La Belgique sous l’occupation française au temps de Napoléon: collaboration et résistance, conscription, camps de concentration, réquisitions, pillages, marasme économique, un état policier, Waterloo: la libération

PLAN

4.0 vue générale
4.1 la collaboration et la résistance (passive et active)
4.2 la conscription et les guerres
4.3 un camp de concentration
4.4 les réquisitions et les pillages
4.5 le marasme économique, la mauvaise gestion et l’endettement
4.6 un état policier, la censure et l’injustice
4.7 la lutte contre le néerlandais et le wallon
4.8 à Waterloo et après Waterloo

4.0 Vue générale de la Belgique sous l’occupation française à l’époque de Napoléon

 

Julos Beaucarne

 

Les soldats de Napoléon disent merde à leur patron le boucher de l’Europe qui bien que mort a un service de presse bien organisé.

 

Bernard Coppens, Patrice Courcelle, Le chemin d’Ohain, Waterloo 1815, Les carnets de la campagne, n°2, éd. De la Belle Alliance, 1999

 

(p.143) Un régime despotique

 

Les expéditions militaires de l’empe­reur ne firent pas que des heureux chez nous, tant s’en faut. Il fallait recru­ter de plus en plus de soldats et si les Belges s’engageaient assez volontiers comme mercenaires dans les armées étrangères, ils n’entendaient pas se voir enrôler malgré eux au service d’un pouvoir étranger. De 1798 à 1813, sur 89267 conscrits, 24460 seulement rejoignirent leur régiment et, quand ils n’avaient pu échapper aux recruteurs, ils désertaient allègrement.

 

Bonaparte avait effectué un pre­mier voyage en Belgique en 1803. Il y avait reçu un accueil très favorable : les habitants voyaient en lui le pacifica­teur qui avait mis fin aux excès révo­lutionnaires. Mais à sa seconde visite à Bruxelles en 1810, tout avait changé. Les seuls applaudissements qui saluè­rent son passage allaient à l’impéra­trice Marie-Louise — parce qu’elle descendait de Marie-Thérèse, l’Autri­chienne.

C’est qu’au fil des années le régime impérial s’était considérable­ment durci. Son omniprésente police s’attira très vite la haine des Belges. La sévère censure de la presse, des livres, des représentations théâtrales même, plongea le pays dans un marasme intel­lectuel dont Napoléon ne désirait pas le sortir : il voulait des sujets capables de travailler et de se battre et non de briller par l’esprit.

 

Par ailleurs, obéissant aux ordres de Paris, les préfets s’efforcèrent d’extirper le flamand non seulement dans son usage officiel mais tout aussi bien sur le terrain culturel, et il n’est pas exagéré de considérer qu’en Bel­gique, la question linguistique a trouvé ses premiers ferments à cette époque-là. En majorité catholiques, les habi­tants de nos provinces n’éprouvèrent plus qu’hostilité pour l’empereur quand les soldats français enlevèrent le pape et que celui-ci excommunia Napoléon. Non seulement les curés cessèrent d’obéir à Paris et de réciter des priè­res pour l’empereur mais ils entrepri­rent d’organiser et d’encadrer l’agita­tion des mécontents.

 

F.-A. Sondervorst, Histoire de la médecine belge, éd. Séquoia, 1981

 

(p.147) La Belgique sous la domination française

La médecine sous la République

 

Les sans-culottes qui s’opposèrent aux troupes impériales et à l’action des émigrés, furent d’abord accueillis avec une certaine sympathie, car ils arboraient la devise: liberté, égalité, fraternité. Toutefois, l’heure de l’indépendance n’avait pas encore sonné pour notre pays. Les envahis­seurs se livraient au pillage, au même titre que les armées qui les avaient précédées. Les combats se succédèrent avec des fortunes diverses. Après la victoire des Français à Jemappes (1792) et la défaite de Dumouriez à Neerwinden (1793), la France triompha définitivement avec Jourdan à Fleuras (1794). Ainsi, tour-à-tour, nos populations goûtèrent-elles les joies amères de la souveraineté populaire et les rigueurs d’un ordre absolutiste rétabli. La Belgique, jadis établie en rempart contre les visées de la France, se vit du jour au lendemain transformée en plate-forme de départ des futures équipées de nos voisins d’outre-Quiévrain.

 

Les vainqueurs de 1789, flanqués de commissaires du peuple, se promettaient de faire disparaître chez nous toutes les traces du despotisme ancien, notamment à l’aide d’une campagne antireligieuse effrénée. Les églises furent transformées en «Temples de la Raison», en salles de spectacle ou en dépôts de munitions, les couvents fermés, les prêtres et les religieuses pourchassés, les biens des possédants ou des ennemis du régime pillés ou vendus à l’encan. Les richesses de nos palais, églises et musées, prirent par convois entiers le chemin de la France, où ils devaient orner le Louvre et d’autres musées et ne nous revenir plus tard que dans une faible proportion. Toutes nos organisations corpora­tives disparurent par l’application, le 18 août 1792, du décret 2 du 17 mars 1791. Celui-ci supprimait aussi les maîtrises et jurandes corpora­tives de nos communautés de chirurgiens et de pharmaciens. Nos collèges médicaux se virent également supprimés. En France, on mit fin au recrutement des Maîtres-es-Arts, tant futurs chirurgiens que philiâtres, licenciés ou docteurs en médecine. Cependant, nos écoles d’anatomie et (p.148) de chirurgie, ne disparurent pas immédiatement, car elles répondaient à des besoins impérieux, ce qui devait d’ailleurs les aider à se reconstituer plus rapidement par la suite. L’université de Louvain s’efforça de poursuivre ses activités en invoquant la liberté d’association.

 

Lorsque la Convention annexa la Belgique en 1794, on caressa l’espoir que la situation s’améliorerait, mais l’opposition du clergé alla grandissante et la persécution religieuse reprit sous le Directoire. Si la liberté du culte ne fut pas supprimée, l’Etat prétendit en régler l’exercice et la soumettre à son intérêt. Les Confréries et les corporations religieuses épargnées jusqu’alors furent supprimées. On interdit aux prêtres de percevoir des taxes culturelles et de se mêler des fonctions réservées aux officiers de l’état civil. On leur imposa le serment républicain et de haine à la royauté en déportant ceux qui refusaient de s’y soumettre. Tous les chapitres séculiers, bénéfices simples, séminaires, ainsi que toutes les corporations laïques des deux sexes furent abolis définitivement. Le 4 brumaire de l’an VI (25 octobre 1797), l’adminis­tration centrale du département de la Dyle, considérant qu’il ne devait plus y avoir, dans toute l’étendue de la République, qu’un seul mode d’instruction publique, arrêta que l’enseignement public devait cesser immédiatement à l’université de Louvain. Déjà menacée en 1794, l’université avait transféré ses archives aux Pays-Bas, où elles furent hélas perdues ou dispersées. La ville de Louvain fut frappée d’une contribution de guerre de deux millions de florins, dont l’université était partiellement redevable. Sa résistance à ces exactions fut un des prétextes qui servirent à la fermeture. Comme nous l’avons vu, le Professeur G. Buesen fut enfermé à la prison de la Porte de Haï. Vounck fut arrêté à son tour, frappé à coups de crosse et déporté à Péronne, d’où on le libéra après quelques semaines pour mener à bien la liquidation de la dette de guerre et remettre de l’ordre dans les affaires. La mort de son collègue Vander Belen (24 avril 1794) avait reporté tout le fardeau sur ses épaules. Après que l’université fut fermée, Vounck, épuisé par le surmenage, mourut de chagrin le 20 mars 1799. Le recteur, Havelange, et de nombreux professeurs furent déportés à l’île de Ré et à Cayenne, d’où plusieurs ne devaient jamais revenir. Ainsi disparut cet établissement qui, pendant quatre siècles, s’était rendu utile à la science et à la patrie.

 

(p.148) J. Henri Matthey

 

La mise en adjudication des biens de l’Eglise profita à des spéculateurs et des républicains qui s’enrichirent facilement et qui occupèrent par la suite de hautes fonctions. Ces nouveaux propriétaires étaient évidemment de chauds partisans de la République et ne manquaient pas d’en chanter les louanges, car à travers toute l’histoire, on retrouve des hommes prêts à acclamer les nouveaux maîtres, pour s’assurer une position avantageuse. Tel fut aussi le cas de J. Henri Matthey de Maaseik (1742-1796), d’abord chirurgien dans l’armée autrichienne et qui avait acquis sa licence médicale à Louvain en 1776 (Fig. 107). En 1771 il avait publié

(p.149) une intéressante brochure consacrée aux soins à donner aux noyés. Il devint médecin fonctionnaire de la ville d’Anvers (1783) et prélecteur de son école d’anatomie. Son désir d’y enseigner la clinique chirurgicale ayant indisposé le magistrat et ses confrères, il fut tout heureux, lorsque les Français occupèrent la métropole, de se voir installé dans un fauteuil municipal. Dès 1794, il fut nommé officier municipal et bientôt (1795) maire de la ville. Il ne cessa de donner de nombreux gages de sa fidélité au nouveau régime. Il fut présent à toutes les fêtes et à toutes les spoliations. Il tint pour justes tous les impôts de guerre qui frappèrent la ville et trouva ses concitoyens trop peu zélés à remplir les coffres de la République. Il se fit le délateur de tous les absents, mena la chasse aux curés et aux rares couvents que Joseph II avait laissé subsister. Lorsque, le 17 août 1794, les Français fêtèrent la réouverture de l’Escaut (déjà réouverte en 1792), Matthey, les yeux pleins de larmes, les remercia pour cet acte libérateur et émit le vœu de voir notre pays réuni pour toujours à la France. Aussi, lorsque J.H. Matthey, en passant l’Escaut, succomba le 9 octobre 1796 à une attaque d’apoplexie, très peu d’Anversois versèrent des larmes!

 

Une forte coalition s’étant formée contre la France, une nouvelle loi décréta la conscription obligatoire alors que les levées, même au temps des Espagnols et des Autrichiens, avaient toujours été volontaires dans notre pays. La réaction du peuple, surtout à la campagne, fut brutale et violente. Comment, en effet, espérer que nos compatriotes soutien­draient un régime impie contre un ennemi extérieur qui promettait de rétablir la liberté du culte? Les paysans armés de piques et de fourches attaquèrent les postes municipaux, brûlèrent les registres de l’état civil contenant les noms des conscrits et s’attaquèrent aux convois de l’intendance. Le mouvement, né dans le pays de Waes, s’étendit au Hageland, à la Hesbaye et surtout à la Campine. Mal armée, après deux mois de lutte acharnée, la révolte fut écrasée dans le sang à Hasselt (4 décembre 1798). Ainsi prit fin la Guerre des Paysans.

 

La répression fut générale, n’épargnant même pas les intellectuels, car le grand élan de fraternité que la Révolution avait voulu engendrer ne dura guère. La plèbe, les meneurs, les commissaires du peuple se montrèrent souvent féroces et plusieurs de nos savants durent fuir devant la tourmente. Tandis qu’on assistait à une refonte totale de nos institutions, certains esprits, nourris aux vues de ceux qui proclamaient que «doit être heureuse la nation gouvernée par la philosophie», espéraient voir fleurir les lettres, les arts et les sciences, et suivre des voies nouvelles. Au pays de Liège, par exemple, où les salons parisiens avaient déjà eu plus d’emprise sur les esprits que l’Aufklärung germanique, on digérait mieux cette révolution venue de France encore que beaucoup d’intellectuels y avaient dû prendre le chemin de l’exil.

Beaucoup d’esprits jeunes brûlaient cependant du désir de sortir de l’ornière, sans voir flétrir le patrimoine acquis. Ce n’était pas facile puisque tous les centres de la vie intellectuelle et scientifique étaient supprimés.

 

Joseph Lefevre, L’Angleterre et la Belgique, à travers les 5 derniers siècles, éd. universitaires, 1946, Bruxelles

 

 ( Le régime impérial. – Chute de Napoléon. – L’arrivée des alliés)

 

(p.150) De la même année date le célèbre décret de Berlin proclamant le Blocus Continental, l’interdiction du trafic avec l’Angleterre et du débit de produits anglais sur le continent. C’était la paralysie du commerce, l’invite à la fraude et à la spéculation. Depuis 1811, l’Europe entière se débat dans une crise économique terrible qui multiplie les ruines et les misères. L’administration d’un immense empire, le gouffre des dépenses militaires amène l’établissement perpétuel de nouveaux impôts et achève d ‘exaspérer les habitants.

 

Infiniment plus lourd est le tribut du sang. La conscription est étendue à la Belgique dès la conquête. Elle se fait par la voie du tirage au sort, tempérée encore au début par la faculté du remplacement. Depuis 1805 elle devient d’une rigueur extrême; on lève chaque année des parties de plus en plus étendues du contingent, on fait des prélèvements sur les classes antérieures, appelant sous les drapeaux des jeunes gens qui se croyaient à l’abri. On se montre exigeant à l’extrême pour les exemptions d ‘ordre physique. L’examen des registres de levées, qui restent dans nos archives, laisse une impression troublante. Des affections graves, comme l’hématurie, sont décelées chez certains conscrits. La colonne latérale du registre n ‘en mentionne pas moins la formule sinistre. Bon pour le service. On sait quelle fut la réaction. La jeunesse s ‘ingénia de plus en plus pour éviter l’appel sous les drapeaux équivalant si souvent à une condamnation à mort. Les mutilations, les mariages fictifs avec de vieilles femmes, la corruption des fonctionnaires du service de 1’état-civil qui se prêtaient à des falsifications dans les registres, à des omissions, à des insertions d ‘actes de décès, tout fut mis en oeuvre. Enfin restait la suprême ressource : prendre le maquis. 

 

Les montagnes et les bois forment l’asile des réfractaires.  En vain, le gouvernement tente de recourir à des mesures de Dracon, il rend les parents responsables, les frappe de fortes amendes , établit chez eux des gendarmes à demeure. Les pères et mères déplorés se résignent, plutôt que d ‘envoyer leurs fils mourir dans les steppes de la Russie ou les montagnes de Castille. Non pas que le service militaire ait été odieux à tous. Le prestige de l’uniforme, l’orgueil de figurer dans l’armée du grand empereur, le désir de voir du pays, de courir l’aventure, fascinent bien des gars. Pour juger de la mentalité des soldats de notre pays nous disposons d ‘une documentation attachante. On conserve quelques centaines de lettres écrites par des conscrits originaires du pays de Liége, envoyée par eux à leurs parents, au cours de leurs diverses campagnes. Ces Lettres de Grognards écrites dans un style naïf et touchant, d ‘une écriture souvent maladroite, d ‘une orthographe fantaisiste dépeignent sur le vif le caractère du soldat, la vie qu’il mène. Beaucoup de correspondants se vantent de leurs exploits, parfois de leurs bonnes, (p. 151) fortunes, sont fiers d’avoir vu l’Empereur, d’avoir défilé devant lui.  Mais, chez tant d’autres apparaît le mal du pays, la nostalgie du clocher de village,  de la maison paternelle, de la vie familiale.  Si la guerre pouvait enfin finir, tel est le souhait général qui transpire dans toutes les lettres.

 

Persécution religieuse, crise économique, rigueurs de la conscription finissent par rendre odieuse à la population belge la personne du souverain, son régime administratif, voire la nation française tout entière. On regrette le vieux temps, l’époque de Marie-Thérèse et de ses successeurs, on se réjouit à l’annonce des défaites du tyran, on s’efforce de lire entre les lignes des informations ambiguës que donne la presse censurée, on colporte les bruits les plus étranges, on attend avec impatience la chute du colosse.

 

La défaite finale de Napoléon est due en ordre principal à trois séries de causes : l’action de l’Angleterre, l’oeuvre du colosse russe et la série ininterrompue des erreurs du tyran lui-même. On le voit une fois de plus : il n ‘est rien de nouveau sous le soleil.

 

(p.152) S’il eût mieux connu les enseignements de l’histoire, Napoléon se fût inspiré de l’exemple de ses prédécesseurs, Louis XIV et Louis XV. Il eût renoncé à cette conquête de la Belgique, que l’Angleterre ne pouvait tolérer, faute de perdre sa place sur le continent. Il eût considéré que, dépourvu d’une marine militaire, il ne pouvait abattre la puissance britannique basée sur l’empire des mers; que les ressources dont  lui-même disposait pour grandes qu’elles fussent, ne devaient pas suffire à une guerre sans fin. Mais, il est empereur des Français, époux d’une archiduchesse, père du roi de Rome, pourquoi s ‘arrêterait-il?

 

Les guerres d’Espagne et de Russie ont décidé du sort de l’empire français. Quand il revient de Moscou, Napoléon ne dispose plus que de quelques débris d’armée. En 1814 il tente un effort désespéré, en vue duquel il a mobilisé de toutes jeunes classes et des vétérans. La fortune avait décidément déserté ses drapeaux. Battu en Allemagne par la coalition russo-prussienne, il doit successivement évacuer la Hollande et la Belgique, assister impuissant à l’invasion de la France, puis enfin abdiquer à Fontainebleau le 4 avril 1814. Le colosse aux pieds d ‘argile s’écroulait comme un château de cartes. Depuis les revers de 1812, l’espérance d’une prochaine délivrance n’avait cessé de croître en Belgique. La population suivait les progrès des armées alliées, dans la mesure où l’on pouvait en prendre connaissance, un peu par la voix de la presse et plus encore par les rumeurs. En plein mois de décembre se répandit à Bruxelles le bruit, bientôt démenti, d’une arrivée des Cosaques à Cortenberg.  L’arrière-garde française évacua la capitale belge le 1er février 1814 au soir. Les alliés firent leur entrée quelques heures plus tard aux applaudissements de la foule en délire.

 

Le régime français de Fleurus à Waterloo, in : Chronique de la Belgique, éd. RTL1987

 

(p.513) De Fleurus à la Belle-Alliance, l’occupation française fut avant tout entre deux codes et deux réformes, une ère de pillages, de centralisation abusive, d’oppression linguistique et religieuse, de batailles sanglantes.

 

Napoléon a « provoqué plus de morts belges que 14-18 »

 

7 sur 7 – 9/06/15 – 15h26  Source: Belga

 

Les auteurs Dave Warnier, Luc De Vos et Franky Bostyn © belga.

Le livre « Waterloo 1815: De val van Napoleon » (La chute de Napoléon) a été présenté mardi sur les lieux mêmes où s’est déroulée la bataille de Waterloo. Ecrit par le professeur Luc De Vos et les historiens Dave Warnier et Franky Bostyn, l’ouvrage est destiné à faire mieux connaitre cette bataille primordiale pour l’histoire de l’Europe.

Les auteurs confrontent des sources de différents pays, et évoquent des aspects moins connus comme l’implication des Belges dans la bataille. Les auteurs ont constaté qu’en Flandre, le public attachait davantage d’importance à la Première Guerre mondiale qu’à la bataille de Waterloo.

« Déclin de la France »
« Mais pour toute l’Europe, la bataille de Waterloo est très importante. Elle marque le déclin de la France et annonce le siècle des Britanniques. Il est aussi intéressant de noter que les campagnes napoléoniennes ont provoqué plus de morts belges que la Première Guerre mondiale », explique Luc De Vos.

Soldats belges
Les auteurs de l’ouvrage se sont d’ailleurs penchés sur le sort des Belges dans la bataille de Waterloo: ils étaient environ 4.000 côté français, et le même nombre côté hollandais. Ces Belges qui se battaient sous le drapeau hollandais étaient des anciens soldats français, qui s’étaient engagé après le départ de Napoléon à l’île d’Elbe. A Waterloo, ils ont dû se battre contre leurs anciens camarades.

« De Val van Napoleon » est édité par la maison d’édition du Davidsfonds. Il n’est actuellement pas disponible en français.

 

4.1 collaboration et résistance (passive et active) en Belgique à l’époque napoloénienne

 

Adelson Garin, Binche et le carnaval, éd. IP (check), 1998

 

(p.48) Un choix de figures binchoises à (re)découvrir

 

Un enfant de Binche, André Boussart, devenu Général de Division, Baron de l’Empire

 

André-Joseph Boussart est né à Binche le 13 novembre 1758 dans un milieu modeste, il était l’aîné d’une famille nombreuse. Son père, ancien militaire, avait servi dans l’armée hollandaise et avait obtenu le grade de lieutenant porte-enseigne à la bataille de Fontenoy (1745) qui marqua la victoire des Français sur les Anglais et les Hollandais lors de la guerre de succession d’Autriche. André Boussart fit ses études au Collège Saint-Augustin (actuellement M.I.C.M.). Un de ses oncles avait servi dans l’armée autrichienne, à l’époque où Marie-Thérèse fut impératrice d’Autriche, de 1740 à 1780. Les récits des combats que faisaient son père et son oncle fermentaient dans la tête du jeune homme qui rêvait de s’engager à l’armée, ce qu’il fit à l’âge de dix-sept ans, au moment où éclata la guerre de Bavière (1776). Il fut caserne à Bruges en qualité de cadet. Trois mois plus tard, son régiment reçut l’ordre de partir pour l’Allemagne. Sa mère vint rejoindre son fils à Bruges pour l’embras­ser avant son départ et attacher au cou de son enfant chéri l’image protectrice de Saint-Ursmer qu’il conservera toute sa vie. Le jeune cadet partit donc en 1777 et fut nommé porte-enseigne à la suite d’une action d’éclat. Au retour de la campagne de Bavière, André Boussart rentra en Belgique avec son régiment qui y tenait garnison ; après neuf années de repos forcé, le lieutenant porte-enseigne donna sa démission (1785). L’insurrection brabançonne survint en 1789 ; un corps franc s’organisa et Boussart y entra comme capitaine, mais bien vite, il eut honte de faire partie de cette armée désorganisée par des traîtres et puis licenciée par les Autrichiens.

