers les rues encore somnolentes leur appel bien connu « Hei gien vodde en bien ? ». Ils ne fouillent pas les boîtes à ordures, ils achètent deci-delà des chiffons, de vieux habits et en général, un peu de toutes ces choses vagues que l’on croit hors d’usage et qui, cependant, ont encore une valeur et une utilité. (G. Freddy, « Bruxelles Inconnu ».)
Une description curieuse du « voddeman » est donnée dans « Kluchtigh ende Belacchelyck Verhael- Dicht, etc ».
« … daer riep een Vent „ Hede geen Voddenen ? ”
VODDESTOK (bâton à chiffons) : parapluie.
VOECH (voort) : de l’avant.
Voech kunnen : savoir marcher.
Ge kunt voech : avec ça tu sais marcher (après un bon repas, ou nanti d’une somme d’argent).
En voech, get er gien mei : et après tout, cela ne vous regarde pas.
Allei, got voech : allez, circulez !
Voech a la même origine que «foert».
VOEDERONS : le Pater.
Hij es beizig on ze voederons te leize (il est en train de lire son pater) : il soliloque, il marmonne.
VOEIL : sale.
Voeile petit : salaud ! cochon ! petit dévergondé ! In de voeile valle (tomber dans la saleté) : tomber dans le pétrin.
Voeil tong (sale langue) : personne médisante.
Oud voeil : archi-connu.
Voeil Jeannette : figure très populaire du carnaval bruxellois. Le « voeil Jeannette » est habituellement un homme habillé en femme à l’aide d’oripeaux, et montrant ostensiblement ses dessous.
’t Es percees ne sCHoepekop in ne voeilen hand- toek (on dirait une tête de mouton dans un sale essuie-main) : des ouvriers des abattoirs transportent parfois des tripes ou une tête d’animal dans un linge sanguinolent. De là l’expression appliquée lorsque quelqu’un a maladroitement empaqueté un objet dans du papier ou dans un linge malpropre. Voeilbak : poubelle, bac aux ordures.
VOENK : gros nez.
Ne slag op a voenk : un coup sur ton nez !
VOETKAPOEN : débardeur, mauvais garnement.
« Allez-vous en chez ta mère, scôbiacq ! parisseux ! voet-capoen, que je lui z’ai dit comme ça. Mette ne plus jamais — van ze lève neet — vos pieds dans vot’ parrain son mison ! » (La malédiction de Jef Krollekop, «Le Sifflet», 28 août 1904.)
C’est parmi les « voet-capoene » ou «-capons du rivage » que se recrutaient les « scheppers » (voir ce mot).
VOGELE : oiseaux, faire l’amour.
Le verbe prête à un jeu de mots intraduisible en français, dans l’histoire que voici : un homme annonce à sa femme qu’il s’absente pour trois jours. Rentrant inopinément, le premier soir, il trouve son épouse en conversation galante. Il empoigne l’individu et ouvre la fenêtre (du troisième étage)
- Oei ! Oeil ! fait l’infidèle, tu vas le tuer !
- Het gien nuut, répond le mari dee kan vogele kan vleege ! (T’en fais pas, qui sait faire l’amour sait voler !)
VOL : plein.
Voile pot : verre plein.
Enseigne bruxelloise de cabaret.
Voile gaz : à toute vapeur, vite, précipité.
VOLLE SLOEF : à plein rendement.
VONTCHESKERMIS : le pan de la chemise qui passe par la culotte ou le pantalon déchiré.
VOOIERING (voering) : doublure d’un vêtement.
Get nog gien vooiëring in â neus (vous n’avez pas encore de doublure dans votre nez) : c’était la réponse que faisait habituellement un priseur à celui qui refusait de puiser une pincée de tabac dans sa tabatière. Elle équivalait à : get nog geil on a bek : tu es encore naïf.
VOOT : pied.
Ge kunt voech, get voete (tu as des pieds, donc tu sais marcher) : tu dois savoir te tirer d’embarras. Z’heit heu voot omgesloege (elle s’est foulé le pied): elle a fauté.
On a voot ! (à ton pied) : des nèfles, zut !
VOS : renard, roux.
De vosse stinken in de zomer (les renards puent en été) : allusion méchante qu’on fait parfois en présence de personnes rousses.
Rossekop ou vossekop (tête rousse) : personne rousse.
VRA (vrouw) : femme.
Dei vra heit teige den hoek van en ronne toefel geluupe (cette femme a couru contre le coin d’une table ronde) : elle est visiblement enceinte.
VRAVOLK : plusieurs femmes (cf. anglais woman folk). Parfois dans le sens de « femmes légères ». (En hâ verkwistje dô al ze goed me vrâvolk. Brus- selsch Dialect, J.-F. Willems. [Et il gaspillait tout son argent avec des femmes légères.l)
VRAAIEN : courtiser, fréquenter, faire la cour.
VREUITE (wroeten) : fouiller, remuer.
Un type qui farfouille partout est un vreuiter. Un gosse qui remue en dormant est un vreuitzak.
VROEGST1TCHE (petit point d’interrogation) : personne questionnant sans arrêt.
VUIDUI : porte de devant.
Zoe zot as en vuidui : fou ou sot comme une porte de rue (peut-être parce que dans les quartiers populaires les portes des habitations sont le plus souvent ouvertes).
WAAIF : femme, épouse (cf. anglais wife).
Se trouve dans la pièce « De Bervoete Bruers » : « trouwen een wyff ».
« Dans un certain monde, il est de vérité élémentaire que le mari a le droit de battre sa femme et l’amoureux sa crotje. Maîtres et seigneurs de leur compagne, ils tapent dessus si ça leur plaît, quand ça leur plaît, où ça leur plaît et comme ça leur plaît.» (Pourquoi Pas? 1931.)
WAAIS : sage.
Waais nioeke : faire avaler des sornettes.
Moki dat on de ganze waais (faites accroire cela aux oies) : je n’avale pas vos bourdes.
WALLEBAK : noceur, ivrogne.
Wallebakkerâ : la noce, la beuverie.
WALOOIS (pou des murailles) : punaise.
Waloisepôt : nom populaire de l’impasse Michiels, chaussée de Forest, à Saint-Gilles.
WATTE ? : Quoi ?
A donné ce jeu de mots.
Watte ? : Quoi ? (mais aussi « ouate ») — Neie, wolle (non, de la laine) — Vei a neus in te rolle
(pour y rouler ton nez).
WEDDE (wedden) : parier.
Wedde of zwaaige : parier ou se taire.
Expression par laquelle on clôt toute discussion.
WE1F (weduwe) : veuve.
Weiveneir (weduwenaar) : veuf.
WEIK : semaine.
Lange weik veû sinche : échalas (personne grande).
Le contraire : grenadeer in twee gezoegt (grenadier scié en deux).
WEL (wel) : bien.
Ge zet er wel mee (vous êtes bien avec ça !) vous vous trompez.
WERKE : travailler.
Hij werkt dat ’t stof in de gebeure vleegt (il travaille tant que la poussière vole dans le voisinage): il trime.
WICHEWACHE (wisjewasje) : toqué, un peu moins que « kwebus ». S’adresse surtout aux personnes affligées d’une infirmité.
WIER
Ze zitte on e wier : ils sont en train de commérer, ou de ronfler sans fin (allusion à la scie du menuisier qui traverse un nœud).
WIGGEL-WAGGEL : tremblote.
WIGGEWAGGESTROET : rue Saint-François, à St-Josse (comme elle est très en pente, on tremble en la descendant).
WILLEKES : roulettes, petites roues.
Voir « rollekes ».
Quand un enfant ne peut pas accompagner ses parents, on lui dit : « ’t Es van thoois blaaive, wogs- kens me paperen willekes oen (il faut rester à la maison, dans petit chariot avec roues de papier).
WIND : vent.
Hij kan teige de wind (il peut résister au vent) : il est bien nanti (de nourriture ou d’argent).
’t Es en smalle flupinne. ze kan de wind duisnaaie
(c’est une typesse étroite, elle sait couper le vent) : elle est très maigre.
Geift er mo wind op : activez le plus possible.
WITTER : souteneur, maquereau, probablement de « mangeur de blanc ».
WOEFEL (wafel) : gaufre, gifle.