 

Il revint chez lui, sa mère était décédée. En 1791, il s’engagea dans l’armée du Nord et reçut très vite le commandement d’une com­pagnie. Il participa à la bataille de Jemmapes1 (1792)  où  les  Français triomphèrent  des Autrichiens avec une telle force qu’il reçut le grade de lieutenant-colonel. Le 1er mars 1793, il fut nommé lieutenant-colonel des dragons du Hainaut et dans la même année, il devint chef d’escadron. Peu de temps après, les Belges de presque toutes les provinces furent appelés à suivre le général Bonaparte dans la campagne d’Italie où les triomphes s’accumulent ; par la suite, Bonaparte le désigna pour la campagne d’Egypte ; ses vieux compagnons d’armes mettaient en évidence son courage excep­tionnel et la grande bonté dont il entourait ses soldats et l’un d’eux de signaler avec une grande fierté : «Nous étions sept enfants de Binche dans sa brigade et le général était toujours heureux et fier de nous réunir et de faire des plaisanteries en wallon : si Saint-Ursmer ne nous assiste pas, nous n’irons plus en conter aux dentellières de Binche». Les historiens ont toujours mis en évidence la grande intrépidité du général Boussart. Il faut aussi reconnaître le dévouement et l’amour sincère qu’il vouait à l’empereur Napoléon.

 

Soulignons également sa grande générosité à l’égard de sa famille nombreuse qui ne vivait pas dans l’aisance.

En juin 1802, il fit une visite à Binche. Les Binchois, fiers de ses succès, lui réservèrent une réception splendide. Nommé général commandant du département de Jemappes (notre pays est sous domination française), André Boussart avait tenu à réserver sa première visite pour sa ville natale.

«Il marchait sous les fleurs et sous les arcs de triomphe de verdure. Tous les notables de la ville venaient lui serrer la main. Le maire de l’époque, Monsieur Coquiart, le harangua mais le bon enfant de Binche se débarrassait rapidement de tout le cérémonial officiel pour donner ses poignées de main à ses anciens camarades et causer avec sa famille et ses amis, avec ses sœurs surtout qu’il aimait en bon frère et qu’il protégeait de loin». Sa première visite en ville, il la fit au Collège des Augustins où il avait fait ses humanités.

 

(p.49) Il répondit aux vœux de ses concitoyens en faisant rouvrir l’église paroissiale et tint sur les fonts baptismaux l’enfant d’une de ses sœurs, décision d’autant plus audacieuse qu’à l’époque, le rétablissement du culte n’était pas encore décrété.

 

En juillet 1805, l’empereur le nomma com­mandant du département de la Haute-Saône et le fit commandant de la Légion d’Honneur. Le 13 octobre 1806, il est à la tête d’une division de dragons à la fameuse bataille d’Iéna (Allemagne) qui consomme la ruine de la monarchie prussienne. De jour en jour, il remporte de très nom­breuses victoires à travers toute l’Allemagne et exécute diverses missions à Ulm, Vienne et Berlin et le 2 décembre, il se retrouve au Quartier Général de Varsovie à la tête de la cinquième division de la Grande Armée. Le 20 décembre, il contribue à battre la division russe à Czarnevo et est grièvement blessé mais le jour de Noël, il a déjà repris le combat, malgré les routes difficilement praticables.

 

Le 26 décembre, il est à nouveau blessé mais c’est là aussi que, selon l’expression d’une de ses biographes, Boussart «mérita les suffrages de toute l’armée». Un mois plus tard, il avait repris le combat, il fut à nouveau blessé ; son incomparable ardeur l’avait entraîné trop loin mais il fut sauvé par l’amour de ses soldats.

Le 2 novembre 1807, il prend le comman­dement de la cavalerie du deuxième corps d’observation de la Gironde et en décembre, il reçoit l’ordre de partir pour l’Espagne et l’em­pereur lui attribue le titre de baron de l’Empire ainsi que quelques faveurs pécuniaires. En 1808, ce fut la campagne d’Espagne où Boussart se distingua encore à plusieurs reprises et où il refusa toute idée de capitu­lation que voulait imposer le général en chef. «Il ne sera pas dit qu’un soldat des Pyramides ait mis son nom au bas de ce honteux traité», disait Boussart.

 

Le 1er mars 1809, l’empereur le nomme Chevalier de la couronne de fer et Boussart continua le combat de ville en ville à travers

l’Espagne, sans subir le moindre revers et l’on put mentionner ce fait par ces mots : «Cette victoire remportée contre toute une armée par moins de cinq cents cavaliers est l’un des plus beaux faits d’armes des longues guerres de l’Empire».

Le ministre de la guerre en Belgique le cite comme «un exemple mémorable des ressources que peut tirer un chef de corps de l’emploi d’une grosse cavalerie conduite avec résolution» et il se plut à constater que ce fut un enfant du Hainaut qui en fournit la preuve. Dans une lettre datée du 25 avril 1810 envoyée à son beau-frère, le général rend simplement compte de ce glorieux combat et dit : «J’ai été embrassé et complimenté par notre général en chef et tous mes autres camarades m’ont aussi félicité de bon cœur. J’ai voulu vous faire part de mon bonheur en vous annonçant tout de suite cette victoire. Cela fera aussi plaisir à ma sœur». Cette joie naïve est touchante et nous pousse à aimer l’homme qu’il était. En 1811, il remporta de nouvelles victoires, capturant de nombreux prisonniers et armes de guerre. Il était un exemple de courage, obligeant souvent l’ennemi à abandonner ses positions ; il en fut ainsi jusqu’au sud de l’Espagne.

 

Le 15 mai 1812, Boussart fut nommé Général de Division et à Valence, où retenu par les blessures qu’il avait subies lors des combats, il s’occupait d’administration militaire, il se faisait aimer des Valencéens qui l’appelaient «le brave Wallon». Hélas, au cours de ses multiples combats, notre célèbre Binchois avait reçu vingt-trois blessures graves dont il portait les cicatrices.

En juillet 1813, notre illustre général est forcé de quitter l’Espagne pour soigner sa santé. Il se retrouve en France, à Bagnères-de-Bigorre où son beau-frère, le lieutenant-colonel Isaac, vient l’entourer de son amitié. Sa fin était proche mais il idolâtrait toujours Napoléon et le 10 août 1813, il mourut en exprimant un regret : «C’est de n’avoir pu faire davantage pour son service et pour mon pays» !

 

F.-A. Sondervorst, Histoire de la médecine belge, éd. Séquoia, 1981

 

(p.144) Dans la nouvelle bourgeoisie ralliée au césarisme napoléonien, Jean-Philippe de Limbourg (natif de Theux), fut l’un des conseillers les plus écoutés du département.

 

P. Pierret, éd., Province de Luxembourg, 1973, St-Hubert

 

(p.27) “Durant la période napoléonienne qui apporte la paix intérieure, on constate cependant, un peu partout, une apathie foncière des populations …”

 

Paul Bay, Le pays natal /Thuin/, 1961

(p.17-18)

/1789-1794  – 1815/

« Je n’oserais pas écrire (….) que les Wallons devenus sujets français l’eussent été « de cœur ». Après la bataille de Jemappes, Dumouriez  ne cacha pas qu’il rencontrait certaine résistance, certaine opposition de la part des Belges de l’époque. Depuis l’origine des libertés communales, le patriotisme belge s’est toujours accommodé du cloisonnement à outrance. Sous toutes les dominations antérieures, nous réclamions à nos princes le serment de respecter nos franchises communales.

(…) Le régime français républicain, dès son origine en 1792, n’a cessé de proscrire les dialectes locaux et la division du pays en provinces comme sous la monarchie.

 

Pol Gérard, Thierry Grosbois, Marie-Rose Toussaint, Petite histoire de Biesme-la-Colonoise depuis les origines, s.d.

 

(p.130) 2   Un anti-Bonapartiste

 

Quand le Révérend J.Deltenre vint prendre possession de la cure de Biesme en 1807, il était, dans une certaine mesure, ce que nous appellerions aujourd’hui, une personne déplacée. Non point qu’il fut un étranger puisqu’il était originaire de Morialmé, mais parce qu’il n’était nullement préparé à remplir les fonctions qu’il allait assumer pendant plus de trente ans.4

La Révolution avait fermé tous les monastères depuis plusieurs années déjà et il était un de ces religieux chassés pour toujours et privés à jamais de la solitude et du recueillement de leurs cloîtres. Aussi, est-ce peut-être avec une certaine nostalgie qu’il écrit en grandes lettres, au début du livre des recommandations qu’il commence « a prima die octobris anno 1807: Rêverendus Dominus Magister R.J.Deltenre, olim religiosus Monasteriorum Walciodorencis et Hasteriensis ordinis

 

4 L’abbé Deltenre fut curé de Biesme du 1-10-1807 au 1-7-1828 et mourut à Moignelée.

 

(p.131) Sancti Benedicti, nunc pastor in Biema colonensi » 5. I1 était autrefois moine bénédictin des abbayes de Waulsort et d’Hastière.

Mais cet homme ne sait porter dans son coeur ce régime français qui l’a replongé brutalement dans le monde, et il le porte d’autant moins que le représentant de l’époque, Napoléon, qui en même temps s’est très mal conduit vis-à-vis de sa propre autorité suprême, le Pape, a détruit définitivement par le Concordat tout espoir de revenir à l’ancien temps. Aussi, si l’abbé Deltenre invite ses fidèles, au prône du dimanche de la Pentecôte 1811 à chanter un Te Deum en action de grâces pour l’heureuse naissance du jeune prince français, voici, comment il relate les événements qui marquent l’année 18156 :

« Napoléon Bonaparte, en 1812, pénétra avec une armée formidable jusqu’à Moscou au milieu d’un hiver rigoureux. L’Empereur Alexandre fit incendier Moscou par où l’armée de Napoléon fut dépourvue de toute subsistance, les Russes les arcelèrent 7 sans cesse et toute cette belle armée fut périe dans les neiges et les glaces de Moscou. Il revint en France et fit lever encore une pareille armée qui fut détruite à Lipsick. Les alliés, c’est-à-dire les russiens, les prussiens, et les autrichiens, les princes du rhin les poursuivirent si vivement qu’il entrèrent à Paris au commencement de 1813 et Napoléon abdiqua l’empire à Fontainebleau dans la même place, sur la même table où il avait détenu le Très Saint Père Pie VII prisonnier longtemps où il l’avait traîné par les cheveux, et fut relégué dans l’île d’Elbe qu’on lui donna en propriété avec 3 millions et Louis XVIII rétabli sur le trône de ces ancêtres. Mais les acquéreurs des biens des Emigrés et des ecclésiastiques sentant que le roi de France ferait rendre ces biens à leurs légitimes propriétaires, firent tant d’efforts que Napoléon au bout de sept mois revint en France, il fit marcher tout le peuple en masse et vint attaquer les prussiens à la pleine de Fleurus qui en était en petit nombre. La Bataille commence le 15 juin 1815 (8). Entre Charleroy et Martiennes au pont trois mille des braves belges Soutinrent sans canon depuis 4 h du matin jusqu’à midi contre trente mille français avec leurs canons. Pendant ce temps, les prussiens se

 

5 Archive de la cure.

6 L’auteur écrit ces lignes au 10e dimanche après la Pentecôte 1815, soit un mois et demi après les faits.

7 L’orthographe et la ponctuation de l’auteur sont respectés.

8 L’auteur écrit « juillet ».

 

(p.132) rassemblèrent sur les pleines de Fleurus qui estaient dispersées depuis un an dans toute la Belgique, les ardennes ou ils se nourrissaient aux frais des paysans, on se battit le 16 avec acharnement de part et d’autre. Le Général Wellington anglais avait donné ordre au général Blucher de se retirer de la nuit. Le 17, pareil combat au quatre-bras. Enfin, le 18 journée à jamais mémorable, les prussiens, les anglais les Hollandais et les Belges qui furent des prodiges de valeur livrèrent le combat aux François, plus de trois quart de ceux-ci y périrent, le carnage fut horrible de part et d’autre. Plusieurs villages furent détruits entre autres Livier. Wavre Fleurus. Le 18 au soir : les Français furent culbutés abandonnèrent tous les parcs d’artillerie. Napoléon n’eut pas le temps de prendre sa voiture qui fut prise avec tous les ornements impériaux qu’il avait amené pour s’ériger un trône à Bruxelles avec tous les papiers des acquéreurs qu’avaient correspondu avec lui. L’armée française était de trois cent cinquante mille hommes. Les alliés les poursuivirent l’épée aux reins et 15 jours après l’ayant défaite une seconde fois entièrement a Paris ou Louis XVIII fut une seconde fois rétabli sur le trône dans cette ville impie qui fit couler le sang de Louis XVI et de Marie Antoinette d’autriche reine de fronce et de tant de millier de victimes innocentes qui passèrent au rasoir de la guillotine.

Napoléon ce tyran a jamais excécrable voulu s’embarquer à Rochefort pour passer en Amérique après avoir fait périr plus de quatre millions d’hommes mais il fut pris par les anglais avec tous ceux qui l’accompagnaient et conduit en Angleterre dou l’on espère qu’il n’échappera plus.

Prenez le sang de Robespierre les os la tête de Tibère les entrailles de Néron vous ferez un Napoléon aujourd’hui 29 juillet on siège Philippeville. Maubeuge, Lille Valenciennes Landueries sont rendus et possédés par les prussiens pour être occupés par notre digne roi des pays Bas guillaume d’Orange de Nassau. »

Et non content d’avoir écrit cette petite histoire, le narrateur ajoute sur la page de garde du même registre :

« Le 18 juin 1815 Bonaparte l’apostat fut terrassé au quatre Bras par l’armée des alliés commandées par le prince royal d’orange, par le lord

 

9 L’auteur écrit « Louis XVII ».

 

(p.133) Wellington et par le général prussien le prince de Blucher. La bataille commença le 15 et finit le 18 juin. »

Cette défaite de l’empereur, l’abbé Deltenre la fera célébrer solennellement en invitant chaque année ses fidèles à la date anniversaire, en action de grâces, à « un Te Deum en Mémoire de la victoire remportée par les troupes alliées dans le champ de Waterloo. »

 

 

 

Lucette Graas-Hoisnard, Arlon aux portes de la plaine, éd. Quorum, 1997

 

(p.104) L’introduction de la conscription, le 5 septembre 1798, n’allait pas apaiser les esprits.

 

Dans le Luxembourg, la colère se transforma en petite insurrection lorsque les jeunes conscrits furent prêts à partir. Deux à trois mille paysans se soulevèrent. Ce fut le « Klepelkrich » ou guerre des gourdins, réprimée dans le sang. Cela se passa fin 1798 dans l’actuel Grand-Duché de Luxembourg et dans la région d’Arlon. En mesure de rétorsion contre ces troubles, une liste des prêtres non assermentés fut dressée le 4 novembre 1798. On les accusait d’avoir poussé les paysans à la révolte. Ils devaient partir en déportation.

Mais la plupart, appuyés par la population, passèrent dans la clandestinité. À Arlon, sur cinquante-deux prêtres re­cherchés, seuls quinze furent capturés et effectivement déportés.

 

Michel Gourdin, Charles Wérotte / One Sovnance des Joeuts di noss jônne Teimps, Mémoire de Philologie romane, UCL 1973

 

guèrnadiè, s. m., personne (homme ou femme) de haute statu­re et large d’épaules. A La Hestre, on connaît l’expression: abiyî à guèrnadiè, leurrer, tromper. Je pense que cette expres­sion remonte à l’époque napaléonienne car des recruteurs de l’envahisseur corse soûlaient des jeunes gens et, lorsqu’ils reprenaient leurs esprits, ils avaient un uniforme de grena­dier, guërnadiè, sur le dos car ils avaient signé un engagement dans les armées de Napoléon pendant leur ivresse: is-avin’te stjà abiyîs à guèrnadiè. Cf. MA, décembre 1981, p. 229; avril 1982, p. 70. Synon. tirè au guèrnâdiè, DWC.

 

Pol Gérard, Thierry Grosbois, Marie-Rose Toussaint, Petite histoire de Biesme-la-Colonoise depuis les origines, s.d.

 

(p.72) 1796. La première levée de conscrits est organisée à Biesme au service de la République. Ces levées continueront jusqu’en 1815. On recrute peu à peu tous les hommes valides; beaucoup se cachent, on les appellent les réfractaires.

 

Lucette Graas-Hoisnard, Arlon aux portes de la plaine, éd. Quorum, 1997

 

Le Consulat et l’Empire (1799-1815)

 

(p.108) Les guerres napoléoniennes furent coûteuses en hom­mes et en argent. Des 14 171 conscrits fournis de 1795 à 1814 par le département des Forêts, 9 089 n’étaient pas revenus en 1815. (…)

Toute l’administration finit par n’avoir qu’un but : fi­nancer les batailles. Toute dépense à but non militaire fut vite interrompue. C’est pourquoi l’Empire n’apporta pas la prospérité.

Et, en 1815, après la bataille de Waterloo, ce fut sans regrets que le Luxembourg vit partir les Français. (…).

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.148) /over de zoon van Hous in Spanje/

 

‘Op 2 april is mijn zoon uit Spanje in Parijs gearriveerd, gezond en wel te

pas!’ Wat de jongen in Spanje heeft uitgevreten, blijft onbekend, vermoedelijk ook voor de vader, want alle brieven met nare berichten worden door de politie onderschept. En uit Spanje komen enkel nare berichten, want de Fransen vechten er uitzichtloos tegen een genadeloze guerilla die van geen wijken wil weten. plaats van Hendrik: in Bordeaux, in Bayonne, in Logrono en in Burgos. Dan blijft het meer dan een jaar stil. tot Hous in april 1812 eindelijk weer bericht ontvangt: De gruwelen tarten er elke verbeelding. De guerilleros snijden Fransen de keel over,  jukken hen de ogen uit en laten de lijken achter met de geslachtsdelen in hun mond. De Fransen van hun kant hangen de brigands op zonder vorm van proces, hakken ze soms met hun bajonet in stukken en vermoorden zelfs kinderen tot in de wieg. Ook de godvrezende en brave conscrits uit de Lage Landen worden algauw gevaarlijke vechtjassen en cynische veteranen.

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.180) Het einde nadert

 

Als Napoleon in december 1812 terugkeert van zijn catastrofale krijgstocht in Rusland, is zijn macht danig aangetast. Zijn reusachtige leger is door de Russische winter gedecimeerd, maar hij laat zich niet uit het veld slaan en begint meteen een grootscheepse campagne om nieuwe troepen te werven. Op enkele maanden tijd worden meer dan 600.000 manschappen opgetrommeld, van wie bijna 45.000 uit de Belgische departementen. Bijna niemand glipt nog door de mazen van het net. Ook jongens onder de twintig jaar moeten nu marcheren, want de lichting van 1814 wordt voortijdig opgeroepen. Van de andere kant wordt ook een beroep gedaan op de garde nationale, dat zijn reservisten tussen 20 en 40 jaar, die eerder door loting aan de krijgsdienst zijn ontsnapt. Maar het gaat niet van harte: ‘Op 17

januari (1813) zijn de garnizoenen van Brussel en Mechelen, de gewezen Garde nationale, in Leuven aangekomen en s’ anderendaags vertrokken naar Tienen. Het heeft in Mechelen veel moeite gekost, want zij wilden niet vertrekken’

 

(p.182) In het najaar van 1813 worden nogmaals 580.000 manschappen opgeroepen, waaronder zelfs de lichting van 1815. Dat betekent dat voortaan ook jongens van 18 jaar moeten marcheren. Maar de meesten weigeren dienst en duiken onder of ze deserteren bij de eerste gelegenheid. De jacht op deze landverraders wordt nog opgevoerd. Hous noteert tussen september en december 1813 niet minder dan zeventien keer een doortocht van opgepakte deserteurs en dienstweigeraars, telkens in groepen van 100 tot 600, samen wel 4000 man: (…).