WOEGEL (de wagon) : véhicule, charrette, charrette à bras, char.
De woegel blaaift thoeis : (la charrette reste à la maison) : le projet est avorté. Cette vieille exprès- sion qui, je crois, n’est plus employée aujourd’hui, l’était encore vers 1875 aux dires de M. Meyn- kercken qui me l’a communiquée.
WOETER (water) : eau.
Het woeter : l’hydropisie.
In druug woeter zwemme : (nager dans de l’eau sèche) : ne pas savoir nager.
Woeter mé wind : boisson sans goût. Waawoetervat (bénitier) : bigot, bigotte.
WOLK : nuage.
De wolken hange lieg (les nuages sont bas) : son pantalon tombe sur ses chaussures.
WOLVENDERM (intestin de loup) : affamé, type qui mange avidement et beaucoup.
WOUT : agent de police (voir « ajoen »).
WULLEWAUTER : sauvage, espiègle, tête folle. L’origine de ce mot est extrêmement curieuse et se rapporte à l’histoire de Bruxelles.
La rue du Bois-Sauvage est une de ces rues bruxelloises qui par suite d’une mauvaise traduction, portent un nom français erroné.
Un nommé Wilde Wouter (Walter le Sauvage) y avait jadis sa demeure. Par analogie entre « woud » et « wouter » on traduisit par « bois sauvage ».
ZA (soie)
Da zaain stukke van za lappe (ce sont des morceaux de loques de soie) : c’est sérieux.
ZAAIKE OU ZEKE : uriner.
Beddezaaiker : qui urine au lit, insulte.
ZABBERE : pleuviner.
ZAK : sac, poche (en Bargoensch : mille francs). Papzak : sac à pappe, se dit de quelqu’un de très gros.
Platzak : sans le sou.
Rotzak (sac pourri) : insulte.
Hij goet in zene zak, mo hij gijft niks (il va dans sa poche, mais il ne donne rien) : se dit de quelqu’un dont la première idée est d’être généreux ou de promettre quelque chose, mais qui se ravise. Une anecdote à ce propos : un riche rentier tombe à l’eau, au canal. Deux pêcheurs à la ligne le sauvent de la noyade. Il promet une récompense à ses sauveteurs, mais quelques minutes plus tard, alors qu’il a repris ses esprits, il leur dit :
— Joenges, kan der gien van aaile en half frankske wissele ? (Camarades, l’un de vous peut-il me changer une pièce de cinquante centimes ?)
ZAI : saoûl.
Dans « Die franzôsische Sprache im Munde der Belgier und die Marollenmundart Brüssels », par Julius Hennig, se trouve une foule de mots et d’expressions bruxellois exprimant l’état d’ivresse.
« Hij es wei ne ki in de patate » (Il est encore une fois dans les papates).
« Hij eit en struutche in zen uug » (Il a un fétu de paille dans l’œil).
« Hij eit en stuk in zen botte » (Il en a plein les bottes).
« Zatlap », « zattekul », « genévelist », « genevelneus ».
« Hij eit en et gelakas en spons » (Il a une éponge pour estomac).
Et dans « Le Bleuet » (journal molenbeekois) du 18 octobre 1936 se trouve cette phrase exprimant l’ivrognerie poussée au plus haut degré :
«— Afin, ge stondt doe, mé a verdoemenis, zoe dreuvig, biest, stoem, schief, scheil, strond, krimineil, baldoeder en stoemlinks-zat, que j’ai dû te mettre coucher. »
Zatte processie
Les habitants de Lembecq qui escortent les reliques de saint Véron revêtent des uniformes militaires, rappelant d’anciennes tenues de l’armée belge d’avant 1914; les uns sont à pied, les autres à cheval, ceci pour rappeler sans doute que le saint était de descendance royale.
La procession dure presque toute la journée et comme les estaminets sont nombreux sur la longue route, nos militaires d’occasion qui, au début, cambraient la jambe et bombaient le torse, finissent par « avoir des jambes en flanelle », marchent en zigzaguant, et le public, goguenard, ne manque pas de qualifier le beau cortège de « zatte processie ». C’est d’ailleurs sous cette dénomination bizarre qu’on la connaît en folklore.
ZATPARTIE : synonyme de zatte processe.
« Zat », « Scheilzat », « Scheilkrimeneilzat », « Scheil- krimeneilstrondzat » : gradation de l’ivresse.
ZATTECUL : ivrogne, comme zatlap ou geneivelist. Zatterik : ivrogne.
« Satterick », dans « Meester Coenraedt Bierborst », farce bruxelloise du XVIIe siècle.
ZAUL : semelle.
Kus men zaule (embrassez mes semelles) : fichez- moi la paix.
ZEEL (ziel) : âme.
Zeelhond (chien d’âmes) : raccoleur de volontaires à prime d’avant 1870.
Hij geift e stuk van zen zeel (il donne un morceau de son âme) : il donne chichement.
ZEEN : voir.
Hij hei deu ma laaif gezeen (il a vu à travers mon corps) : il m’a roulé.
ZEIKER EN VAST : sûr et certain.
ZEIMELEIR : un hésitant.
ZEINE (zenuwen) : nerfs.
Ge geif ma op de zeine : vous m’énervez.
ZEIKERE (NE) : désigne un homme lent, prudent, dans la parole ou l’action.
ZEURPROEMIER : pisse-vinaigre.
«Lange Lowi, ça était un zuurpruimer», J. Bouley, « La Gazette » 3 août 1936.
ZEUTE LEES : saindoux.
ZIEP : savon, enrichi (aussi Baron Ziep qui pendant la guerre de 1914-1918 désignait l’accapareur ayant fait fortune, particulièrement dans la fabrication du savon).
On appelait aussi le Baron Ziep : saucisse-marchant. Ziepsop : savonnée.
Ziep on den boeik en de trappen af ! Vous allez voler à la porte !
Hij es om ziep (il est allé chercher du savon) : il a fait faillite.
Hij hei ma gesCHaure zonder ziep (il m’a rasé sans savon) : il m’a eu, il m’a roulé.
ZIEPTRINNE : femme lente (de ziep : savon et Trien : Catherine ?).
ZIER DOON : faire mal, faire souffrir.
Hij hei zier : il a mal.
Hem ek a zier gedoen ? : T’ai-je fait mal ?
« Hout op dat ghij mijn Vrouw niet seer doet…» (« Lemmen met sijn Neus », farce bruxelloise du XVIIe siècle.
ZIEVEREIR (zeeveraar) : radoteur, baveur, imbécile, gâcheur.
Da es ni gezieverd : cela est sérieux.
Allei, zievert ni ! : sois sérieux !
Zieveresse est le féminin de zievereir.
Zievereir est la forme dialectale d’un mot néerlandais qui s’écrit: « zeeveraar » (baveur) et, au féminin : « zeeveraarster » (baveuse).
Il vient de zeever (bave) lequel possède, dans sa famille : zeeverdoek (bavette), zeeveren (baver), zeeverbaard (baveur) et zeeverzaad (barbotine), Callewaerts dixit.
Examinons maintenant, dans la suite des temps, les acceptions de « zeeveraar » :
« Le Grand Dictionnaire français-flamen » de Jean Waesbergue, Amsterdam 1624: « zeeveraer » : baveur. Qui jette de la bave.
« Het Groot Woordenboek der Nederlandsche en Fransche Talen » par Richelet, 3e édition, Georges Fricx, junior, Bruxelles 1739: « seeveraer », « seeve- raerster », « die seevert » : baveuse.
« Algemeen Vlaamsch Idioticon », par L.-W. Schuer- mans, Louvain, 1865-1870 : «zeever» : flauwe praat, kinderklap, arme raas : wat flauwe zeer vertelt gij nu !
«Zeeveren», flauwen praat vertellen ; babbelen ; wat ligt gij daar te zeeveren ; « zeeveraer », « zee- verpot », die flauwen klap vertelt (Flandre, Brabant, Anvers, Campine, Limbourg).
Un Belge fut condamné un jour pour avoir fait usage du mot « zievereir ».
C’était en 1906. Le Conseil de Guerre du Brabant eut à connaître le cas d’un artilleur qui avait traité son supérieur de « zievereir ».