 

De geallieerden in Leuven

 

(p.189) Er vinden meerdere arrestaties plaats. De meest gezochte mannen zijn degenen die bij de inkomst van de kozakken voorop zijn gereden om de weg te wijzen. Eerst wordt visverkoper Francis Pauwels opgepakt en later is het de beurt aan Arts, de herbergier van de Korenbloem. Pauwels is voor de Fransen een oude bekende. Hij had eerder al twee keer in de gevangenis gezeten wegens vermeende spionage voor de Oostenrijkers. Ook de Heer Robijns, ontvanger van de domeinen, wordt om onbekende redenen gearresteerd en naar Brussel afgevoerd.

 

Het Franse schrikbewind is op een minimum van tijd weer helemaal in voege. De gevangengenomen deserteurs sjokken weer door de straten en ‘op 23 december (1813) was het bureau van de Droits Réunis volop in gang, met al zijn commiezen.

 

 

4.3 un camp de concentration en Belgique sous l’occupation française à l’époque napoléonienne et des Belges envoyés au bagne

 

400 chronogrammes curieux, in: Le Messager de Châtelet, 03/12/1987

 

Un chronogramme relate le ressentiment d’un prêtre de chez nous envoyé au bagne par les révolutionnaires français après l’annexion de la principauté de Liège et des Pays-bas autrichiens.  L’abbé Lecocq, curé de Florennes, exprima ainsi sa haine des Français:

 

ConfVDIt MosCoVIta gaLLos

Le Moscovite a confondu les Français (1812);

DeCIMa oCtaVaIVaIl belgIo Laeta

le 18 juin, bonheur pour la Belgique (bataille de Waterloo, 1815)

 

(dans le recueil de chronogrammes publiés par le Musée de cerfontaine, A. Lepine, conservateur)

 

Eddy Surmont, Du haut de ce fort … l’ Angleterre, LS 16/06/1992

 

Le fort Napoléon à Ostende

Dès 1810, des prisonniers de guerre espagnols devaient venir en aide aux maçons locaux.  « Ces forçats étaient obligés de passer deux fois par jour à travers les marais de « Liefkes Morre ».  Il n’est pas étonnant dès lors qu’ils succombent en masse, victimes de la fièvre des marais. »

 

4.4 réquisitions et pillages sous l’occupation française à l’époque napoléonienne

Henri Guillemin, Napoléon, Légende et vérité, éd d’utovie, 2005

 

(p.47) On cite trop peu, dans les manuels, les instructions de Carnot, dès 1794 (et contre la volonté de Robespierre) à Jourdan et à Pichegru: « Montrez à vos hommes les richesses de l’Allemagne »; « En Belgique, prenez tout; il faut vider le pays. »

 

René-P. Hasquin, Les grandes colères du Pays Noir, éd. Londot, 1972

 

(p.49) (…) il importe d’ajouter les exactions dont les Révolutionnaires, puis les soldats d’Empire, se rendirent coupables.

 

Luc De Vos, De val van Napoleon, Davidsfonds, 2015 

 

(p.188) Het Franse schrikbewind is op een minimum van tijd weer helemaal in voege. De gevangengenomen deserteurs sjokken weer door de straten en ‘op 23 december (1813) was het bureau van de Droits Réunis volop in gang, met al zijn commiezen. De Franse militairen gedragen zich nu openlijk als bezetters van een heroverd gebied en eisen met harde hand tal van goederen op. zoals vlees, bier en jenever, haver, hooi en stro, trekpaarden, rijpaarden en koetsen. Als laatste gebaar persen de Droits Réunis de brouwers van Leuven nog een belasting van 40.000 francs af, ‘zoniet gaven ze de soldaten bevel om te plunderen .

 

(p.188) Er vinden meerdere arrestaties plaats. De meest gezochte mannen zijn degenen die bij de inkomst van de kozakken voorop zijn gereden om de weg te wijzen. Eerst wordt visverkoper Francis Pauwels opgepakt en later is het de beurt aan Arts, de herbergier van de Korenbloem. Pauwels is voor de Fransen een oude bekende. Hij had eerder al twee keer in de gevangenis gezeten wegens vermeende spionage voor de Oostenrijkers. Ook de Heer Robijns, ontvanger van de domeinen, wordt om onbekende redenen gearresteerd en naar Brussel afgevoerd.

 

Georges Krug s.j., Rassemblement Wallonie-France, LB 08/12/1999

 

Il faut prendre les auditeurs pour des ignares de l’ABC de notre histoire pour oser parler d’un ‘retour’ à une mère-patrie qui serait la France.

Sur un passé de plus deux mille ans, les Pays-Bas du Sud ont été annexés par la force à la France de 1792 à 1815.  Ces 23 pauvres années furent marquées par le pillage de nos trésors d’art, la mise à sac de plusieurs sanctuaires, l’embrigadement forcé de toute une jeunesse dans les armées de la république, puis de l’empire …Waterloo fut un soulagement, mais la liberté ne nous échut que 15 ans après.

 

Aline Octave, Porte ouverte sur … Bourcy, 1973

1792-1815

 

(p.34) « L’armée française traîna derrière elle des pillards, s’enrichissant au détriment des populations, sous prétexte de fausses réquisitions. »

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.212) Wat Hous echt verfoeit is het blinde fanatisme van de revolutionairen, die alles op hun weg lijken te vernietigen. ‘De Fransen zijn brekers, geen makers’, schrijft hij. De puinhoop die ze achterlaten vindt Hous verschrikkelijk: de scholen gesloten, de universiteit opgeheven, de collèges verkocht, de kerken afgebroken, het meubilair aan stukken geslagen, de priesters vervolgd, de boeren mishandeld… ‘ We waren beter afin de tijd van de slavernij dan nu in de tijd van de vrijheid.’ Wat hem het meest schokt in deze zee van ellende is de opkomst van de nieuwe rijken, ‘republikein geworden om hun interest’, die gewetenloos kerkelijke goederen inkopen en collaboreren met de vijand: ‘Mocht dit allemaal gebeuren door toedoen van de Fransen, zou ik er niet over willen spreken, maar het gebeurt door volk van onze eigen stad.’ Met de jaren wordt hij echter milder, als hij merkt dat er zich onder de Franse medestanders en logebroeders ook ernstige en sociaal bewogen mensen bevinden.

De jaren na 1800 vormen een duidelijke breuk met het verleden. Ook Hous juicht Bonaparte toe omdat die een concordaat sluit met de paus en omdat hij rust en vrede belooft, maar de nieuwe keizer kan het niet waarmaken. Onder zijn bewind vallen uiteindelijk nog meer slachtoffers dan in de revolutietijd: piepjonge soldaten die wenend in dienst gaan en nooit meer terugkeren, déserteurs of hun gegijzelde familieleden die wegrotten in gevangenissen, stervende gewonden en (p.213) uitgemergelde krijgsgevangenen: ‘Hei zal vandaag ofmorgen ongelofelijk schijnen’, herhaalt Hous keer op keer. Maar als het Franse bewind voorbij is, herinnert Hous zich ook de positieve kanten, zoals de toename van de welvaart onder Napoleon. Hij begint zelfs te beseffen dat sommige revolutionaire idealen een kern van waarheid bevatten. Ondertussen voelt hij steeds meer sympathie voor de Belgen, de bewoners van het ‘Nederland’, die blijkbaar noch bij Oostenrijk noch bij Frankrijk noch bij Holland thuishoren. De Belgische Revolutie van 1830 heeft hij echter niet meer mogen meemaken. Hous sterft enkele maanden voordien in een tehuis voor ouderlingen en wezen.

 

Lucette Graas-Hoisnard, Arlon aux portes de la plaine, éd. Quorum, 1997

 

Le Consulat et l’Empire (1799-1815)

 

(p.107) En 1804, Bonaparte devint empereur sous le nom de Napoléon Ier. Il passa quelques jours en octobre dans le département des Forêts.

Une grande partie de l’armée traversa la ville entre le 11 et le 20 septembre 1805. Il s’agissait du IIIe corps, com­mandé par le maréchal Davout. Bien sûr, il fallut nourrir les soldats et leurs montures, et aussi leur fournir des chevaux. Un bien grand tracas pour le maire Résibois chargé des réquisitions !

 

Georges Lecomte, Un réfractaire ardennais sous Napoléon Ier, Ed. Petitpas

 

(p.41) Pillages …

Napo est venu « emprunter » en Belgique 1500 manuscrits pour la”Bibliothèque Nationale de Paris”.

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.130) In 1800 wijst Bonaparte alle goederen van de afgeschafte universiteit van Leuven toe aan het Prytanée Français, dat is de instelling van hoger onderwijs in Parijs.

 

4.5 le marasme économique, la mauvaise gestion et l’endettement sous l’occupation française à l’époque napoléonienne

 

Charles Nollomont, Le Pays de La Roche par les textes, Coll. Histoire Collective & asbl Action-Animation-Tourisme, 1999

 

(p.218) La grande misère du service des postes

 

Sous le régime français, le réseau routier s’est peu développé. Des difficultés de trésorerie ont réduit à sa plus simple expression la mise en chantier de nouveaux tronçons. La réorganisation de l’administration et la perception des taxes par l’Etat central vont mettre les travaux publics en veilleuse. L’entretien du réseau existant obère les maigres budgets qui ont été dégagés par l’État, les départements et les communes; ils ne permettent pas la construction de nouveaux axes.

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.150) Schrijnende armoede

 

De oorlog, de conscriptie en het tromgeroffel bepalen in hoge mate de sfeer in de Napoleontische période, maar ondertussen gaat het gewone leven zijn gang, in goede en kwade dagen. Kenmerkend voor deze woelige periode is de opkomst van nieuwe klassen, zowel arm als rijk. Hous, die het zelf niet erg breed heeft, sympathiseert met de armen en mijmert soms over het verleden: ‘In die tijd toen dit land nog aan Oostenrijk toebehoorde, ten tijde van Maria Theresia, waren er ook arme mensen, maar die waren arm in naam en niet metterdaad. want in alle kloosters gaven zij toen alle middagen potagie en in de abdijen om de twee dagen brood en dat aan al het arme volk dat zich vertoonde. Zelfs de kinderen die zij op de arm droegen, kregen een klomp brood.’ De afschaffing van de kerkelijke instellingen, de bestuurlijke en financiële ontreddering, de permanente oorlogstoestand en de economische crisis dwingen vele mensen tot bedelarij, landloperij en banditisme. Sinds 1796 bestaat er weliswaar een Commission de bienfaisance of Commissie van weldadigheid, maar het zal nog velejaren duren eer daar een behoorlijk bestuur van de grond komt. Ondertussen troepen de armen samen in leegstaande panden, zoals Hous terloops getuigt naar aanleiding van overstromingen in februari 1799. Het voormalige Craenendonck­college is door het water helemaal van de buitenwereld afgesloten:

‘In het Craenendonckcollege woonde enkel arm volk en die mensen zaten nu zonder eten, wat erg droevig was. Dan is er iemand rondgegaan voor aalmoezen, heeft daarmee brood gaan kopen en is te paard naar het genoemd collège gereden. Ter hoogte van het huis van de weduwe Robijns, waar het water het diepst was, dachten we dat hij zou verdrinken met paard en al… Het arm volk van het Craenendonckcollege is met alle kinderen naar buiten gekomen en waadde door het water, vooraleer het nog hoger zou staan. In het voornoemde collège wonen 29 huishoudens.’

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.153) Ondertussen blijven horden bedelaars het normale leven verstoren. zodat in 1808 de bedelarij bij keizerlijk decreet andermaal verboden wordt. In elk dépar­tement wordt een centraal depot opgericht waar het arme volk zonder pardon wordt opgesloten. Het depot voor het département van de Dijle komt echter pas klaar eind 1811. Het gaat meer bepaald om de vroegere abdij van Terkameren in Elsene, waar plaats is voor 1200 personen. Ook hier komt echter niet veel van in huis. Hous vermeldt nog een nieuw keizerlijk decreet waarin sprake is van publieke soepbedeling voor de armen, maar voegt er ietwat sarcastisch aan toe: Tot nog toe heeft het arm volk geen soep gezien. En zo blijven vele goed bedoelde pogingen in de startblokken zitten. Van 1811 af heerst er immers in het land een ware crisissfeer tengevolge van de stijgende graanprijzen, de aanslepende oorlog en de verpletterende belastingen, tot de industrie helemaal stilvalt: ‘Bij mensen gedenken heeft er nooit zo een tijd geweest. Bijna alle ambachten staan stil. Voor niemand voit er iets te verdienen. Veel ambachtsmannen verlaten vrouw en kinderen en gaan voorgeld als vervanger in militaire dienst.’ Eer de mensen deze laatste stap zetten, moet de toestand wel heel ernstig zijn.

 

H. Pirenne, Histoire de Belgique, TVI, 1926

 

(p.206) “En 1813, le mouvement économique était tombé dans un marasme complet.  Le préfet de l’Escaut constatait que la fabrication des toiles était réduite au dixième de ce qu’elle avait été.”

 

J.-P. De Clippele, Bruxelles étouffée par la régionalisation?, LB 19/05/1982

 

« La seule grave récession qu’elle ait subie se situe sous l’occupation française (1795 à 1815).  D’une capitale, le régime français en fit un chef-lieu de département, la détachant des villages environnants qui formaient son « hinterland ». »

 

Lucette Graas-Hoisnard, Arlon aux portes de la plaine, éd. Quorum, 1997

 

(p.102) Puis ce fut Thyes, l’un des associés de la fabrique de céramique qui avait acheté le couvent des Carmes pour y établir son industrie. Il resta jusqu’en 1803. Quant à la faïencerie, elle ferma ses portes peu après. Le maire suivant resta plus longtemps. C’était Antoine Résibois, qui mena les destinées d’Arlon pendant vingt-cinq ans.

Il avait beaucoup de projets dont bien peu furent réalisés faute d’argent. Cependant, il fit beaucoup d’efforts en faveur de l’école qui, presque totalement brûlée lors de l’incendie de 1785, fut successivement tenue au couvent des Carmes, puis dans une maison louée, enfin au rez-de-chaussée du presbytère. En 1811, les classes émigrèrent au couvent des Capucins, jusqu’en 1825, date où elles furent installées chez les trois maîtres d’école. L’histoire a retenu le nom de deux d’entre eux : Kuborn et Proschaska.

 

Très vite, de gros problèmes financiers surgirent : Les assignats se dépréciaient à grande allure. Si, en janvier 1790, ils faisaient encore 90 pour cent de leur valeur, en juillet 1795 ils n’en étaient plus qu’à 2,97 pour cent et, en février 1796 lors de leur destruction, à 0,25 pour cent. La valeur d’un assignat de cent livres était alors de 5 sous. Dans ces conditions, les prix en assignats s’envolaient, passant par exemple pour le quintal de seigle de 60 livres le 1er floréal an III (20 avril 1795), à 100 livres trois semai­nes plus tard, alors que ce même quintal de seigle, vendu en pièces d’or ou d’argent, coûtait 10 livres le quintal, en décembre 1795.

 

Et quand la République réclama un emprunt forcé aux habitants d’Arlon, il était, bien entendu, payable en piè­ces. Il s’agissait de 28 000 livres.

Devant les nombreuses réclamations, on procéda à des réquisitions.

Le 28 novembre 1795, Arlon dut fournir 1 400 voitures de fourrage. Le 5 décembre 1795, 3000 quintaux de grains, tant de froment, que de méteil, seigle et orge, à livrer avant le 1er janvier 1796.

(p.104) Comme le grain était rare, une loi défendit de l’utiliser pour faire de l’alcool de grain ou de la bière.

 

La République, poursuivant sa quête incessante d’argent, décida de confisquer les biens des émigrés. Puis on ex­pulsa les religieux de leurs couvents. Les Capucins et les Carmes d’Arlon durent partir. Leurs biens et revenus furent saisis et séquestrés le 20 août 1796.

Au mois de novembre suivant, il fut décidé de transfor­mer le couvent des Capucins en caserne pour la gendar­merie, mais les travaux furent estimés trop importants et il fallut finalement renoncer au projet. Il fallait également loger la 24e demi-brigade d’artillerie, casernée à Arlon dès le 16 décembre 1795. Elle compor­tait 3 officiers et 54 hommes.

 

Le couvent des Capucins fut provisoirement affecté au logement des pauvres de la commune. L’hôpital qu’ils occupaient auparavant ainsi qu’un bâtiment national voisin, dit « le Bock », fut consacré au casernement de la brigade de gendarmerie créée le 19 novembre 95 (28 brumaire an IV).

En 1811, la municipalité racheta l’ancien hospice et les pauvres regagnèrent leurs locaux.

 

Puis ce fut la vente des bâtiments appartenant au clergé. Le couvent de Clairefontaine avait brûlé en 1794 et les moniales s’étaient réfugiées à Luxembourg. Elles durent quitter leur retraite le 4 décembre 1795. Le 27 nivôse (16 janvier 1797), eut lieu la vente publique du refuge de Clairefontaine à Luxembourg, estimé 7 500 livres et vendu finalement 12 100 livres à Marlet, rece­veur des domaines du département. Le même jour, le moulin d’Etalle, appartenant à l’abbaye d’Orval, estimé 17 172 livres, fut aussi vendu. Le 25 février 1797 (7 ventôse), on mit en adjudication le couvent des Carmes d’Arlon, estimé 12 000 livres, et des bâtiments et ruines dépendant de la maison conventuelle (p.105) de Clairefontaine, estimés 27 980 livres. Mais l’adjudica­tion dut être remise, faute d’acquéreurs. Les habitants ne voyaient pas d’un bon œil cette destruc­tion systématique de l’ancienne Église. Et quand on ap­prit que les prêtres devaient prêter serment « de haine à la royauté et à l’anarchie, d’attachement et de fidélité à la République », le refus du serment fut quasi général. Sur environ cinquante prêtres dans le canton d’Arlon, seuls deux prêtèrent serment. Les chapelles et les églises furent fermées.

 

Paul Vaute, Du maïeur qui dérange, la police fait un corrompu, LB 05/03/1997

 

En 1811, le maire Werbrouck est poursuivi pour détournement de fonds publics à Anvers.  Mais le commissaire général Bellemare cherche surtout à se subordonner le pouvoir civil.  Un affaire hautement révélatrice des moeurs du régime français.

Fin 1810, une rumeur de scandale se répand sur Anvers.  Le caissier municipal, Bunelle, a filé à l’anglaise en laissait un trou dans les comptes de la Ville, déjà accablée de dettes.  Après vérification, il apparaît que les recettes des octrois –  les taxes prélevées par la commune à l’entrée des biens de consommation – ont été en partie détournés. Au profit de qui ?

Le responsable est un ex-prêtre français, Marescal,  introduit dans l’administration.  Mais on ne reconnaîtra que plus tard, quand la cour le condamnera, le 21 juin 1817, qu’il a agi à peu près seul.  Pour l’heure, c’est vers le maire que remonte la recherche des négligences inadmissibles ou des complicités délibérées.  Parce qu’il est le ‘coupable idéal’… Banquier, frère d’un vicaire-général, Etienne a pourtant été un fidèle serviteur du régime français. D’ailleurs, il a voté pour Bonaparte au Conseil des Anciens.  Mais il a des doutes, n’est plus très bien vu en haut lieu et même opposé au général Colaud qui a durement réprimé la guerre des paysans.

 

 

LE MINISTRE PRESIDE LES AUDITIONS

 

Pour son malheur, c’est le fougueux Bellemare, commissaire général d’Anvers, qui mène l’enquête, au printemps 1811, avec la volonté manifeste de se subordonner le pouvoir civil… et, accessoirement, de se venger d’un affront infligé à sa maîtresse dont Mme Werbrouck a refusé publiquement la compagnie..

Dans un premier temps, Marescal et ses complics, arrêtés, passent aux aveux complets et mouillent le maire.  Celui-ci se défend.  Il ne s’agit pas de fraude, dit-il: il a retiré des fonds de l’octroi, certes, mais le plus régulièrement du monde, pour se payer les indemnités que lui devait la Ville dont la caisse principale était vide. Bellemare n’en envoie pas moins à Paris un dossier ficelé à sa manière.  L’ayant lu, Napoléon, dans une colère homérique, suspend Werbrouck et charge une commission de trois conseillers d’Etat d’examiner l’affaire

Suivent des auditions, entre autres du maïeur et des coaccusés.  Celles-ci, raconte P. Verhaegen, qui a épluché le dossier de la poursuite conservé au greffe de la cour d’assises de Gand, ‘eurent lieu à Paris avec une solennité peu ordinaire sous la présidence du ministre de la Justice’ (« Revue générale », 1922).  Le rapport conclut à la révocation et à la mise en jugement pendant que Bellemare, à Anvers, intoxique l’opinion, laissant entendre que le préfet du département, le baron de Voyer d’Argenson, est aussi impliqué : ‘Déjà, des listes circulaient dans la ville, et chaque jour voyait la malignité publique y ajouter quelques noms’.

Pourtant, la population n’est pas pleinement convaincue et la Justice réserve une désagréable surprise au pouvoir.  Les inculpés ont demandé et obtenu le renvoi de la cause devant les tribunaux de Bruxelles en invoquant la suspicion légitime envers les juges d’Anvers, ‘travaillés’ par la police locale.  Et le préfet, au nom de la présomption d’innocence, a préféré démissionner plutôt que d’obéir à un ordre de séquestration des biens des ‘fraudeurs ».

 

UN DEFI  A NAPOLEON

 

La cour d’assises de la Dyle ne trouve rien qui confirme les accusations.  Ses jurés ont beau avoir été triés sur le volet (des Français pour la plupart), l’éloquence des avocats, parmi lesquels Paul Berryer, venu de Paris, entraîne la conviction.  Un acquittement général est finalement prononcé, sauf pour Marescal qui a, dans l’intervalle, réussi à prendre la fuite.

Scènes insolites. le public applaudit, les notables en liesse viennent chercher Werbrouck au Palais de Justice et on fait aussi la fête dans la Métropole.  Mais ‘acclamer la victime du despotisme, c’était huer le despote.  Napoléon ne s’y trompa point’, écrit Henri Pirenne.  Bellemare fait jouer la grosse artillerie et alerte l’Empereur.  Celui-ci, depuis le camp de Dresde où il se trouve, écrit au prince archichancelier Cambacérès : ‘Les faits de Bruxelles sont un scandale public.  Faites arrêter le maire et les autres accusés par mesure de haute police.  Voyez avec le comte Merlin à faire casser le jugement’.  Aussitôt dit, aussitôt fait.

 

Le Sénat n’ose pas désobéir au Souverain: il casse le jugement au nom de la sécurité de l’Etat et charge la Cour de cassation de désigner une Cour impériale qui jugera l’affaire de nouveau, sans jurés.  Comme la Cour de Paris n’est pas très docile, on choisit les juges de Douai.  Une lettre dans laquelle Cambacérès fait part de ces intrigues à Napoléon tombe entre les mains d’un parti de cosaques, qui la fera paraître dans le ‘Journal de Francfort’.

A sa nouvelle épreuve, l’ex-maïeur, gravement malade, ne survivra pas.  Il succombera, prisonnier, à Douai, le 16 décembre 1813, et justice ne lui sera rendue qu’à titre posthume.  Dans son acte de déchéance du 2 avril 1814, le Sénat reprochera au vaincu de Leipzig, entre autres, ‘d’avoir confondu tous les pouvoirs et violé l’indépendance des corps judiciaires.

 

Au début de notre siècle, on représentait encore souvent, sur les scènes flamandes, une pièce de Frans Gittens, ‘De Maire van Antwerpen’, créée en 1891 et consacrée à l’affaire Werbrouck.  Dans la poignante dernière scène, le héros, qui va bientôt mourir entouré des siens, regrette que son fils Steven ne soit pas là: ‘Je lui dirais: ne sers jamais des maîtres étrangers, mon enfant jamais !jamais !’

 

René-Pierre Hasquin, Les grandes colères du Pays Noir, T1, éd. Londot, 1972

 

(p.58) DES LOIS ANTI DEMOCRATIQUES

On était certes encore loin des libertés octroyées par la Révolution et confirmée par l’Empire. Il est vrai qu’en y regardant de plus près, on eût découvert, dans la forêt des lois édictées sous le régime révolutionnaire et maintenues sous Napoléon et sous le Royaume, une loi aussi inique que celle dite de « Le Chapelier » et que tous les patrons du XIXe siècle semblaient connaître sur le bout des doigts. Cette loi, votée à l’Assemblée Constituante le 17 juin 1791, avait pour objectif d’empêcher la reconstitution des corporations, en interdisant aux entrepreneurs, commerçants, ouvriers et compagnons d’une même profession, de se réunir en associations organisées. Cette loi anti-démocratique était ainsi libellée :

—    « Les citoyens d’un même état ou profession, les entre­preneurs, ceux qui ont boutique ouverte, les ouvriers et les compa­gnons d’un art quelconque ne pourront, quand ils se trouveront ensemble, nommer ni présidents, ni secrétaires, ni syndics, tenir des registres, prendre des arrêtés ou délibérations, former des règlements sur leurs prétendus intérêts communs ».

—                    A part cela, vive la République et vivent aussi la Justice, l’Egalité et la Fraternité !

Vint 1810 et le Code Pénal de Napoléon avec notamment ses articles 414 et 415 qui poussaient les inégalités plus loin encore que la loi de Le Chapelier : il établissait une distinction de fait entre les coalitions de patrons et celles d’ouvriers. La coalition des ouvriers était interdite même si elle se fondait sur des réclama­tions absolument légitimes ; par contre, la coalition des patrons pouvait être admise dès l’instant où ils administraient la preuve que cette coalition n’était pas abusive !

L’article 291 de ce même Code Pénal de 1810, est tout aussi révélateur quant à l’état d’esprit du législateur :

—    « Toute association de plus de vingt personnes dont le but sera de se réunir tous les jours ou à certains jours marqués pour s occuper d’objets religieux, littéraires, politiques ou autres, ne pourra se former qu’avec l’agrément du gouvernement et sous les conditions qu’il plaira à l’autorité publique d’imposer à la société. »

L’article 414 visait pourtant les patrons :

—  « Toute coalition entre ceux qui font travailler des ouvriers (p.59) tendant à forcer injustement et abusivement l’abaissement des salaires suivie d’une tentative ou d’un commencement d’exécution sera punie d’un emprisonnement de six jours à un mois et d’une amende de 200 à 3 000 F ».

Mais l’article 415 ne ménage pas les ouvriers :

—    « Toute coalition de la part des ouvriers pour cesser en même temps le travail dans certains ateliers, empêcher de s’y rendre et d’y rester après certaines heures et en général pour suspendre, empêcher, enchérir les travaux, sera punie d’un empri­sonnement d’un mois au moins et de trois mois au plus. Les chefs ou moteurs (meneurs) seront punis d’un emprisonnement de deux à cinq ans. »

Et cela continue à l’article 416 :

—    « Seront aussi punis de la peine portée à l’article précédent et d’après les mêmes distinctions, les ouvriers qui auront prononcés des amendes, des défenses, des interdictions ou toute proscription vers le nom de damnation ou sous quelque qualification que ce puisse être, soit contre les directeurs d’ateliers et entrepreneurs d’ouvrages, soit les uns contre les autres. Dans le cas du présent article, et dans celui du précédent, les chefs ou moteurs du délit pourront, après l’expiration de leur peine, être mis sous la surveil­lance de haute police pendant deux ans au moins et cinq ans au plus. »

Ces articles 291, 414, 415, 416 auraient-ils inspiré les promo­teurs de nos récentes lois sur le « maintien de l’ordre » ?

Quoi qu’il en soit, elles expliquent pourquoi l’ouvrier, des XVIII et XIXe siècles, analphabète en général, abruti par le tra­vail le plus souvent, restait assez docilement prisonnier d’une législation à laquelle il ne comprenait rien et qu’il ne lui venait donc pas à l’idée de contester.

La Constitution Belge promulguée va certes accorder aux Belges le droit d’association mais dans la pratique ce ne sera longtemps qu’un leurre : de 1830 à 1860 plus de 1 500 ouvriers belges seront poursuivis pour délit d’opinion et plus d’un millier seront condamnés à des peines d’emprisonnement.

C’est dire que la lutte contre le « délit de coalition » était loin d’être gagnée.

 

s.n., Assassiner la forêt wallonne?, PP? 06/04/1983, p. 24-25

 

(p.24) “Sous le régime hollandais, entre 1815 et 1830, l’Etat, confronté à des communes endettées jusqu’à l’os – résultat des guerres napoléoniennes – se refusa à les aider en vue d’éponger leur défaite.”

 

4.6 sous Napoléon, un état policier en Belgique: censure, injustice, …

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

(p.177) Frankrijk is echter niet enkel een rechtsstaat, maar ook een politiestaat. Naar mate het bewind van Napoleon vordert, wordt de sluipende dictatuur van de staat steeds duidelijker en arroganter. Overal opereren spionnen die zelfs de minste kritiek melden aan de hogere overheid.

 

(p.178) /20/08/1809/ Ook onder de burgerbevolking groeit de onvrede en steeds meer maakt Hous melding van arrestaties m politieke redenen.

 

In tegenstelling tot het ancien régime, waarin criminelen foltering en lijfstraffen moesten ondergaan, worden in de Franse tijd veel meer mensen opgesloten. (p.179) (…)Nu blijven de gevangenen soms jaren opgesloten in ongezonde en vooral overbevolkte plaatsen. Voor de meesten is het een ware hel op aarde. In Leuven is er een gevangenis in de kelders onder het stadhuis en verder in de oude Brusselse binnenpoort. Volgens een officieel rapport uit 1807 is laatstgenoemde gevangenis zo ongezond dat de mensen er aan de koorts bezwijken en zo vervallen dat verbetering onmogelijk is. Veel mensen verkiezen liever de dood dan in dergelijke krochten te moeten leven: ‘Er is een vrouw un een van de hoge vensters van de gevangenis in de Brusselse binnenpoort gesprongen in de tuin van de heer Ducuper. Zij heeft haar been gebroken en is naar het gasthuis gedragen. waar ze de volgende nacht gestorven is.’

De overbevolking is het gevolg van een andere kwaal van de Franse tijd, namelijk de opsluiting zonder vorm van proces van grote groepen mensen – dikwijls onschuldigen – die verdacht worden van banditisme of complotteren tegen de staat. Soms wordt het zo erg dat de prefect ingrijpt en een aantal mensen vrijlaat, nog altijd zonder vorm van procès: ‘De heer de Chaban, prefect, heeft verleden week een bezoek gebracht aan het tuchthuis van Vilvoorde en heeft er in de vijftig verlost die daar zaten zonder termijn.’ In de loop van 1806 wordt in één keer de vrijlating bevolen van 480 mensen, van wie er ondertussen al 70 zijn overleden en dat na amper anderhalf jaar gevangenis. Hoevelen hebben niet gebeden en gehoopt dat de Engelsen zouden landen en de Fransen uit het land verdrijven!

 

Jean Huens, Histoire illustrée de Belgique, éd. Racine, 200…

 

Police impériale

 

S’il était un bon organisateur, Napoléon n’en était pas moins un despote. Nous ne jouissions plus d’aucune liberté ni de presse ni de parole. Tout était censuré, dénoncé, condamné. Une formidable police impériale, dirigée par le ministre Fouché, surveillait et traquait les suspects. Chez nous presque tout le monde était suspect.

 

M. Chapelle R. Angot, Les processions et la marche militaire de la Saint-Feuillen à Fosses-la-Ville, s.d.

 

(p.172)

En 1802 [3 octobre]

Mais, dès le 6 vendémiaire an XI (28 septembre 1802), la ville de Fosse était déjà en émoi. En effet, les organisateurs de la Procession avaient appris que les autorités religieuses ne participeraient pas à la sortie tradition­nelle …. (1)

Que l’on ait supprimé les « Marches » pendant les premières années de la République, soit ! Mais en 1802, sous le Consulat à vie de Bonaparte, au lendemain du Concordat signé avec le Pape Pie VII, interdire de « marcher » à la Saint-Feuillen, c’était vraiment dépasser les bornes. (2)

Le curé de Fosse, l’abbé Ferdinand Bauwens n’en menait pas large. Soucieux d’obéir aux ordres de l’Evêque Mgr Claude-Léopold de Bexon (3), il s’était vu contraint de refuser aux «Marcheurs» la permission de sortir le Buste et de le porter en procession. (4)

 

(1) E. Fivet, O.c. p. 905.

(2) Idem.

(3) II succéda à Mgr de Lichtervelde qui avait exercé son ministère jusqu’en 1796. Mgr de Bexon avait été appelé au siège épiscopal de Namur peu après la signature du Concordat. Mgr Charles-François-Joseph, baron Pisani de la Gaude, lui succéda en 1804.

(4) E. Fivet, pp. 906-907.

 

(p.174)  Les Fossois s’étaient donc arrogé le droit de promener un Reliquaire de saint Feuillen, à travers la ville et les campagnes, et cela en bravant l’interdiction de l’Evêque et celle du Préfet. Il est vrai que Pérès avait défendu de sortir le «Buste» … mais n’avait pas «pensé» à la nouvelle châsse ; tout restait donc — si l’on peut dire — dans la légalité. (2)

 

Quand Napoléon interdit nos marches …

 

Ernest Fivet, La marche de saint Feuillen à Fosses sous le Consulat, p.905-918, s.r.

 

(p.905)  » Le 28 septembre 1802 — officiellement le 6 vendémiaire an XI de la République française —, la ville de Fosses était en émoi. Les organisateurs de la procession-marche de saint Feuillen, martyr du VIIe siècle et patron de la cité, avaient appris que l’autorité religieuse ne participerait pas à la sortie traditionnelle du dimanche 6 vendémiaire qui coïncidait avec la fête locale ‘.

Que l’on ait cessé de marcher dans les premières années de la république, d’accord ! Encore sous le coup des événements qui avaient entraîné leur rattachement à la France, les Fossois avaient volontiers rompu avec la tradition, peu soucieux, en paradant en armes, d’être enrôlés de force dans les armées de la Conven­tion. Mais, en 1802, sous le consulat à vie de Bonaparte 2, au lendemain de la paix d’Amiens conclue avec l’Angleterre 3, du concordat signé avec le pape Pie VII 4, interdire de marcher à la Saint-Feuillen, c’était, franchement, dépasser les bornes !

Le concordat, il est vrai, ne rétablissait pas l’Église dans tous ses droits; l’article 45 de la loi qui le ratifie 5 stipule que « aucune » cérémonie religieuse n’aura lieu hors des édifices consacrés » au culte catholique dans les villes où il y a des temples destinés aux différents cultes. » ((p.906) /Pourtant, il n’y avait pas de temple protestant , voire israélite à Fosses./) « Mais une ancienne loi, celle du 7 vendémiaire an IV (29 septembre 1795) avait interdit « les cérémonies de tous cultes hors l’enceinte de l’édifice choisi pour leur exercice ».

 

1.   De temps immémorial la kermesse annuelle de Fosses a lieu le dernier dimanche de septembre.Nous ignorons pourquoi, en 1802, elle avait été retardée d’une semaine.

2.   Nommé consul à vie par sénatus-consulte du 14 thermidor an X (z août 1802).

3.   Le 6 germinal an X (27 mars  1802).

4.   Le  23  fructidor an   IX   (10  septembre   1801).

5.   Loi du 18 germinal an X (8 avril 1802), relative à l’organisation des cultes. (Cf. bon, Législation des paroisses en Belgique,  1842, p. 60).

 

(p.911) Ainsi donc, les Fossois s’étaient permis de promener, par en Leiche, Saint-Roch et la Folie, un reliquaire de saint Feuillen en dépit des interdictions de l’évêché et de la préfecture (1).

Pérès /préfet du département/ ne se fâcha point, du moins ouvertement. Le pouvait -il ? Certes, il avait défendu de promener le buste du saint, mais il avait omis de parler de la châsse. Quant au pasteur de Fosses, a-t-il cédé in extremis aux sollicitations de ses ouailles ? C’est très possible. Nous ne voyons pas bien, en effet, les marcheurs faire irruption dans la collégiale et, manu militari, s’approprier, ne fût-ce que pour quelques heures, l’un ou l’autre reliquaire.

Il semble bien que, de son côté, l’évêque soit resté sur ses po­sitions car, l’année suivante, où les Fossois voulurent récidiver, l’autorité religieuse fut nettement prise à partie par l’adjoint au maire de Fosses :

 

(1) La châsse porte la date du 18 octobre 1802 ; c’est sans doute celle de sa béné­diction. L’évcque, nous l’avons vu, n’avait pas autorisé la procession ; rien ne prouve que, le 3 octobre, la fierté renfermait des reliques.

 

4.7 la lutte contre les langues néerlandaise et wallonne sous l’occupation française à l’époque napoléonienne

Hervé Hasquin, éd., La Belgique française, 1792-1815, Crédit Communal, 1993

 

(p.421) La bigarrure linguistique des « provinces belgiques »

 

Pour les révolutionnaires français, cartésiens par tradition et porteurs d’un projet si neuf qu’il paraissait ne pouvoir s’accomplir qu’au moyen d’une po­litique de la «table rase», les provinces belges n’allaient pas manquer, par la diversité de leurs comportements linguistiques, de susciter de nombreuses difficultés à la mise en application d’une politique cohérente et systématique en matière de langue.

A Bruxelles, la-situation était pour le moins complexe. Ainsi pouvait-on li­re, par exemple, dans une Description de la ville de Bruxelles éditée chez Bou47bers en 1782, ces quelques lignes: «La langue naturelle des habitants de Bruxelles est le flamand, mais presque tous entendent et parlent le français ; c’est même aujourd’hui la langue que l’on parle le plus communément». La présence de la Cour, qui avait contribué à promouvoir le français comme langue principale dans la vie sociale, de même que la pratique du français par les classes aisées de la population, qui y avaient trouvé une sorte de pas­seport culturel dans l’orbite de la vie parisienne, ne pouvaient cependant fai­re oublier que Bruxelles était et restait une ville flamande. Des études récen­tes ont permis de fixer aux environs de 10 à 15% le pourcentage de fran­cophones dans la capitale du Brabant d’avant la Révolution. A cet égard, la relation entre l’appartenance à un certain milieu social et l’emploi de l’une ou l’autre langue est apparue de façon particulièrement explicite : on parle surtout français dans les quartiers huppés du haut de la ville, du parc de Bru­xelles, ou de la rue Neuve. Le bilinguisme de fait d’une bonne partie des Bruxellois avait par ailleurs entraîné, dans le courant du siècle, un relatif abâtardissement du flamand parlé dans la capitale, qui, fortement contami­né par le français, avait créé quantité de vocables hybrides plus ou moins sa­voureux. Cette proximité relative avec les tournures françaises, ainsi que la facilité avec laquelle il était loisible de se faire comprendre et de converser en français aux quatre coins de la ville, n’allaient pas manquer, dans un premier temps, d’induire les occupants en erreur quant à l’appartenance linguistique des Bruxellois.

En Flandre même, malgré la diversité des patois d’une ville ou d’une ré­gion à l’autre, la conscience d’appartenir à une même entité linguistique et culturelle était vive. La tradition, quelque peu surannée, des «chambres de rhétorique» dans les villes, et l’influence du clergé dans la vie sociale des campagnes constituaient notamment un ciment culturel particulièrement solide. Bien que pratiquant dans une large mesure le français, les élites socia­les flamandes elles-mêmes n’en étaient pas pour autant coupées de leurs ra­cines linguistiques et culturelles. Elles continuaient à employer le flamand dans leurs rapports avec la population locale, et, pour ce qui est de la vie so­ciale et administrative, on peut parler, dans les provinces flamandes sous l’Ancien Régime, d’un véritable unilinguisme. Au niveau local, comme à l’é­chelon provincial, tout se traitait en flamand. De même, dans leurs rapports avec l’administration centrale à Bruxelles, les différentes instances flaman­des, tout comme les particuliers, pouvaient user sans difficulté de l’idiome

(p.424)

du pays. La plupart des fonctionnaires du gouvernement central étaient d’ailleurs astreints au bilinguisme pour pouvoir exercer leur fonction. Ce n’est donc guère que dans quelques salons, parmi l’élite cultivée, que le fran­çais était parlé, en Flandre, à la veille de l’invasion française.

La principauté de Liège, dont un bon tiers chevauchait l’actuelle province de Limbourg, n’échappait pas à la double appartenance linguistique, com­pliquée encore par l’usage, largement majoritaire dans les campagnes et fort répandu en milieu urbain, du wallon.

La même situation prévalait dans le comté de Namur et le duché de Lu­xembourg, ce dernier comportant en outre, dans sa partie orientale, un « quartier allemand», dont la fidélité au pouvoir autrichien, fortement condi­tionnée par des facteurs de nature culturelle, allait constituer une source supplémentaire de résistance à l’occupant.

Seul, peut-être, le Hainaut pouvait paraître présenter une situation lin­guistique propice à une politique de francisation. Bien qu’on y parlât égale­ment le wallon et le picard, la proximité de la frontière et les vicissitudes de l’histoire avaient fait depuis longtemps du français une langue usuelle pour une bonne partie de la population.