Le Conseil ne pouvait pas ne pas condamner. Il y allait du prestige du supérieur et de l’armée tout entière. S’il avait acquitté, tous les piottes et tous les artilleurs auraient désormais pu dire à leur colonel :
« Oué, mon zievereir »,
«Très bien, mon zievereir»,
« A vos ordres ,mon zievereir ».
Curtio (George Garnir), écrit : « L’origine du mot « zievereir » se perd dans la plus haute antiquité. Beaucoup de bons esprits estiment cependant, d’ores et déjà, que « zievereir » est originaire du bas de la ville : l’affection qui le caractérise participe à la fois du bégaiement, du bec de lièvre et du petit verre de Hasselt.
» Le «zievereir» est de la famille du « broubeleir », lequel n’est lui-même, qu’une variété de l’espèce « bafouilleur ».
» On distingue le «zievereir» à l’eau (« zievererius humidus » de Linnée) ; le «zievereir» vulgaire (« zie-
vererius crapulosis »); le « zievereir » constitutionnel alcoolique (« zievererius zatteculosis »).
Les symptômes les plus apparents du « zieverei- risme » sont : les troubles dans l’élocution, l’obligation, pour l’interlocuteur du «zievereir» d’ouvrir un parapluie, la nécessité pour le malade de sécher toutes les vingt secondes son menton avec le dos de sa main transversalement promenée ; enfin une difficulté extrêmement considérable à prononcer la phrase fameuse : « Six cent six Suisses sucèrent six cent six saucissons sans sauce ».
ZIEVERKUT : féminin renforcé de zieveresse.
ZIEVERTOTCHE : synonyme de zievereir, mais plus gentil, plus amical.
ZIEVEROLOGUE : synonyme de zievereir.
ZIN : sens, intention.
Hij ei zen vaaif zinne ni : il n’a pas ces cinq sens. Il est maboule.
Wa zaain ze mi ons van zin ? : Que vont-ils faire de nous ?
Egalement caprice, lubie. Le Bruxellois dit aussi : avoir une zin.
ZINNE (Zenne) : Senne.
Hij es van de frontière van het Zoevelzinneke :
c’est un type dont on ignore l’origine.
ZINNEKE : chien bâtardé c’est-à-dire qui a si peu de valeur marchande qu’il est bon à jeter à la Senne.
ZITTE : s’asseoir, être en prison.
Loete zitte : laisser en plan, abandonner, renoncer. Ik zit er ni mei in : je ne m’en soucie pas, cela me laisse froid.
Hij ès drâ moend goên zitte : il fait 3 mois de prison.
ZOED (zaad) : graine.
’t Es zoed in ’t bakske (il y a des graines dans la mangeoire) : il y a de l’argent disponible.
Ze schit op vé zoed (elle monte en graine) : se dit d’une jeune fille qui ne se marie pas.
ZOEGEMEIL : sciure de bois.
Dee zoegemeil fret zal planke schaaite (qui mange de la sciure de bois chiera des planches) : très vieux dicton bruxellois, d’après M. Boreux, et signifiant : qui sème le vent récolte la tempête.
ZOEIPE : boire à longs traits, s’enivrer.
Zoeiper : buveur.
Pottezoeiper : buveur.
« Des middaghs trecken sij, met schoon robijnsche kaecken,
Naar Hanske Rattesteert, of in het Schild van Aken.
Daer suypt men wijn en bier
Dat was seer lecker nat, wij hebben braef ghesopen. »
(«De Ghedwonghe Griet», farce du XVIIe siècle.) Markies Schandael, baron Kramiek Die zuipen g’lyk een kous Z’hebben een lyf, een ton zoo dik,
Zy zwemmen in wyn en saus.
(« Dans « De rijke Zattecul en de Werkman », par Coco-Lulu, Bruxelles 1858.)
ZOEL : salle.
Huugzoel : jubé.
Zoeipzoel : nom de la salle privée, au cabaret « Au Vieux Saint-Pierre », rue d’Anderlecht, où se réunissaient les buveurs attitrés.
ZOEVEL : sable, vient de « zavel ».
Zoevel marchant ou zoevelboôr : marchand de sable. Son cri était « Witte zoevel ! Zoevelôôô ! Zoevelôôô ! ».