Premières mesures prudentes sous le Directoire

V otée quelques jours avant la chute de Robespierre, la loi du 2 thermidor an ii ne devait lui survivre que quelques semaines. Suspendue dès le 16 fruc­tidor (2 septembre 1794), elle ne fut d’ailleurs jamais remise en vigueur par le Directoire. Au contraire, celui-ci allait – tout comme Dumouriez l’avait fait pendant les quelques mois (novembre 1792-mars 1793) de la première occupation française – pratiquer, en matière linguistique, une politique de type pragmatique qui, sans abandonner l’idéal de francisation, tiendrait compte du multilinguisme de fait des provinces belges. Dans un rapport pré­senté à la Convention au début de l’année 1794, les commissaires Camus et Treilhard, délégués en Belgique pour y organiser la première occupation, avaient en effet rendu compte des difficultés supplémentaires «considéra­bles» que représentait, pour la pénétration des idées révolutionnaires, l’obs­tacle de la langue. En Flandre, par exemple, ils avaient relevé que le français n’était pratiquement pas compris de la masse de la population dans des villes comme Courtrai, Bruges, ou Ostende, où il avait fallu faire appel à la bonne volonté de quelques républicains locaux pour se faire entendre d’elle. A Meerhout, en Campine limbourgeoise, c’est en latin que le commissaire de la République Publicola Chaussard avait dû s’entretenir avec le bourgmestre, qui ignorait le français. L’Ancien Régime se vit dès lors accusé, entre autres maux, par le même Chaussard, d’avoir entretenu à dessein la diversité des langues pour mieux asservir les peuples.

La «réunion» des provinces belges à la France, proclamée officiellement le 1er octobre 1795, allait être l’occasion, pour les nouvelles autorités, de ten­ter de remédier à cette situation préoccupante. Le 21 vendémiaire an iv (13 octobre 1795), un décret prescrivait que les lois et arrêtés ne seraient dé-

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sormais plus envoyés aux administrations d’arrondissement et aux municipa­lités qu’en français. L’article 3 précisait cependant que «partout où besoin serait», une traduction flamande pourrait y être jointe. Face à une situation locale peu favorable à une francisation rapide, les autorités se résignaient provisoirement à une sorte de compromis.

L’année suivante, la loi du 2 frimaire an v (22 novembre 1796) amorçait clairement une procédure de francisation dans le domaine judiciaire : désor­mais, seul le français devait être employé au cours de la procédure, quelle que soit la langue des parties. Les actes en flamand devraient faire l’objet d’une traduction certifiée, qui seule aurait force de preuve. Il n’y eut, de pri­me abord, que peu de réactions au sein de la magistrature flamande, compo­sée il est vrai, pour l’essentiel, de partisans du nouveau régime et au sein de laquelle le bilinguisme était déjà un fait acquis. Quelques voix s’élevèrent bien lorsque la conjoncture politique française parut permettre, dans le cou­rant de 1797, au parti royaliste de relever la tête, mais le coup d’Etat répu­blicain du 18 fructidor an v (4 septembre 1797) mit fin à toutes velléités en ce sens. L’arrivée au ministère de la Justice du campinois Charles-Joseph

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Lambrechts, originaire de Samt-Trond, fut cependant suivie de la publica­tion en flamand du Bulletin des lois, ce qui mettait au moins la population a même de prendre connaissance dans sa propre langue des mesures législati­ves décidées à Paris.

De ce point de vue, il faut reconnaître qu’en pays flamand comme à Bru­xelles, la plupart des affiches officielles étaient bilingues. De même, en ce qui concerne la presse, et même si le gouvernement tentait d’imposer ses pro­pres publications, la plupart des journaux flamands avaient pu continuer à paraître.

En matière d’enseignement, la déliquescence de l’ensemble des réseaux après cinq années de troubles, n’avait pu être endiguée. De ce point de vue, flamand et wallon faisaient, en principe, l’objet d’un traitement différent. Considéré comme un «idiome», et donc une entité linguistique à part entiè­re, susceptible de véhiculer une idéologie contre-révolutionnaire, le flamand devait a priori être éradiqué du territoire national, au même titre par exem­ple que l’allemand ou l’italien. L’envoi «d’instituteurs de langue», prévu dans les régions concernées par un décret du 8 pluviôse ann (27 janvier

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1794), était pratiquement resté lettre morte en Flandre. La méfiance de la population envers un enseignement considéré comme impie avait fait le res­te : les écoles flamandes, trop peu nombreuses et désertées par les élèves, n’avaient pu jouer dans le processus de francisation le rôle qui leur était en principe assigné.

Quant au wallon, classé dans la catégorie des «patois» par le décret du 8 pluviôse, il ne faisait pas, en raison de l’absence de danger pour l’identité nationale qu’était supposée présenter sa parenté avec le français, l’objet de mesures spécifiques. Bien que fréquemment employé, notamment à Liège, dans les pamphlets contre-révolutionnaires, il fut plus méprisé, ou simple­ment ignoré, que véritablement combattu par les autorités directoriales.

Si le français avait certes fait des progrès dans la vie sociale et admini­strative – ainsi qu’en témoignent les registres notariaux bruxellois, au sein desquels la proportion d’actes en français passe, entre 1794 et 1799, de 24 à 60% -, il ne faudrait cependant pas se méprendre sur l’impact réel, très min­ce, de la francisation de la population au cours de ces premières années du régime français. Sans doute, le contact quotidien avec les nouvelles autorités et les nombreux Français présents dans nos régions fit-il plus, pendant cette période, pour familiariser la population avec la langue de l’occupant, que des mesures administratives à la fois trop peu nombreuses, incohérentes et mal appliquées, dont l’effet vexatoire ne pouvait, dans un milieu souvent hostile au régime lui-même, en particulier en matière de politique religieuse et de conscription, que susciter des réactions de rejet. Dans ce contexte, ce n’est sans doute pas un hasard si la «guerre des Paysans», qui éclate en Cam-pine et en Flandre fin 1798, et le «Klëpelkrich» luxembourgeois, qui lui est contemporain, constituent pratiquement les deux principaux faits de résis­tance collective armée au pouvoir français, synonyme non seulement de conscription forcée, mais aussi d’oppression linguistique dans ces régions de langue germanique.

 

Le Consulat et l’Empire : une francisation «à marche forcée»

 

Le coup d’Etat du 18 brumaire (9 novembre 1799) et l’installation du Con­sulat (15 décembre 1799), bientôt confié «à vie» au seul Bonaparte (2 août 1801), assurent dans la vie politique intérieure de la France, et par consé­quent dans nos provinces, la stabilité nécessaire à la poursuite d’une politi­que de francisation active. Après un statu quo de quelques années, la loi du 24 prairial an xi (14 juin 1803) remet à l’ordre du jour les dispositions du 2 thermidor an n. De nouveau, il est stipulé que tout acte public devra être rédigé en français, et que les actes sous seing privé ne vaudront que munis d’une traduction certifiée par un traducteur juré, laquelle seule sera receva-ble. Les officiers publics sont cependant autorisés, si les justiciables en font la demande, à inscrire en marge de l’acte officiel en français, une traduction en idiome du pays. Bien qu’appliquées dans une large mesure – la propor­tion d’actes notariés en français à Bruxelles dépasse désormais les 80% – ces directives ne le sont pas avec la même exactitude dans toutes les régions du (p.429) pays, et ne manquent d’ailleurs pas de susciter certaines protestations. Ainsi, les notaires, pourtant devenus fonctionnaires publics depuis la réforme du 3 prairial an iv (22 mai 1796), contestent-ils notamment cette mesure à l’é­gard des testaments, et ce au nom de l’article 972 du nouveau Code Civil, pu­blié le 21 mars 1804, qui stipule qu’ils doivent être couchés dans la langue du testateur. Régnier, ministre de la Justice, refusera tout accommodement à ce sujet : bien que dicté dans la langue du testateur, le testament devra être transcrit en français par le notaire et seule cette transcription pourra être considérée comme authentique. Bien qu’un délai d’un an fût accordé pour la mise en pratique de ces mesures, il paraît évident que leur application fut (p.433) loin d’être un fait acquis au cours des années suivantes dans l’ensemble des départements réunis.

Si la francisation des classes dominantes se poursuivait – notamment à tra­vers un enseignement pratiquement francisé aux niveaux secondaire et su­périeur, par le brassage culturel de l’institution militaire, et au sein de la fonction publique qui connaissait un développement sans précédent – il s’en faut de beaucoup que tous les cœurs aient été gagnés au français et à la Fran­ce dans ces milieux. Ainsi, en Flandre, les chambres de rhétorique, qui péri­clitaient sous le Directoire, relèvent-elles la tête et permettent-elles de main­tenir, au sein de l’environnement culturel flamand, une certaine tradition dialectale. Parfois débaptisées en «genootschap» voire en «société», elles entretiennent parmi les élites intellectuelles flamandes la conscience tangi­ble d’une identité séparée. De même, les journaux flamands subsistent-ils dans un premier temps. Un seul exemple permettra de vérifier ce maintien tenace, à travers les vicissitudes politiques du temps, d’un véritable « senti­ment flamand». En 1796, des médecins progressistes avaient fondé à Anvers une association dont les réunions se tenaient en néerlandais. Réprimandés par les autorités, il n’hésitèrent pas à publier, en tête du premier volume de leurs annales, un texte intitulé Lof der rijke en bevallige Moedertael («Eloge de la riche et élégante langue maternelle»). Mieux encore, contraints de fusion­ner en 1801 avec la très francophone et francophile Société d’Emulation de la ville, ils s’en séparèrent dès 1806, pour fonder la Société médico-latine, dont les débats se faisaient dans la langue de Cicéron ! Chez ces bourgeois cultivés, progressistes, et qui maniaient très probablement le français quand besoin était, c’est là le signe évident de la volonté de conserver une identité flaman­de. De même peut-on signaler la fondation par J.A. Stips et J.A. Terbruggen d’une société intitulée Tot Nut der jeugd («Pour le bien de la jeunesse»), dont l’objectif essentiel était le maintien de la langue maternelle dans l’enseigne­ment.

De ce côté, la volonté de francisation s’était également affirmée. Dans les collèges et lycées, seul le français devait être enseigné, tandis qu’un effort particulier était fait dans l’enseignement primaire afin d’y implanter la (p.434)

langue de l’occupant, à l’aide d’instituteurs formés dans les nouvelles écoles normales. Certains parents cédèrent sans doute à l’envie d’assurer à leurs en­fants un meilleur avenir grâce à l’apprentissage du français, mais la mesure semble cependant avoir été un échec, puisqu’il fallut, en 1804, ouvrir au ly­cée de Bruxelles une classe préparatoire de français. La résistance du clergé à la politique du nouveau régime, bien qu’atténuée après la signature du Concordat de 1801, n’avait pas réellement cessé, et est sans doute responsa­ble, pour l’essentiel, de cet échec scolaire de la francisation des populations flamandes, pour lesquelles la langue française restait souvent synonyme d’impiété et d’incroyance. La nomination, par Napoléon, d’évêques français dans les départements réunis ne parvint pas à renverser la situation, l’opi­nion restant fermement attachée au bas-clergé qui maintenait, dans l’ensem­ble, son opposition au régime.

Face à cette résistance, certains préfets, véritables petits despotes locaux, choisirent la manière forte pour tenter d’imposer le français comme seule et unique langue dans leur département. Ainsi vit-on à Anvers, le préfet Voyer d’Argenson interdire les périodiques en langue flamande. A Gand, d’Houdetot se signalait par son zèle également, en obligeant par exemple la Gazette van Cent à publier dorénavant ses articles en français, en interdisant, en 1810, l’impression de tout ouvrage ou périodique en flamand dans le dépar­tement de l’Escaut, et en tentant deux ans plus tard d’imposer une traduc­tion obligatoire des noms de rues et des enseignes, alors même qu’on avait dû, à Bruxelles, six ans auparavant, en revenir aux dénominations usitées sous l’Ancien Régime, en raison des protestations répétées de la population.

Malgré ces mesures coercitives, et nonobstant l’usage généralisé du fran­çais dans la vie mondaine, sociale et administrative, le régime était loin d’être parvenu, après vingt ans d’efforts, à la francisation souhaitée. La méthode

(p.435) employée, souvent brutale, l’attitude, fréquemment arrogante, des fonction­naires français ne pouvaient certes pas favoriser la réalisation d’un tel objec­tif. Sans doute des progrès avaient-ils été accomplis dans la direction souhai­tée, mais il y manquait l’adhésion de la population sans laquelle une véritable francisation ne pouvait s’accomplir.

La facilité avec laquelle le régime hollandais put s’installer en 1815 est une preuve supplémentaire de cet échec, que l’on aurait facilement pu prédire au vu des réactions suscitées dans une région aussi potentiellement fran­cophile que celle de Mons par la défaite des Français à Neerwinden. Amers, après six mois à peine de présence française, les mêmes qui avaient chanté en wallon l’arrivée des libérateurs, composaient une pièce intitulée Les Montwas in sont dégoûtés, proclamaient que les Etats «valiont bié mieûs que l’club» et se réjouissaient de pouvoir à nouveau porter en procession la châsse de Sain­te Waudru.

«L’abject et insignifiant jargon» décrié par le républicain liégeois Dieu-donné Malherbe dans un ouvrage daté de 1802, le langage «impur» que stig­matisait le Flandricismes, wallonismes et expressions impropres dans la langue française publié en 1806 «par un ancien professeur» tout acquis à la cause de la francisation, avait encore devant lui, tout comme les différents patois fla­mands, un bel avenir.

Dans un pays où le provincialisme était depuis des siècles cultivé comme une vertu, l’œuvre centralisatrice et rationalisante des révolutionnaires fran­çais était, par avance, condamnée à s’embourber dans le maquis inextricable des particularismes. Pourquoi en aurait-il été autrement dans le domaine lin­guistique ?

 

Paul Bay, Le pays natal /Thuin/, 1961

 

(p.18) /1789-1794  – 1815/

 

« (…) Le régime français républicain, dès son origine en 1792, n’a cessé de proscrire les dialectes locaux et la division du pays en provinces comme sous la monarchie.

 

Jo Gérard, Les Flamands et leur langue au fil du temps, LB 02/03/1987

 

L’abbé Grégoire va suggérer dans son « Rapport sur la nécessité et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française » rédigé à la demande de la Convention en 1794″ qu’on interdise le mariage aux citoyens qui ne pourraient pas prouver « qu’ils savent lire, écrire et parler la langue nationale. »  Celle-ci étant, bien entendu, le français.

« La même francisation fut appliquée au système judiciaire où elle eut de graves conséquences, celle que souligna le professeur Paul Hamelius: « Bien des Belges furent condamnés sans pouvoir s’expliquer par les juges étrangers ou négligents que devait compter le personnel bizarre de la Révolution. »

« Les lycéens impériaux établis à Bruges, Gand et Bruxelles ostracisent le flamand. »

 

Abbé Raymond Mouzon, s.r., in : VA, s.d.

 

Napoléon

 

Les aléas de l’histoire nous ont imposé la langue française, présentée à l’époque commune universelle. Napoléon a signé l’arrêt de mort des dialectes (sic). Comme d’autres dialectes (sic), le wallon fut pourchassé dans les écoles et chargé d’un mépris qui n’a pas encore tout à fait dis­paru de nos jours, déplore l’abbé Raymond Mouzon.

 NDLR: Le wallon est bien une langue et non un dialecte, une variété du français.

4.8 les Belges à Waterloo et après Waterloo

Charles Terlinden, Histoire militaire des Belges, T II, p.281-302, …

 

SOUS LA COCARDE ORANGE (1814-1830)

(p.281) La popularité toute personnelle dont avait joui en Belgique le Premier Consul, au lendemain de la pacification intérieure, s’évanouit dès que s’appesantit sur nos provinces la formidable armature du pouvoir impérial. Parmi les nom­breuses causes qui rendirent le régime impopu­laire, figurent certes au premier rang les exigences sans cesse croissantes de la conscription qui, de 1798 à 1814, coûta la vie à 51.000 jeunes Belges. Aussi, lorsque parvint la nouvelle des terribles revers de la campagne de Russie, l’espoir d’une prompte délivrance ranima une opposition générale qui, à vrai dire, n’avait jamais complè­tement désarmé.

Les mesures de salut public, décrétées par l’Empereur dès le début de 1813, accrurent encore l’animosité. L’appel anticipé des jeunes classes, l’augmentation formidable du contingent porté à près de 10.000 hommes pour une population de moins de trois millions d’âmes, l’enrôlement forcé d’enfants de seize ans, l’incorporation dans les régiments de Gardes d’Honneur des jeunes gens de famille aisée s’étant libérés de la  milice, (p.282) l’arrestation des séminaristes de Gand pour les incorporer dans un régiment d’artillerie, l’emploi de garnisaires vivant à discrétion dans les familles dont les fils ne répondaient pas à l’appel, les excès des colonnes mobiles, parcourant les campagnes pour faire la chasse aux réfractaires de plus en plus nombreux, les réquisitions de denrées, de chevaux et de bétail eurent pour résultat de pousser à l’extrême la haine de tous les Belges contre la domination étrangère.

 

Cependant, dès que les jeunes gens ainsi arrachés de force à leur famille avaient revêtu l’uniforme, l’honneur militaire les portait à faire bravement leur devoir. Les Gardes d’Honneur, en dépit de leur inexpérience, se conduisirent bravement au cours de la campagne de Saxe, spécialement à Hanau et au siège de Mayence. Plusieurs même, comme le jeune baron Lambert de Baré de Comogne, mort à Ingolstadt de ses blessures, versèrent leur sang pour une cause qui n’avait pas leur sympathie. Semblable esprit animait les jeunes mili­ciens de la levée de 1813. C’est presque uniquement avec des conscrits belges, dressés par quelques semaines d’instruction intensive et aidés par une poignée de marins, que le général Bizanet repoussa, les 8 et 9 mars 1814, une attaque anglaise contre Berg-op-Zoom, dernière ville occupée par les Français en Hollande, causant à l’assaillant une perte de 4.000 hommes, faisant prisonniers deux généraux et prenant quatre drapeaux.

C’était avec allégresse, qu’en dépit des efforts de la censure, on avait appris en Belgique le désastre de Leipzig, puis le passage du Rhin par les Alliés. La frontière de l’Empire avait craqué de toutes parts. Le 21 janvier 1814, les soldats de la coalition étaient entrés à Liège, et le 1″ février, de grand matin, le général Maison et les dernières troupes françaises avaient évacué Bruxelles où, quelques instants après, les Cosaques avaient pénétré par la porte de Louvain.

 

L’arrivée de ces hardis batteurs d’estrade, sales, dégue­nillés, barbus et hirsutes, armés de longues lances et de fouets et montés sur de nerveux petits chevaux à tous crins, suscite dans la population un enthousiasme indescriptible. On se dispute l’honneur de leur fournir (p.283) l’hospitalité, de leur apporter des rafraîchissements. Tout le monde saluait en eux les précurseurs de la délivrance.

On sait combien ces espérances devaient être déçues. En dépit de l’accueil enthousiaste fait aux armées victorieuses, les Alliés traitèrent la Belgique en « pays conquis ». Des agents orangistes avaient exploité dans les chancelleries le fait que les Belges n’avaient pu suivre l’exemple de leurs voisins du Nord et ne s’étaient pas soulevés pour chasser eux-mêmes les Français. Ils se gardaient de laisser voir que notre situation était bien différente de celle de la Hollande, presque entièrement évacuée, dès 1813, par les garnisons françaises, tandis que les départements belges avaient été, jusqu’au dernier moment, tenus en respect par l’armée du général Mai­son, par une partie de la Garde impériale, infanterie et cavalerie, sous les ordres du duc de Trévise, et par la forteresse d’Anvers, confiée à l’énergique Carnot. Tandis que les Hollandais avaient pu immédiatement se grouper autour du prince d’Orange, continuateur de leurs anciens Stadhouders et représentant la tradition nationale, les Belges n’avaient trouvé aucun chef assez influent pour prendre la tête d’un mouvement général. C’est pour cette raison qu’un vaste complot, étendant ses ramifications jusque dans la Flandre française, n’avait pas eu l’occasion d’éclater pour hâter la chute du régime impérial.

 

Déjà, avant de passer le Rhin, les Alliés s’étaient mis d’accord concernant l’organisation provisoire des terri­toires qu’ils allaient envahir et les avaient divisés en « gouvernements ». Après quelques modifications, les départements belges situés sur la rive droite de la Meuse furent placés sous le contrôle de la Prusse, ceux de la rive gauche sous celui de l’Autriche.

 

Un des premiers soins du pouvoir occupant fut de lever des troupes. Dès qu’il eut constitué le Gouvernement provisoire de la Belgique, le duc Charles-Auguste de Saxe-Weimar décréta la formation immédiate, sous les couleurs brabançonnes, d’une Légion belge, composée des régiments de Brabant, de Flandre, de Hainaut et de ‘ Namur et de deux régiments de cavalerie : les (p.284) chevau-légers, levés à Malines par le comte van der Burch, et les hussards levés à Tervueren par le prince de Croy. Un corps d’artillerie, fort d’un bataillon à pied et de deux compagnies montées, complétait cet embryon d’armée belge. On y joignit peu après, un régiment de Volontaires des Flandres, recrutés à Bruges par le comte de Puckler-Muskau, aide de camp du duc de Saxe-Weimar, un régiment d’infanterie légère, sous les ordres du prince E. d’Arenberg, un bataillon de chasseurs, levé dans le pays de Chimay et appelé chasseurs Le Loup, en souvenir de l’ancien corps national du même nom, et un autre régiment d’infanterie légère, recruté sur la rive gauche de la Meuse par les soins du comte de Murray. Toutes ces formations, sur lesquelles on ne possède que peu de documents, intéressent au plus haut point les origines de notre armée, plusieurs de nos unités actuelles en descendent par une filiation inin­terrompue.

 

En même temps, les Provinces-Unies des Pays-Bas, assurées de leur indépendance dès la fin de 1813, faisaient recruter dans notre territoire un bataillon de chasseurs, organisé à Bréda par le major Perez, Belge d’origine, et deux bataillons liégeois levés par le colonel van der Maesen, sous le nom de Légion du Bas-Rhin.

Alors qu’elles commençaient à peine à s’organiser, les troupes de la Légion belge étaient intervenues à côté des Alliés, en mars 1814, contre un retour offensif des Français. Quelques volontaires du régiment de Flandre, unis à deux cents Cosaques, tentèrent de défendre Gand contre toutes les forces du général Maison et les artilleurs belges brisèrent net, par la vigueur et la précision de leur feu, une attaque de vive force de la division Roguet contre Tournai.

 

Malheureusement, les Alliés renoncèrent à leur projet initial de constituer, au moyen des départements belges et de quelques territoires rhénans un « Etat barrière », sous le sceptre de notre dernier gouvernement général, l’archiduc Charles, et ils se rallièrent à l’idée, mise en avant par l’Angleterre, d’amalgamer la Belgique et la Hollande en un seul royaume. En conséquence, Guil­laume d’Orange, déjà Prince Souverain des Pays-Bas, (p.284) fut investi par le traité de Paris du pouvoir sur nos provinces. Il y activa le recrutement des troupes, et au début de 1815, les forces belges comportaient deux bataillons de chasseurs, quatre bataillons d’infanterie de ligne, plus vingt-cinq bataillons de milices en formation, un régiment de hussards, un régiment de chevau-Iégers, un régiment de grosse cavalerie, levé à Bruxelles, sous le nom de carabiniers belges, un corps d’artillerie à cheval de deux compagnies, un bataillon d’artillerie à pied, trois bataillons d’artillerie de milice en formation, deux compagnies du train et sept compagnies de maré­chaussée. A partir du 21 avril 1815, ces troupes furent incorporées à l’armée néerlandaise, avec un numérotage unique pour les deux pays.

 

Au mois de juin toutes les forces mobiles des pro­vinces méridionales, soit 5.500 hommes, entrèrent, avec celles des provinces du Nord, dans l’armée très disparate confiée au duc de Wellington pour arrêter la marche de Napoléon. Dans la division de cavalerie, forte de 3.600 sabres, mise à la disposition des Alliés par le roi Guillaume, les Belges étaient en majorité. Le com­mandant de la division, le lieutenant général de Collaert et deux généraux de brigade sur trois, de Ghigny et van Merlen, étaient Belges; était Belge également le com­mandant de la 2e brigade de la division d’infanterie Chassé, le général d’Aubremé, ancien volontaire de la Révolution brabançonne, devenu colonel du 136e de ligne après avoir fait toutes les campagnes de la Répu­blique et de l’Empire. A Lutzen, il avait reçu pour son régiment, qui s’était comporté d’une façon admirable, quarante-deux croix de la Légion d’honneur, ne s’en réservant pas pour lui et gagnant la sienne à Bautzen, quelques semaines plus tard, par de nouveaux exploits.

 

La méfiance et la suspicion injustifiées du haut état-major allié à l’égard des officiers et soldats issus des armées de l’Empire et passés au service des Pays-Bas, eurent pour résultat l’établissement dans l’armée de Wellington d’un amalgame néfaste, qui rend difficile la détermination exacte de la part prise par chaque corps dans les opérations de juin 1815. Cette circonstance a (p.286) permis la création de légendes outrageantes pour la réputation des troupes des Pays-Bas.

 

Les solides réfutations publiées par les généraux Eenens, Renard, Brialmont, de t’Serclaes de Wommerson, de Bas et d’autres auteurs encore, ont réduit à néant ces calomnies et ont confirmé l’hommage publiquement rendu aux Hollando-Belges, immédiatement après Water­loo, par Wellington, Bliicher et par l’unanimité des contemporains.

Il a été établi d’une manière irréfutable que c’est aux Hollando-Belges qu’est dû en grande partie le succès des Alliés aux Quatre-Bras, où les jeunes troupes de la division Perponcher, avec 16 canons, tinrent tête, pendant trois heures à deux corps d’armée, commandés par Ney et soutenus par une nombreuse cavalerie et 62 canons. Cette héroïque résistance donna aux Anglais le temps d’accourir et permit d’éluder les conséquences fâcheuses de l’erreur stratégique de Wellington, qui s’était complètement trompé sur la ligne d’opérations des Français. Il avait cru que l’attaque serait dirigée contre lui par Mons et Nivelles et, nonobstant le passage de la Sambre par Napoléon, il avait prescrit d’abandonner les Quatre-Bras et de concentrer toutes les troupes sur Nivelles. Si ces ordres avaient été exécutés, remarque Henri Houssaye, une trouée large de quatre lieues, eût été ouverte entre Nivelles et la Haute-Dyle trouée par laquelle Ney aurait pu s’avancer, sans devoir tirer un coup de fusil, jusqu’à mi-chemin de Bruxelles.

 

Heureusement, le chef d’état-major du prince d’Orange, le baron de Constant-Rebecque, voyant plus clair que le générallissime, avait pris sur lui de porter aux Quatre-Bras la brigade du prince de Saxe-Weimar, ordon­né au général Chassé de concentrer sa division à Fay et prescrit au général de Collaert de rassembler sa cavalerie derrière la Haine et à Perponcher de rejoindre Saxe-Weimar aux Quatre-Bras. La petite armée hollando-belge formait ainsi, au point le plus menacé, l’avant-garde des Alliés.

 

Les généraux hollando-belges firent preuve du même esprit d’initiative. Quand arriva l’ordre de repli sur Nivelles, « le lieutenant général de Perponcher, écrit Gneisenau,  (p.287) chef d’état-major de Blûcher, sentit que le duc avait donné cet ordre sans se rendre un compte bien exact de la situation de l’armée. Il comprit le danger qu’il y aurait si l’ennemi, trouvant les routes de Bruxelles et de Namur libres, se portait en avant et séparait les deux armées. Il assuma la responsabilité de la résistance et demeura dans sa position des Quatre-Bras. Le lendemain, il fut attaqué par des forces supérieures; il perdit un tiers de son monde et se maintint jusqu’à l’arrivée des soutiens. Si le lieutenant général de Per-poncher avait suivi l’ordre du duc de Wellington, s’il avait marché sur Nivelles et n’avait pas fait une aussi bonne résistance, le maréchal Ney, atteignant les Quatre-Bras, aurait pu tourner à droite, arriver sur le derrière de l’armée qui combattait à Ligny, sous le comman­dement du prince Blûcher, et causer ainsi sa destruction totale ».

Dans cette lutte énergique pour la défense des Quatre-Bras, plusieurs corps belges se distinguèrent particu­lièrement. Le 7e bataillon de ligne, sous les ordres du lieutenant-colonel Van de Sanden, ancien chasseur de Le Loup, puis capitaine au 112e, blessé à Raab, arriva sur le champ de bataille vers trois heures de l’après-midi, au moment où les troupes de la brigade Saxe-Weimar, accablées sous le nombre, cédaient peu à peu le terrain. Le bataillon belge fut chargé de tenir à tout prix dans le bois de Boussu, clef de la position. Il s’y maintint jusqu’au soir, perdant 92 hommes, dont deux officiers. Il repoussa toutes les attaques, ce qui permit l’arrivée du prince d’Orange avec des renforts et, à la fin de la journée, chassa d’un suprême effort les soldats de Ney de leurs dernières positions. En tête des renforts amenés par le prince d’Orange galopaient les hussards hollandais de Boreel et les chevau-légers belges de van der Burch, devenus les dragons légers n° 5, formant la brigade van Merlen. Ils venaient de faire neuf lieues d’une traite. Le prince les lance immédiatement contre la colonne française du général Foy, qui menaçait de percer le centre des Alliés. Les hussards, vivement rame­nés par la cavalerie de Pire, sont dégagés par nos dragons légers, qui, non loin de la ferme de Gemioncourt, foncent (p.288) sur le 6e chasseurs à cheval français, commandé par le colonel de Fodoas. Les deux régiments se compénètrent et se mêlent pour se sabrer. « Plusieurs de nos braves, écrit le général Renard, furent soumis à une pénible épreuve; ils se trouvèrent en présence de camarades avec lesquels, quelques mois auparavant, ils bravaient les mêmes dangers. Ceux-ci appelaient les nôtres par leurs noms, en les engageant à rejoindre leur drapeau. De cet appel infructueux on en vint aux coups. Le capitaine Delenne se trouva en face de Devielle, son frère d’armée de France. Le capitaine Van Remoortere reçut un coup de pointe dans le ventre d’un de ses anciens sous-officiers. Le maréchal des logis Beauce se sabrait avec un des maréchaux de logis chefs de son ancien escadron ».

Le colonel belge Courtin, qui avait servi dans les chasseurs de la Garde, déclarait plus tard : « J’ai fait bien des charges, mais je n’en ai exécuté aucune où nous ayons été mêlés si longtemps avec l’ennemi ».

 

Au cours de cette lutte, qui demeurera un éternel titre de gloire pour notre cavalerie, le lieutenant colonel Ed. de Mercx est renversé d’un coup de sabre. Le major qui le remplace, voyant arriver un régiment de lanciers en soutien des chasseurs à cheval français, fait sonner la retraite et indique comme point de ralliement la ferme de Gémioncourt. Nos dragons légers, reformés en ordre parfait, approchaient du but lorsque soudain une ligne rouge se dresse devant eux et les fusille presque à bout portant. C’était un bataillon de la division Picton, fraîchement arrivé sur le champ de bataille et abrité dans le fossé d’accotement de la grand-route de Char-leroi. Trompé par la ressemblance entre l’uniforme des chasseurs à cheval français et nos dragons légers (veste verte et collet jaune), il avait accueilli par une décharge meurtrière nos cavaliers déjà si durement éprouvés par l’ennemi. Cette méprise, qui nous coûta 40 hommes, ne provoqua qu’un désordre passager, nos dragons légers, rapidement ralliés, occupèrent leurs positions jusqu’à la fin de la journée. Sur les 400 hommes que comportait le régiment, 157 officiers, sous-officiers et soldats avaient été tués ou blessés.

 

(p.289) La batterie d’artillerie belge du capitaine Stévenart prit part également à cette mémorable journée. Six de ses pièces étaient en position en avant de la ferme de Gémioncourt; les deux autres, sous les ordres du lieutenant Winssinger, plus tard général au service belge, étaient placées entre la ferme du Grand-Pierrepont et le bois de Boussu.

 

Après un long duel d’artillerie contre les pièces plus nombreuses de la division Foy, les trois premières sec­tions se rapprochèrent du bois de Boussu, de manière à prendre la chaussée en écharpe. Le brave capitaine Stévenart est tué et une de ses pièces démontée. La place n’étant plus tenable, les cinq pièces restantes prennent une nouvelle position plus près des Quatre-Bras et appuient de leur feu la charge de la brigade van Merlen. Mais les hussards hollandais n° 6, vivement ramenés comme nous l’avons dit, par la cavalerie de Pire, se replient sur nos pièces et entravent leur tir. Les Français, poursuivant les Hollandais, arrivent avec eux au milieu des canons. Paralysés dans leur action, nos artilleurs se défendent, comme ils le peuvent, à l’arme blanche et à coups d’écouvillons. Officiers et soldats sont hachés sur leurs pièces, deux de celles-ci restent aux mains des Français, et lorsqu’un retour offensif des Alliés dégage les trois autres, tous les officiers et servants étaient morts en braves ou griève­ment blessés. Seule la section de Winssinger qui, pendant toute la bataille, avait appuyé de son feu la vaillante infanterie de Nassau, défendit jusqu’au bout avec avantage la lisière du bois de Boussu.

 

Le surlendemain, les Belges se battirent tout aussi héroïquement à Waterloo. Les trois bataillons belges de la division Chassé : 35e chasseurs, lieutenant-colonel Ar-nould; 36e chasseurs, lieutenant-colonel Goethals; 3e de ligne, lieutenant-colonel L’Honneux, lui aussi un ancien du 112e, après avoir escarmouche pendant toute la matinée du côté de Braine-l’Alleud avec les patrouilles françaises, se portèrent en avant pour appuyer la droite de Wellington. Vers 5 heures, au moment des grandes charges de la cavalerie française, ils se formèrent en carrés et subirent sans broncher le choc des escadrons (p.290) français. Vers 7 heures, lors de la fameuse attaque de la Garde impériale, lord Hill fit remplacer ses bataillons épuisés par des troupes hollando-belges, parmi lesquelles figuraient le 35e chasseurs et le groupe d’artillerie du major van der Smissen (batteries Lux et Krahmer). Le rôle de ces troupes fut brillant : le 36e chasseurs prit une part glorieuse à la charge à la baïonnette qui rejeta du plateau les grenadiers français. Le 35e chas­seurs et le 3e de ligne, restés d’abord en seconde ligne, participèrent avec vaillance à l’attaque générale, où tombèrent le capitaine Guyot et le lieutenant Roberti, et qui décida du sort de la bataille. Dans toute cette journée, les fantassins de la division Chassé, bien que, pour la plupart, de récente levée, encadrés, il est vrai, par des vétérans de l’Empire, avaient dépassé l’attente de Wellington. « Dans la position défensive où ils furent placés pendant la première partie de la bataille, ils avaient supporté avec une solidité remar­quable un feu d’artillerie dépassant en intensité celui des plus grandes batailles de l’Empire; lorsqu’ils furent directement abordés par l’avalanche formidable des escadrons français, ils se formèrent en carré avec le sang-froid et la précision d’une vieille troupe; enfin, à l’approche du moment décisif, ils se portèrent en avant avec tout l’élan dont une jeune troupe est susceptible», et le général baron van Rode, ancien officier du 35e chasseurs, écrivait : « les bataillons belges de la division Chassé étaient superbes, bien disciplinés, leur conduite a été irréprochable, étonnante même pour des troupes qui voyaient le feu pour la première fois ».

 

Plus importante encore fut la part prise à l’échec de la Garde impériale par le groupe d’artillerie belge du major van der Smissen. Les auteurs anglais sont unani­mes à faire l’éloge de l’aide « très efficace et très opportune, prêtée par les artilleurs belges aux 30e et 70e régiments britanniques pour repousser l’attaque des grenadiers français ». Le groupe van der Smissen avait été placé d’une façon si judicieuse et ouvrit un feu si bien dirigé et si décisif que les Français faits prisonniers se plaignaient d’avoir été victimes de « batteries mas­quées ».

 

(p.291) Tandis que les Belges de la division Chassé se couvraient ainsi de gloire à l’aile droite, à l’aile gauche ceux de la brigade de Bylandt se tiraient à leur honneur des plus rudes épreuves. Le 7e bataillon de ligne avait été placé dans l’ordre de bataille à l’Est de la route, vers Papelotte, sur le grand chemin de terre conduisant à Ohain, non loin de l’endroit où se dresse actuellement le monument commémoratif belge. C’était la position la plus exposée de la première ligne, étant la plus rapprochée des Français, au point même où l’Em­pereur avait massé six divisions pour percer le centre britannique. Cette attaque fut longuement préparée par le feu d’une batterie de 80 pièces de gros calibre, placée en avant de la Belle-Alliance. Cette pluie de fer s’abattait sur la brigade hollando-belge de Bylandt, seule exposée à découvert, tandis que les masses anglaises, plus en arrière, étaient abritées par la crête de Mont-Saint-Jean. Pendant deux heures, le 7e de ligne, couché le long du chemin, avec sa compagnie de voltigeurs déployée en tirailleurs, subit une effroyable canonnade. Lorsque l’empereur put croire, comme il l’écrit dans ses Mé­moires, que la seule troupe qu’il voyait devant lui, sur le plateau, était détruite par les boulets et la mitraille, il lança sur la gauche de Wellington trois colonnes fortes chacune de deux divisions. Placée en avant-ligne, comme sur un promontoire, la brigade de Bylandt supporte seule le premier choc. Sous l’avalanche, le bataillon de chasseurs hollandais n° 27 recule de quelques mètres pour se reformer sur la crête. Le 7e de ligne belge reste couché jusqu’au moment où la tête de colonne française est à portée de pistolet, puis, se levant comme un seul homme, il ouvre le feu. Les premiers rangs français commettent la faute de s’arrêter pour y répon­dre. « Nous tirions de si près, écrit le colonel Scheltens, que le capitaine l’Olivier reçut la bourre d’une cartou­che, avec la balle, dans la blessure ». Cet arrêt momen­tané de la colonne française, qui cherche à se déployer au lieu de pousser en avant, permet à Wellington de lancer contre elle la cavalerie de lord Uxbridge. La fameuse charge des Scots Greys et des Inniskïllings passe comme un ouragan sur les ailes du 7e de ligne, (p.292) dont quelques hommes sont même bousculés. Le batail­lon, qui a cessé le feu pour laisser passer la cavalerie anglaise, franchit le chemin, se porte en avant et se joint aux régiments de Picton pour exploiter le succès de la charge triomphale d’Uxbridge. Cette vaine tenta­tive pour conquérir le plateau coûtait aux Français les Aigles du 45e et du 105e, 3.000 tués, blessés et prisonniers et de la désorganisation de toute l’artillerie de leur aile droite. Cet échec, auquel le 7e de ligne avait pris une part si importante, fut décisif au point de vue du résultat de la journée. Le brave bataillon retourna pren­dre sa position première, harcelant par le feu de ses tirailleurs le flanc droit des grandes charges de la cavalerie française, et prit part à l’attaque finale.

 

Le soir, au bivouac, 300 hommes à peine répondirent à l’appel : c’était la moitié de l’effectif. Trois semaines plus tard, dans une revue passée au bois de Boulogne, Wellington s’arrêta devant le bataillon et le félicita de sa belle conduite à Waterloo. Ce corps conserva dans le pays et dans l’armée une renommée sans pareille. La ville de Tournai, où il tenait garnison, lui envoya un drapeau d’honneur; le peintre officiel Odevaere le repré­senta à côté des Ecossais au plus fort de l’action. La légende même s’en mêla, on racontait que les soldats du 7e étaient allés délivrer le prince d’Orange enveloppé par les cuirassiers français et que celui-ci, en igné d’admiration, avait attaché sa croix à leur drapeau. Cette légende, reprise par Lamartine dans son Histoire de la Restauration, suffit à prouver qu’à Waterloo le 7e de ligne belge fit plus que son devoir.

 

La section Winssinger de la batterie belge Stévenart, renforcée d’un obusier, dernier débris des trois autres sections, rendit également de grands services à Waterloo. Rattachée à la brigade de Nassau, elle resta toute la journée sur une éminence en arrière de la Haie-Sainte et contribua par son feu à retarder la conquête par les Français de cette position importante et à les empêcher d’en déboucher.

 

La cavalerie belge se montra à Waterloo digne des autres armes. Les chevau-légers n°5 fortement réduits par leur héroïque charge des Quatre-Bras, servirent pendant (p.293) toute la journée de soutien de batteries, opérèrent dans les intervalles des carrés, prirent part à l’offensive finale et poursuivirent l’ennemi jusqu’à la nuit tombante. Le brave général belge van Merlen, averti par un pressen­timent funeste, doi.t il avait fait part à ses camarades le matin même de la bataille, fut emporté en pleine victoire par un boulet.

 

Le régiment des hussards de Croy, devenu hussards, belges n° 8 et les dragons hollandais n° 4, formant brigade avec lui sous les ordres du général Ghigny, furent em­ployés pendant les premières heures de la bataille à empêcher les tirailleurs français et la cavalerie légère de Jacqueminot de prendre pied au bas du plateau, tandis que se déroulait l’attaque de Drouet d’Erlon sur la Haie-Sainte. Après l’échec de cette tentative, la brigade Ghigny reçut l’ordre de se déployer derrière la droite de la ligne de la bataille.

 

On conserve à Londres, dans une vitrine du palais d’Aspley House, un ordre crayonné en toute hâte, par Wellington au cours de l’action et prescrivant d’envoyer la cavalerie belge pour colmater une brèche dans la ligne de bataille entre les deux routes. C’est ainsi que dès que se dessinèrent les grandes charges de la cava­lerie française sur le centre, nos escadrons s’avancèrent, en colonne serrée, les hussards en tête pour rétablir la première ligne britannique.