Zoevelzinneke (Zavelzenneken) : Petite Senne sableuse : dérivation de la Senne près de la Porte de Flandre.
SCHerpe zoevel : roublard, malin, finaud.
Zeût zoevel : quelqu’un de mielleux.
ZOKKE : chaussons.
Ge komt op a zokke (tu viens sur tes chaussons) : je te vois venir, je sais ce que tu vas me demander.
ZONNEKLOPPER : fa inéant qui passe ses journées à dormir au soleil.
ZOOIE (zieden) : bouillir.
Zooibiest (bête à bouillir) : poule à bouillir, femme sortant avec un homme plus jeune qu’elle ; une vieille.
ZOT : fou, maboul.
Zotkapotche (capote des fous) : camisole de force. Zot étant une insulte favorite des Bruxellois, voici quelques synonymes, ou approchant : kwast, kwe- bus, keigel, kinsch, kaille, keeke, snul, veer en en kroeimel, halve gegroeide, veer en een boterkoek, ’n vaais verlore, ’n gat in de keitel.
Zatte streike : excentricités.
Oud zot : démon du Midi.
’t Oud zot komt op : le voilà pris du démon du Midi. Il est atteint de folie sénile.
Etre fou après quelqu’un ou quelque chose, dit-on à Bruxelles, dans le sens d’être entiché.
Mé eemand de zot hâve (tenir le fou avec quelqu’un) : se moquer.
ZOT LOUITCHE : un des derniers « types » populaires de Bruxelles, mort en mars 1931, à 61 ans.
La jaquette miteuse constellée de « décorations » de fer-blanc (des couvercles de boîtes), il parcourait les rues où la bonté des gens lui assurait sa pitance quotidienne. Il chantait et, agitant une canne, faisait danser les enfants en poussant de sourds ronflements préludant à son couplet favori :
« Ne vogel op e stokske,
» Méke mé heu rimdjimdjim,
» Ze zegge da Méke gien tetten heit,
» Ik heb ze gevuld, ik hem ze getast,
» Mo ik hem ze loete stoen ».
Ce doux déséquilibré, s’appelait Louis Lamon. Il habitait le « Bloempanchgang » (la rue de l’Abricotier).
ZOUT : sel.
Hij wint het zout vé zen patate : il gagne le sel de ses pommes de terre, rien de plus. Se dit d’un commerçant qui fait de mauvaises affaires, d’un ouvrier qui ne gagne presque rien.
ZUUM : intestin de bœuf débité chez les tripiers.
ZWAAIGE (zwijgen) : se taire.
Zwaaigsigare : ce qu’on donne pour acheter le silence de quelqu’un, pot-de-vin.
Zwaaigtoobak : tabac qui s’éteint continuellement. Zwaaigen es oude : se taire est de l’argent.
ZWANCHELE : flâner.
ZWANZE : plaisanterie, fumisterie.
« Autrefois on aimait faire bombance,
Et l’on supportait la zwanze Quand l’hiver venait,
Aux soupers et aux banquets.
On bouffait à s’faire craquer la panse. »
(Les Banquets, paroles d’Ernest Verhaegen.)
ZWCHIKZWCHAK
Lange zwchikzwchak : personne très maigre. Schuermans : zwikzwak.
ZWEERE (zwieren) : danser, tournoyer, faire tournoyer.
Op zweer : en vadrouille.
ZWEIR (zweer) : inflammation, abcès.
Zweiruug : abcès, « clou ».
Ossenuutzweir : migraine.
ZWERT (zwaard) : épée.
ZWERDSTROTCHE : rue de l’Epée.
ZWIETE : transpirer, suer (du flamand zweten).
Zwiet : transpiration, sueur.
Oeitzwiete (uitzweten) : endurer, supporter. Zwietpateikes (littéralement : gâteaux suant) : pieds transpirant.
Loe zwiet es gâ geried (la sueur des fainéants vient très vite) : les flemmards sont vite fatigués.
Ge leegt da ge zwit, en ge zwit da ge stinkt : tu mens que tu sues, et tu sues que tu pues.
ZWOZZE : couenne.