Après avoir passé entre deux carrés, les hussards débouchent sur les pentes du plateau et s’y heurtent à plusieurs régiments ennemis, notamment aux grenadiers à cheval de la Garde, soutenus par une batterie, qui ouvre sur la tête de colonne un feu de mitraille. En un instant, presque tout le premier escadron, hommes et chevaux, gît dans la poussière. Le général Ghigny et: le colonel Louis Duvivier, le cadet des deux frères montois qui s’étaient couverts de gloire pendant toutes; les campagnes de l’Empire, ont leurs chevaux tués sous; eux. Ce feu terrible provoque un moment de désordre. Ghigny prescrit de faire déboîter le régiment pour le porter en arrière des dragons n° 4, mais cet ordre, donné en néerlandais, est mal compris par les hussards belges,, les escadrons de tête, au lieu de faire à gauche par(p.294) quatre, font demi-tour, se heurtent aux escadrons qui les suivent et les entraînent dans leur marche rétro­grade. Heureusement, avec des chefs aussi expérimentés que Ghigny et Duvivier, le désordre ne pouvait se prolonger; au bout de quelques instants, la colonne est arrêtée, reformée et reportée en avant. Cependant, de­vant l’attaque massive de toute la cavalerie française, les Alliés étaient réduits à la défensive. Les hussards n°8, ayant à leur droite les dragons n°4 et, à leur gauche, les hussards noirs de Brunswick, sont employés à repousser les escadrons français dans les intervalles des carrés et par leurs charges répétées empêchent l’ennemi d’utiliser ses avantages.

 

A la fin de la journée, nos hussards, réduits à là force d’un faible escadron, se joignirent à la charge de la cavalerie anglaise de Vivian et Vandeleur qui eut raison de la dernière résistance des Français. Fort de 400 hommes, au début de l’action, le régiment avait perdu, d’après les documents officiels, en tués et blessés, 8 officiers, 277 sous-officiers et soldats. Parmi les morts figuraient le major de Villers et le capitaine comte Camille du Chastel de la Howarderie, dont le frère Albéric, capitaine aux chevau-légers n° 5, avait été griève­ment blessé l’avant-veille aux Quatre-Bras.

 

C’est ce régiment, dont les pertes énormes prouvent, mieux que les meilleurs arguments, la part importante dans la lutte, que le pseudo-historien anglais Siborne, repris par le romancier Thackeray dans Vanity /azY, a dépeint comme fuyant le champ de bataille, à toutes brides, et semant la panique jusqu’à Bruxelles. L’histoire à eu raison de ces calomnies et si, un moment, un •ordre donné dans une langue incomprise de la plupart des cavaliers provoqua quelque désordre, il est injuste de parler de fuite. Sans vouloir ouvrir des polémiques, depuis longtemps apaisées, rappelons qu’un seul régi­ment de l’armée alliée fut pris d’une de ces paniques inexplicables, comme on en constate même dans les troupes les plus braves et les plus aguerries… Ce fut le régiment des hussards hanovriens de Cumberland qui, voyant les cuirassiers français prendre pied sur le (p.295) plateau, s’engouffra ventre à terre sur la route de Bruxelles, son colonel von Hacke-Ohr en tête.

 

Le troisième régiment de cavalerie belge engagé à Waterloo était celui des carabiniers n°2; il était com­mandé par le colonel J.B. Debruyn, dont la carrière aventureuse et en grande partie énigmatique a été récemment retracée par M. W. Aerts, attaché au Musée royal de l’Armée. Ce régiment formait brigade, sous les ordres du général Trip, avec les carabiniers hollandais nos 1 et 3. Ces cavaliers, se substituant aux escadrons fatigués de Somerset, chargèrent à plusieurs reprises, avec succès, les cuirassiers de Milhaud et la cavalerie légère de la Garde, lancés en avant pour amorcer la grande attaque de toute la cavalerie française.

 

Au cours de cette lutte, rapporte le général Renard, passa un incident remarquable : « Un capitaine de cui­rassiers français, se portant en avant de ses lignes, appela un des officiers ennemis en combat singulier. Un de nos Belges se détacha des rangs et répondit à son appel. C’était un officier sortant du 27e chasseurs à cheval français, commandé par notre brave duc d’Arenberg, que les Anglais ont bien connu en Espagne. Les deux antagonistes se blessèrent mutuellement». La présence de trois anciens officiers du 27e chasseurs à cheval dans les cadres de nos carabiniers n°2 nous empêche malheureusement de préciser quel fut le héros de cette lutte inégale contre un adversaire protégé par une cuirasse.

 

Lors des grandes charges contre les carrés, les carabiniers, en déblayant les intervalles, jouèrent un rôle important dans cette lutte héroïque, où, dit Renard, «la première cavalerie du monde, abandonnée à ses seules ressources contre toute une armée en position, trouva son glorieux tombeau ». Ils prirent part à la charge finale, au cours de laquelle fut blessé le lieutenant géné­ral de Collaert, et lancés dans la poursuite ne s’arrêtèrent que vers minuit près de Genappe. Leurs pertes avaient été lourdes : 87 tués, 56 blessés. Le lieutenant J.J. Henry était parmi les morts, le major Maurice de Mercx, frère du lieutenant-colonel commandant des chevau-légers n° 5, le major Bouwens van der Boyen, les capitaines James-Bernard (p.296) de Liedekerke de Pailhe et van der Duyn, l’adjudant-major Anoul, les lieutenants Majoie, Arnould, d’Astier, Charles-Louis de Macar, Louis-Jérôme de Woor de Trixhe, qui sortait des lanciers rouges de la Garde impériale, Delobel, plus tard général au service belge, de Goldstein, Prudent-Joseph de Ladrière, François van der Veken Hacquart, Pierre-Jacques Rodenbach étaient blessés.

Cette longue liste suffit à prouver que, quoi qu’en aient dit certains écrivains anglais, désireux de monopo­liser pour leurs compatriotes la gloire de la bataille, les carabiniers belges n° 2 méritèrent largement les vingt croix de l’Ordre militaire de Guillaume attribuées au régiment pour sa belle conduite à Waterloo.

Les chiffres parlent un langage plus sincère que certains historiens. Aux Quatre-Bras, sur 1.313 soldats belges engagés, plus de 200 sont tués ou blessés; à Waterloo, sur un total d’environ 4.000 hommes, les pertes se montent à plus de 800!

 

Edward de Masschalck, Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse Bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

De slag van Waterloo

 

(p.200) Geheel nieuw is het gevoel van trots over het opmerkelijke feit dat er voortaan ook ‘Belgische’ soldaten bestaan. Er zijn natuurlijk altijd soldaten van eigen bodem geweest, maar die liepen verloren in het grote Franse leger. Nu krijgen de soldaten van de Zuidelijke Nederlanden hun eigen generaals, zoals Jean de Cobbart en Jean Baptiste van Merlen, zelf oudgedienden van het Franse leger.

Begin april 1815 maakt Hous voor het eerst melding van ‘de Belgen, Nederlandse troepen’. Het begrip ‘Nederlands’ is hier synoniem voor ‘Belgisch’. want als Hous het heeft over de Nederlanders uit het noorden, spreekt hij steevast over ‘Hollanders’. Dat Hous trots is op deze ontwikkeling, blijkt duidelijk uit volgend incident: ‘Op 14 met, op Sinksendag. is er ruzie geweest tussen de Belgen en de Pruisen. Aanstonds grepen al de Belgen naar hun wapens en daar was meteen een menigte volk op de markt. De Pruisen hebben van de Belgen veel slaag gekregen met de kolf van het geweer. De burgers van de stad waren allemaal tegen de Pruisen. Zij die woonden aan de kant van de markt sloegen al hun deuren en vensters toe, want de Belgen kregen op de markt poeder en lood.

De kanonniers kregen het bevel hun kanon te laden. Het is er zo erg aan toe gegaan dat de generaal van de Belgen, de Heer Van Merlen. en de commandant van de Pruisische troepen zijn moeten tussenkomen om ze te bedaren.’

 

(p.201) Er is nog een belangrijke wijziging die Hous met verbazing gadeslaat. Een nieuwe lichting van 25.000 man wordt uitgeschreven, van wie 4160 voor rekening van het Dijledepartement. Het gaat om de mannen tussen 18 en 35 jaar, inclusief de weduwnaars zonder kinderen. Maar terwijl vroeger zo’n tijding meteen leidde tot onderduiking of zelfs rebellie, is de sfeer nu helemaal omgeslagen: ‘Op 24 april is er op het stadhuis en de voormalige prefectuur loting geweest van de dorpen Heverlee, Oud-Heverlee en Bertem. Ook alle andere dorepen moeten dat lot ondergaan. De boeren van Bertem die moesten loten kwa-men in massa (zij waren in de 70 sterk en het dorp moest er maar 11 leveren). met het vaandel voorop en de maire, de Heer Stroobants, aan het hoofd. Ook de volgende dagen blijven zich dergehjke patriottische taferelen afspelen:

‘Het is wonderlijk en bijna ongelofelijk hoe dat de boeren naar de stad komen om te loten, nu met slaande trommel het vaandel voorop en de oranje cocarde op de hoed. Vroeger bij het loten van de Fransen werd alle mogelijke geweld gebruikt door de gendarmes.’ Algauw krijgt Leuven echter ook te maken met typisch ‘Belgische’ toestanden: ‘De loting van de stad Leuven is geannuleerd en moet overgedaan worden, omdat er iets niet in orde was. De schrijver van de onderintendant, de Heer Hambroeck, is gevangen gezet omdat hij, naar men zegt, de briefjes van de hoge nummers groter gevouwen heeft dan de andere en dat aan heel wat personen heeft gezegd.

 

Eric Meeuwissen, Un livre, un prof, pour jouer au stratégo à Waterloo, LS 31/5/1990

 

A propos du livre de Luc Devos, Les 4 jours de Waterloo 15-16-17-18 juin 1815, éd. Hatier.

Le livre mentionne une erreur parue dans le “Dictionnaire d’histoire de Belgique “, publié en 1988 sous la direction d’Hervé Hasquin et dans lequel on peut lire: “Les Belges qui participèrent à la bataille de Waterloo le firent surtout dans les rangs de l’armée française.” 

 

Les Belges à Waterloo

 

Frans Van Kalken, Histoire du Royaume des Pays-Bas et de la révolution belge de 1830, Bruxelles, s.d.

 

(p.27) (…) un certain nombre de membres de la classe moyenne désiraient le maintien de la domination française, par attache­ment aux principes de 89, ou par admiration pour la centralisation impériale, mode de gouvernement plutôt opportun — il faut en convenir — dans nos provinces ultra-particularistes. C’étaient pour la plupart des officiers et des fonctionnaires belges autrefois au service de Napoléon, ou des républicains français et des bonapartistes émigrés après la restau­ration des Bourbons. Peu nombreux et isolés au milieu d’une population pleine de rancune au souvenir du régime de coercition qu’elle venait de subir, ils ne semblent guère avoir fait, en 1814, de propagande en faveur de leurs idées.

 

(p..34) Nous n’avons pas à retracer ici, en détail, la période des Cent-Jours. L’armée hollando-belge, à peine créée, fut hâtivement mobilisée, puis encadrée dans les troupes d’élite du duc de Wellington. Quoi­que jeunes et inexpérimentés, les soldats belges et bataves surent, par deux fois, rivaliser en intrépidité et en force d’endurance avec les vétérans de Sa Majesté Britannique (3) : le 16 juin aux Quatre-Bras, en repoussant, sous les ordres du prince d’Orange, fils aîné de Guillaume Ier, les soldats du maréchal Ney; le 18, à Waterloo, en défendant la ferme de la Haye-Sainte et en participant à la dernière attaque contre les grenadiers de la garde (4). Fait à noter : ce furent

 

(3)  Le fait est d’autant plus notoire qu’au début de 1814 l’on avait, dans plusieurs villes belges, dû procéder aux opérations du tirage au sort avec l’appui de la force armée, tant les nouvelles lois de milice, pourtant si nécessaires, avaient été mal accueillies par les jeunes gens et leurs familles. Voir buffin, Documents inédits, Introduction, p. vu.

 

(4) Sur la campagne de 1815, voir F. db bas et comte J. db T’SERclaEbs de wommersom, La Campagne de 1815 aux Pays-Bas, d’après les rapports officiels néerlandais (3 vol., Bruxelles, 1908, A. Dewit). Ce grand ouvrage, fruit de longues et judicieuses études, met définitivement fin à la légende calomnieuse de la lâcheté des troupes hollando-belges, durant la campagne de 1815.

 

(p.35) Durant cette grande journée de Waterloo, les généraux, officiers et soldats du prince d’Orange payèrent héroïquement de leur personne. Le prince fut même blessé à l’assaut final. Certains historiens étrangers ont cherché dans la suite à diminuer la valeur des troupes hollando-belges, avec l’intention de mettre d’autant plus en relief les mérites de leurs compatriotes. Les Alliés, en 1815, furent plus justes. Le général Pirch, s’adressant au maire de Namur, disait : « De tous temps, les Belges se sont montrés un peuple brave, généreux et vail­lant. » Blücher, dans une. proclamation « aux braves Belges », les apostrophait ainsi : « Vous êtes un peuple brave, loyal et noble… »

 

Jusqu’à la fin de la guerre les soldats du nouveau royaume firent loyalement leur devoir, participant à l’envahissement du nord de la France et aux sièges du Quesnoy, de Condé et de Valenciennes.

 

 

Luc De Vos, Les quatre jours de Waterloo, 15-18 juin 1815, éd. Versant Sud,  2002

 

(p.7) À l’heure actuelle, les Belges francophones optent de plus en plus pour le mythe napoléonien. Ils sont à ce point subjugués par l’impérialisme culturel de Paris que seul mon éminent pré­décesseur, feu Henri Bernard, a embrassé la thèse britannique. Certaines têtes chaudes voudraient même faire disparaître le Lion. Un collègue a osé écrire dans le Dictionnaire d’histoire (p.8) de Belgique, publié sous la direction de Hervé Hasquin : « Des Belges participèrent à la bataille de Waterloo, surtout dans les rangs de l’armée française » ! Les Néerlandais et les Belges fla­mands semblent à peine s’intéresser à la bataille de Waterloo. L’armée belge n’a conservé aucune tradition de ces combats titanesques. Il n’existe en néerlandais aucun ouvrage digne de ce nom sur la bataille.

Le nombre de soldats belges ayant combattu au sein des armées présentes sur le site de Waterloo n’a jamais pu être très déterminé. Diverses études ont été entreprises afin de résoudre ce problème mais pour l’une ou l’autre raison, elles se sont tou­jours révélées très partielles. Aujourd’hui, nous pouvons cependant avancer un chiffre qui doit pouvoir se rapprocher de la réalité. Sur les 70 000 soldats présents dans le camp français sur le site même de Waterloo, il semblerait que 1350 «Belges» (dont beaucoup d’officiers) aient pris part à la bataille. Un travail de recherche a également été entrepris pour les unités alliées. Ici, bien plus que pour le camp français, les chiffres avancés peuvent être discutés. André Bikar dément formellement, exemples précis à l’appui, les affirmations de de Bas et de ‘t Serclaes de Wommersom. Selon lui, les bataillons de Zuid-Nederlanders qui combattirent à Waterloo n’étaient pas composés que de «Belges». L’effectif des unités de Zuid-Nederlanders atteignait le chiffre de 4 315 unités. L’étude de l’ensemble des documents nous amène à penser que le nombre de soldats « belges » au service des Alliés qui semble se rapprocher le plus de la réalité serait de 3 600 unités. Mais rien n’est moins sûr !

 

(p.50) La faiblesse de la flotte française ne permettant pas une attaque directe contre la Grande-Bretagne, Napoléon chercha un recours dans la stratégie indirecte. Le blocus continental décrété contre la Grande-Bretagne depuis 1806 devait mettre fin à la prospérité et à la puissance de cet État industriel. Le blocus apparut comme une bévue dans le domaine de la Grande straté­gie et il s’avéra un tournant dans la carrière de Napoléon. Non seulement, le blocus était inefficace, mais il était aussi très impopulaire, surtout au Danemark, dans les Pays-Bas, en Italie et en France même, en particulier à Bordeaux, Nantes et La Rochelle. L’extension du blocus au Portugal et à l’Espagne allait mener à une lutte sans fin. Le Portugal refusa d’appliquer les mesures à l’encontre de son vieil allié britannique, tandis qu’une petite armée anglo-portugaise soutenait l’insurrection espa­gnole dès 1808. Enfin, la Grande- Bretagne trouvait de nouveaux débouchés en se tournant vers le marché latino-américain.

 

(…) L’absorption des États pontificaux aboutit en 1811 à l’excom­munication de l’Empereur. Ce faisant, il dressait contre lui la France rurale encore majoritairement catholique.

 

(p.64) Napoléon croyait-il que l’on parlait partout le néerlandais en Belgique? Toujours est-il qu’il écrivait dans son ordre de mouvement du 14 juin: «Reille, Vandamme, Gérard et Pajol (…) mettront, autant que possible, à l’avant-garde les officiers parlant le flamand, pour interroger les habitants et prendre des renseignements » !

(…)

Le peuple se réjouissait de pouvoir assister à la grande cérémonie militaire prévue pour le 21 juin, en souvenir de la bataille de Vittoria, remportée par Wellington contre le maréchal Jourdan en 1813.

 

(p.72) Entre-temps, Constant-Rebecque avait installé son quar­tier général aux Quatre-Bras. Le prince d’Orange y arriva vers 5 heures. À 9 heures, le prince disposait à peine de 4300 hommes aux Quatre-Bras, et de 8 canons. Vers 14 heures, le nombre était passé à 7 500 hommes et 16 canons. En face, plus de 13 000 hommes et 24 canons attendaient l’ordre d’attaquer.

À Sainte-Hélène, Napoléon reconnut que la décision de Constant-Rebecque d’amener des troupes aux Quatre-Bras fut une initiative capitale qui l’empêcha de prendre les Anglais en défaut. C’est ce coup de génie militaire, que Napoléon attribua initialement au prince d’Orange, qui devait en grande partie sceller la décision finale de la campagne de 1815. Et personne ne semble s’y être trompé ! En effet, après la bataille et en signe de reconnaissance, un palais construit à Bruxelles lui fut attribué. C’est l’actuel palais des Académies. Un domaine lui sera cédé à Tervuren pour qu’il puisse s’y faire construire une seconde résidence. Elle deviendra le musée colonial, aujour­d’hui musée d’Afrique centrale.

(.108)

Napoléon décida alors de déclencher l’assaut principal, mais son attention fut détournée vers Goumont. Cette grosse ferme, transformée en redoute, apparaissait sur la carte de Ferraris sous l’appellation « Hougoumont », mais il s’agissait d’une transcription phonétique de « au Goumont ».

 

(p.131) La phrase célèbre « La Garde meurt, mais ne se rend pas !» n’a jamais été prononcée par Cambronne. C’est une invention d’un journaliste nommé Rou-gemont qui écrivit cela dans le Journal général de la France, du 24 juin 1815. Le romantisme qui suivit la période napoléo­nienne a colporté le mot qui a survécu jusqu’à nos jours. Mais, comme c’est souvent le cas, ce genre de propos traduit bien l’état d’esprit qui règne dans un corps d’élite à un moment cru­cial. Diverses contre-attaques menées par quelques escadrons de la garde personnelle de Napoléon n’apportèrent aucun sou­lagement. Partout résonnaient les cris «trahison» et «sauve qui peut». Les mensonges concernant l’arrivée de Grouchy se retournaient à présent contre l’Empereur. Le faux espoir dégé­néra en désespoir. Il n’était plus possible d’arrêter dans leur fuite les débris des corps d’armée de Drouet d’Erlon et de Reille. Seule une brigade de la division Durutte put se retirer en combattant en bon ordre sous la direction de Ney.

 

(p.156) Le nom de Waterloo continue toutefois d’intriguer. De nos jours, plus de 130 villes, villages et lieux-dits portent ce nom en Grande-Bretagne et dans ses anciennes colonies, surtout au Canada. Mais le nom apparaît également aux États-Unis et en Allemagne. Quelques villages d’Allemagne s’appellent La Belle Alliance. Toutefois, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les Allemands se sont également ralliés au nom de Waterloo.

 

Luc De Vos, Les quatre jours de Waterloo, 15-18 juin 1815, éd. Versant Sud,  2002

 

(p.72) Entre-temps, Constant-Rebecque avait installé son quar­tier général aux Quatre-Bras. Le prince d’Orange y arriva vers 5 heures. À 9 heures, le prince disposait à peine de 4300 hommes aux Quatre-Bras, et de 8 canons. Vers 14 heures, le nombre était passé à 7 500 hommes et 16 canons. En face, plus de 13 000 hommes et 24 canons attendaient l’ordre d’attaquer.

À Sainte-Hélène, Napoléon reconnut que la décision de Constant-Rebecque d’amener des troupes aux Quatre-Bras fut une initiative capitale qui l’empêcha de prendre les Anglais en défaut. C’est ce coup de génie militaire, que Napoléon attribua initialement au prince d’Orange, qui devait en grande partie sceller la décision finale de la campagne de 1815. Et personne ne semble s’y être trompé ! En effet, après la bataille et en signe de reconnaissance, un palais construit à Bruxelles lui fut attribué. C’est l’actuel palais des Académies. Un domaine lui sera cédé à Tervuren pour qu’il puisse s’y faire construire une seconde résidence. Elle deviendra le musée colonial, aujour­d’hui musée d’Afrique centrale.

 

Martin Bril, De kleine keizer, Prometheus Uitg., 2009

 

(p.143) Of ik wist dat er Nederlandse en Belgische soldaten aan de kant van Wellington tegen Napoleon hadden gevochten, bij Waterloo, en dat die jongens zelfs een belangrijke rol hadden gespeeld, tijdens de gevechten bij Quatre-Bras, twee dagen voor de grote slag die de laatste van de keizer zou zijn?

 

(p.144) Nadat ik met Amersfoort wat brieven had gewisseld, werd ik uitgenodigd voor de jaarlijkse kranslegging bij Quatre-Bras. Daar staat sinds 1990 een monument dat de Nederlandse bijdrage aan de gevechtshandelingen memoreert.

(…) Deze keer vond ik het goede kruispunt, de kransleggers waren er al. Ze zaten in hun auto’s te wachten op het mo­ment suprême, het uur U: twaalf uur precies. Het waren commandanten van Nederlandse huzarenregimenten, de heren Johan, Alexander en Metzger (tevens commandant van de Cavalerieschool).

(p.146) Daarna vertelde overste Rens, de historicus met de dochter, dat we hier bijna op de exacte plek stonden waar in 1815 de huzaren van Boreel hun charge tegen de Fransen hadden uitgevoerd: de mannen hadden de hele dag te paard gezeten, waren moe en onervaren, hadden hun dieren nog maar nauwelijks kunnen laten grazen; toen moesten ze de strijd al in. Ze werden door Franse cavalerie teruggeslagen en hoefden de rest van de dag niet meer mee te doen. Het latere eerste regiment der Belgische lansiers daarentegen zou nog furore maken.

 

Bernard Coppens, Patrice Courcelle, Le chemin d’Ohain, Waterloo 1815, Les carnets de la campagne, n°2, éd. De la Belle Alliance, 1999

(p.23) LE 7e BATAILLON DE LIGNE BELGE

 

L’armée des Pays-Bas qui combattit à Waterloo était issue de la fusion hâtive d’éléments constitués dans deux pays différents, la Hollande et la Belgique, que la politique européenne avait réunis sans que les sentiments des populations aient été pris en compte.

Le sort de la Belgique, au moment de l’invasion par les troupezs alliées était demeuré incertain. Trois solutions furent envisagées : l’indépendance, le retour à la souveraineté de la maison d’Autriche, et l’union de la Belgique et de la Hollande, afin de former un état en mesure de s’opposer à l’expansionnisme français. Une partie du pays, les départements de la Meuse-Inférieure (Limbourg) et celui de l’Ourthe (Liège), formèrent avec le département de la Roer, le gouvernement général du Bas-Rhin dont le siège était à Aix-la-Chapelle, et que la Prusse espérait pouvoir s’attribuer.

Finalement, les Hautes Puissances alliées, sur les instances pressantes de Guillaume d’Orange, se mirent d’accord sur la réunion de la Belgique et de la Hollande, et signèrent un protocole dans ce sens au mois de juin 1814. Le 21 juillet le Prince souverain des Pays-Bas « accepta » la souveraineté des provinces belgiques. Dès ce moment, la fusion des troupes belges et hollandaises devait s’opérer. Mais pour des raisons de haute diplomatie, le secret fut gardé sur le traité. La réunion de la Belgique et des Pays-Bas ne fut connue qu’à la fin du mois de février 1815 ; quant aux frontières du nouveau royaume, elles ne furent arrêtées définitivement que par le traité de Vienne, signé le 31 mars 1815. Tout ceci explique que la mise sur pied d’une force armée en Belgique fut plutôt décousue.

En janvier 1814, l’organisation de l’armée hollandaise fut fixée à 16 bataillons de ligne et 6 bataillons de chasseurs ; chaque bataillon devant être constitué de 10 compagnies, dont deux compagnies d’élite désignées sous le nom de flanqueurs.

Dès la fin de février 1814, le gouverneur militaire de Bruxelles faisait paraître une proclamation pour la formation de régiments belges.

Une « légion belge » avait été mise sur pied en mars 1814, elle devait être composée à l’origine de quatre régiments d’infanterie (régiments de Brabant, de Flandre, de Hainaut et de Namur) et d’un régiment de chevau-légers. Cette légion fut placée sous le commandement du comte de Murray, lieutenant général au service de l’empereur d’Autriche, belge de naissance, et dont le nom rappelait celui du régiment wallon de Murray.

Plus tard deux bataillons d’infanterie légère et une division d’artillerie complétèrent la légion.

Les régiments devaient être de deux bataillons de six compagnies chacun, la compagnie étant de 100 hommes.

 

Un avenir incertain

souvenirs et symbolisait l’oppression du régime impérial, avait été abolie. Et les Pays-Bas autrichiens n’avaient jamais connu d’autre régime que celui du volontariat.

Lorsqu’il prit les rênes du gouvernement des mains du baron Vincent, en août 1814, le Prince-souverain des Pays-Bas avait institué une commission pour la direction des affaires militaires

Le pays avait été épuisé par les réquisitions militaires de toutes sortes, et la Belgique, du fait de l’incertitude sur son avenir se trouvait gouvernée sans vision d’avenir par un gouverneur autrichien, le baron Vincent, lequel ne faisait rien pour favoriser l’organisation militaire d’un pays qui ne devait pas rester sous la domination de son maître. De ce fait, la légion belge était dans un grand dénuement. Le cadre en officiers était hétérogène, composé d’officiers ayant servi en Autriche ou en France ; quelques officiers étaient hollandais ou nassauviens. Dans ces conditions, l’instruction de la troupe ne pouvait être que médiocre.

Le recrutement ne pouvait se faire que sur la base du volontariat, car la conscription, qui avait laissé tant de mauvais

 

Soldat d’une compagnie de flanqueurs.

de la Belgique, qui travailla à rendre compatible l’organisation militaire de la Belgique avec celle de la Hollande, afin de pouvoir intégrer les deux forces en un seul ensemble le moment venu.

Le 7 août, la légion belge était placée sous les ordres du général anglais sir Thomas Graham.

Le 1er septembre, l’infanterie belge fut réorganisée à la hollandaise et se composait de huit bataillons d’infanterie de ligne (portant les numéros 1, 2, 3, 4, 6, 7, 8, et 9) et de deux bataillons d’infanterie légère portant les numéros 5 et 10.

Tous ces bataillons se composaient d’un état-major et de six compagnies, dont deux de flanqueurs, et d’un dépôt. L’effectif de chaque bataillon devait s’élever à 30 officiers et 912 hommes de troupe.

L’organisation du 7e bataillon fut entièrement terminée le 17 septembre. Mais l’habillement et l’armement continuaient à faire défaut. Le général Tindal, inspecteur général des troupes belges, écrivait le 7 novembre au prince-souverain : « L’armée, surtout l’infanterie, n’a que peu de bons officiers… Tous les soldats ne sont pas encore casernes, ce qui est naturellement nuisible à la discipline. (…) L’armement est très mauvais et des bataillons entiers n’en ont point. La comparaison avec l’armée anglaise, abondamment pourvue de tout et n’ayant que des effets des meilleures qualités, est peu propre à porter les jeunes gens à s’enrôler dans l’armée nationale. Cet état de choses me désole. »

Mais petit à petit, grâce à la rentrée d’officiers libérés du service français, les troupes belges améliorèrent leur instruction. On lit dans le « Journal de la Belgique », à la date du 8 mars 1815, dans une lettre écrite à Gand :

« Le 7e bataillon belge, dans les rangs duquel on remarque avec plaisir des officiers qui se sont distingués dans les armées française et autrichienne, s’est fait admirer par une précision et une promptitude de mouvements qui feraient honneur aux troupes les plus exercées. « 

Scheltens, un des anciens officiers de ce bataillon, qui sortait des grenadiers à pied de la garde, et qui, à ce titre, devait savoir juger les troupes, rend le témoignage suivant :

« Notre bataillon était parfaitement composé : tous des officiers célibataires ; (…) Quoique jeunes d’âge, nous étions vieux soldats expérimentés. Il en était de même des sous-officiers et de beaucoup de soldats. Tous les officiers savaient faire des armes, plusieurs étaient de première force, ainsi que les sous-officiers. Les caporaux et presque tous les soldats tiraient également bien. Nous avions plus de 200 maîtres et autant de prévôts au bataillon. « 

 

MOBILISATION

 

La nouvelle du débarquement effectué par Napoléon le 1er mars 1815 au Golfe Juan arriva à Vienne le 7 mars, et à La Haye le 11 mars. Le 13 mars, les signataires du traité de Paris proclamèrent que Napoléon Bonaparte était l’ennemi de l’Europe, le déclarèrent hors la loi des nations civilisées et s’engagèrent à soutenir Louis XVIII avec toutes les forces dont ils disposaient. Le prince d’Orange pressa le général Tindal afin de mettre le plus rapidement possible les troupes belges en état de faire campagne. L’ordre de mobilisation des troupes belges fut lancé le 24 mars. Des fusils furent envoyés d’Angleterre pour remplacer ceux du modèle français qui équipaient encore en partie certaines unités. Le 21 avril 1815, une dernière réorganisation compléta l’amalgame entre les troupes belges et hollandaises. Tous les corps de ligne devaient être compris, à partir du 1er juin, dans la même série de numéro, sans distinction d’origine. Le 7e bataillon de ligne belge conserva, dans cette réorganisation, son numéro. Il combattit dans les rangs de la première brigade (Bijlandt) de la deuxième division néerlandaise, placée sous les ordres du général Perponcher.

 

COMPOSITION

 

Les bataillons d’infanterie néerlandais comprenaient six compagnies, dont deux de flanqueurs, et une compagnie de dépôt. Les compagnies étaient composées de : 1 capitaine ; 1 premier lieutenant ; 1 second lieutenant ;

1  sergent-major ; 4 sergents ; 1 fourrier ; 8 caporaux ;

2 tambours ; 1 fifre et 108 soldats.

 

HABILLEMENT :

Le règlement du 9 janvier 1815 définit la tenue des bataillons de ligne :

Habit bleu fermant sur la poitrine au moyen d’un seul rang de 9 boutons, portant le numéro du bataillon, collet parements et passepoils blancs, doublure (retroussis) rouge ponceau. Veste à manche blanche sans distinction, pantalon large gris sur demi-guêtres grises, capote grise, shako portant sur le devant une plaque ornée de la lettre « W » (pour Willem : Guillaume), pompon vert de 43/4 pouces (mesure du Rhin).

Bonnet de police de drap bleu, avec distinctive blanche.

Les compagnies de flanqueurs se distinguaient par des wings de drap bleu liserés de blanc, et par un pompon vert à sommet blanc. Certains auteurs ont donné aux flanqueurs belges le pompon et le cordon rouge.

Les officiers portaient l’habit à pans longs. Sur le shako ils avaient, à la place du pompon, un petit plumet de plumes de coq de la même dimension et couleur que le pompon. Ils portaient, comme signe de service, l’écharpe orange autour de la taille, nouée derrière l’épée. Les officiers supérieurs étaient distingués par deux épaulettes à bouillons, les capitaines par une épaulette à bouillons sur l’épaule droite, les lieutenants par une épaulette à franges sur l’épaule droite. Les adjudants portaient l’épaulette de leur grade sur l’épaule gauche.

Les officiers portaient un pantalon collant gris, avec bottes à la Souwarow, mais non échancrées dans le haut, sans galon ni gland.

Les sous-officiers avaient des chevrons au-dessus des parements : deux galons d’argent pour le sergent-major, un I chevron d’argent pour le sergent, deux chevrons de poils de chameau blancs pour le caporal ; sergents et caporaux étaient armés du sabre-briquet ; les dragonnes étaient, pour les sergents, de ruban argent à gland orange, et pour les caporaux de ruban blanc à gland orange.

Les nids d’hirondelle pour les tambours et cornets étaient blancs à galons et frange blanc. Le tambour-major avait le fond et la frange de couleur argent, les caporaux-cornets portaient le fond et les galons de couleur blanche avec la frange d’or.

Les bataillons du Nord et ceux du Sud ne différaient que par la coiffure: shako tronconnique à visière et couvre-nuque pour les premiers, shako du modèle anglais pour les seconds.

D’après les journaux, les troupes belges étaient habillées selon le règlement du 9 janvier 1815 dès la fin de ce même mois. Le Journal de la Belgique écrit le 23 janvier : « Le bataillon belge, qui se trouve ici (Bruxelles) en garnison, s’est rendu aujourd’hui à k messe avec le nouvel uniforme. Ceux qui le composent portent le shako forme anglaise, avec un W sur le devant. « 

Et le 31 janvier : « Le bataillon belge, en garnison dans cette ville, a passé aujourd’hui une grande revue sur la place de l’hôtel de ville. Hors la couleur de l’uniforme, qui est bleu, l’infanterie belgique est habillée à l’anglaise : même coupe d’habit, même shako, pantalon large et demi-guêtres grises. Les officiers sont décorés de l’écharpe orange. »

Légende des illustrations:

En haut à gauche; sergent, à droite; officier.

Au centre; tambour des compagnies du centre.

En bas à gauche; sapeur, à droite; fusilier des compagnies du centre.

 

 

(p.143) Un régime despotique

 

Les expéditions militaires de l’empe­reur ne firent pas que des heureux chez nous, tant s’en faut. Il fallait recru­ter de plus en plus de soldats et si les Belges s’engageaient assez volontiers comme mercenaires dans les armées étrangères, ils n’entendaient pas se voir enrôler malgré eux au service d’un pouvoir étranger. De 1798 à 1813, sur 89267 conscrits, 24460 seulement rejoignirent leur régiment et, quand ils n’avaient pu échapper aux recruteurs, ils désertaient allègrement.

Bonaparte avait effectué un pre­mier voyage en Belgique en 1803. Il y avait reçu un accueil très favorable : les habitants voyaient en lui le pacifica­teur qui avait mis fin aux excès révo­lutionnaires. Mais à sa seconde visite à Bruxelles en 1810, tout avait changé. Les seuls applaudissements qui saluè­rent son passage allaient à l’impéra­trice Marie-Louise — parce qu’elle descendait de Marie-Thérèse, l’Autri­chienne.

C’est qu’au fil des années le régime impérial s’était considérable­ment durci. Son omniprésente police s’attira très vite la haine des Belges. La sévère censure de la presse, des livres, des représentations théâtrales même, plongea le pays dans un marasme intel­lectuel dont Napoléon ne désirait pas le sortir : il voulait des sujets capables de travailler et de se battre et non de briller par l’esprit.

Par ailleurs, obéissant aux ordres de Paris, les préfets s’efforcèrent d’extirper le flamand non seulement dans son usage officiel mais tout aussi bien sur le terrain culturel, et il n’est pas exagéré de considérer qu’en Bel­gique, la question linguistique a trouvé ses premiers ferments à cette époque-là. En majorité catholiques, les habi­tants de nos provinces n’éprouvèrent plus qu’hostilité pour l’empereur quand les soldats français enlevèrent le pape et que celui-ci excommunia Napoléon. Non seulement les curés cessèrent d’obéir à Paris et de réciter des priè­res pour l’empereur mais ils entrepri­rent d’organiser et d’encadrer l’agita­tion des mécontents.

 

(p.149) /tableau/ La charge du 2e Carabiniers à Waterloo : les Belges y jouèrent un rôle important lors des combats qui bloquèrent les assauts du maréchal Ney.

 

(p.212) /photo/ En 1940, les réfugiés se traînaient, par dizaines de milliers, sur les routes, emportant avec eux le peu de biens qu’ils pouvaient transporter. Ils voyaient dans la France un havre. Il y furent souvent mal accueillis au début de leur exode. Par la suite, les choses s’arrangèrent.

 

Gaston Remacle, Notice sur Salmchâteau, GSHA, 1, 1978

 

(p.26) Au temps  de  Napoléon

 

Beaucoup de jeunes gens, dans les armées de Napoléon jusqu’en 1814, ne  revinrent  jamais de leurs  randonnées  à travers  l’Europe; ils  restèrent sur les champs de bataille ou moururent dans  les  hôpitaux. 

 

Voici le nom de plusieurs de ces jeunes  gens, de Salmchâteau et Bêche (58)   :

Jean-Hubert RULMONT, de Bêche. Né le 21 janvier 1790; fusi­lier au 51e  régiment d’infanterie  de ligne. Décédé le 2 novembre 1809 à l’hôpital militaire de Bruxelles.

Jean-Guillaurne LEMAIRE. Né à Salmchâteau le 24 décembre 1784. Conscrit de l’an 14, incorporé le 16 septembre 1806 dans la 2e  compagnie du 1e bataillon de sapeurs,  corps impérial du génie.  Décédé le 3 février 1808 à l’hôpital militaire d’Ancone (Italie) « par suite  de fièvre ».

Guillaume MASSON. Caporal au 115e régiment de ligne (armée d’Espagne), tué le 23 mai 1809 à « l’affaire Dalcauiz, province d’Aragon ».

Noël LAURENT. Né le 22 décembre 1887. Sapeur à la 2e compagnie du bataillon des sapeurs de Walcheren. Entré à l’hôpital de Gand le  19 septembre 1811 et y décédé le 29 aovembre 1811.

André-François LEMAIRE. Né le 23 février 1794. Chasseur au 21e  régiment d’infanterie légère, compagnie des voltigeurs. Entré à l’hôpital de Dobernai,  département du Rhin,  le  29 octobre 1813, et y décédé  le 4 novembre 1813.

Henri HEBAN.  Né le 25 mars  1787. Entré au 26e régiment de chasseurs  à cheval en février 1807. Mort à Victoria (Espagne) le 4  juin 1812.

(p.27) François LAPLUME. Né le 16 décembre 1789. Du 30e  régiment d’infanterie de  ligne.  Décédé le 19 janvier 1814 à l’hôpital de Maastricht.

Gengoux LAPLUME.  Né le 12 mai 1787. Décédé à Ratisbonne le 9 mars 1809.

Paul-Louis EVRARD.  Né le 15 janvier 1788. Décédé  à l’hôpital de B… (?), près de Vielle,  le 29 mars 1810, à 22 ans.

 

in : Twintig eeuwen militaire glorie, Belgische militaire tafereelen, Ministerie van Landsverdediging, 1946

 

HET   HOLLANDSCHE   TIJDVAK (1814-1830)

 

(p.26) Op den rechtervleugel van Wellingtons leger ingezet, weerstaan drie Belgische bataljons, tijdens den slag van Waterloo, (18 Juni 1815) aan de onstuimige charges der Fransche  ruiterij en nadien aan den aanval der Keizerlijke Garde. Op den linkervleugel ondergaat het 7e Belgische bataljon gedurende twee uren het helsche vuur van 80 vuurmonden. Het blijft gedekt liggen totdat de Fransche colonnes binnen zijn bereik komen, veert dan recht aïs één man en opent op den vijand een moorddadig vuur. Verrast blijft de vijand aan den grond gespijkerd. Het bataljon gaat nadien tot den tegenaanval over.

Wellington feliciteert dit bataljon in ‘t bijzonder, de helft van het effectief sneuvelde in den strijd. In zijn carré zou de Prins van Oranje zijn erekruis geworpen hebben roepende : « Ik kan u allen niet decoreeren, al hebt ge ‘t ook allen verdiend ! »

Heel de Belgische ruiterij chargeert en verliest de helft harer manschappen.

 

de Maesschalck Edward (doctor in de geschiedenis), Overleven in de revolutietijd, Een ooggetuige over het Franse bewind (1792-1815), Davidsfonds Leuven, 2003

 

P. Blondeau, Au pays des Rièzes et des Sarts, 97, 1984, p.37-39

 

“Les ‘pilleries’ françaises

 

C’est dans cette ‘fameuse voïe’ Nord-Sud que la tradition situe, en 1815, un des nombreux assassinats, par les gens des villages, de soldats français, de retour de Waterloo. …

Nous sommes donc en 1815 …

Nos villageois viennent de subir l’annexion de 1793 par les révolutionnaires étrangers, la Terreur et les persécutions religieuses.  Ils ont vu leurs florins devenir francs puis papiers.  Ils ont tremblé lors de la conscription qui a fait fuir dans les bois la plupart des garçons appelés à servir dans une armée occupante.” (…)

 

(p.39) “On comprend très bien leur soif de vengeance quand, enfin, ils ont pris la ‘déroute’ de leurs ennemis dans la ‘Morne plaine’.  Et ils désirent se venger, faire leur part, en même temps que soulager leur misère.”

(p.39) “Et voici l’explication que ces fusils de l’armée de Waterloo, ‘butin de guerre’, conservés dans certaines maisons du pays …”

 

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